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Les eaux toxiques du militantisme écologique russe

dimanche 26 mai 2013 à 23:40

La protection de l’environnement est devenue un sujet de militantisme public dangereux en Russie, tout du moins en ce qui concerne la pollution industrielle. Ceci est dû au fait que les militants écologistes s’opposent souvent directement à des intérêts commerciaux régionaux, qui réagissent parfois par la force. Exemple parlant : le 9 mai 2013, des inconnus ont attaqué et roué de coups un éco-blogueur de Pervouralsk, une ville industrielle de taille moyenne située à 40 km d'Ekaterinbourg, dans l’Oural. Le blogueur, Stepan Tchernogoubov, affirme qu’il s’agissait de représailles suite à la publicité qu’il donne à un fabricant local de chrome qui déverse des déchets dans la pittoresque rivière Tchousovaïa (voir la photo d’archive ci-dessous).

A cliff on the Chusovaya River. One of the color photographs made in 1912 by Prokudin-Gorsky. Public domain. Wikimedia Commons.

Une falaise surplombant la rivière Tchousovaïa. Une des photographies en couleur prises en 1912 par Prokudin-Gorsky. Domaine public. Wikimedia Commons.

Le 4 mai 2013, Tchernogoubov a été mis sur la piste d'un déversement illégal de déchets donnant à la rivière une couleur rouge sang. Il s’est rendu sur place pour vérifier l’information et prendre des photos. Il a découvert une conduite déversant dans une mare proche une sorte de boue orange chimique. Tchernogoubov raconte [russe] sur son blog de LiveJournal :

Ощущается стойкий химический запах, в носоглотке возникли болезненные ощущения. [...] А источник заполнения этого хим озера, как выяснилось, – сгнившая труба. Возможно её прорвало в праздники, но скорее всего она всегда была такой.

Il y avait une forte odeur de produits chimiques, et celle-ci me faisait mal au nez et à la gorge. [...] Il s’est avéré que la source de ce lac chimique était une canalisation pourrie. Elle a peut-être rompu pendant les jours fériés, mais il est probable qu’elle a toujours été dans cet état.

Des produits chimiques orange se déversant dans une mare près de la Tchousovaïa et provenant d'une rupture de canalisation. Photographie provenant du blog de Tchernogoubov.

L’article de Tchernogoubov a été reproduit [russe] sur le site de la radio Echo Moskvy par l’économiste local Alexander Anikine. L’usine en question, « Chrome Russe 1915 » [russe], n’a pas pris une telle publicité à la légère. Quand Tchernogoubov est retourné sur les lieux le lendemain (accompagné d’un groupe d’écologistes d'Ekaterinbourg) pour faire des prélèvements des substances chimiques, ils ont été accueillis par des agents de sécurité privés qui ont essayé de les empêcher d'approcher l'eau [russe] :

Standoff between environmentalists collecting water and security guards. YouTube screenshot, May 23, 2013.

Confrontation entre les écologistes prélevant des échantillons d'eau et les agents de sécurité. Capture d'écran de Youtube. 23 mai 2013.

Как и предполагали, они стали препятствовать сбору проб воды. [...] Впоследствии при попытке оказать на нас физическое воздействие, чтобы отобрать взятые пробы, люди, позиционирующие себя сотрудниками охраны завода “Русский Хром 1915″ были остановлены моим предупреждением о возможном разливе собранных проб на их руки, лицо и тело.

Comme nous le pressentions, ils ont essayé de nous empêcher de faire des prélèvements. [...] Plus tard, après avoir tenté de nous forcer physiquement à abandonner les échantillons prélevés, ces gens (qui se disaient agents de sécurité de l'usine « Chrome russe 1915 ») ont fini par se raviser quand je les ai avertis que je pourrais renverser les échantillons sur leurs mains, leurs visages et leurs corps.

La police locale a ensuite placé en garde à vue Tchernogoubov et son escorte après que le chef du groupe de sécurité privé eut signalé qu'ils avaient « volé » des échantillons, mais les autorités les ont rapidement tous libérés. Dans le même article [russe], Tchernogoubov prétend que l'un de ses collègues écologistes a été contacté par l'éditeur d'un journal local qui lui a demandé de ne pas soulever la question de la pollution de « Chrome russe », puisque cela risquait de mettre à mal le maire de Pervouralsk, celui-ci ayant apparemment des liens avec l'usine. Voici comment l’usine elle-même décrit [russe] ce qui s’est passé le 5 mai :

[...] неустановленные лица в количестве 5 человек пытались проникнуть на территорию станции нейтрализации промышленных стоков ЗАО «Русский хром 1915». При себе имели бутыли, наполненные неизвестной жидкостью.

[...] des inconnus, au nombre de 5, ont tenté d'accéder au site de la station de neutralisation des eaux usées industrielles de « Chrome russe 1915 ». Ils avaient avec eux des bouteilles remplies d'un liquide inconnu.

Les ennuis de Tchernogoubov ne se sont toutefois pas arrêtés là. Le 9 mai, quelques jours après avoir causé cette agitation et signalé le cas de pollution à la police locale [russe], Tchernogoubov a remarqué lors d'une promenade avec sa femme qu'il était surveillé par quatre hommes. (Étrangement, il a identifié l'un d'entre eux comme étant un employé de la branche locale de « Ville sans drogue, » le groupe d'action antidrogue d’Evgueni Roizman basé à Ekaterinbourg.) Tchernogoubov a approché un de ces hommes, et lui a demandé pourquoi ils le suivaient. Ce qui s'est ensuivi [russe] fait froid dans le dos :

В ответ он нанёс мне удар в лицо, затем появились ещё двое, которые подбежав заломали мне руки. В это время первый, [...] начал наносить целенаправленные удары мне в голову. Когда я вырвался и нанёс ему удар, меня повалили и стали бить ногами те двое, которые держали мне руки. [...] На очередную попытку встать один из нападавших достал пистолет и ударил мне рукоятью в голову. Я временно потерял сознание. [...] По итогу я имею разбитую голову, зашитую двумя швами и выбитые верхние передние зубы.

En guise de réponse, il m'a frappé au visage, puis deux autres sont accourus et m'ont tordu les bras dans le dos. À ce moment-là, le premier homme [...] s'est mis à me frapper directement à la tête. Quand j'ai réussi à me libérer de leur étreinte et à répliquer, les deux hommes qui me retenaient m'ont poussé au sol et ont commencé à me donner des coups de pieds. [...] Quand j'ai tenté de me relever, un des agresseurs a sorti une arme et m'a donné un coup de crosse à la tête. J'ai brièvement perdu conscience. [...] Je me retrouve avec le visage tuméfié, deux points de suture, et les dents de devant cassées.

Chernogubov in the hospital, post assault. YouTube screenshot. May 23, 2013.

Tchernogoubov à l'hôpital, après l'agression. Capture d'écran de Youtube. 23 mai 2013.

Ainsi que l'explique Tchernogoubov, lorsque la police est arrivée sur les lieux, l'un des agresseurs leur a montré un insigne de police et les trois hommes n'ont pas été appréhendés. Tchernogoubov est persuadé qu'il a été agressé pour avoir dénoncé « Chrome russe ». Si c'est bien le cas, la vérité a toutefois déjà été révélée. Le 10 mai, des militants russes de Greenpeace ont prélevé leurs propres échantillons dans la rivière et ont découvert  [russe] que le taux de chrome dans l'eau était presque 100 fois supérieur à la « concentration maximum autorisée ». Bien sûr, ce fait ne garantit pas en lui-même un quelconque résultat. Ce n'est pas la première fois que des responsables évoquent « Chrome russe » en lien avec des questions de pollution [russe], mais l'usine continue de fonctionner et de polluer dans une relative impunité. Peut-être que l'attaque dont Tchernogoubov a été la victime permettra de faire une différence en suscitant une indignation publique, et que par conséquent quelqu'un sera puni. Toutefois, même dans le meilleur des cas, il est difficile de concevoir l'histoire de Tchernogoubov comme autre chose qu'une victoire sans suite pour les blogueurs et militants russes.

La sociologie russe dans le collimateur de la justice

dimanche 26 mai 2013 à 23:03

La science n'est pas en sécurité en Russie aujourd'hui. C'était, en substance, le message de Lev Gudkov ce matin dans une déclaration publique publiée [russe] sur le site web du Centre Levada, l'une des plus anciennes et plus respectées institutions de recherche russes. L'institut abrite aussi des intellectuels affichant des positions largement critiques du régime de Poutine. Goudkov, qui dirige le Centre, a annoncé que des procureurs de Moscou l'avaient contacté il y a cinq jours, le 15 mai, pour donner un avertissement officiel que son équipe opère en contravention à une loi fédérale récemment forgée qui requiert les ONG actives politiquement recevant des fonds de l'étranger de s'enregistrer auprès de l'administration comme agents de l'étranger.

Goudkov a déposé sur slideshare.net des scans [russe] de l'avertissement officiel du procureur de Moscou, tout comme son propre appel public en défense du Centre Levada. Dans ce dernier texte, Goudkov annonçait que l'application de la loi “agents de l'étranger” au Centre accroît les probabilités que son travail soit interrompu dans un avenir proche. Son communiqyé insiste sur le fait que le financement extérieur ne représente au maximum que 3% des ressources de Levada, et ajoute que le travail de l'organisation scientifique ne se mêle pas de politique.

Russian sociologist Lev Gudkov, 26 January 2008, photo by Andrei Romanenko, CC 3.0.

Le sociologue russe Lev Goudkov, 26 Janvier 2008, photo de Andrei Romanenko, CC 3.0.

Plus particulièrement, l'Etat accuse le Centre Levada d'avoir mené un travail politique entre 2009 et 2012 en échange de dons d'une poignée d'institutions occidentales importantes, dont 150.000 dollars de la Fondation MacArthur, 290.000 de la Fondation Ford, et 337.000 de la Fondation d'aide OSI. (Note aux lecteurs : RuNet Echo est actuellement financé par l'Open Society Institute.) De plus, Levada a exécuté plusieurs études de marché entre 2010 et 2013 pour des organisations étrangères telles que le National Endowment for Democracy (pour 40.000 dollars) et l'Université du Massachusetts (pour 8.000 dollars).

Goudkov conclut tristement :

Следуя логике Предостережения прокуратуры, мы должны были бы прекратить выпуск нашего журнала и закрыть сайт Левада-центра, перестать публиковать, открыто комментировать и анализировать результаты наших опросов в среде специалистов и в публичном пространстве – в СМИ, на семинарах и конференциях, на что согласиться мы не можем.

En suivant la logique de l'avertissement du procureur, nous devrions cesser de publier notre revue et fermer le site du Centre Levada, arrêter de publier, commenter et analyser publiquement les résultats de nos enquêtes à la fois dans la sphère professionnelle et dans l'espace public —dans les média, en séminaires, et dans les conférences. Nous ne pouvons accepter cela.

Sur la page Facebook [russe] du Centre Levada, l'institution a appelé les internautes [russe] à diffuser la déclaration de Goudkov, qui réfute l'accusation selon laquelle le travail sociologique consiste en une activité politique. Lors de la rédaction de cet article, le message du Centre sur Facebook avait attiré 158 “j'aime” et 1.159 “partage.” Plusieurs sociologues importants sont aussi intervenus [russe], critiquant l'amalgame entre étude sociologique et activisme politique. Dans un message [russe] sur Facebook comptant 79 “partage” à lui seul, le sociologue Vladimir Magun faisait allusion à la tradition soviétique de répression contre l'autonomie et l'intégrité de la science :

Какими бы словами и легалистскими аргументами эта постыдная кампания ни прикрывалась, речь идет о войне против современной науки, и ее организаторы и вдохновители должны ясно осознавать, что их имена навсегда войдут в позорный список безграмотных душителей мысли – таких, как Лысенко, Жданов или Трапезников.

Quelques soient les mots et arguments plus ou moins juridiques qui se cachent derrière cette campagne honteuse, c'est un acte de guerre à l'encontre de la science moderne, et ses organisateurs et instigateurs doivent clairement prendre conscience que leurs noms seront à jamais sur la liste ignominieuse des étrangleurs ignorants de la pensée — des hommes comme Lyssenko, Jdanov, ou Trapeznikov.

L'analyste politique et ancien du sérail au Kremlin Gleb Pavlovsky a écrit [russe] sur Facebook pour demander aux responsables des deux autres principaux instituts sociologiques de Russie, FOM et VTsIOM, ce qu'ils pensaient des ennuis judiciaires de Levada. Le directeur du second institut, Valery Fedorov, a répondu [russe] une heure plus tard pour rapporter que VTsIOM avait reçu des avertissements similaires de procureurs d'Etat.

Sur Twitter, les internautes russes  ont fait un concours de bons mots sur l'avertissement des procureurs à Levada. Avec 132 retweets, l'activiste Ilya Iachine semble être en tête, en écrivant :

ВЦИОМ и “Левада” зафиксировали снижение рейтингов Путина и ЕР. Прокуратура зафиксировала снижение шансов ВЦИОМ и “Левады” на существование.

VTsIOM et “Levada” ont établi un déclin dans les cotes de Poutine et de Russie Unie. Les procureurs ont établi un déclin des chances pour VTsIOM et “Levada” de continuer d'exister.

Dans un autre message populaire (qui compte désormais près de 20 retweets), l'opposant Alexander Zalessky a souligné le fait que les principaux concurrents de  Levada, VTsIOM et FOM, sont notoirement proches du Kremlin :

ВЦИОМ сообщает, что после закрытия Левада-центра рейтинги Единой России за неделю выросли на 35%.

VTsIOM rapporte qu'après la fermeture du Centre Levada, la cote de Russie Unie a augmenté de 35% en une semaine.

Tout le monde, cependant, n'a pas rallié la défense de Levada. Le prévisible magazine électronique pro-Kremlin politonline.ru a publié des extraits de la déclaration publique de Goudkov, rajoutant la question [russe] suivante :

Стоп. Директор “Левада-центра” говорит, что иностранные гранты составляют лишь жалкие крохи – от 1.5% до 3% бюджета социологической службы. Но если это такие маленькие средства – почему же “Левада-центр” не готов от них отказаться и работать дальше без статуса “иностранного агента”? Вместо этого Лев Гудков говорит о “закрытии” центра. Вам тоже кажется, что это нелогично или где-то здесь нестыковка?

Arrêtez. Le directeur du Centre Levada dit que les financements extérieurs ne sont que des miettes — entre 1,5% et 3%— du budget de l'institut sociologique. Mais si ces fonds sont si faibles, pourquoi le Centre Levada n'est-il pas prêt à y renoncer et continuer son travail sans le statut d’ “agent de l'étranger” ? Au lieu de quoi, Lev Goudkov parle de “fermeture” du centre. A vous aussi, cela vous semble illogique ou incohérent quelque part ?

Stanislav Apetian, un autre acteur de RuNet, habituellement associé au camp des anti-opposition, a soulevé les mêmes questions sur Twitter, écrivant :

Если в доходах “Левада-центра” иностранные деньги составляют 1,5%, то почему нельзя просто от них отказаться? К чему вопли о закрытии?

Si parmi les revenus du Centre Levada, l'argent provenant de l'étranger ne représente que 1,5%, alors pourquoi ne peut-il pas simplement renoncer à un tel financement ? Quel intérêt de hurler à la fermeture ?

Alors que la plupart des Russes éduqués et avertis d'Internet disent leur dégoût de la répression contre Levada, l'institut devrait faire davantage pour répondre aux objections comme celle d'Apetian. La défense de Levada est-elle d'avoir cessé de recevoir des dons étrangers après 2012, comme son compte Twitter l'indiquait dans un tweet du 20 mai ? Si c'est le cas, pourquoi l'avertissement du procureur mentionne-t-il le financement de l'OSI jusqu'à mi-janvier 2013, et également un contrat d'étude de marché avec des clients étrangers jusqu'en 2013 ?

Le plus important à long terme, cependant, est le probable effet paralysant que les informations d'aujourd'hui auront sur la capacité de Levada à maintenir à la fois clients (et donateurs) et groupes clés de personnes sondées pour ses enquêtes. En effet, dans un entretien [russe] avec Kommersant Radio aujourd'hui, Gudkov a révélé que ses clients comme ses sondés sont déjà de plus en plus réticents à collaborer avec une organisation qui véhicule le bagage politique de Levada.

‘Dumbass', la dernière vidéo musicale d'Ai Weiwei

dimanche 26 mai 2013 à 19:45
Prominent Chinese Artist Activist Ai Weiwei has released a music video, Dumbass, which shows his solitary detention back in april 2011 when the Chinese police arrested him for "tax evasion".

Le célèbre artiste et activiste chinois Ai Weiwei a publié le clip vidéo d'une chanson intitulée « Dumbass » (« Abruti »), montrant sa détention solitaire en avril 2011 lorsque les autorités chinoises l'ont arrêté pour évasion fiscale. Chanson d'Ai Weiwei interprétée par Zuoxiao Zuzhou. Réalisation de Christopher Doyle. (Paroles pouvant heurter la sensibilité de certains)

Brésil: Sans perspective, des travestis sont victimes de la traite de personnes

dimanche 26 mai 2013 à 18:58

Ce billet écrit par Andrea Dipp, de l'Agência Pública (dont Global Voices est partenaire), a été publié comme reportage sous le titre original “VOU BOMBAR PARA COBRAR MAIS NA COPA”  “JE VAIS ME FAIRE GONFLER POUR GAGNER PLUS PENDANT LA COUPE DU MONDE” et fait partie intégrante de la couverture spéciale #CopaPública sur la Coupe du Monde 2014. Le texte sera diffusé en trois parties sur Global Voices Online. En voici la seconde partie.

Le premier billet est consultable ici: “Brésil: Silicone et dettes pour les travestis, en prévision de la Coupe du monde”

Lívia Xerez coordinatrice de la cellule de lutte contre le trafic d'êtres humains au Secrétariat général de la justice et de la citoyenneté de l'Etat du Ceará déclare que, malgré les allégations des travestis, qui affirment faire le voyage par choix personnel, la situation peut être effectivement considérée comme de la traite de personnes. En prenant pour référence le protocole de l'ONU contre le Crime organisé transnational, ratifié par le gouvernement en 2004, elle explique :

Por mais que elas não denunciem ou achem que estão indo porque querem, o protocolo de Palermo define o tráfico de pessoas como ‘o recrutamento, o transporte, a transferência, o alojamento ou o acolhimento de pessoas, recorrendo à ameaça ou uso da força ou a outras formas de coação, ao rapto, à fraude, ao engano, ao abuso de autoridade ou à situação de vulnerabilidade ou à entrega ou aceitação de pagamentos ou benefícios para obter o consentimento de uma pessoa que tenha autoridade sobre outra para fins de exploração’. Neste caso, elas seriam as vítimas e os aliciadores os criminosos.

Même si elles ne dénoncent personne ou si elles pensent qu'elles y vont parce qu'elles le souhaitent, le protocole de Palerme définit le trafic de personnes comme ‘le recrutement, le transport, le transfert, le logement ou l'hébergement de personnes, sous la menace ou l'usage de la force ou de quelque autre forme de contrainte, par le rapt, la tromperie, l'abus de pouvoir ou la mise à profit d'une situation de vulnérabilité, ou la remise ou l'acceptation de paiements ou d'avantages dans le but d'obtenir le consentement d'une personne détentrice d'autorité, dans un but d'exploitation’. Dans le cas présent, elles seraient bien les victimes et les responsables, les criminels.

Il y a encore beaucoup de préjugés et de craintes de la part des victimes elles-mêmes, pour dénoncer les responsables. Livia continue :

Elas são ludibriadas com promessas de uma vida nova, por vezes luxuosa, de ganhar mais dinheiro e por isso não conseguimos chegar. Muitas também têm medo, talvez por sermos um aparelho oficial, de que serão criminalizadas, quando na verdade elas são as vítimas. Por isso ainda não conseguimos provas de que isso têm aumentado por conta da Copa, apesar de termos fortes suspeitas.

Elles sont bernées par des promesses de nouvelle vie, des fois même luxueuse, de gagner plus d'argent, et c'est une des raisons qui font qu'on n'arrive pas à les atteindre. Un grand nombre d'entre elles ont peur aussi, peut-être parce que nous représentons un organisme officiel, d'être assimilées à des criminelles, alors qu'en fait, ce sont elles les victimes. C'est aussi pour cela que nous ne sommes encore pas parvenus à rassembler les preuves de l'augmentation du phénomène à cause de la Coupe du Monde, même si nous avons de fortes suspicions.

Un autre facteur a favorisé le trafic : c'est le peu d'alternatives professionnelles qu'ont les travestis, explique Lídia [éducatrice de la Barraca da Amizade, le Bar de l'Amitié]:

Nós temos uma parceria com o programa Vira Vida do SESI, que dá cursos profissionalizantes para elas mas, no fim das contas, quantas empresas contratam travestis? Nós trabalhamos com muitos garotos que nem eram travestis, eram apenas homossexuais, mas foram colocados para fora de casa e apareceu uma cafetina que ofereceu dinheiro caso eles se montassem. Para a juventude não existem políticas públicas em Fortaleza como existem para crianças e adolescentes – que ainda assim são escassas. As travestis têm o discurso da emancipação, como se a prostituição fizesse parte da própria identidade de ser travesti. Mas nem todas estariam ali se tivessem outras opções.

Nous avons un partenariat avec le programme Vira Vida ou Change de Vie du SESI (Service Social de l'Industrie), qui leur propose des formations professionnalisantes, mais, il ne faut pas se leurrer, quelle entreprise embauche des travestis ? Nous travaillons avec un certains nombre de jeunes qui n'étaient même pas travestis, juste homosexuels, ils ont été jetés de leur maison et une maquerelle est apparue pour leur proposer des sous s'ils se faisaient opérer. Il n'existe pas de politique pour la jeunesse à Fortaleza comme il en existe pour les enfants et les adolescents – mais même celles-ci sont insuffisantes. Les travestis tiennent un discours d'émancipation, comme si la prostitution faisaient partie intégrante de l'identité du travesti. Mais toutes n'en seraient pas là si elles avaient d'autres options.

Projeto ViraVida SESI oferece cursos profissionalizantes para criança, adolescentes e travestis/ Vira Vida SESI/Facebook

Le projet Vira Vida (Change de Vie) du SESI, l'un des partenaires de l'Association  Barraca da Amizade (Bar de l'Amitié) qui offre des formations professionnalisantes pour les travestis/ Vira Vida SESI/Facebook

Marcela [le prénom a été changé], 22 ans, entre parfaitement dans le cadre décrit par Lídia. Suite à une formation professionnalisante et plusieurs tentatives de trouver un emploi, elle s'est retrouvée sur le trottoir. Quand nous nous sommes rencontrées dans un centre commercial de São Paulo pour discuter, la cearense (NdT: originaire du Cearà) attirait tous les regards masculins sur son corps magnifique, acheté grâce au système décrit par Carla e Luana. “Je suis venue à São Paulo en avril de l'année dernière. J'ai payé l'opération en trois mois, puis j'en ai mis plus, j'ai payé en un mois, et la prothèse des seins je l'ai payée en 20 jours” se vante le travesti.

Elle travaille de dix heures du matin à neuf heures du soir avec une pause -déjeuner, dans un cinéma porno du centre de la ville :

Chego a tirar oito mil reais por mês mas trabalho muito e não saio nem uso drogas. Todo o meu dinheiro vai para a minha mãe e para o banco porque quero comprar uma casa.

J'arrive à gagner huit milles réais (trois milles euros) par mois mais je bosse beaucoup et je ne sors jamais et je ne touche pas à la drogue. Tout mon argent est pour ma mère et pour la banque parce que je veux m'acheter une maison.

Journée mondiale anti-contrefaçon : Le cas des médicaments

dimanche 26 mai 2013 à 16:10

Le 28 mai aura lieu la journée mondiale anti-contrefaçon. L'occasion de s'intéresser aux différents domaines frappés par ce fléau moderne, de l'art à la maroquinerie en passant par les parfums, le textile, les produits d'entretien ou encore les casques audio. Si la contrefaçon entraîne des conséquences délétères en termes de sécurité, d'environnement, de droit social ou encore d'économie dans la plupart des secteurs concernés, il est un domaine dans lequel les fakes commettent des ravages encore plus néfastes : la branche pharmaceutique. Une activité loin d'être marginale, puisque l'Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que 10% des médicaments fabriqués sont des faux.

Nombre d'incidents causés par de faux médicaments, par année. Graphique de PSI (domaine public).

Nombre d'incidents causés par de faux médicaments, par année. Graphique de PSI (domaine public).

Un marché souterrain colossal

La contrefaçon de médicaments touche tous les pays, sans exception, qu'ils soient développés ou moins. Elle atteint parfois des proportions vertigineuses, comme pour le traitement du paludisme, bidon une fois sur deux. En Europe, elle représente 24% des saisies douanières, soit davantage que les cigarettes. En 2010, elle a généré 75 milliards de dollars de bénéfices. Plus que le marché de la drogue. Une situation grave sur le plan de la santé publique, combattue à grand renfort de mesures plus ou moins idoines, plus ou moins efficaces.

 Des mesures souvent efficaces, mais encore insuffisantes

Fer de lance de ce combat en France, le Leem (les entreprises du médicament) s'est doté en 2003 d'un comité anti-contrefaçon. Il assure un lien en continuum entre industriels et autorités publiques (service des douanes, justice…). Vigie plutôt que réelle force de frappe, ce comité n'en demeure pas moins en première ligne dans le processus de modernisation des techniques anti-contrefaçon. Ces innovations sont de tous types : boîtes scellées, code-barres, hologrammes sur les emballages…

Mais la lutte contre la contrefaçon passe aussi par une coopération accrue entre industriels et forces de l'ordre. A ce titre, une trentaine de grands groupes pharmaceutiques travaillent main dans la main avec Interpol pour améliorer la détection des faux. Autant de mesures nécessaires, mais encore insuffisantes à éradiquer un ennemi versatile, bien souvent campé dans le champ du virtuel.

Internet sur le banc des accusés

Ce n'est un secret pour personne, internet est en première ligne des raisons qui font que la contrefaçon de médicaments a explosé. Dans un article du Point, Christian Peugeot, président de l'Unifab, association regroupant les sociétés françaises inscrites dans la lutte contre la contrefaçon, incrimine ces “sites champignons”, vite créés, vite supprimés, qui parviennent à “piéger les consommateurs”.

Encore une fois, la collaboration internationale porte ses fruits. En septembre et octobre dernier, un coup de filet d'envergure mené sur internet, coordonné par Interpol, l'Organisation mondiale des douanes (OMD) ou encore le Forum permanent sur la criminalité pharmaceutique internationale (PFIPC), s'est soldé par une saisie record. En France, ce sont plus de 427 000 médicaments qui ont été interceptés. 236 sites illégaux ont dû passer la clé sous la porte. Beau score. Pourtant, entre deux opérations coup de poing, les médicaments contrefaits se remettent à pulluler sur le net. Leur production ne freinera qu'au prix d'un contrôle systématique par Interpol de ces sites interlopes. Couteux, oui, mais la santé des citoyens a-t-elle vraiment un prix ?