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Au Pakistan, les manifestants anti-gouvernement continuent à réclamer le départ du Premier Ministre

mercredi 3 septembre 2014 à 19:55
Women and Children are seen at large numbers as protestors made the Liberty Roundabout an 'independence square' in Lahore and rallied late into the night. Image by Saad Safraz Sheikh. Copyright Demotix (28/8/2014)

Femmes et enfants sont présents en grand nombre sur le Rond-Point de la Liberté à Lahore transformé par les contestataires en ‘place de l'indépendance’ lors d'un rassemblement prolongé tard la nuit. Photo Saad Safraz Sheikh. Copyright Demotix (28/8/2014)

Trois jours de heurts entre le gouvernement pakistanais dominé par le PML-N, la Ligue Musulmane du Pakistan-N (N pour Nawaz), et les manifestants de l'opposition devant la résidence officielle du Premier Ministre Nawaz Sharif ont laissé au moins trois morts et des centaines de blessés.

Le 1er septembre, des manifestants anti-gouvernement ont envahi et occupé le siège de PTV, la télévision d'Etat pakistanaise, dans la capitale Islamabad. Les transmissions de PTV ont été suspendues pendant 35 minutes, jusqu'à ce que les troupes paramilitaires reprennent le contrôle de la chaîne publique. Peu avant l'interruption, le présentateur annonçait : ”Ils ont envahi le siège de PTV. Le personnel de PTV présent est roué de coups.”

Deux partis politiques sont à la tête du mouvement contestataire : le Pakistan Tehrik-e-Insaaf (PTI, Mouvement du Pakistan pour la Justice) de l'ex-star du cricket reconverti dans la politique Imran Khan, et le Pakistan Awami Tehreek (PAT, Mouvement Populaire du Pakistan) du prédicateur soufi anti-talibans Tahir-ul-Qadri. Les deux prétendent que l'élection générale du 23 mai, qui a installé le PML-N au pouvoir après une victoire écrasante, était truquée, et ils réclament la démission du Premier Ministre Nawaz Sharif.

Les affrontements ont commencé au petit matin du 30 août, quand les policiers ont refoulé à coup de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc la foule de manifestants – hommes, femmes et enfants — qui tentaient d'envahir les bureaux du premier ministre.

Policiers et manifestants s'affrontent de nouveau sur l'avenue de la Constitution

La scène à Islamabad s'est transformée en champ de bataille, là où des dizaines de milliers de manifestants pacifiques campaient dans le calme depuis le 14 août en réclamant la démission du Premier Ministre Nawaz Sharif.

Le 18 août, les partisans du PTI de Khan et du PAT de Tahirul Qadri ont pénétré la zone rouge, une zone de sécurité délimitée, qui renferme les principaux bâtiments gouvernementaux, avec les bureaux du premier ministre et les ambassades étrangères. D'ordinaire, seules les personnes munies d'autorisations de la sécurité sont habilitées à entrer dans la zone rouge d'Islamabad. Vingt-mille policiers et paramilitaires ont été appelés en renfort pour garder la zone rouge. Presque toutes les missions étrangères ont fermé depuis le début des violences.

Le Pakistan Tehrik-e-Insaaf affirme que des balles réelles ont été utilisées et que le nombre de morts est supérieur à trois :

Autant de preuves que le pouvoir utilise des balles réelles contre les manifestants pacifiques.

Hamza Salman, qui tient le compte Twitter du PTI, a partagé la photo d'un homme ensanglanté :

Les manifestants anti-gouvernement confrontés à une violente répression au Pakistan

Arif Alvi, ex-secrétaire général du PTI, écrit que les manifestants étaient pacifiques et ne portaient ni gourdins ni bâtons :

Le PMLN a voulu détruire une contestation pacifique, mais nous sommes restés pacifiques. Réaction aux balles avec des morceaux de briques et lacrymogènes vont se poursuivre

Le politologue Raza Rumi, pour sa part, a vu des manifestants armés de bâtons :

Mon oeil : manifestants pacifiques :)

Un assaut pacifique contre la maison du premier ministre, c'est la même chose qu'un cambriolage pacifique chez tout un chacun : Asma Jahangir

Natalia Tariq, une citoyenne ordinaire d'Islamabad, a tweeté :

Mon chauffeur attaqué par une bande de manifestants au marché Aabpara, qui avaient des bâtons et des pierres et molestaient les commerçants et les policiers

ARY news, une des plus grosses télévisions du pays, a rapporté que la police faisait des descentes dans les hôpitaux pour arrêter les manifestants blessés, une affirmation que n'a vérifiée aucune autre source journalistique :

La police du Pendjab a raflé les blessés au PIMS ~ ARY. Pakistan pour une vraie démocratie.

Rumeurs et théories du complot circulent sur tous les réseaux sociaux. Les messages étaient envoyés via WhatsApp et Facebook par des faux comptes inconnus relayant des articles de presse qui incitaient à la violence et affirmaient que l'Institut pakistanais des sciences médicales, le PIMS, cachait des cadavres et que le bilan était beaucoup plus lourd :

Des cadavres sont gardés hors de vue dans les hôpitaux. Il est impensable qu'ils aient blessé 400 personnes avec des balles en caoutchouc.

Le journaliste Moeed Pirzada a tweeté :

Je reviens du PIMS ; plus de 300 blessés ; l'hôpital sous pression pour cacher les chiffres des morts et blessés ; policiers anti-émeute dans les couloirs de l'hôpital

De fausses photos des blessés ont aussi été publiées sur les comptes Twitter officiels du PTI et font depuis le tour des médias sociaux. Emrys Schoemaker, un Britannique stratège en communication et expert en technologie installé à Islamabad, a tweeté :

L'image appropriée du PTI d'un enfant tué provenant de la couverture de la révolution égyptienne, une image originellement du massacre de Lahore

Les médias pris à partie 

Des manifestants en colère ont lancé des pierres sur le siège de Geo TV à Islamabad. Le Réseau Geo est le plus grand groupe de médias du Pakistan et passe pour pro-gouvernement et pro-démocratie. Geo a récemment encouru la fermeture et une amende après une dispute avec l’ISI, les services secrets.

Des ouvriers du PTI attaquent le siège de Geo News à Islamabad par GeoNews

Maria Memon, une journaliste de télévision à Islamabad, a tweeté une photo de l'immeuble de Geo :

Salut ! Aujourd'hui ce sont tous des Gullu Butts #PAT #PTI

Gullu Butt” est un terme familier qui désigne au Pakistan un casseur rémunéré, notamment dans un contexte politique.

Journalists of Larkana & Naundero took out separate protest rallies & held demonstrations against beating of Media Persons in Islamabad by Punjab police during crackdown on PTI and PAT political workers. Image by Jamal Dawoodpoto. Copyright Demotix (31/8/2014)

Des journalistes de Larkana et Naundero ont tenu des rassemblements de protestation séparés et manifesté contre le passage à tabac de journalistes à Islamabad par la police du Pendjab lors de la répression de permanents politiques du PTI et du PAT. Photo Jamal Dawoodpoto. Copyright Demotix (31/8/2014)

Dans un autre incident, la police a agressé des journalistes venus couvrir les manifestations.

Le journaliste et présentateur Talat Hussain a tweeté :

Le gouvernement a pété les plombs. Agresser les médias est criminel. Politiquement, c'est suicidaire.

Selon des récits des manifestants armés de bâtons ont aussi attaqué des policiers.

Des manifestants anti-gouvernement pakistanais frappent un policier anti-émeute à Islamabad

Suivez les prochains développements dans les nouveaux articles à paraître.
Anushe Noor Fahim a contribué à cet article.

Les réseaux sociaux russes s'imposent en Ukraine dans un climat de guerre de l'information

mercredi 3 septembre 2014 à 10:55
Euromaidan protesters use electronic devices like smart phones and tablet computers at the IT tent on the Independence Square in Kiev. Photo by Anatolii Stepanov for Demotix.

Manifestants pro-européens utilisant des appareils électroniques, tels que des smartphones et des tablettes dans la tente informatique située sur la place de l'Indépendance à Kiev. Photo de Anatolii Stepanov pour Demotix.

[Sauf mention contraire, tous les liens de ce billet renvoient vers des pages web en ukrainien]

D'après le  géant russe de l'Internet, Yandex, VKontakte et Odnoklassniki, réseaux sociaux russes, s'imposent sur le marché ukrainien. Dans son rapport annuel publié sur le Web ukrainien, Yandex recense plus de 40 millions de comptes créés sur VKontakte, Odnoklassniki, Facebook et Twitter cet été.

VKontakte, avec ses 27 millions d'utilisateurs ukrainiens, est le réseau social le plus utilisé, suivi par Odnoklassniki avec 11 millions d'utilisateurs. 3,2 millions de personnes utiliseraient Facebook, soit un million d'inscriptions supplémentaires depuis l'été 2012. Selon le blog de Yandex, Twitter compterait pas moins de 430 000 comptes en Ukraine. Depuis début 2013, le réseau social a vu son nombre d'utilisateurs augmenter de 1,5 fois, grâce notamment aux manifestants pro-européens [article en anglais] ayant littéralement pris d'assaut le réseau social.

Total audience of social network sites in Ukraine: VKontakte 27 million, Odnoklassniki 11 million, Facebook 3.2 million, Twitter 430,000. Courtesy of Yandex.

Répartition des utilisateurs de réseaux sociaux en Ukraine : VKontakte 27 millions, Odnoklassniki 11 millions, Facebook 3,2 millions, Twitter 430 000. Avec l'aimable autorisation de Yandex.

Le public ukrainien de VKontakte est plutôt jeune : en effet, plus de la moitié d'entre des utilisateurs ont moins de 25 ans, alors qu'Odnoklassniki compte un tiers d'utilisateurs âgés de 26 à 35 ans.

La situation politique du pays a largement contribué à l'engouement des utilisateurs pour Twitter : avant le mois de novembre 2013, on dénombrait entre 6 000 et 7 000 nouveaux comptes créés par mois. Ce nombre passe à 16 0000 au mois de décembre et atteint même 55 000 en janvier 2014.

Alors que le mouvement de contestation Euromaïdan fait rage, les Ukrainiens ont publié pas moins de 130 000 tweets par jour alors qu'en 2012, on n'en comptait que 90 000. Pour la seule journée du 20 février, lorsque des dizaines de manifestants ont perdu la vie dans le centre-ville de Kiev, 240 000 tweets ont alors été publiés.

Bien que le mouvement de contestation Euromaïdan soit sur le déclin, les réseaux sociaux montrent des signes d'inquiétude concernant les troubles dans l'est du pays (annexion de la Crimée et guerre de l'information entre l'Ukraine et la Russie). Entre le rôle joué par la Russie dans la situation actuelle de l'Ukraine, le refus de la propagande et de la manipulation russes (ainsi que les tentatives pour organiser une réponse ukrainienne patriotique sur internet, procédant de la même façon à chaque tentative), le partage, la dévalorisation et la vérification des informations provenant des zones de conflit, les Ukrainiens fréquentent les réseaux sociaux comme jamais auparavant.

Pour qu'un réseau social puisse réunir des citoyens de tous bords tout en augmentant le nombre de ses utilisateurs, il faut un espace de liberté d'expression et d'opinion. La prochaine étude risque de mettre en avant la dégradation de l'opinion publique envers la Russie, ou encore les nouvelles règlementations contraignantes d'Internet, ce qui risque d'ébranler la confiance et la popularité actuelle des réseaux sociaux russes en Ukraine.

Madagascar: Mazana II, la marque de voitures 100% malgache Karenjy

mercredi 3 septembre 2014 à 09:05

, heureux d'annoncer la reprise de la production des voitures Karenjy, entièrement conçue et fabriquée à Madagascar, parle de sa contribution lors des enquêtes sur l'opinion des consommateurs sur son blog CORBEILLE :

En fait, j’ai suivi sur internet le développement de cette voiture. J’ai même participé un peu en répondant aux enquêtes de l’entreprise afin de peaufiner les caractéristiques du modèle. Remplir les formulaires de ces enquêtes me plaisait beaucoup. Une fois, ils demandaient de choisir la fiche technique et les options que je voudrais. Ah! c’était comme si j’achetais une voiture personnalisée et comme si j’étais en train de remplir ma commande.

Voilà donc mon idée de la voiture idéale :

- Pour le type de voiture : bien sûr ce serait un 4×4 ou une familiale. Allez, pourquoi choisir? Une familiale à quatre roues motrices donc.
- Nombre de place : 7 à 9, c’est évident aussi. Il y a moi, ma femme, mes 5 enfants, mon père, ma mère, la nourrice, ce qui fait déjà qu’on serait à l’étroit dans une voiture à 7 places.
- Transmission : 4 roues motrices, je l’ai déjà dit. On veut aller loin avec. Si vous saviez l’état des routes qui mène à la campagne ou sont restés grand-père et les autres, cela vous paraîtra aussi très évident.
- Motorisation : je crois que le choix était entre plutôt puissante ou plutôt fiable? Bah…plutôt les 2 si c’est possible, non? il faudrait au moins un bon turbo pour rendre le moteur plus performant.
- Carburant : le Gasoil, c’est toujours moins cher au litre par rapport à l’essence.
- Qu’est-ce qui vous intéresse : l’aspect extérieur ou le côté pratique? Un compromis également si c’était possible. On veut de la praticité mais c’est triste de lire et d’entendre les étrangers comparer la première Mazana à une Mehari des années 1960, un tank ou une boîte à savon.

Une photojournaliste iranienne en exil montre les individus pris dans les conflits du Moyen-Orient

mardi 2 septembre 2014 à 23:13
Inside the Iranian Communist party of the Komala’s camp in the Sulaymaniyah province, a group of men and women peshmerga who have recently finished their military training are testing their guns in late 2012. All photos provided by Maryam, and used with permission.

A l'intérieur du camp du Komala, la branche kurde du parti communiste iranien, dans la province de Souleimaniye, des peshmergas hommes et femmes qui viennent de terminer leur formation militaire essaient leus fusils, fin 2012. Toutes les photos de cet article ont été fournies par Maryam Ashrafi et utilisées avec permission.

Maryam Ashrafi est une Iranienne qui vit en exil à Paris. Elle a laissé un pays aux multiples luttes ethniques et en défense des droits humains, pour voyager aux quatre coins du monde et photographier la vie des gens au milieu des crises.

Le portfolio de Maryam Ashrafi couvre l'Iran, l'Irak, la Turquie et des manifestations à Paris. Son plus récent projet l'a conduite au Kurdistan irakien où elle a documenté la formation militaire des peshmerga (combattants armés) féminines kurdes dans leurs camps d'entraînement. Dans cet entretien avec Global Voices, elle explique son travail de photojournaliste, qu'elle illustre d'une sélection de 13 photos.

Global Voices (GV) : Pouvez-vous encore retourner en Iran ? Si non, expliquez-nous la situation d'un photographe politique comme vous.

Maryam Ashrafi (MA) : Après mes projets récents, j'ai trouvé très risqué de retourner en Iran. Malgré toute la difficulté pour moi, il y a longtemps que j'ai pris la décision de me consacrer totalement aux sujets qui pour moi valent qu'on en parle et à des événements qu'il faut fixer. Ces projets n'ont jamais contribué à mes chances de rentrer en Iran, et ces sujets impliquent parfois des gens qui luttent ou manifestent pour les droits humains et des questions inacceptables pour les autorités iraniennes. Mon dernier voyage en Iran a eu lieu dans la dernière année de la présidence de M. Khatami [en 2005]. A l'époque je commençais à suivre les histoires de réfugiés afghans et leur vie en Iran. Le projet a été tué dans l'oeuf quand j'ai été arrêtée en allant voir des familles afghanes, raison pour laquelle je n'ai pas de photos à montrer de ce projet. Quand ils se sont rendu compte que j'étais une photojournaliste vivant hors d'Iran, ils m'ont automatiquement accusée d'espionnage et il m'a fallu un mois d'allers-retours devant les tribunaux pour prouver mes intentions. C'est alors que j'ai décidé de travailler avec une ONG (du nom de Persépolis) qui aide les toxicomanes à surmonter leurs addictions.

Maryam captures a recovering addicts portrait in Tehran’s Perspolis drop-in centre in 2005. Of the photo, Maryam explains, “ She was forced to use drugs which she believed was her husband's intention to keep her dependent on him. It took her years to realise the road she was drawn into. Determined to stop, she ran away from her husband and asked for help. Persepolis was amongst the few NGOs in Iran that helped drug addicts overcome their addiction through a step-by-step recovery using methadone.”

Portrait d'une toxicomane en désintoxication au centre d'accueil Persépolis de Téhéran, en 2005. Maryam Ashrafi explique : “ Elle a été contrainte à se droguer et croit que c'était parce que son mari voulait la garder dépendante de lui. Il lui a fallu des années pour se rendre compte de la voie dans laquelle elle était entraînée. Décidée à arrêter, elle s'est enfuie de chez son mari et a demandé de l'aide. Persépolis était pami les rares ONG en Iran à aider les toxicomanes à surmonter leur addiction par une guérison pas à pas à l'aide de méthadone.”

Mes autres projets à Paris (notamment ceux traitant du Mouvement Vert iranien) et au Kurdistan ont également compliqué mon retour. Il y a beaucoup de photojournalistes vivant en Iran qui couvrent toujours courageusement les questions sociales et politiques, mais ce n'est évidemment possible que jusqu'à un certain point, et avec de sérieuses limites. Le meilleur exemple en est la grande quantité de photos et de vidéos amassées en Iran pendant le Mouvement Vert, à la fois par les professionnels et les amateurs, plus précisément les journalistes-citoyens. Cela a mis beaucoup de vies en danger, amené certains à fuir l'Iran, pendant que d'autres se faisaient arrêter. Cela montre l'incroyable puissance de la photographie, et la menace qu'elle fait planer sur les hommes au pouvoir.

The Iranian ambassador in France Mehdi Mir Abu Talebi and his entourage as they are restrained by the French police at Neauphle-le-Chateau, on the outskirts of Paris, where the Ayatollah used to reside. The ambassador tried to confront the protesters on the day to commemorate the founder of the Islamic Revolution Ayatollah Khomeini’s return to France on January 31, 1979.

L'ambassadeur d'Iran en France, Mehdi Mir Abou Talebi, et son entourage contenus par la police française à Neauphle-le-Château en banlieue parisienne. L'ambassadeur voulait se confronter aux manifestants lors de la commémoration du retour en France de l'ayatollah Khomeiny le 31 janvier 1979, devant l'ancienne résidence de ce dernier.

French police stand by as Iranians protests against the executions of 5 Iranian and Kurdish prisoners in Evin prison by the Islamic Republic of Iran in front of the Iranian embassy, in Paris on May 9, 2010.

Des policiers français en faction pendant une manifestation d'Iraniens devant l'ambassade d'Iran à Paris le 9 mai 2010 contre l'exécution de cinq détenus iraniens et kurdes à la prison d'Evin par la République islamique d'Iran.

GV : D'après un reportage de France 24, vous avez participé à des manifestations contre l'ambassade d'Iran et ses diplomates à Paris en 2010. Croyez-vous que les Iraniens en exil puissent faire quelque chose pour améliorer la situation des droits humains dans leur pays ?

​MA : J'ai pris part aux manifestations de Paris, pas seulement comme photographe. Oui, je suis convaincue que le rôle de ceux qui vivent hors d'Iran est d'une réelle importance. A un certain niveau, nous autres de la diaspora sommes un grand soutien pour ceux qui sont en Iran, mais plus que cela, nous pouvons envoyer un message au monde et lui montrer ce qui se passe pour les Iraniens, contre quoi les gens se débattent et pour quoi ils luttent. Il y a des questions liées aux droits humains qui ne peuvent pas être évoquées librement à l'intérieur de l'Iran. Elles deviennent la responsabilité de ceux qui vivent hors d'Iran.​ C'est peut-être le meilleur moyen de faire comprendre au monde que le gouvernement et le peuple iranien ne se confondent pas. Le système iranien ne représente pas la nation dans sa totalité.

Iranians gather in Paris on June 12, 2010 to mark the first anniversary of the Green Movement, on the day the government was accused of rigging the 2009 Presidential elections.

Rassemblement d'Iraniens à Paris le 12 juin 2010, pour marquer le premier anniversaire du Mouvement Vert, le jour où des manifestations ont éclaté contre la fraude électorale du régime.

GV : Comment en êtes-vous arrivée au thème des femmes peshmergas kurdes ?

​MA : Les histoires de Kurdes ne sont pas neuves. Depuis des siècles ils subissent malheurs et injustice, et cela dépasse les Kurdes d'Iran : en Syrie, Turquie et Irak tout autant. Ce qui m'a attirée vers ce sujet, c'est le rôle des femmes dans les partis kurdes, où elles combattent au coude-à coude avec les hommes.

Maryam captured Kurdish peshmergas learning to use their guns inside the military training camp of the Komala party of Iranian Kurdistan in late 2012. Sulaymaniyah, Kurdistan.

Des peshmergas kurdes, homme et femme, apprennent le maniement du fusil dans le camp d'entraînement militaire du parti Komala du Kurdistan iranien fin 2012. Souleimaniye, Kurdistan.

Leur combat, je crois, est encore plus dur que celui de leurs homologues masculins,​ car elles ne luttent pas seulement pour leurs droits élémentaires de Kurdes, mais aussi en tant que femmes dans des sociétés plutôt dominées par les hommes. Mon intérêt pour elles est apparu en deux fois. D'abord, pour connaître leur rôle et place dans les partis politiques comme le Komala [un parti communiste iranien] ou le PJAK [Parti pour la vie libre du Kurdistan], et ansuite pour en savoir plus sur des sociétés qui les poussent dehors et leur font rejoindre de tels mouvements. J'ai voulu en savoir plus sur leurs motivations, les problèmes qu'elles affrontent, pas seulement politiques mais aussi culturels, comme les mariages précoces, la violence domestique, l'excision, le droit à l'éducation et ainsi de suite.

Kurdish peshmergas during their politic theory training course inside the military training camp of Komala party of Iranian Kurdistan. This was during Maryam’s 2012 stay in Sulaymaniyah, Kurdistan.

Des peshmergas kurdes pendant leur programme d'instruction politique dans le camp d'entraînement militaire du parti Komala du Kurdistan iranien fin 2012. Souleimaniye, Kurdistan. C'était le séjour de 2012 de Maryam Ashrafi à Souleimaniye, Kurdistan.

GV : Vous avez photographié ces femmes dans l'intimité. Comment avez-vous gagné leur confiance et obtenu leur permission pour les prendre en photo ? Combien de temps avez-vous passé avec elles ?

MA : Je suis allée quatre fois au Kurdistan entre la fin 2012 et 2014, j'ai passé chaque fois deux semaines avec ces femmes. Pendant mon dernier voyage en juin 2014 j'ai rencontré les femmes Peshmergas kurdes du 2ème Bataillon qui sont la seule branche féminine officielle de l'Armée nationale kurde.

Femme journaliste, j'ai pu me mêler à elles dans leurs moments privés et gagner leur confiance pour qu'elles me racontent leurs histoires. Elles me l'ont dit plus d'une fois : elles combattent pour les droits de l'homme et des femmes. Leur arme, c'était leurs fusils, et la mienne, mon appareil photo, disaient-elles.

Portrait of Tina, a Kurdish woman Peshmerga inside the camp of Kurdistan Democratic Party of Iran. Like many other girls her age, following the social pressure in Kurdistan she fled Iran to join the group. While fighting for Kurdish rights Tina explained to Maryam about learning about her rights as a woman. Taken in Kurdistan, near Erbil in 2013.

Portrait de Tina, une peshmerga kurde, dans le camp du Parti Démocratique du Kurdistan d'Iran. Comme beaucoup de jeunes filles de son âge, suite aux pressions sociales au Kurdistan elle a fui en Iran pour rejoindre le groupe. Tout en combattant pour les droits des Kurdes, a expliqué Tina à Ashrafi, elle a aussi découvert ses droits de femme. Photo prise au Kurdistan, près d'Erbil en 2013.

Notre relation était à ce niveau. Il était important pour moi de ne raconter que ce avec quoi elles étaient à l'aise étant donné leurs situations, obligations et engagements. Je pense que leur rôle et leurs problèmes sont largement absents des grands titres et disparaissent parfois dans l'actualité quotidienne. Ceci dit, je me suis consacrée à un reportage de longue durée et en profondeur sur leur vie.

Zilan, a female PJAK guerrilla binds her hair before starting her daily routines inside the camp located in Qandil, Kurdistan in 2012.

Zilan, une guérillera du PJAK, attache ses cheveux avant de commencer sa journée dans le camp situé à Qandil, au Kurdistan, en 2012.

GV : Comment ces femmes justifiaient-elles les dangers de leur vie sur le champ de bataille ?

MA : Ces femmes voient leur place chez les Peshmergas comme un moyen d'affirmer leur égalité avec les hommes dans la société en général. Elles ne combattent pas seulement avec le fusil. Une part de leurs responsabilités est d'informer leurs sociétés sur les droits des femmes. Elles travaillent avec les médias à travers leurs programmes de télévision et de radio pour informer les femmes sur leurs droits en tant que femmes. Pendant le temps que j'ai passé avec elles, ces femmes se préparaient pour défendre leurs terres contre le régime iranien et lutter pour les droits des Kurdes en Iran. Sur l'autre plan, les femmes Peshmergas kurdes du 2ème bataillon étaient aussi prêtes à défendre le Kurdistan contre l'EI, aux côtés des hommes qui se battent en ce moment sur les lignes de front.

Kurdish female Peshmergas of the 2nd Battalion during their daily military training.  The 2nd Battalion comprises exclusively of 550 female Peshmergas and is the only official female branch of the Kurdish National Army. This battalion is responsible for defending Kurdistan against ISIS, side by side with men who are fighting on the frontlines these days. Maryam captured this image in Sulaymaniyah, Kurdistan in July 2014.

Des femmes peshmergas kurdes du 2ème Bataillon pendant leur entraînement militaire quotidien. Le 2ème Bataillon est exclusivement composé de 550 femmes peshmergas et est la seule unité féminine officielle de l'armée nationale kurde. Ce bataillon est chargé de défendre le Kurdistan contre l'EI, aux côtés des bataillons masculins. Ashrafi a pris cette photo à Souleimaniye, au Kurdistan, en juillet 2014.

GV : Vous reproche-t-on, comme souvent aux photographes qui montrent les individus dans les crises, d'exploiter ou victimiser vos sujets de façon condescendante ?

MA : Je crois que c'est le cas pour de nombreux photographes, et je dois admettre qu'il y a eu des fois où j'ai douté de la pertinence de photographier ou pas certaines scènes : quand je dois me rappeler ma vraie raison d'être là, et pourquoi il est important que ces vies et situations soient captées​. Bien entendu si je sais que ma réaction et mon aide concrètes sont plus appropriées ou nécessaires, alors je pose mon appareil et je viens en aide.

Maryam captures Syrian children at a UN refugee camp in the Iraqi Kurdistan Arbat camp, July 2014.

Ashrafi a photographié des enfants syriens dans un camp de réfugiés de l'ONU, le camp Arbat au Kurdistan irakien, en juillet 2014.

Le moment qui me vient à l'esprit est lorsque j'ai commencé à observer de loin deux petites filles syriennes. L'aînée essayait de faire un abri pour sa petite soeur. Elle a fini par renoncer et quand je me suis approchée elle était curieuse, et a supposé que la grande personne que j'étais pouvait l'aider. Mon intention était de montrer leur situation dans le camp de réfugiés d'Arbat, mais je me suis demandé alors ce qui était le plus important pour elles à cet instant précis : les regarder fixement avec mon appareil photo, ou me joindre à leur jeu ? je me suis jointes à elles.

GV : Quelle sorte d'impact aimeriez-vous avoir par votre travail sur les sujets que vous couvrez ? Y a-t-il un projet particulier sur lequel vous avez travaillé qui vous a le plus touchée ?

MA : Ma conviction est que les photographes sont capables de créer une conscience des événements et situations lointaines, et de faire avancer le changement social par l'illustration des problèmes de chaque société. Ainsi, nous ne pouvons plus rester ignorants et prétendre ne pas connaître les effets qu'a le conflit syrien sur les gens là-bas. Les photos que j'ai prises de réfugiés syriens en Turquie et Kurdistan visaient à en faire la preuve.

Portrait of a young Syrian refugee in Istanbul, February 2014.

Portrait d'une jeune réfugiée syrienne à Istanbul, février 2014.

Sur les 600.000 Syriens qui ont fui les troubles dans leur pays et ont cherché refuge en Turquie, 100.000 sont allés à Istanbul et vivent dans des lieux aux conditions médiocres, insalubres ou dangereuses. Même si une partie des réfugiés syriens ont été envoyés dans des camps en différentes régions de Turquie, beaucoup préfèrent encore vivre dans les grandes villes, dans l'espoir de trouver du travail et de meilleures conditions pour leurs familles. L'avenir de leurs enfants est incertain et précaire. Les mêmes conditions ont prévalu pour les Irakiens avec les invasions de l'EI.

En étant un témoin et en partageant mes photos de ces situations, j'espère amener les gens à réfléchir et à agir, tout en s'interrogeant sur les lacunes dans les médias traditionnels.

Maryam captured Zahra, an Iraqi girl who fled Mosul with her family a few days after ISIS took over the city. They are among as many as a million internally displaced people throughout Iraq. Captured on June 23, 2014 in the Khazer refugee camp for Iraqis, in Kurdistan.

Zahra, une fillette irakienne qui a fui Mossoul avec sa famille quelques jours après la prise de la ville par l'EI. Ils font partie du million de déplacés dans tout l'Irak. Photo prise le 23 juin 2014 dans le camp de réfugiés irakiens de Khazer, au Kurdistan.

Comment mobiliser les citoyens du web en Guinée

mardi 2 septembre 2014 à 16:54

 

Le Palais du peuple - Conakry, Guinée. CC BY 2.5

Le Palais du peuple – Conakry, Guinée. CC BY 2.5

Alimou Sow est l'un des bloggers les plus populaires en Guinée. Créateur du blog Ma Guinée plurielle, il est lauréat du concours du meilleur blog francophone organisé par la Deutsche Welle en 2013. 

La Guinée traverse une période difficile : le virus Ebola affecte le pays et le système sanitaire n'est pas à même de répondre aux besoins pressants. De plus, le pays a pris du retard dans l'implication des citoyens dans les avancées numériques et à l'inverse de ses voisins, les guinéens se mobilisent peu quand les crises humanitaires frappent.  Il vient de publier sur sa page Facebook un billet à l'occasion de la Journée internationale des blogs, le 31 aout 2014:

… comme chaque 31 août, c'est la journée mondiale du‪#‎Blog‬. Mais que s'est il passé sur la blogosphère guinéenne ? La Guinée-à t-elle une blogosphère ? Une twittosphere ? Ne sommes nous pas, comme très souvent des nombrilistes spectateurs passifs des convulsions du monde? Quelle est notre part du dividende de la citoyenneté sur le web ? Nous sommes un des rares pays – sinon le seul – de la sous région à n'avoir jamais pu organiser un ‪#‎BarCamp‬ ou un ‪#‎BlogCamp‬. Pendant ce temps chez nos voisins il existe des communautés structurées très dynamiques des net-citoyens qui se mobilisent spontanément à chaque événement important pour apporter une aide désintéressée à leurs concitoyens à travers les outils internet. C'est le cas actuellement en RCI et au Sénégal pour lutter contre l'épidémie d'Ebola que nous leur avons fourguée….

Puis, j'ai entrepris de partager mon expérience au sein de certaines universités et à travers la Maison de la presse de Guinée. A quelques rares exceptions, j'ai globalement rencontré des gens indécis, démotivés, désarticulés et désorganisés…  En vérité, nous Guinéens, nous nous sommes laissés avoir par la politique et l'ethnocentrisme en oubliant nos terribles ennemis communs que sont: l'ignorance, le chômage, la pauvreté et les maladies. Nous pouvons toujours continuer à demander de l'aide à Dieu, mais au vu de ce dont IL nous a déjà gratifié (un pays immensément beau et riche, une diversité ethnique et culturelle, etc.) je crains qu'Il ne soit lassé vu son agenda dans les autres contrées du globe: Palestine, Ukraine, Ebola, Irak, Libye, Syrie…

 Plusieurs commentaires sont venus étayés la discussion sur l'état de la blogosphère guinéenne. Morceaux choisis :   

Alfa Diallo pense aussi que la Guinée accumule un retard important sur le web  : 

 Particulièrement touché par ces vérités. Mais, moi je pense que vous êtes sur la bonne voie. La formation est l'élement qui manque à la chaine. En Guinée, même ceux qui ont des choses à dire ou à montrer ont un serieux handicap: la non maitrise des outils du web. J'ai participé à une seule séance de votre formation à la MDP, mais croyez moi j'ai baucoup appris. Courage!!!

Tafsir Balde est touché par les mots de son concitoyen et affirme que les Guinéens doivent se responsabiliser, spécifiquement sa diaspora (Balde est résident au Maroc) : 

 Très profondément touché par ces réalités. Tu a frappé fort cher Alimou Sow. Au faite, moi je trouve que ce retard n'est pas toujours du côté de la Guinée, mais du guinéen en quelque sorte (sauf quelque uns). Au Maroc ici, des jeunes guinéens talentueux y sont, mais pas tellement branchés dans la blogosphère. Je ne connais qu'un seul mondoblogeuer guinéen ici (Kba), si non, le reste, ce ne sont que des simples internautes. J'ai représenté la Guinée et l'Afrique en général dans pas mal d'événements web ici au Maroc; ou j'étais le seul participant sub-saharien!… 

Thierno Diallo  pense que certains blogueurs sont capables de faire avancer l'engagement civique numérique sur le web en Guinée mais qu'il faut s'organiser : 

Bonjour Alimou, debut août j'ai profité de mon séjour à Labé pour parler de ce triste constat avec Bilaly. On a même dressé la liste (non exhaustive) des personnes qui se sont montrées aptes (par leur civisme) à faire partie de cette organisation ; en plus de ceux que tu as mentionnés dans la publication il y a Aguibou Ramadane et Ousmane Tanou….

Tu sais autant que les autres blogueurs que nous ne pouvons pas être manipulés comme les jeunes qui soutiennent aveuglément l'un ou l'autre camp en échange de quelques billets de banque, sans se soucier de l'intérêt de la Nation. 

Mamadou Aliou Balde pense qu'une des raisons de ce manque d'engagement peut être imputé aux difficultés des Guinéens à maitriser la langue française :  

Félicitation Mr Sow. Je suis un des vos lecteurs assidus. Sans démagogie ,j'ai un grand respect pour votre plume [..]  J'ai commencé à pratiquer la langue de Molière qu'à l'age de 14 ans. Je sais combien, des fois, écrire et parler français est difficile pour les jeunes guinéens. Je pratique l'école guinéenne depuis plus de 20 ans en tant que promoteur d'école et enseignant. Je sais combien, des fois, notre éducation est au rabais. Intéresser les jeunes guinéens à l'écriture est un vrai parcours de combattant. 

Ce débat résume bien les nombreux handicaps de la blogosphère guinéenne. Ils manquent de préparation en français, la langue de communication qu'ils utilisent le plus régulièrement dans l'écrit. Ils agissent individuellement dans un environnement pauvre où ils doivent relever chaque jour de nombreux défis dont l'accès régulier aux services de base dont Internet.