Réactions africaines à l'abdication du pape
dimanche 17 février 2013 à 16:26
Le Saint-Père, le pape Benoît XVI. Photo Catholic Church (England and Wales) sur Flickr, licence CC by-nc-sa/2.0
L'annonce par le Pape Benoît XVI de son intention d'abdiquer le 28 février 2012 a provoqué de nombreuses réactions en Afrique francophone, tant dans les médias traditionnels que sur les réseaux sociaux. L'admiration pour le pape prédomine. Et le souhait que certains dirigeants africains imitent son exemple.
Des avis variés, mais teintés d'admiration
Dans un billet bien documenté publié sur Togocouleurs, intitulé “Le Pape doit-il mourir Pape ?”, Charles Lebon a écrit :
La nouvelle est tombée ce 11 février comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. Ce coup aurait été moins violent si c’était le décès du pape, qui, dans ce cas et trop souvent prévisible, obligeait les journalistes à attendre sous les fenêtres du saint homme en agonie avec micro, camera et bougie. Mais ce n’était pas le cas. Il s’agit de la démission du souverain pontife au sens de : « renoncer à sa charge ».
Le blog de Diery Diallo cite les propos tenus par l'Abbé Jacques Seck de Dakar :
Je dis que je suis heureux que le Saint-Père (Pape Benoît XVI) ait pris cette idée personnellement. Les hommes de Dieu que nous sommes (…) ne sont pas des fonctionnaires qui travaillent. Je suis heureux que le Saint-Père à la tête de l’Eglise nous donne l’exemple. Les évêques, Cardinaux, Pape, ne sont pas des fonctionnaires, quand ils ne peuvent plus ils cèdent la place aux autres », a réagi Abbé Jacques Seck sur les ondes de la Rfm. Rappelons que le Pape Benoit XVI a annoncé sa démission de ses fonctions de Pape pour le 28 février 2013. Il a donné comme raison, son âge avancé qui ne lui permet plus d’exercer le ministère Pétrinien.
Sur la page Facebook de Radio France internationale, une radio très écoutée en Afrique francophone, de nombreuses réactions ont été postées lors de l'émission qui a été consacrée à l’évènement. En voici quelques unes.
Pour de nombreux Africains, leurs dirigeants devraient s'inspirer de l'acte courageux de Benoit XVI. Source photo:
commons.wikimedia.org
Depuis Conakry, en Guinée Hilal Sylla a écrit :
Pour peu que cela ait du sens, cette démission de Benoit XVI me renvoie au Film culte sur l'église et les illuminatis. Une façon de dire que l'église n'a plus de force dans un monde dominé par tant de perversion. Une question : la fin du monde n'est-elle pas proche?
Pour Samuel Azabho, depuis Kisangani en République démocratique du Congo :
Cette démission est normale par le fait de l'age. son pontificat est positif dans la mesure où il est le précurseur de la lutte contre la pédophilie. je pense qu'il était un homme de décision. Et celui qui doit venir après lui doit relever le défis de l'avenir de l'église catholique et de toute l'humanité peu importe sa race et ses origines.
Depuis Yaoundé, Ben Mbele fait remarquer que :
nous pouvons cependant dire ke le pontificat de benoit xv1 n'a pa été un fleuve trankil, de son discours sur l'islam et la violence en passant par le scandal des prêtres pédophiles et enfin du débat sur le mariage gay,au demeurant notons ke la décision salutaire de benoit xv1 fera un précédent car il lancera le débat sur la modification du droit canon en matière du mandat du pape, personnellement il ne faut pa trop attendre du nouveau pape en matière d’émancipation sur certains sujets car la plus part des cardinaux actuels ont été nommé par benoit xv1 et jean paul 2 eux très conservateurs.
Alpha Ulrick Marcellus depuis Brazzaville, en République du Congo, pense que :
La décision du Pape est courageuse. Il ne démissionne pas mais il renonce, il renonce au ministère pétrinien. Une décision qui n'est pas facile à prendre. Son pontificat a été à mon avis celui des grandes épreuves, des discours aux vérités sans détours et choquant. Benoit XVI à donné le meilleur de lui-même, dans la direction d'une Église en conflit avec un monde de plus en plus excentrique. Pour le futur Pape plaise à Dieu de choisir celui qui est apte, valide à prendre des décisions courageuses contre les déviations que le monde légalise pour préserver l'intégrité de la foi et de l'Église.
La BBC diffuse également des émissions spéciales vers l'Afrique francophone, relayées par des stations de radio locales. Sa page Facebook compte plus de 17 000 fans. Lors de son émission “Afrique en Direct“, du 16 février consacrée à cette démission, de nombreux Africains y ont publié leurs points de vue. Michel Djadji Anigbe depuis Abidjan, en Côte d'Ivoire, a écrit :
Relativement à la décision de démission du Pape, son motif me laisse perplexe et pantois. Comment un grand intellectuel tel que lui a pu accepter ce pontificat avec tous les sacrifices que cela demande. Surtout avec ce que son prédécesseur, le vénérable Pape Jean Paul II , a fait du sien. De plus, son argument est trop facile avec le scandale qui nous a été servi par l'affaire de son majordome. Et quand on sait aussi que le Vatican n'est pas ignorant et étranger à tous ce qui passe actuellement dans le monde.
Didier Didou Mady a posé une question intéressante :
Le rejet de la démission du Pape est-il envisageable au regard du droit canon? Quoi de plus normal que les touristes au Vatican visite à la fois le pape et l'ex-pape. Difficile d'avoir un pape infatigable!
Un exemple pour les dirigeants africains ?
L'Afrique compte un grand nombre de pays mal gérés. Pourtant, c'est sur ce continent aussi que l'on trouve les chefs d'Etat qui sont au pouvoir depuis le plus grand nombre d'années. Quelques exemples : Robert Gabriel Mugabe, 89 ans, au pouvoir au Zimbabwe depuis 1980, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, 71 ans, au pouvoir en Guinée équatoriale depuis 1979, Paul Biya, 80 ans au pouvoir au Cameroun depuis 1982, José Eduardo dos Santos, 71 ans, au pouvoir depuis 1979, Denis Sassou Ngesso, 80 ans, au pouvoir en République du Congo depuis 1979.
De nombreux Africains ont commenté la démission du Pape Benoît XVI en pensant à ce qui se passe sur leur continent. Josiane Kouaghe a écrit du Cameroun sur son blog :
Passés ces moments de disputes, les vraies questions s’imposent. Et les comparaisons ne tardent pas à suivre. «Ah…Il me rappelle Nelson Mandela. Tu te rappelles, en 1999, quand il a démissionné après seulement cinq ans? », demande Éric Ntomb, 64 ans, à son ami. «Tu parles Éric. C’est la même chose avec le pape. Il n’est là que depuis 2005. Si seulement nos dirigeants africains pouvaient faire comme lui», répond l’ami en poussant un long soupir. L’ami dit haut ce que des millions de personnes pensent bas. Et je vous arrête. Ne dites pas que le pape a démissionné parce qu’il est un homme de Dieu. Non! Il dirigeait le plus petit et puissant État du monde.
Josiane Kouagheu passe en revue la liste des Présidents africains qui ont démissionné volontairement de leurs fonctions, à savoir Ahmadou Ahidjo, du Cameroun en 1982, Léopold Sédar Senghor du Sénégal en novembre 1980 à l'âge de 74 ans, Julius Nyerere, de Tanzanie, en novembre 1985. Le plus célèbre de tous les chefs d'état africains à quitter le pouvoir volontairement est sans aucun doute Nelson Mandela, en 1999.
