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Au Paraguay, ces paysans qui luttent pour leurs terres se disent prisonniers politiques

mardi 27 février 2018 à 12:43

Avant d'aller en prison, Arnaldo Quintana travaillait la terre avec sa mère et rêvait d'être footballeur. Photo: Santi Carneri. Utilisée avec permission.

A Asunción, capitale du Paraguay, 4.000 hommes vivent confinés dans un espace prévu pour 1.300 personnes. Dans cet endroit humide, parfois sans lumière, ni eau, ni nourriture, des hommes accusés de vols, d'agressions, d'homicides ou de trafic de drogue côtoient sans distinction les patients des hôpitaux psychiatriques et les accro au crack. 80% d'entre eux ne savent pas de quoi leur avenir sera fait, en l'absence d'un procès et d'une peine à purger. Parmi eux, malgré des procès irréguliers et douteux, une dizaine d'hommes ont reçu une condamnation aux peines les plus longues que prévoit le Paraguay. Ces paysans de la prison de Tacumbú se définissent comme prisonniers politiques.

Au delà d'une sentence commune, les dix paysans “campesinos” partagent une attitude exemplaire qui leur apporte le respect des autres détenus au sein de la prison. Chacun d'eux rend service quotidiennement, en effectuant du soutien éducatif pour les détenus les plus pauvres ou en assurant au sein de la prison le fonctionnement de la boulangerie, de la cuisine ou de la menuiserie. Ils partagent également un passé commun. En tant que paysans, ils travaillaient la terre dans les zones rurales de San Pedro, Canindeyú et Caaguazú. Dans leurs communautés, ils étaient des leaders et des activistes d'organisations qui défendent l'accès à la terre et au travail des paysans, le Paraguay étant l'un des pays possédant la répartition des terres la plus inégale au monde.

Roque Rodríguez a été accusé de l'enlèvement suivi de mort de Cecilia Cubas. Il explique avoir été condamné sans preuve. Photo: Santi Carneri. Utilisé avec permission

Au Paraguay, depuis la chute de la dictature en 1989, 115 dirigeants paysans ont été assassinés lors de conflits pour la terre, mais aucun responsable n'a été condamné. Depuis 2012, année d'un massacre survenu dans la commune de Curuguaty, on observe un changement de méthode dans la répression de ceux qui réclament des terres : s'ils ne sont pas tués, ils sont poursuivis. Entre 2013 et 2015, 460 personnes ont été inculpées et 273 incarcérées.

Ces affaires judiciaires sont caractérisées par la violation des règles élémentaires de procédure, telles que la conservation des preuves, ou par l'absence de garanties pour la défense de l'accusé. Les procédures judiciaires des dix paysans détenus à Tacumbú révèlent de graves irrégularités selon le Parlement européen, les Nations Unies, Amnesty International, Oxfam et les organisations paraguayennes, telles que la Coordination des femmes paysannes et indigènes (Conamuri) et l'Église catholique (Pastorale Social de la Iglesia).

Néstor Castro a été atteint par une balle dans la mâchoire lors du massacre de Curuguaty. Son frère a été tué dans la fusillade. Il purge une peine de 18 ans de prison. Photo: Santi Carneri.

Enfermés à cause de leur lutte

La définition du prisonnier politique est subtile et fait l'objet de débats. Pour l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, un prisonnier politique est celui qui a subi une arrestation qui répond à des motivations politiques, ou lorsque la détention est le résultat d'une «procédure clairement illégale, liée aux motivations politiques des autorités “.

Selon Amnesty International, les prisonniers d'opinion sont ceux qui «sans avoir fait usage de la violence ou en avoir préconisé l'usage, sont emprisonnés (…) en raison de leurs croyances, de leur origine ethnique, de leur sexe, de leur couleur ou de leur langue». Dans le cas où les prisonniers auraient fait usage de violence, l'organisation exige la tenue de procès équitables.

À Tacumbú, Aristides Vera enseigne le guaraní. Le procès qui l'a condamné était entièrement en espagnol, qui n'est pas sa langue maternelle. Photo: Santi Carneri.

L'avocat et secrétaire général du Coordinateur des droits de l'homme du Paraguay (Codehupy), Óscar Ayala Amarilla, explique que la condamnation de plusieurs de ces prisonniers était basée sur le témoignage d'une seule personne, qui avait également fait des déclarations contradictoires. “Ils sont condamnés sur la base d'un seul témoignage, ce qui en soi est déjà une preuve dérisoire quand il n'est pas accompagné de documents, et est controversé car il serait insuffisant dans un procès normal pour condamner qui que ce soit”, dit-il.

Dans le cas du massacre de Curuguaty, l'enquête du procureur n'a pas montré que les détenus étaient les auteurs des coups de feu qui ont entraîné la mort des policiers ou qu'ils portaient les armes à l'origine de la fusillade. La mort des paysans n'a pas non plus été élucidée.

Rubén Villalba, condamné à trente-cinq ans de prison pour l'affaire de Curuguaty, assure qu'il n'y a aucune preuve pour les incriminer et affirme que la mort des paysans n'a pas fait l'objet d'une enquête. Il dit qu'il sait ce qui s'est passé à Curuguaty: “C'était la tactique de l'oligarchie et des sociétés transnationales, ce sont eux qui nous ont tués”.

«Je suis un paysan, un travailleur», explique Rubén Villalba. Avant la prison, il occupait des terres appelées “malhabidas” qui devaient être destinées à la réforme agraire. Il a été condamné à 35 ans de prison pour l'affaire de Curuguaty. Photo: Santi Carneri. Utilisé avec permission

L'avocat Óscar Ayala rappelle que les paysans emprisonnés ne peuvent être définis comme prisonniers ordinaires. “Nous parlons de personnes qui ont exercé et qui continuent d'exercer un rôle d'activiste rural autour de revendications sociales qui les distinguent de tout autre détenu”, dit-il.

Les nombreux vices de procédure sont répertoriés dans les notes de Margarita Durán Estragó, historienne, chercheuse et activiste qui n'a manqué que deux audiences durant tout le procès de Curuguaty. Pour elle, des preuves ont été ajoutées et d'autres ont été cachées pour incriminer les paysans. “Ils ont accusé les civils et n'ont pas enquêté sur la police, ils ont même stoppé les autopsies”, dit-elle.

Pour les dix prisonniers de Tacumbú, les jours défilent dans les couloirs de la prison, entre les promenoirs, le football et le désir de liberté. Dans l'attente de justice, ils évoquent leur vie d'avant avec des activistes et des journalistes étrangers qui leur rendent parfois visite pour entendre leurs cas.

Après avoir purgé dix ans de prison, les six accusés de l'enlèvement de Cecilia Cubas ont publié une autobiographie. Dans ce livre, Aristides Vera détaille le rêve qui l'a envoyé en prison, comme les autres paysans de Tacumbú: “Je suis un paysan, mon rêve de liberté en tant que paysan est d'avoir une terre, un toit, la santé, l'éducation et l'accessibilité aux routes pour que nos produits soient plus faciles à commercialiser. La liberté pour moi est que chaque femme et chaque homme ait la possibilité de travailler et de vivre dignement, c'est pourquoi je me suis battu toute ma vie. Je suis un prisonnier politique. “

Ces femmes samies tentent de maintenir vivante leur langue native, le skolt

mardi 27 février 2018 à 12:27

Tiina Sanila-Aikio dirige un atelier sur les langues sâmes au Centre culturel sami de Sajos. Crédit: Nicholas Magand pour GEN

Ce billet de Lucy Sherriff pour GlobalPost a été initialement publié sur PRI.org le 16 février 2018. Il est repris ici dans le cadre d'un partenariat entre PRI et Global Voices.

Tiina Sanila-Aikio n'est une présidente comme on en voit tous les jours. Âgée de 34 ans, elle est à la tête du peuple Sami en Finlande, la seule population autochtone reconnue dans l'Union européenne. Elle est également la créatrice des premiers albums de rock en langue skolt au monde. Le skolt est une langue sâme parlée par seulement 300 personnes.

Bien que la population Sámi compte au moins 75 000 personnes, leurs langues sont en train de disparaître. Les Sámis sont constitués de neuf tribus différentes distribuées à travers la Norvège, la Suède, la Russie et la Finlande et parlant divers dialectes. Le manque d'éducation en langue sâme signifie que les jeunes Sámis grandissent en ne parlant pas leur langue maternelle.

“Je suis très triste de constater que le nombre de personnes qui parlent une version du sâme comme leur première langue est en baisse, et ce rapidement”, a déclaré Sanila-Aikio.”Dans le même temps, la population Sámi est en augmentation.”

Dans les années 1960, 75 pour cent des Sámis parlaient la langue comme leur langue maternelle, selon les archives du Centre culturel sami de Sajos. Une recherche de 2007 a révélé que seulement 24 pour cent des Sámis étaient des locuteurs natifs, et que certains dialectes avaient déjà disparu. Sur les 11 dialectes, neuf étaient encore parlés [fr], et le sámi ter n'était parlé que par deux personnes.

Sanila-Aikio est une Sami skolt et a grandi dans le village de Sevettijärvi, où la culture et la langue skolt sont encore très vivantes. Elle était si passionnée par la renaissance de sa langue qu'elle est devenue enseignante à l'Institut de Sámi d'Inari, une école professionnelle secondaire unique en son genre, qui enseigne en finnois et en sâme et promeut la culture sâme dans toute la région.

“J'étais très inquiète de la tendance et je voulais faire quelque chose à ce sujet”, dit-elle. “Nous avons une loi sur la langue sâme qui couvre les situations où les Sámis ont le droit d'utiliser leur langue lorsqu'ils traitent avec les autorités. Tout d'abord, les autorités devraient avoir du personnel qui parle les langues sâmes, et deuxièmement, elles pourraient avoir des interprètes. Mais en réalité, cela n'arrive pas.

“C'est un gros combat.”

Non content d'enseigner le sâme skolt, Sanila-Aikio a écrit et enregistré deux albums rock en 2005 et 2007.

“Les Sámis ont aimé. Nous avons vendu la totalité des 2.500 exemplaires que nous avons produit. Avoir du rock dans leur propre langue est une façon d'intéresser les jeunes à leurs racines et de faire vivre la langue dans les temps modernes. “

Parler le skolt – et d'autres langues sâmes comme le sâme d'Inari – est étroitement lié au mode de vie sâme, qui est menacé par l'exploitation minière, l'exploitation forestière illégale et le manque de protection des terres.

“Quand une nouvelle route est construite à travers les pâturages de nos rennes, ou qu'une forêt est abattue, cela change la façon dont nous faisons les choses”, a expliqué Sanila-Aikio. “Cette zone ne peut plus être utilisée pour l'élevage de rennes.

“Ainsi, les connaissances traditionnelles et la manière d'utiliser cette zone disparaissent. Nous ne pouvons plus les enseigner à la génération suivante, et c'est pourquoi la langue est oubliée – parce que notre culture change.

“Mais le gouvernement ne met pas ces choses ensemble, et c'est notre travail le plus difficile en ce moment – pour essayer de rendre visible la question de la perte de notre culture et de notre langue.”

Actuellement, les enfants sâmes vivant en dehors des zones peuplées de Sâmes n'ont pas la possibilité d'apprendre la langue. Le programme est enseigné en finnois, et même si les Sámis peuvent l'apprendre au niveau universitaire, l'accès est varié.

Sara Wesslin est journaliste au média finnois Yle, basé à Inari au Centre culturel sami Sajos, qui abrite également le Parlement sâme.

Le Centre culturel Sámi Sajos abrite le Parlement Sámi et la station de radio finnoise Yle. Crédit: Lucy Sherriff/PRI

La jeune femme de 28 ans émet à la radio et à la télévision en Sámi Skolt  et est l'une des deux seules journalistes au monde à le faire  – à sa connaissance. (L'autre est le collègue de Wesslin à Yle, Erkki Gauriloff.)

“Je sens que j'ai une énorme responsabilité pour faire en sorte que cette langue soit vue et entendue”, a déclaré Wesslin. “Je vis dans une région rare où la langue sâme skolt est forte et vivante, et nous devons prendre soin de cela.”

Wesslin dit qu'il est important pour elle de pouvoir parler et travailler dans la langue maternelle de sa grand-mère.

“Je n'ai pas appris le skolt comme langue maternelle – c'est le finnois qui l'est – et j'ai donc dû travailler très dur pour garder cette langue dans ma vie. Dans ma famille, je suis la seule qui parle skolt avec ma grand-mère, mais c'est très difficile parce que nous parlons le finnois depuis 20 ans. Cela demande beaucoup d'énergie à toutes les deux.

Mon travail de journaliste est l'un des rares endroits où je peux rencontrer des Skolt-sámi et utiliser ma langue.”

Sara Wesslin émet en Sámi skolt  from Finnish radio station Yle. Credit: Ville-Riiko Fofonoff

Wesslin partage les préoccupations de Sanila-Aikio quant à l'avenir de skolt et affirme que les femmes sont l'épine dorsale de la préservation de la langue.

“Les femmes ont un grand rôle à jouer pour garder la langue dans leur famille. Les enfants passent généralement plus de temps en contact avec leur mère, en particulier dans les familles sâmes traditionnelles d'élevage de rennes, où les hommes sont dehors toute la journée.

“Les adultes et les enfants apprennent la langue avec enthousiasme, mais nous devons créer les conditions pour que le sâme skolt devienne la langue normale de la vie quotidienne.”

Les médias ont un rôle très important à jouer dans la relance de la langue, a-t-elle ajouté. “Et peu à peu, il y a plus de musique et de cultures populaires produites en skolt sámi.

“Je pense que cela motive les enfants à utiliser leur langue minoritaire.”

Le Parlement sâme a mis en place un institut éducatif pour enseigner la culture sâme aux adultes et adolescents et propose un cours intensif d'un an e langue sâme. Les programmes sont financés par des subventions de l'UE, mais Sanila-Aikio affirme que l’État n'y contribue pas – et c'est une chose pour laquelle le Parlement local se bat.

Sanila-Aikio croit en l'exemple. Sa fille de huit ans, Elli-Då'mnn, apprend sa langue maternelle, le sâme de Skolt, ainsi que le sâme d'Inari, la langue parlée dans la famille de son père.

Quant à faire un nouvel album de rock, les fonctions présidentielles de Sanila-Aikio ne lui laissent pas beaucoup de temps à consacrer à la musique, mais elle n'exclut rien : “Peut-être un jour.”

Lucy Sherriff a écrit cet article depuis la Finlande.

Paraguay, le pays où les paysans occupent les terres pour survivre

lundi 26 février 2018 à 20:14

Mariano Castro. Photographie de Melanio Pepangi publiée avec autorisation.

Cette publication est la version courte de l'article de Kurtural, publiée par Global Voices avec l'autorisation de ses auteurs. Elle fait partie de la série de chroniques “Les sans-terre ne vont pas au supermarché”, qui sera adaptée et publiée par Global Voices.

Dans sa ferme, Mariano Castro possède une maison de quatre pièces, une basse-cour constituée de poules et une autre de porcs, neuf vaches et un silo rempli de six tonnes de maïs qu'il a lui-même récolté. Son histoire est liée à celle de la fondation de son village : Yby Pytã. Il a cinquante-cinq ans, les yeux bridés, le regard doux et la mine vulnérable. Il a un fils prisonnier et un autre, assassiné. Il possède des dizaines d'arbres fruitiers, une cuisinière à bois et une récolte récente d'énormes courges orangées. Il est marié à Élida Benítez, avec qui il a eu huit enfants et cinq petits-enfants.

Pourtant, Mariano Castro ne possède aucun papier attestant qu'il est propriétaire de la terre qu'il travaille.

Un samedi matin d'hiver ensoleillé et chaud, comme peuvent l'être les journées d'hiver au Paraguay. Mariano Castro est à la ferme, comme d'habitude, avant le lever du soleil. C'est un homme qui sourit parfois avec pudeur. Il est né dans la ville de Caacupé en 1962, un an avant la création de l'Institut du Bien-être Rural (IBR) et la promulgation du Statut Agraire, des événements qui allaient marquer sa vie.

Selon les calculs de Mariano, il avait deux ou trois ans quand son père a quitté leur maison de Caacupé en quête d'une parcelle à cultiver pour ainsi le faire vivre, lui et ses frères et sœurs. Il prit la route vers Caaguazú, une des zones les plus impactées par la colonisation liée à la réforme agraire, un exemple de développement dont la région entière discutait dans les années soixante.

Le père de Mariano Castro allait devoir émigrer encore plus à l'Est pour s'installer définitivement à Curuguaty, dans la région de Canindeyú, à la frontière avec le Brésil. C'est lors d'un été entre 1996 et 1997 que Mariano, âgé d'un peu plus de trente ans, a répété l'histoire de son père en occupant des terres.

Cet endroit, qui porte aujourd'hui le nom de Yby Pytã I, a été rejoint par quatre autres compagnies ou quartiers ruraux, et fait partie depuis 2013 de la commune de Yby Pytã, à 250 km d'Asunción.

L'occupation a été le moyen employé par les paysans pour accéder à la terre, et la famille de Mariano applique cette méthode depuis trois générations. (Photographie : Melanio Pepangi)

Les terres de Yby Pyta avaient des propriétaires, mais Mariano Castro nous explique que, selon le Statut Agraire, ce territoire avait les caractéristiques d'un grand domaine agricole improductif – une grande étendue de terre à l'abandon -, que l'on peut exproprier légalement. De plus, la terre appartient selon lui à celui qui la travaille, et pour la travailler, il faut d'abord l'occuper.

L'occupation a été la voie naturelle des paysans pour accéder à la terre. “Il n'y a pas une colonie ou communauté dans ce pays qui ne soit née sans une forme d'occupation au préalable”, dit Perla Álvarez, paysanne membre de la Coordination nationale des femmes rurales et indigènes (Conamuri). La chercheuse Mirta Barreto, qui a écrit de nombreux livres sur le problème de la terre au Paraguay, confirme que la majorité des terres conquises par des femmes et des hommes de la campagne sont le fruit d'occupations.

Comment naît un village

Mesurer, sarcler, couper, arracher. Semer, élever des animaux de basse-cour, se réveiller et répéter toujours les mêmes gestes. C'est ainsi que l'on occupe la terre, que l'on construit une colonie et qu'apparaissent des villages. Mariano Castro le sait parce qu'il l'a fait pendant un an et demi. Dix-huit mois au cours desquels il a marché pendant 35 kilomètres de Curuguaty à Yby Pyta, entouré d'une caravane de jeunes hommes abîmés à force d'avoir sarclé, coupé, arraché, et d'avoir à nouveau sarclé, coupé et arraché.

Pour Mariano, la terre appartient à celui qui la travaille, et pour la travailler, il faut d'abord l'occuper. (Photographie : Melanio Pepangi. Utilisation autorisée.)

Le chemin pour parvenir à consolider l'occupation n'a pas été facile. “Souvent, mes enfants demandaient pourquoi je n'étais pas là, pourquoi je les abandonnais. Cela durait souvent quinze jours, et comme il n'y avait pas d'autre moyen et que le trajet à pied était très long, je restais parfois longtemps sans rentrer [à la maison]”, se souvient-il.

Mais l'endroit a pris forme petit à petit, et chaque membre de l'expédition s'est mis à marquer chacun dix hectares, comme le stipulait le Statut Agraire. Mariano a construit une petite maison avec des murs en paille et un toit avec des planches qu'il a lui-même taillées.

Une tradition interrompue

En 2012, Mariano n'a pas eu peur lorsque trois de ses fils, Néstor, Adalberto et Adolfo Castro, ont décidé d'occuper des terres pour les cultiver et y faire vivre leurs familles. Ils allaient faire comme lui avait fait, comme son père Enrique Castro encore avant lui. Selon le principe paternel, ses fils ont choisi Marina Kue, un terrain appartenant à l'État situé à l'autre bout de Yby Pytã I.

Mais au matin du 15 juin 2012, Néstor, Adalberto y Adolfo Castro ont trouvé 324 policiers de différents grades et divisions venus à Marina Kué pour les déloger. Six policiers et onze paysans ont été tués pendant l'opération, parmi eux Adolfo. Néstor a été condamné à 18 ans de prison au terme d'un procès douteux au cours duquel on a seulement enquêté sur la mort des policiers.

Enfants et petits-enfants de Mariano Castro à Marina Kue, un samedi après-midi après une réunion des nouveaux habitants de la colonie (Photographie : Melanio Pepangi. Utilisation autorisée.)

Après ce 15 juin, Mariano Castro a abandonné la ferme pour se consacrer entièrement à la lutte pour la libération de ses fils Néstor et Adalberto dans la ville d'Asunción.

Mariano Castro doit affronter la bourrasque qui sévit sur une parcelle de manioc. Il se lève tous les jours à quatre heures et demi du matin pour devancer le soleil, prend son petit-déjeuner et va à la ferme, cet endroit où il vit et meurt à petit feu au cours de longues journées passées à sarcler, labourer, travailler cette terre pour laquelle il se bat depuis plus de deux décennies.

L'Agence indienne d'investigation ‘définit’ les devoirs d'un ‘vrai’ journaliste après l'arrestation du photojournaliste Cachemiri Kamran Yousuf

lundi 26 février 2018 à 12:57

Les forces indiennes en formation pour arrêter les pierres après que des manifestations ont éclaté à Srinagar, la capitale d'été du Jammu-et-Cachemire. Image sur Instagram par Ieshan Wani. Utilisée avec permission.

La National Investigation Agency (NIA) de l'Inde – un organisme chargé de l'application de la loi antiterroriste – a décrit ce que les journalistes cachemiris devraient rapporter ou non, dans son mémoire au tribunal après l'arrestation de Kamran Yousuf, photojournaliste cachemiri [fr] de 23 ans.

Yousuf travaillait comme photojournaliste indépendant pour de nombreux quotidiens locaux, y compris le Greater Kashmir (Grand Cachemire), le plus grand quotidien de la vallée, et MunsifTV, une chaîne d'information de langue anglaise. Il était surtout connu pour son approche courageuse dans la couverture de l'hostilité croissante entre les forces de sécurité et les civils dans la vallée du Cachemire [fr].

Malgré les campagnes de la part des journalistes et des organisations internationales de défense des droits de l'homme, y compris le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), Yousuf est emprisonné depuis septembre 2017. Les responsables indiens l'accusent de faire partie d'un groupe terroriste international la vallée du Cachemire. Il a été arrêté dans le district de Pulwama au Cachemire et transporté par avion à New Delhi. Les responsables indiens l'accusent de faire partie d'un groupe terroriste international qui prévoit de mener une guerre [fr] contre les forces de sécurité indiennes dans la vallée du Cachemire. Il a été arrêté dans le district de Pulwama, au Cachemire, et transporté par avion à New Delhi.

Le photojournaliste cachemiri Kamran Yousuf, 23 ans, est en prison en Inde depuis septembre. Il risque une condamnation à mort pour sa couverture du conflit dans la région

Dans leurs déclarations devant le tribunal, les fonctionnaires affirment que Yousuf n'est pas un vrai journaliste et continue à inclure une définition du rôle d'un journaliste dans leur mémoire d'accusation :

Had he been a real journalist/stringer by profession, he may have performed one of the moral duty of a journalist which is to cover the activities and happening (good or bad) in his jurisdiction. He had never covered any developmental activity of any Government Department/Agency, any inauguration of Hospital, School Building, Road, Bridge, statement of a political party in power or any other social/developmental activity by the state government or Govt of India.

S'il avait été un vrai journaliste / correspondant local de profession, il aurait peut-être rempli un des devoirs moraux d'un journaliste, qui doit couvrir les activités et les événements (bons ou mauvais) dans sa région. Il n'avait jamais couvert aucune activité de développement d'un ministère ou agence gouvernementale, inauguration d'un hôpital, bâtiment scolaire, route, pont, déclaration d'un parti politique au pouvoir ou toute autre activité sociale ou de développement réalisée par le gouvernement de l'État ou le gouvernement indien.

Fait notable, le site internet de la NIA ne mentionne pas Kamran Yousuf, même dans la liste des “Personnes arrêtées détenues par la NIA“.

Depuis des décennies, les journalistes cachemiris sont confrontés à des interrogatoires, des menaces et des intimidations. Des militants cachemiris qui ont publiquement condamné l'autoritarisme et l'utilisation de fusils à plomb ont été réduits au silence par des menaces. Même les journalistes internationaux qui tentent de faire des reportages sur le Cachemire ont été expulsés et ont été interdits d'entrer en Inde.

Le caractère contradictoire des accusations montre clairement que Kamran Yousuf est utilisé comme bouc émissaire pour intimider les journalistes qui tentent de documenter la situation au Cachemire.

Les accusations contre Yousuf

Yousuf a été emprisonné en septembre 2017 mais il n'a été formellement accusé que le 18 janvier 2018 de complot criminel, de sédition et de tentative de guerre contre l'Inde.

Kamran a passé plus de 150 jours en détention injustiée de la NIA, bien que le chef de la police du Sud-Cachemire ait déclaré qu'il n'y avait pas de First Information report (FIR) (Procès verbal) ou de plainte déposée contre Kamran dans aucun poste de police.

Dans son acte d'accusation, la NIA souligne également que Yousuf a omis de rendre compte des réalisations civiles de l'armée indienne. Dans leur acte d'accusation, ils accusent Yousuf d'avoir “l'intention de ne couvrir que des activités qui sont anti-nationales et de gagner de l'argent en échange de tels reportages”..

Pour tenter de discréditer Yousuf en tant que journaliste, la NIA souligne également l'absence de formation en journalisme de Yousuf dans aucun institut ; cependant, son avocat Warisha Farasat a affirmé que Yousuf avait rempli tous les critères nécessaires pour être journaliste.

Pendant ce temps, la famille de Yousuf est désemparée par les nombreuses accusations qui ont été portées contre leur fils, y compris d'être un caillasseur. Cette accusation, que la famille nie avec véhémence, pèse lourd dans la région. Beaucoup de gens associent tant les caillassages que les représailles subséquentes de la part des forces de police au conflit socio-politique plus général qui affecte le Cachemire.

La famille et les amis de Yousuf réfutent les allégations du gouvernement et disent qu'il était un photojournaliste pigiste sérieux qui voulait simplement se tailler une place par son travail. Des journalistes cachemiris ont protesté contre son arrestation par la NIA et les enquêtes opaques de celle-ci, citant des accusations contre Yousuf pour son travail de couverture des manifestations anti-gouvernementales et des activités militantes.

Les soutiens de Yousuf demandent justice

Après l'arrestation de Yousuf, son ancien employeur, le Greater Kashmir, a désavoué Yousuf et a même refusé de le qualifier de journaliste – un comportement que beaucoup de personnes ont ressenti comme le résultat de la pression du gouvernement. La communauté du journalisme local a rapidement critiqué cette attitude et a défendu Yousuf. Plus particulièrement, son confrère journaliste indépendant Junaid Bhat, qui a écrit sur Facebook :

I'm Junaid Bhat from Sopore, North Kashmir and I was affiliated with the Kashmir's leading newspaper Greater Kashmir. I was attached as a contributor for the said organisation, now after GK disowned my colleague Kamran Yousuf, I have decided to quit the organisation. So hereby I'm informing everyone that I will no longer be part of Greater Kashmir newspaper from now.

Je suis Junaid Bhat de Sopore, Cachemire du Nord et je travaillais pour le plus grand journal du Cachemire, le Greater Kashmir. J'y travaillais comme contributeur pour cette entreprise, maintenant que GK a désavoué mon collègue Kamran Yousuf, j'ai décidé de démissionner. Donc, j'informe tout le monde que je ne fais désormais plus partie du journal Greater Kashmir.

Certains utilisateurs des réseaux sociaux ont demandé pourquoi d'autres associations de journalistes n'ont pas fait plus pour protester contre l'arrestation de Yousef. Le photojournaliste de l'Associated Press, Altaf Qadri, a écrit sur Facebook :

I feel ashamed to be part of a fraternity which only protests or raise their voice when a particular set of journalists are targeted. Kamran was targeted because his photographs from the South Kashmir from the spots of violence rattled the authorities. Because it challenged their narrative. Charges of stone pelting can be leveled against anyone, but it doesn't mean that he is guilty. This seems to be another way to control media. I honestly fail to understand why is Kashmir Editor's Guild, which came into being to address exactly the same issues faced by journalists, has not called for a protest or at least issued a statement. How about Kashmir Press Photographers Association? Or have we already accepted the charges leveled against Kamran? Today it is Kamran, tomorrow it could be YOU.

J'ai honte de faire partie d'une fraternité qui protester ou élève la voix que lorsqu'un certain groupe de journalistes est visé. Kamran a été pris pour cible parce que ses photographies du Sud-Cachemire faites sur les lieux de violence ont ébranlé les autorités. Parce qu'il a contesté leur récit. Des accusations de jets de pierres peuvent être portées contre n'importe qui, mais cela ne signifie pas qu'il est coupable. Cela semble être une autre façon de contrôler les médias. Honnêtement, je ne comprends pas pourquoi la Guilde des rédacteurs du Cachemire, qui a été créée pour aborder exactement les mêmes problèmes que les journalistes, n'a pas protesté ou au moins publié une déclaration. Et l'Association des photographes de presse du Cachemire ? Ou avons-nous déjà accepté les accusations portées contre Kamran ? Aujourd'hui c'est Kamran, demain ça pourrait être VOUS.

Muzammil Jalil a écrit sur Facebook :

We need to stand up for Kamran and if nothing more, we can at least demand to know what is the evidence against him. Taking pictures, shooting videos, being at the spot are all legitimate journalistic activities. That is no crime.

Nous devons défendre Kamran et si nous ne pouvons rien de plus, nous pouvons au moins exiger de savoir quelles sont les preuves contre lui. Prendre des photos, tourner des vidéos, être sur place sont autant d'activités journalistiques légitimes. Ce n'est pas un crime.

L'oncle de Yousuf Irshad Ahmad a été cité par Scroll.in disant :

If it was the local police, we would have known whom to approach and how to deal with this. But this is the NIA, he is not even in Kashmir. Where do we go?

We would sometimes tell him not to work hard and cover every event given the situation in the valley, but he wanted to keep working. It was his passion […] he deserved to be appreciated and encouraged, not arrested and booked under false charges.

Si c'était la police locale, nous aurions su à qui nous adresser et comment gérer cela. Mais c'est la NIA, et il n'est même pas au Cachemire. Où aller ?
Nous lui disions parfois de ne pas travailler autant et de couvrir chaque événement compte tenu de la situation dans la vallée, mais il voulait continuer à travailler. C'était sa passion […] il méritait d'être apprécié et encouragé, pas arrêté et enfermé sous de fausses accusations.

Le coordonnateur du programme Asie du Comité pour la protection des journalistes (CPJ), Steven Butler, a déclaré :

India's National Investigative Agency is way out of its league and has no business defining what ‘a real journalist’ should cover. […] Kamran Yousuf's work taking photographs of conflict in Jammu and Kashmir is a public service in the best spirit of journalism. He should be freed immediately.

L'Agence Nationale d'Investigation de l'Inde outrepasse son rôle et n'a pas à définir ce que “un vrai journaliste” devrait couvrir. […] L'œuvre de Kamran Yousuf photographiant les conflits au Jammu-et-Cachemire est un service public dans le meilleur esprit du journalisme. Il doit être libéré immédiatement.

Entre-temps, le directeur exécutif adjoint du CPJ, Robert Mahone, a déclaré :

Indian authorities must stop trying to crush the independent press in the Jammu and Kashmir region. Authorities should immediately release Kamran Yousuf.

Les autorités indiennes doivent cesser d'essayer d'écraser la presse indépendante dans la région de Jammu-et-Cachemire. Les autorités doivent immédiatement libérer Kamran Yousuf.

La guilde des rédacteurs du Cachemire a déclaré:

The pathetic standards of journalism that NIA aims to thrust is not just childishly naive but also reflect a dangerous conspiracy to disempower the fourth estate. If [the] NIA does not understand the basics that separate PR [public relations] from journalism, it puts its own investigating capabilities into question.

Les normes pathétiques du journalisme que la NIA vise à imposer ne sont pas seulement d'une naïveté puérile, elles reflètent également une conspiration dangereuse visant à paralyser le quatrième pouvoir. Si [la] NIA ne comprend pas les bases de la distinction entre communication et journalisme, elle remet en question ses propres capacités d'investigation.

Un pays, deux présidents, quatre chaînes de télévision censurées: la crise politique au Kenya touche aux droits de l'homme

lundi 26 février 2018 à 11:22

“Votez intelligemment” : conseil dans une rue de Kibera à Nairobi au Kenya avant les élections. Photo de Pernille Baerendsten, utilisée avec permission.

Des élections annulées. Des médias bâillonnés. Un citoyen expulsé. Des expressions courantes dans les manchettes d'aujourd'hui au Kenya.

La cérémonie de “prestation de serment” était censée être un geste symbolique du principal parti d'opposition dirigé par Raila Odinga. Mais cela a déclenché une série d'événements menant à une répression de la liberté des médias et à une menace aux citoyens au Kenya.

Pour comprendre ce qui se passe au Kenya, il faut commencer par les élections présidentielles controversées d'août 2017. Après que les résultats ont montré que le président sortant Uhuru Kenyatta les avait remportées d'une courte tête, le candidat de l'opposition Raila Odinga a contesté les résultats devant les tribunaux.

Le 1er septembre, la Cour suprême du Kenya a annulé l'élection [fr] d'Uhuru Kenyatta en raison “d'irrégularités et d'illégalités” dans le processus, faisant du Kenya le premier pays d'Afrique à avoir annulé un scrutin présidentiel par une décision de justice. La cour a par conséquent convoqué une nouvelle élection.

Certains Kenyans retournent aux urnes (mais pas tous)

Raila Odinga n'a pas participé à cette élection de rattrapage, et a encouragé ses partisans à l'imiter, arguant que les failles systémiques qui ont produit ces irrégularités n'avaient pas été résolues et qu'une élection libre et juste était donc impossible. Un nouveau scrutin a eu lieu le 26 octobre et a été marqué par des manifestations, de multiples incidents violents et la destruction de biens.

Lors de la répétition de l'élection, Kenyatta n'a recueilli que 7,4 millions de voix sur un électorat de 19,6 millions. Sa victoire a été confirmée par la même Cour suprême.

En raison de la légitimité douteuse de cette élection refaite, et du fait que Kenyatta a obtenu le soutien de moins de la moitié des électeurs du Kenya, le parti de la Super Alliance nationale (NASA) d'Odinga a soutenu qu'on avait dénié au peuple kenyan la possibilité de voter pour lui en tant que leur président.

Sur cette base il a décidé de prêtér symboliquement serment en tant que “président du peuple” auto-proclamé, à la date prévue du 31 janvier.

Odinga “prête serment” et les médias sont fermés

Quelques jours avant la cérémonie de prestation de serment qui devait avoir lieu dans la capitale Nairobi, le président Uhuru Kenyatta et d'autres cadres auraient convoqué des directeurs de médias et “menacé de fermer leurs stations et de révoquer leurs licences” s'ils procédaient à la diffusion de ce que le gouvernement estimait être une menace pour la sécurité nationale.

Toutes les grandes chaînes de télévision ont ignoré cette directive et sont allées de l'avant avec la diffusion en direct. Ce qui a suivi, c'est l'arrêt des signaux de transmission de quatre médias privés: NTV, KTN, Citizen TV, sa station sœur, Inooro TV.

Trois journalistes de NTV – Linus Kaikai, Larry Madowo et Ken Mijungu – ont déclaré à Reuters que les agences de sécurité les avaient avertis qu'ils allaient être arrêtés et que des policiers en civil s'étaient rendus à leurs bureaux et avaient menacé de les arrêter s'ils tentaient de quitter le bâtiment.

Le Conseil des médias du Kenya a condamné les suspensions des chaines de télévision et le musellement de la presse par le gouvernement, qualifiant la situation de “plus grande menace et atteinte à la liberté d'expression”.

Le 1er février, la Haute Cour du Kenya a suspendu la fermeture des stations concernées. Le gouvernement a défié l'ordre du tribunal pendant une semaine, jusqu'à ce qu'il finisse par réactiver NTV et KTN News après sept jours, et Citizen TV et Inooro TV après dix jours, le 8 février.

“Ils se permettront n'importe quoi à l'avenir”

La coupure des signaux de transmission des chaînes de télévision au cours d'un événement largement considéré par les Kenyans comme symbolique (et non officiel) en a laissé beaucoup sous le choc.

La GUILDE DES RÉDACTEURS condamne les mesures prises par le gouvernement pour fermer trois stations de télévision privées;  demandons à l'État d'annuler immédiatement les ordres de musellement.

Le pays est divisé sur les questions en jeu. Certains ont exprimé leur soutien à l'initiative du gouvernement, “pour que cela serve de leçon” à l'opposition.

Honnêtement, je pense que la coupure des médias doit. Il y a moins de discussions politiques dans les ménages. Moins de publicités de jeu, moins d'analystes politiques irritants, moins de drame.

Les gens se parlent plus.

Ces gens qui appuient fortement l'initiative du gouvernement de fermer les médias sont encore plus choquants. Un gouvernement qui a l'audace de fermer les médias en 2018 est un gouvernement dangereux. Ils ont franchi la ligne rouge et ils se permettront n'importe quoi à l'avenir

Ce que j'aime au Kenya, c'est que quand quelque chose arrive, cela nous affecte tous. La fermeture des médias affecte tous aussi bien les partisans du Jubilee que de la NASA. Ça pareil pour nous avec la faim.

Un échantillon représentatif de Kényans n'a pas vu ces coupures comme une atteinte à la liberté des médias ou à leur droit de chercher des informations, car beaucoup reprochent aux organisations de presse de ne pas avoir les intérêts des Kenyans à cœur:

Chères stations de télévision,
Lorsque vous aurez terminé avec le gouvernement, prenez du temps et faites une retraite, et repensez. Réorganisez toute l'approche du secteur de l'information. Parce que vos consommateurs ne vous suivent plus. Vous ne leur manquez pas, la plupart s'en fichent.

Il est temps que les médias kényans comprennent que les politiciens et les ministres ont besoin de médias comme les poissons ont besoin d'eau, et quand ces derniers seront toujours du côté des gens et non des profits, alors ils auront la vraie liberté. Regardez le New York Times et le Washington Post … ils sont intouchables même par Trump.

Cependant, la société civile kényane a condamné les actions du gouvernement comme violant les droits fondamentaux. Les fermetures de médias ont été suivies par l'intimidation et le harcèlement de journalistes, y compris les journalistes NTV mentionnés ci-dessus, et des partisans loyaux de la NASA.

Déclaration de Hivos: La fermeture des médias au #Kenya est un affront à la liberté de la presse et une violation des droits humains! Le deuxième jour de fermeture des médias, nous demandons : est-ce mal de faire ce qu'il faut ?

Un avocat kényan expulsé

Le 7 février, de nombreuses personnes ont été surprises par l'arrestation et l'expulsion de Miguna Miguna, l'avocat qui a veillé à la prestation de serment d'Odinga en tant que “président du peuple” du Kenya. Miguna est un écrivain, un avocat et un fervent partisan de la NASA.

Miguna a été expulsé vers le Canada le 7 février, dans ce que de nombreuses sources gouvernementales ont décrit comme son “retour à la maison”. Miguna est né au Kenya , mais détient également la citoyenneté canadienne. Il s'était présenté au poste de gouverneur de Nairobi – et a été autorisé par le la Commission électorale à le faire – lors des élections de 2017, mais il a perdu.

Le Kenya vient d'expulser illégalement Miguna Miguna au Canada, un éminent homme politique de l'opposition ayant la double nationalité.

Et maintenant ?

Ce tournant récent a mis en évidence la question de la citoyenneté. Beaucoup de Kenyans sont divisés sur la question de savoir si le gouvernement avait un fondement et le droit d'expulser un citoyen kenyan de son pays, bien que la constitution protège clairement la citoyenneté de toute personne née sur le sol kényan en cas d'acquisition d'une deuxième nationalité.

A qui incombe le blâme DCI IG ou Département de l'immigration

Dans un communiqué de presse publié par AllAfrica.com, Miguna a décrit les événements qui ont conduit à son expulsion. Le ministère de l'Intérieur affirme avoir révoqué la citoyenneté kenyane, qu'il détient par naissance, mais Miguna a déclaré que ce n'est pas le cas.

Miguna a ensuite intenté un procès contre le gouvernement et le 15 février, la Haute Cour du Kenya a statué en sa faveur. Le juge Kimaru a déclaré que l'expulsion de Miguna “n'avait aucun fondement juridique” et a ordonné aux autorités de lui redonner son passeport kenyan sous les sept jours.

De nombreux Kenyans ont exprimé leur colère face à la dernière manœuvre du gouvernement dans ce qui constitue une violation flagrante des droits de l'homme d'un citoyen kényan, dont la seule offense était d'utiliser son pouvoir d'avocat pour légitimer la prestation de serment symbolique d'Odinga.

Comment pouvez-vous dire quelqu'un qui est né à Ahero, est allé à l'école secondaire Onjiko, a fait le Service national de la jeunesse à Gilgil avant de rejoindre l'UON [Université de Nairobi] n'est pas un Kényan. Est-ce que vous avez seulement conscience [de ce que vous faites] ? @OleItumbi, le pouvoir est liquide, il ne va pas durer éternellement, c'est Miguna  à UON

La répression contre les médias, le mépris du système judiciaire kényan par le pouvoir exécutif et l'expulsion illégale d'un citoyen kényan malgré une décision de justice contraire vont avoir de profondes implications pour les droits de l'homme au Kenya.

Avec les événements récents, l'illusion d'un média kenyan indépendant et libre de toute interférence étatique s'est évaporée. Le mépris pour les droits de l'homme continue d'être rapporté dans les médias locaux et internationaux alors que Miguna Miguna poursuit son combat contre son extradition depuis l'Ontario, au Canada.