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Les relations complexes entre Addis-Abeba et l'Oromia, la plus grande région d'Ethiopie

lundi 24 juillet 2017 à 20:39
La cathédrale de la Sainte-Trinité à Addis-Abeba a été construite après 1941 pour commémorer la libération de l'Ethiopie de la colonisation de l'Italie fasciste. Photo de David Stanley via Flickr. CC BY 2.0

La cathédrale de la Sainte-Trinité à Addis-Abeba a été construite après 1941 pour commémorer la libération de l'Éthiopie de la colonisation de l'Italie fasciste. Photographie de David Stanley via Flickr. CC BY 2.0

À la fin du mois de juin, le Conseil des ministres éthiopien a révélé un projet de loi régulant les questions de services sociaux, de langues, d'éducation et de culture impliquant la capitale du pays et la région administrative d'Oromia, la plus grande d'Éthiopie et dans laquelle se trouve Addis-Abeba.

Le gouvernement et ses partisans affirment que la loi est nécessaire pour remédier aux injustices historiques que le peuple oromo a subies depuis la création d'Addis-Abeba. Les critiques considèrent la loi comme une tactique pour priver les résidents d'Addis-Abeba de certains de leurs droits. D'autres vont plus loin dans leurs soupçons et pensent que la loi vise à aggraver les relations ethniques déjà sensibles en Éthiopie.

La majeure partie du débat se concentre dans la confrontation entre élites régionales et celles plus cosmopolites, tradition contre modernité, et ethno-nationalistes contre militants d'une Éthiopie unifiée – divisions qui sont souvent source de conflits dans le pays.

Sur la carte éthiopienne, Addis-Abeba est une étendue de hautes plaines à l'intérieur de l'État d'Oromia. Avec seulement 0,047 % du territoire du pays, Addis-Abeba est la plus grande région métropolitaine du pays. De nombreux groupes ethniques et religieux de tous les coins de l'Éthiopie y vivent; un nombre significatif de ses 4 millions de résidents se présentent généralement comme cosmopolites, libéraux et post-ethniques.

La région d'Oromia, quant à elle, abrite les gens de l'ethnie oromo, le plus grand groupe ethnique, comprenant au moins 34 % des 100 millions d'éthiopiens, mais qui ont été aussi toujours politiquement marginalisés. Addis-Abeba est le siège du gouvernement actuel – EPRDF, qui est dominé par le Front de libération populaire Tigrayan [fr]- et bien qu'elle soit à l'intérieur de cet état, elle n'en fait pas partie; c'est le gouvernement fédéral qui la contrôle et ce depuis 1991, lorsque l'Éthiopie a été transformée en une fédération de neuf États régionaux sur une base ethnique.

Cependant, la Constitution éthiopienne a accordé à la région oromo ce que le gouvernement a appelé un “Intérêt spécial” sur Addis-Abeba lorsqu'elle a été adoptée en 1995, en raison de l'emplacement particulier de la ville.

L'objet du nouveau projet de loi est de légiférer sur les dispositions considérées par la constitution “d'intérêts particuliers”  afin de résoudre d'autres problèmes qui se sont posés entre l'administration de la ville d'Addis-Abeba et la région d'Oromia, tels que l'expansion éventuelle des limites de la ville, ce qui comporterait l'expulsion d'agriculteurs Oromo dont la subsistance dépend des terres agricoles situées autour de la ville.

Cette expansion, entre autres choses, a été au cœur des manifestations des étudiants oromos de 2014 à 2016, sévèrement réprimées par le gouvernement éthiopien; selon les organisations de défense des droits de l'homme, des centaines de personnes ont été tuées et des milliers arrêtées [fr] avant que le gouvernement ne déclare l'état d'urgence en octobre 2016.

La loi proposée est controversée, mais beaucoup d'observateurs s'attendent à ce qu'elle soit adoptée au cours des prochains jours.

L'horizon d'Addis-Abeba plein de gratte-ciels fournissent une toile de fond pour la place Meskal, site de défilés militaires et de rassemblements pendant l'ère communiste qui s'est terminée en 1991. Photo de David Stanley via Flickr. CC BY 2.0

L'horizon d'Addis-Abeba plein de gratte-ciels fournit une toile de fond pour la place Meskal, site de défilés militaires et de rassemblements pendant l'ère communiste qui s'est terminée en 1991. Photographie de David Stanley via Flickr. CC BY 2.0

Incorporation de l'identité Oromo dans Addis-Abeba

Il y a environ 13 “titres” dans le projet de loi, tous relatifs à “l'intérêt spécial” de l'État d'Oromia sur Addis-Abeba.

Dans ses principales dispositions, le projet de loi intégrerait l'oromo (connu sous le nom de “afaan oromo”) en tant que langue de travail de la municipalité, obligerait le gouvernement de la ville à dispenser une éducation aux résidents d'Addis-Abeba dont la langue maternelle est l'afaan oromo et préserverait les enclaves culturelles et les édifices oromos de la ville. Le projet de loi stipule également l'utilisation du nom oromo Finfine (en langue oromo) en usage alternatif à Addis-Abeba et permettrait de renommer les rues, les places publiques et les quartiers à Addis-Abeba avec des noms commémorant la culture et l'identité oromo.

Cette partie du projet de loi a été largement débattue sur les médias sociaux car elle traite de l'histoire, de l'identité et de l'utilisation des langues à Addis-Abeba.

Les adversaires craignent que cela ne cause une division et des conflits en faisant appel aux nationalistes oromos, et d'autres encore ont affirmé que les problèmes que ces dispositions prétendent résoudre n'existaient pas réellement.

Cependant, de nombreux nationalistes oromos soutiennent cette partie du projet de loi, même si c'est avec réserves.

À qui appartient les terres d'Addis-Abeba?

Les nationalistes oromos s'opposent catégoriquement à une autre partie du projet qui traite de la propriété des terres à Addis-Abeba.

Dans la pratique actuelle, le gouvernement fédéral est propriétaire des terres et le projet de loi affirme explicitement qu'Addis-Abeba est une entité fédérale. Mais le projet de loi autoriserait l'État d'Oromia à acquérir et développer des terres pour ses activités gouvernementales et les services publics sans paiement de taxes d'occupation.

Pour les critiques, ceci ne protège pas suffisamment les droits de propriété légitimes et historiques d'Oromia sur la ville d'Addis-Abeba. Comme l'a écrit un auteur invité du site d'analyse d'informations pro-gouvernemental, HornAffairs:

La Constitution prévoit clairement que, territorialement, l'État éthiopien est structuré en seulement neuf états régionaux. Il comprend le territoire de ces états membres.

Outre le territoire des états membres, il n'y a aucune terre appartenant au gouvernement fédéral ou à tout autre type d'administration. Toute conception d'Addis-Abeba comme une administration distincte avec sa propre juridiction territoriale séparée de l'État d'Oromia ou en tant que territoire fédéral est exclue dès le début.

Toute personne vivant dans Addis vit dans l'État régional d'Oromia.

Les opposants non-oromos du projet de loi affirment que cette section permettra la discrimination contre les résidents d'Addis-Abeba, qui se présentent généralement comme post-ethniques et cosmopolites. Sur Facebook, l'ancien président de la Chambre de commerce d'Addis-Abeba, M. Kebour Ghenna, a écrit:

Très bientôt, je célébrerai mon soixantième anniversaire à Addis-Abeba. Mon fils est né à Addis-Abeba. Je suis né à Addis-Abeba. Mon père est né Addis-Abeba. Mon grand-père aussi!

L'édit arbitraire du EPRDF de la semaine dernière, offrant Addis-Abeba, par une action absurde a été comme une surprise et un choc pour moi … Je suis sûr que c'est le cas pour beaucoup d'autres aussi. Ce décret renforce encore la tentative du gouvernement de diviser les Addis-Abebiens selon des critères ethniques, excluant un grand nombre de résidents.

Mais les nationalistes oromos font valoir qu'ils ont été expulsés par la force de leurs terres au cours de nombreux conflits sanglants, et qu'il est donc logique pour leur état d'avoir un certain droit sur la ville. Dans une réponse à M. Kebour Ghenna, M. Birhanemeskel Abebe a écrit:

Pas d'Armageddon! Pas d'apocalypse sur le retour d'Addis-Abeba en tant que ville à l'État d'Oromia et capitale!

Santé et emploi

Une autre composante importante du projet de loi traite des emplois, des services sociaux et des soins de santé.

Selon la pratique actuelle, tous les Éthiopiens à Addis-Abeba, y compris les Oromos, ont droit à l'emploi, aux services sociaux et aux soins de santé. Mais le projet de loi créerait des structures offrant des opportunités pour les jeunes Oromos qui vivent dans la ville d'Addis-Abeba et à proximité de celle-ci, ce qui semble impliquer qu'il existerait actuellement une discrimination contre les Oromos à Addis-Abeba. Opride, un site d'analyse d'informations a écrit:

… en outre, le projet prive de leurs droits et exclut les Oromos de la ville par une interprétation erronée des droits constitutionnels fondamentaux et des droits de l'homme comme intérêt particulier d'Oromia. Par exemple, une disposition clé sur les soins de santé indique que les Oromos vivant dans les villes et les zones rurales autour d'Addis-Abeba peuvent “accéder aux services de santé dans les hôpitaux gouvernementaux et les établissements médicaux comme tout résident de la ville”. C'est ridicule. Cela implique qu'il existe une loi qui empêche actuellement les Oromos d'avoir un traitement médical dans les hôpitaux publics et les cliniques d'Addis-Abeba. Ou que les résidents d'Addis-Abeba bénéficient actuellement d'un accès et d'un traitement préférentiels dans les établissements de santé publique de la ville.

L'entreprise de cette écologiste indienne fabrique du papier à planter

lundi 24 juillet 2017 à 09:10

Drapeaux indiens miniatures en papier. Photographie de Daniel Incandela sur Flickr. CC BY-NC 2.0

Pendant les festivités indiennes, on voit la foule agiter des centaines de milliers de petits drapeaux. Mais ensuite, ils sont souvent jetés n'importe où dans les rues.

Que se passerait-il s'ils ne devenaient pas des déchets ? S'ils contenaient des graines qui, avec un peu d'attention, pourraient pousser ? C'est l'idée créative d'une Indienne amoureuse de la nature et diplômée en biotechnologie légale : insérer des graines dans des cadeaux jetables.

Mansi Shah a démissionné de son travail l'an dernier et a lancé son entreprise Green Gift dans le but d'agir en faveur de l'environnement. Elle a commencé par mouler du terreau et des graines en forme de modaks, les beignets sucrés dégustés pendant le festival en l'honneur de Ganesh. Ensuite, elle a créé des rangoli (objets décoratifs) imprégnés de graines pour le festival de Diwali.

Tout ceci lui a donné de nouvelles idées. Dans un entretien avec le Times of India, elle explique que son inspiration lui est venue d'une coutume japonaise qui consiste à attacher des graines à une page du quotidien avec des instructions pour que les lecteurs les plantent. Son père, qui avait une imprimerie, l'a aidée à réaliser son idée de placer des graines dans du papier.

Peu de temps après, son entreprise fabriquait des articles de papeterie comme des cartes, des marque-pages, des invitations de mariage, des carnets et des sous-verres imprégnés de graines de différentes plantes.

Happy moment! 🇮🇳 Plantable Indian Flags. Thank you for the appreciation. #giftgreenindia #gifts #republicday 🇮🇳

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Ces objets sont vendus avec des explications pour les planter, et la couleur du papier indique quel type de graines il contient : les graines de tomates sont dans du papier rouge, celles de basilic dans du vert.

Plantable Coasters! YES! GET READY for our upcoming collection ONLY at #indenvfest Come and meet us for more exciting gifts from 24th to 26th February in Ahmedabad ! See you all there! #indenvfest #gogreen #giftgreenindia #giftgreen

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Le public trouve l'idée excellente pour l'environnement. Rajashree Kuttisankaran écrit sur Facebook :

Just when I thought there couldn't be a perfect gift, Gift Green came along. I hate to gift a bouquet of flowers that'll die soon, or a showpiece that is forgotten in a week. On the other hand, a plant will grow and with good care, be around forever.

Juste au moment où je ne pensais plus trouver de cadeau parfait, Gift Green est arrivé. Je déteste offrir un bouquet de fleurs qui va faner rapidement, ou un objet décoratif qui sera oublié une semaine plus tard. Par contre, une plante va pousser et avec un peu d'attention, elle sera là pour toujours.

Debjyoti Bhattacharyya suggère à d'autres d'imiter l'idée de Shah :

আচ্ছা, বইমেলায় মেলাপ্রাঙ্গণ যারা কাগজের টুকরোয় ছেয়ে দেন, তাঁরা এটা ভাবতে পারেন না?
আচ্ছা আনন্দ, পত্রভারতী, দেবসাহিত্য কুটির, দেজ, মিত্র ও ঘোষ, আপনারা যে প্যাকেটে বই দেন, তা তো দু মিনিট বাদের সবাই ছিঁড়ে ফেলে দেয়! ওর একধারে মানসীর মত কয়েকটা প্রায় অদৃশ্য বীজ আটকে দিলে খুব সমস্যা হবে কি? ভাবুন তো, সে প্যাকেটটা রাস্তার ধারে কোন আস্তাকুঁড়েতে গাছ হয়ে যাচ্ছে।

Ceux qui décorent la fête du livre avec des guirlandes de papier, ne pourraient-ils pas réutiliser cette idée ? Des maisons d'édition comme Ananda, Potrvarati, Dev Sahitya Kutir, Dey's, Mitra et Ghosh vendent les livres dans des sacs en papier qui terminent dans la rue ou à la poubelle. Si vous pouviez, mixez-y des graines, est-ce que ce serait si difficile ? Imaginez, les sacs qui finiraient au coin de la rue ou dans une décharge pousseraient et deviendraient des plantes.

My new friend. 🤗 Thank you @giftgreenindia #NewFriend #AloeVera #Plant #GiftGreenIndia

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L'entreprise de Shah organise aussi des initiatives stimulantes et enrichissantes comme des ateliers de jardinage et compostage, et veut poursuivre sa mission en proposant des articles écologiques personnalisés.

En Argentine, la recherche d'identité et de vérité montrée sur les planches

dimanche 23 juillet 2017 à 18:48

Image : Théâtre pour l'identité. Nous ne vous laissons pas dans le doute.  Logo institutionnel et photo du profil Facebook du mouvement Théâtre pour l'identité.

“Mon nom est… et je peux le dire parce que je sais qui je suis”. C'est avec ces mots que les artistes du Théâtre pour l'identité ouvrent toutes leurs représentations depuis 17 ans.

Le Théâtre pour l'identité (TXI) a inauguré un nouveau cycle en juillet. Il s'agit d'une initiative artistique des Grands-mères de la place de mai lancée en 2000 dans le but de soutenir sur scène la lutte qui les a caractérisées depuis leur création en 1977 : “Localiser et rendre à leurs familles légitimes tous les enfants disparus lors de la dernière dictature argentine“.

Les oeuvres du TXI ont évolué et se sont diversifiées pour aborder différents thèmes, qui tous tournent autour de l'identité. La vision et le but du TXI est de “jouer pour ne pas oublier, jouer pour découvrir la vérité”. On estime qu'en Argentine il reste encore environ 400 personnes avec une identité modifiée, enfants de jeunes militants séquestrés, torturés et disparus dans les années 70.

Dans un article publié récemment dans le journal Página 12, Eugenia Levin, membre du TXI, déclare :

Entendemos que la aparición tiene que ser ya, porque las abuelas se van sin conocer a sus nietos, muchos de los cuales ahora tienen hijos, así que hay bisnietos. Ya hay dos generaciones que no conocen su identidad, no queremos que sean tres.

Nous comprenons que la divulgation doit intervenir maintenant, parce que les grands-mères continuent à ne pas connaitre leurs petits-enfants, dont beaucoup ont maintenant eux-mêmes des enfants, et donc il y a des arrières petits-enfants. Il y a maintenant deux générations qui ne connaissent pas leur identité, nous ne voulons pas arriver à trois.

La vidéo institutionnelle suivante, datant de 2015, a été faite à l'occasion des 15 ans du TXI, anniversaire qui a donné lieu au rassemblement de plusieurs grandes figures du cinéma et de la télévision nationale et a été diffusée avec le slogan “Rencontre-toi aujourd'hui” et le hashtag #notepierdaselabrazo (#NeRatePasUneEtreinte), en faisant référence à l'étreinte lors de la rencontre entre un petit-fils qui a retrouvé son identité et sa grand-mère.

De même, le TXI dispose d'un projet de théâtre itinérant, qui amène les représentations sur les scènes de tout le pays, que ce soit des écoles, des universités, des théâtres, des organismes officiels ou non-gouvernementaux, des places, des centres culturels et toute autre entité qui les invite, dans le but d'être un outil pédagogique, de réflexion et de débat qui aide le public à comprendre la réalité historique et qui de plus a pour but de faire en sorte que d'autres possibles petits-enfants perdus se posent des questions, doutent et cherchent leur véritable identité.

Bannière du cycle de théâtre itinérant du TXI en 2017. Photo partagée publiquement sur Facebook.

Les représentations dans les institutions éducatives ont été spécialement importantes pour les membres du mouvement, parce qu'ils savent que c'est là où ils peuvent créer les plus grandes inquiétudes :

En los últimos años, los ITINERANTES han tenido una fuerte presencia en las escuelas de nivel medio y del segundo nivel de colegios primarios de todo el país. Muchas instituciones educativas han elegido enseñar una parte tan dura de la historia argentina a través del arte, entendiendo al teatro como una herramienta pedagógica esencial y efectiva. Esta creciente intervención en los colegios se relaciona con el hecho de que TXI, luego de realizar las obras, ofrece un debate donde alumnos y docentes pueden expresar todas las inquietudes y sensaciones que les dejó la puesta en escena.

Ces dernières années, les ITINERANTS ont eu une grande présence dans les collèges et pour les classes de fin de primaire de tout le pays. Beaucoup de ces institutions éducatives ont choisi d'enseigner un moment si difficile de l'histoire argentine à travers l'art, en incluant le théâtre comme un outil pédagogique essentiel et effectif. Cette intervention croissante dans les collèges est en lien avec le fait que TXI, après avoir effectué la représentation, propose un débat où les élèves et les professeurs peuvent exprimer toutes les inquiétudes et les sensations provoquées par la mise en scène.

De plus, sur la page Facebook et Twitter, le projet propose un programme de ‘radioteatro‘ qui retransmet en direct tous les vendredis à 10 heures du matin (GMT -03:00).

Des Colombiens envoient des lettres d'amour à d'anciens guérilleros pour leur souhaiter un bon retour dans la société

vendredi 21 juillet 2017 à 21:15

Photo: Valentina Monsalve. Utilisée avec permission.

Cet article est une version écourtée de l'article “Lettres d'amour pour les guérilleros” publié sur Tea After Twelve. Il est republié ici dans le cadre d'un partenariat avec Global Voices.

Pourquoi n'envoyons-nous des lettres d'amour qu'aux personnes que nous connaissons ? N'est-il pas plus important de donner de l'affection à ceux qui se sentent rejetés ? Cette idée qui hantait les jeunes militants colombiens Leonardo Párraga de la Fondation BogotArt et Cristian Palacios de la Young Youth Foundation, a servi d'inspiration pour la création de Cartas por la Reconciliación (Lettres pour la réconciliation), une campagne qui encourage les jeunes gens à envoyer des lettres à des guérilleros.

Un événement historique venait de se produire dans leur pays et ils voulaient y prendre part : après des années de négociations, le gouvernement colombien était arrivé à un accord de paix avec les FARC (Forces Armées Révolutionnaires Colombiennes), mettant ainsi fin au conflit le plus long d'Amérique Latine.

Au niveau international, la conclusion de cet accord de paix a été perçue comme une avancée si importante que le président José Manuel Santos a reçu le Prix Nobel de la Paix pour ses efforts. Mais il reste du chemin à parcourir avant que ne s'installent véritablement la paix et la réconciliation. Les combattants de la guérilla qui ont vécu dans des camps illégaux pendant des années, qui ont été exposés aux discours de guerre et qui gardaient leur arme à leurs côtés 24 heures sur 24 vont maintenant devoir, d'une manière ou d'une autre, réintégrer la vie civile. Et la société colombienne, habituée à la peur constante et, dans certains cas, à la haine contre les guérilleros, devra les accepter et soutenir leur retour à une vie normale.

Leonardo et Cristian étaient convaincus que les jeunes Colombiens devaient se rassembler pour soutenir cette réintégration. Et c'est ce qu'ils ont fait : des milliers de jeunes ont déjà écrit des lettres d'amour à d'anciens combattants de la guérilla, leur souhaitant un bon retour dans la société. Leur objectif est d'écrire 6 900 messages, un pour chaque ancien guérillero, et de les leur remettre personnellement.

La Saint Valentin, source d'inspiration de la campagne

L'idée de Cartas de Reconciliación a vu le jour lors du Sommet mondial des lauréats du Prix Nobel de la Paix à Bogotá en février 2017, au cours duquel Leonardo et Cristian ont eu l'occasion d'échanger brièvement avec le lauréat du Prix Nobel de la Paix 2014, Kailash Satyarthi. Ce dernier disait que nous écrivons le jour de la Saint Valentin des tonnes de lettres d'amour à ceux que nous aimons, en oubliant ceux qui sont dans le besoin. Son objectif cette année, avait-il ajouté, était de transmettre de l'amour à ceux qui avaient le plus besoin d'encouragements.

Leonardo et Cristian ont adapté l'idée au contexte colombien et ont eu l'idée d'envoyer des lettres d'espoir et de soutien aux anciens combattants des FARC qui ont du mal à trouver leur place et à adopter un nouveau mode de vie. Selon eux, “les lettres montreront que la société colombienne est prête à passer d'un discours de guerre à un récit collectif de paix”.

Pour l'instant, la campagne a permis de récolter plus de 2 000 messages et les 735 premiers ont été remis aux destinataires. L'initiative est en place dans toutes les plus grandes villes de Colombie, parmi lesquelles Cali, Manizales, Medellín, Barranquilla et Bogotá.

‘Je n'aurais jamais pensé qu'on serait prêt à me pardonner’

Les 500 premières lettres ont été distribuées le 19 mars dans l'un des camps des Nations Unies dans la région de Caldono-Cauca. Un groupe de 40 étudiants de l'Université Javeriana de Cali ainsi que deux représentants du maire de Cali et Leonardo de la Fondation BogotArt se sont rendus dans le camp pour distribuer les lettres en personne.

Les membres des FARC se sont alignés comme ils le faisaient autrefois pour recevoir les ordres de leurs commandants, mais cette fois c'était pour recevoir des lettres de soutien provenant d'habitants de tout le pays. Ce fut un moment très émouvant pour tous ceux présents. “C'est incroyable le nombre d'émotions que l'on peut ressentir en l'espace de quelques heures, de la peur au bonheur en passant par tous les intermédiaires”, déclarait après coup Manuela Jiménez Avila, étudiante en sciences politiques.

Sandra Parra, du bureau du gouverneur de Valle del Cauca a rapporté cette expérience inoubliable:

Après la distribution des lettres, un ancien combattant m'a fait visiter le camp de la guérilla. Quand j'ai regardé dans l'un des ‘cambuches’ (sorte de cabane dans lesquelles vivent les membres de la guérilla), j'ai vu un homme en train d'écrire. J'avais peur de rentrer dans la maison car il y avait un lance-grenades MGL reposant sur le lit juste à côté de lui, telle une Belle aux bois dormant fatale. Je lui ai quand même demandé ce qu'il faisait. “Je réponds à une lettre qu'on m'a écrite: elle est très belle et remplie d'espoir. Personne ne m'a jamais rien écrit d'aussi beau, c'est pourquoi je veux y répondre.”. Les larmes se sont mises à couler sur mon visage. Je l'ai serré dans mes bras et je me suis assise à côté du lance-grenades. Peut-être ce dernier était-il fatigué de la guerre lui aussi, épuisé d'être son fidèle compagnon depuis des années, et peut-être voulait-il l'aider à écrire cette lettre. Il m'en a raconté plus sur sa vie, qu'il n'en n'avait jamais rien attendu d'autre que la guerre et que rejoindre les FARC avait été pour lui et ses six frères le seul moyen d'échapper à la faim. “Je n'aurais jamais pensé que quelqu'un serait prêt à pardonner mes erreurs mais je sais désormais que la société nous attend les bras ouverts. Jusqu'à maintenant, la seule chose que je savais faire c'était tenir une arme et en prendre soin. Mais pour la paix, je peux apprendre à faire bien des choses et à travailler dignement.”

Des voix qui sortent du silence

Pour donner le coup d'envoi de l'événement, des étudiants et certains dirigeants des FARC se sont assis pour un tour de parole. Les étudiants avaient grandi pendant la guerre, à l'époque où les FARC étaient déjà une organisation clandestine. Alors les dirigeants des FARC ont raconté l'histoire de leur organisation, leurs idéaux et leur point de vue sur le processus de paix: “Après avoir pendant des années été témoins de l'injustice sociale causée par l’État au peuple colombien, nous pensons que cette occasion de nous muer en parti politique nous permettra de transformer le pays en une société plus équitable. Un objectif de cette ampleur vaut la peine de surmonter tous les obstacles.” a déclaré l'un d'entre eux.

Impressionnée, Manuela témoigne :

Entendre les témoignages de ceux qui n'ont jamais eu voix au chapitre ou le pouvoir de voter, et réaliser que ceux que j'ai souvent considérés comme des monstres jusqu'au point de les haïr étaient aussi des êtres humains dotés de bons sentiments déformés par l'environnement dans lequel ils ont dû vivre et par des conditions qui les ont façonnés. C'était très douloureux. La réalité du pays fait mal, mais il est réconfortant de voir que tous les êtres humains, même ceux qui ont tué et causé tant de dommages, ont quelque chose à nous apprendre, avec en plus un sourire ou une embrassade à offrir.

De nombreux anciens combattants ont répondu aux lettres. Gustavo González, commandant du campement de Caldono-Cauca, par exemple, a rédigé les lignes suivantes à l'intention de l'archevêque de Cali, Darío de Jesús Monsalve :

On a fait croire aux Colombiens que la paix viendrait avec le désarmement. Ce n'est pas le cas. Tant qu'il y aura des inégalités, la faim, le chômage et le manque d'éducation et de services de santé, il y aura toujours des personnes prêtes à prendre les armes, à se révolter, à manifester pour réclamer leurs droits, et cela est complètement légitime (…) Aujourd'hui, les FARC misent sur la paix, sur une politique sans armes. C'est pourquoi nous appelons tous les partisans de la paix, quelle que soit leur origine, leur religion ou leur idéologie, à s'élever au-dessus de ceux qui souhaitent un pays en guerre. Nous vous donnons notre parole, notre contribution et notre sacrifice parce que nous sommes les mieux placés pour savoir que rien n'est facile et que les défis à relever sont nombreux pour ceux qui défendent la vie comme clé de voûte de l'existence. Nous rencontrerons de nombreux obstacles mais nous les surmonterons ensemble.

Le plus grand lac d'Éthiopie envahi par les jacinthes d'eau

vendredi 21 juillet 2017 à 21:00

L'embouchure du Nil Bleu. Photo Richard Mortel via Flickr. CC BY 2.0

Depuis 2012, les jacinthes d'eau envahissent des centaines de km² du lac Tana, de même que les zones humides et ranchs entourant le lac.

Quelque deux millions d’Éthiopiens dépendent du lac ainsi que des zones humides et d'élevage adjacentes pour leur subsistance, selon l’Union pour la conservation de la nature et de la biodiversité (NABU), une ONG allemande dédiée à l'environnement et au développement durable dans la région. La prolifération de la jacinthe d'eau a des conséquences néfastes, surtout du côté ouest du lac, peuplé de pêcheurs, agriculteurs et éleveurs qui en dépendent pour leur activité.

Avec ses 2.156 km², cette nappe d'eau est le plus grand lac d’Éthiopie, et déborde d'attraits écologiques, culturels et historiques. Il est situé sur les hauts-plateaux de la deuxième plus vaste région administrative de l’Éthiopie, la région-Etat Amhara.

Sur le plan écologique, le lac Tana abrite des espèces rares et menacées d'oiseaux, comme la grue couronnée, ainsi que de nombreux migrateurs.

Le lac Tana se distingue aussi comme la source du Nil Bleu, qui coule vers l'ouest avant de se mêler au Nil Blanc à Khartoum, capitale du Soudan.

Le Nil Bleu et le Nil Blanc forment par leur confluence le plus long fleuve du monde, le Nil. Au long de son cours, le Nil est alimenté par de multiples rivières plus petites avant de couler vers le Nord et de pénétrer en Égypte, mais c'est du Nil Bleu qu'il reçoit plus de 80 % de ses eaux. Une primauté que le célèbre aventurier et géophysicien Pasquale Scaturro définit ainsi : “La richesse de l’Égypte est un don du lac Tana.”

Le lac symbolise aujourd'hui tout autre chose : la situation déplorable des ressources naturelles de l’Éthiopie au moment où une population nationale en expansion rapide voit croître ses besoins dans tous les domaines.

Détectées pour la première fois en 2012, les inflorescences massives de la jacinthe d'eau étaient alors confinées à des zones représentant environ 100 km² des eaux peu profondes et des rives du lac sur ses bords occidentaux. Depuis, la plante flottante croît rapidement, et dévore de vastes surfaces. Conséquence, l'étendue moyenne du lac dans la province occidentale de Dembiya diminue avec constance, ont dit des habitants au médias de l’État.

Selon des spécialistes interrogés par les médias officiels, depuis 2012 la jacinthe d'eau a doublé sa superficie pour atteindre 200 km², malgré la relative sécheresse de la saison hivernale de 2016 qui en a ralenti l'expansion.

La prolifération de cette espèce exotique invasive résulte de l'activité humaine sur le pourtour du lac Tana. D'après l’article écrit par deux académiciens, la croissance rapide de cette mauvaise herbe pernicieuse est provoquée par le ruissellement des eaux riches en nutriments des effluents urbains et agricoles, et les sous-produits de déchets industriels, qui menacent également les autres lacs éthiopiens comme le lac Hawasa et le lac Zeway.

Depuis 2015, UNESCO reconnaît le lac Tana parmi les sites du patrimoine mondial pour sa réserve unique de biosphère écologique, grâce à l'action de NABU pour garantir ce statut dans le cadre de son activité pour l'environnement dans la région. L'UNESCO a aussi reconnu la richesse historique, culturelle et religieuse de ses îles, aux liens profonds avec l’Église copte orthodoxe éthiopienne.

En effet, le lac abrite aussi des monastères et églises historiques. Leur relatif isolement sur les îles a contribué à leur préservation, mais alors que la dangereuse jacinthe d'eau menace d'obstruer le lac entier, leur survie est en jeu comme les moyens de subsistance de tous ceux qui vivent à côté du lac Tana et en dépendent pour ses ressources naturelles.