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Les Angolais ricanent après le laborieux lancement du premier satellite de leur pays

jeudi 11 janvier 2018 à 11:42

Le lancement d'Angosat-1 a été diffusé en direct par Televisão Pública de Angola. Image: screengrab, Clubk Clubk / YouTube.

Le 25 décembre, le premier satellite angolais est entré en orbite. Le lancement a été suivi sur grand écran diffusant les images en direct accompagné de feux d'artifice sur Marginal de Luanda, l'une des principales avenues de la ville.

Baptisé Anglosat-1, le satellite est fabriqué en Russie, fruit d'un partenariat russo-angolais lancé en 2009, et destiné à offrir l'Internet à haut débit ainsi que des transmissions radio et télévision dans divers pays d'Afrique et d'Europe.

Cependant, quelques heures après son lancement depuis le Kazakhstan, le satellite a perdu la communication avec sa plate-forme terrestre et est resté silencieux pendant plusieurs heures.

Les Angolais ont traité le lancement et le pépin avec humour, mais ils ont également profité de l'occasion pour questionner les récits des médias étrangers et l'opportunité de dépenser de l'argent sur un satellite alors que le développement humain reste si médiocre dans le pays.

Les médias sociaux étaient pleins de réactions comiques à l'annonce des nouvelles du dysfonctionnement temporaire du satellite :

Les faiseurs de mèmes deviennent plus rapides à chaque fois. “Le satellite a utilisé une puce Movicel, c'est pourquoi il a perdu la connexion” [Movicel est un opérateur de téléphonie mobile en Angola]; “Le satellite a été trouvé quelque part à Kwanza-Sul [province d'Angola], il a détruit les véhicules du soba [chef de village] et de l'administrateur”

Hier, les Angolais ont lancé des feux d'artifice pour célébrer le lancement du premier satellite de leur pays.
Aujourd'hui, l'agence spatiale russe a perdu le contact avec le satellite.

Moscou a perdu le signal du satellite angolais” maintenant il n'y a de porno pour personne

Doit être sans système …
Après tout, le satellite est angolais

Certains, cependant, ont critiqué l'attention portée à la perte provisoire de contact avec le satellite – qui a finalement été rétabli deux jours plus tard, selon le fabricant russe RSC Energia.

Tant de médias internationaux ne s'intéressent soudainement qu'à l'échec du satellite angolais … la haine et la volonté de ne pas voir un pays africain se démarquer sont si grandes ?

L'Angola est devenu le septième pays africain, aux côtés de l'Algérie, de l'Afrique du Sud, de l'Égypte, du Maroc, du Nigeria et de la Tunisie, à disposer d'un satellite de communication en orbite.

Le gouvernement angolais révèle qu'il a investi 320 millions de dollars américains dans le projet, dont il prévoit qu'il se rentablisera en deux ans. Selon le ministre d'État Carvalho da Rocha, les opérateurs de télécommunications angolais dépensent, ensemble, entre 15 et 20 millions de dollars américains chaque mois en location d'espace sur d'autres satellites pour la région.

En outre, le ministre a déclaré que 40 % de la capacité du satellite avait déjà été vendue, pour être utilisée par les opérateurs nationaux de télécommunications, tandis que le reste devrait être loué à d'autres opérateurs en Afrique et dans certaines parties de l'Europe. Angosat-1 devrait rester en orbite pendant 15 ans :

Images exclusives d'Angosat.
Le satellite angolais sera lancé le mois prochain. Les techniciens mettent la dernière touche à Angosat.

Cependant, certains ont eu des interrogations, comme le militant Pedrowski Teca:

Pergunto:
1 – O que é que a bandeira russa 🇷🇺 está a fazer no nosso satélite?
2 – Por que que a bandeira da Rússia 🇷🇺 está em primeiro plano e a de Angola 🇦🇴 em segundo lugar?
3 – Por que que as escritas no satélite 🛰 estão em língua estranha (parecendo russo)?

Je demande:
1 – Que fait le drapeau russe sur notre satellite?
2 – Pourquoi le drapeau russe est-il le plus important et celui de l'Angola, à la deuxième place?
3 – Pourquoi l'inscription sur le satellite est dans une langue étrangère (apparemment du russe)?

Pour Raúl Danda, le satellite n'est pas sa priorité en tant que citoyen angolais :

[…] Se é um motivo de orgulho, porque não é qualquer país que leva um satélite próprio ao espaço, o episódio lembra-me o CAN 2010: muita banga para nada ou quase nada. Muitos dos estádios que custaram milhões e milhões de dólares (de custo “custado” e de custo roubado) andam aí com o capim a crescer para pasto de cabritos. Naquele momento, o Executivo do Presidente Eduardo dos Santos (agora “ex”) pretendia apenas mostrar que “nós também podemos”! Desta vez a coisa repete-se. Lançar um satélite é uma coisa boa, super boa até. Mas é preciso primeiro fazer outras realizações. Comprar um BMW quando, em casa, os filhos não têm pão, mais do que absurdo é irracional. Lançar satélite no espaço quando no chão não há medicamentos, comida, educação de qualidade, saúde digna desse nome, saneamento básico…. e outras coisas realmente básicas, parece-me ser de uma irracionalidade terrível…

[…] C'est un motif de fierté, car ce n'est pas n'importe quel pays qui envoie son propre satellite dans l'espace, cet épisode me rappelle la Coupe d'Afrique des Nations 2010 ; beaucoup de prétention pour rien ou presque rien. Beaucoup de stades qui coûtent des millions et des millions de dollars (payés et volés) restent là avec l'herbe qui pousse pour que les chèvres broutent.

A cette époque, le gouvernement du président Eduardo dos Santos (maintenant “ex”) avait pour seul but de montrer que “nous pouvons aussi” ! Cette fois la chose se répète. Lancer un satellite c'est bien, même très bien. Mais il faut d'abord réaliser d'autres choses. Acheter une BMW pendant que, à la maison, les enfants n'ont pas de pain, est, plus qu'absurde, irrationnel. Lancer un satellite dans l'espace alors qu'il n'y a pas de médicaments, de nourriture, d'éducation de qualité, de soins de santé dignes de ce nom, d'assainissement de base … et d'autres choses vraiment basiques, me semble une terrible irrationalité…

Un autre militant angolais a demandé pourquoi le gouvernement avait invité des leaders religieux à assister à la cérémonie de lancement :

Ces “chefs religieux” qui ont été amenés à Moscou, en Russie, pour le lancement du satellite qui a déjà disparu, étaient là pour faire quoi ? Il semble que ce gouvernement n'a pas cessé de dépenser de l'argent inutilement ou ceux-ci [les chefs religieux] ont-ils payé leur voyage ?

Entre fermetures de sites et débit réduit, les utilisateurs d'Internet au Yémen font face à la censure en plein coeur du conflit

jeudi 11 janvier 2018 à 11:07

Une attaque aérienne frappe la capitale yéménite Sana'a le 11 mai 2015. Photo prise par Ibrahem Qasim (CC BY-SA 2.0)

Lorsqu'elle apprit que de violents affrontements avaient éclaté entre les rebelles houthis et les forces restées loyales à l'ancien président du Yémen, Ali Abdullah Saleh, une jeune femme nommée Amal a immédiatement essayé d'appeler chez elle. Elle était à l'université hors du pays à ce moment-là, mais elle se tenait toutefois au courant des affrontements survenus à côté de la maison familiale dans la capitale Sana'a.

Elle a essayé de les contacter par le biais de diverses applications mobiles et fut surprise de ne pas avoir de nouvelles ou de ne pas les voir connectés sur Facebook. Elle commençait déjà à imaginer le pire jusqu'au moment où elle a finalement réussi à les joindre par téléphone avant la fin de la journée.

L'expérience vécue par Amal et par beaucoup d'autres nous donne un aperçu des effets nuisibles que peuvent avoir des interruptions de service internet durant un conflit armé.

Depuis trois ans environ, le Yémen est plongé dans un conflit dans lequel les rebelles houthis cherchent à reprendre le pouvoir au gouvernement internationalement reconnu du Président Abdrabbuh Mansour Hadi, ce dernier étant soutenu par une coalition menée par l'Arabie Saoudite. Les forces loyales à l'ancien Président Ali Abdullah Saleh (qui fut destitué à la suite des manifestations du printemps arabe de 2011) ont tout d'abord combattu les Houthis, avant que Saleh ne se décide à rejoindre la coalition rebelle pour finalement s'en détourner et renouer le dialogue avec l'Arabie Saoudite en décembre 2017. Les Houthis finiront par assassiner Saleh quelques jours plus tard, le 4 décembre 2017.

Le 7 décembre, quelques jours après la fin de l'affrontement entre Houthis et les forces loyales à Saleh, les internautes se retrouvaient ainsi pris au dépourvu par une coupure d'Internet de 30 minutes, entre 22h30 et 23h00 heures locales.

Internet a subi de nombreuses pannes au Yemen alors que la guerre civile ne semble pas cesser. YemenNet (AS30873) est totalement hors-ligne depuis 30 minutes environ.

Si la connexion à Internet fut plus tard réactivée, les accès à Facebook (un des sites les plus populaires au Yémen selon Alexa, le service d'analyses de données du trafic sur le web), Twitter et aux applications de messagerie instantanée WhatsApp, IMO et Telegram (qui fut précédemment suspendue en 2016 avant d'être réactivée début 2017) étaient au même moment bloqués. Les sites des organes de presse affiliées à l'ancien Président Saleh et au parti politique qu'il avait fondé, le Congrès Général du Peuple, voyaient également leurs accès interdits.

Ces blocages ont été mis en place à l'initiative des Houthis, ces derniers contrôlant la capitale Sana'a et s'étant emparés du ministère des Communications et de la Technologie d'Information. Le ministère contrôle l'ensemble des serveurs DNS du pays ainsi que son seul fournisseur d'accès internet, YemenNet.

Bien que YemenNet ait levé son embargo sur les réseaux sociaux et les applications de messagerie six jours plus tard, le 13 décembre, le débit internet restait sensiblement plus lent que la normale.

 La connexion internet la plus lente au monde

Le Yémen possède déjà la vitesse de début la plus basse au monde d'après Akamai, un réseau de diffusion de contenu et fournisseur de services cloud basé aux États-Unis. Le rapport d'Akamai pour le dernier trimestre de 2016 conclut que “malgré une hausse trimestrielle de 85% à 1,3 Mbps [mégaoctets par seconde], le Yémen est resté le pays qualifié avec la connexion moyenne la plus basse.”

En juillet 2016, le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies a adopté une résolution historique pour condamner les coupures d'Internet comme des violations des droits de l'homme en tant que telles. Pendant des périodes de guerre, les atteintes à Internet et aux plateformes de communication peuvent mettre les droits fondamentaux encore plus en péril.

D'après Fahmi Al-Baneth, président de l'antenne yéménite pour l'Internet Society (ISOC), “la disponibilité de l'accès à Internet lors de conflits armés est plus importante que pour des circonstances normales”. Il détaille ainsi sa pensée :

Lors de conflits armés, les gens utilisent Internet pour connaître la situation autour d'eux, rester au courant des dernières évolutions concernant leur sécurité immédiate, communiquer avec les autres et s'assurer qu'ils vont bien, mais aussi pour demander de l'aide et une prise en charge médicale d'urgence.

D'après un essai mené le 18 décembre, par le biais du service de test de vitesse internet Fast.com, Internet au Yémen fonctionnait avec une vitesse de téléchargement de 130 kilooctets par seconde (soit 0.13 mégaoctets par seconde). C'est dix fois moins rapide que la vitesse moyenne, qui est elle-même déjà très lente au quotidien. La réduction de la vitesse du débit Internet est l'une des mesures employées par les régimes pour réprimer les droits numériques des utilisateurs.

Al-Baheth pense également qu'en finir avec le monopole de YemenNet comme fournisseur de services Internet pourrait être une solution pour résoudre les problèmes actuels liés à l'accès à Internet au Yémen.

Un rapport du SMEX, un groupe de protection des droits d'Internet basé à Beyrouth, précise un peu plus la situation :

Selon plusieurs sources en ligne qui se plaignaient d'un accès Internet particulièrement lent, les Houthis auraient volontairement régulé et ralenti Internet bien avant la coupure de jeudi. Dans un entretien avec SMEX, Walid al-Saqaf, le co-fondateur et président de ISOC-Yémen, déclare ainsi que YemenNet ralentit régulièrement Internet et que cette pratique a également continué pendant ces deux coupures.

“Un débit lent interfère avec une utilisation efficace d'Internet pour communiquer : par exemple lorsqu'un utilisateur a besoin de quinze minutes, voire parfois plus, pour envoyer un mail basique avec des pièces jointes, ou lorsqu'il est impossible d'utiliser YouTube pour partager des informations, ” déclare Amr Mostafa, coordinateur de projet à l’Organisation yéménite pour le développement et l'échange technologique. “De telles fonctions deviennent un privilège, un avantage inaccessible pour la plupart des utilisateurs internet au Yémen.”

Récemment, les utilisateurs yéménites se sont efforcés de trouver des outils de contournement pour éviter la censure. Malgré le fait qu'ils ralentissent parfois la vitesse de connexion, certains Yéménites utilisent ainsi des réseaux virtuels privés (VPN) pour communiquer et échanger des informations avec leurs familles et amis à l'intérieur et en dehors du Yémen. Puisqu'elle ne faisait pas partie des applications bloquées, un certain nombre d'utilisateurs ont également commencé à se servir de l'application de messagerie sécurisée Signal.

Les utilisateurs qui chercheraient à identifier ou reporter la censure exercée sur certains sites ou plateformes peuvent le faire via OONI, un projet de logiciel et d'application gratuit alimenté par Tor et qui “cherche à renforcer les efforts décentralisés visant à accroitre la transparence au regard de la censure sur Internet autour du monde.”

 Un passif en matière de restriction à l'expression numérique

Les autorités yéménites possèdent un long passif en matière de violations des libertés d'expression et d'opinion, ainsi que du droit d'accès à l'information. De telles atteintes nous ramènent à la présidence Saleh, quand le gouvernement commençait à bloquer les sites affiliés à l'opposition de 2005 à 2011. La censure sur l'ensemble des sites fut ensuite levée en 2012. Malgré tout, depuis le commencement de la guerre récente en 2015, les Houthis qui contrôlent désormais la capitale et les serveurs DNS ont commencé à bloquer l'accès à plusieurs sites d'informations régionaux qui s'opposent à leurs politiques. Ils ont ainsi interdit Telegram et Instagram pendant plusieurs mois alors que WhatsApp restait bloqué pendant plusieurs jours au cours du mois d'octobre de la même année.

Internet a été mis à disposition du grand public yéménite pour la première fois en 1996 par l'unique fournisseur d'accès YemenNet, une compagnie affiliée au ministère des Communications et de la Technologie d'Information (contrôlé par les Houthis). Selon la Public Telecommunication Corporation (la compagnie étatique qui gère les réseaux fixes et mobiles), il y avait 4,2 millions d'utilisateurs au Yémen à la fin 2015. D'après Internet Live Stats, ce chiffre aurait augmenté pour atteindre 6.773.228 utilisateurs en juin 2016, soit 24,7 % de la population du pays.

Le gouvernement internationalement reconnu du Président Hadi se trouve actuellement dans le gouvernorat d'Aden et cherche à connecter les provinces qu'il contrôle par l'installation de serveurs DNS à Aden et la liaison de la province à un câble sous-marin international. En cas de succès, cette mesure pourrait mettre fin au monopole des Houthis dans le secteur des télécommunications. Cela pourrait également aboutir à la fin de la censure et une accélération du débit Internet dans les zones contrôlées par le gouvernement Hadi. A moins bien sûr que ce dernier ne choisisse également de pratiquer la censure, la surveillance et le ralentissement de la vitesse de connexion.

Une version arabe de cet article a d'abord été publiée sur le blog d'ASL19.org le 20 décembre. Global Voices a de adapté et republié cet article à la demande de son auteur, Bahseer Alsamawi, un activiste yéménite qui documente les violations des droits de l'homme perpétrées contre les civils pendant le conflit en cours.

Que se passe-t-il à Maekelawi ? Récits de torture dans ce centre de détention éthiopien dont la fermeture a été annoncée

mercredi 10 janvier 2018 à 21:03

Tous les membres de Zone9 à Addis-Abeba, 2012. De gauche à droite: Natnael, Abel, Befeqadu, Mahlet, Zelalem et Atnaf. Photo avec l'aimable autorisation d'Endalk Chala.

Cette semaine, le Premier ministre éthiopien Hailemariam Desalegn a annoncé que la prison Maekelawi, l'un des centres de détention les plus célèbres du pays, allait bientôt fermer ses portes.

Cette annonce a apporté des sentiments mêlés aux nombreux Éthiopiens qui ont survécu aux pratiques d'interrogatoire notoirement brutales utilisées à Maekelawi. Parmi eux, Befeqadu Hailu, un auteur de Global Voices et blogueur sur les droits de l'homme.

En 2014, Befeqadu a été arrêté avec huit de ses confrères blogueurs et journalistes, tous en raison de leur participation à un blog collectif intitulé Zone9, où ils décrivaient les obligations de leur gouvernement en matière de droits de l'homme et de droit constitutionnel.

Les neuf écrivains ont été arrêtés et détenus à Maekelawi sans inculpation pendant près de douze semaines en 2014, avant d'être inculpés en vertu de la Proclamation antiterroriste du pays.

Befeqadu a ensuite écrit un récit de première main de son expérience au centre de détention, que nous partageons ici dans le but de mettre au grand jour la dure réalité de Maekelawi sous le gouvernement éthiopien actuel.

Dans une lettre envoyée en août 2014 à Global Voices par les avocats des blogueurs, Befeqadu écrivait :

The idea of setting a foot in the compound of the ill-famed Maekelawi detention center gives a cold shiver to anyone who knows its history. But my sheer optimism and trust that the brutal and inhumane treatment of people was a distant memory saved me from trembling as I was escorted into the compound. The same was true of my friends, I suppose. What is more, we had nothing to be scared of, because we are neither undercover agents nor members of armed forces. We are just writers.

But as soon as I arrived at Maekelawi, [other] detainees informed me that I had been placed in one of the notorious sections of the detention center, known as “Siberia”. In less than a week, I felt like I was living in the middle of an account from the 2013 Human Rights Watch report entitled “They Want a Confession”.

L'idée de mettre un pied dans l'enceinte du centre de détention mal famé de Maekelawi donne le frisson à quiconque en connaît l'histoire. Mais mon optimisme absolu et ma confiance dans le fait que le traitement brutal et inhumain des gens était un lointain souvenir m'empêchaient de trembler lorsque je fus escorté dans l'enceinte. La même chose était vraie pour mes amis, je suppose. De plus, nous n'avions rien à craindre, car nous ne sommes ni des agents infiltrés ni des membres des forces armées. Nous sommes juste des écrivains.

Mais dès que je suis arrivé à Maekelawi, [d'autres] détenus m'ont informé que j'avais été placé dans l'une des sections les plus célèbres du centre de détention, connue sous le nom de «Sibérie». En moins d'une semaine, j'avais l'impression de vivre au milieu d'un récit tiré du rapport 2013 de Human Rights Watch intitulé «Ils veulent des aveux».

Le documentaire “They Want a Confession” (Ils veulent des aveux) traite des graves violations des droits de l'homme, des techniques d'interrogatoire illégales et des mauvaises conditions de détention au centre de détention de Maekelawi à Addis-Abeba, à partir d'entretiens avec d'anciens détenus et des membres de leur famille. Parmi les personnes emprisonnées à Maekelawi figurent des dizaines de d'opposants politiques, de journalistes, d'organisateurs de manifestations et de prétendus partisans des insurrections ethniques.

Befeqadu a décrit les méthodes d'interrogation à Maekelawi comme étant “plus axées sur la domination et la soumission que sur la confiance ou la créativité”.

“S'ils ne parviennent pas à vous extorquer des informations de cette manière, ils forcent les aveux en vous frappant à coups de poing et en vous battant, en vous obligeant à faire des exercices physiques intensifs et en vous flagellant”, écrivait-il. “J'ai parlé avec des détenus qui avaient subi des procédures encore plus pernicieuses qui étaient clairement des violations de leur vie privée. Certains détenus ont été contraints de se déshabiller et de se mettre debout nus, ou de faire des pompes jusqu'à l'aube. “

Il continuait, décrivant comment lui et ses collègues ont été forcés d'avouer :

In our case, finally we were made to plead guilty. We confessed under duress. We could not bear the ceaseless brutal and psychologically degrading pressure. We could not carry on surviving the hell of Maeklawi. We ended up telling our interrogators what they wanted to hear. To their delight, we added as many self-incriminating phrases as possible. But phrases like “yes, we wanted to incite violence” never pleased them. So they rewrote our confessions to fit their frame. Some of us tried to explain. Others had to endure beatings. But at last we succumbed to the pressure and signed the carefully scripted confession pages, with the exception of our colleague Abel, who refused to sign at that time. He has survived the pain he has endured since, and his confession, when finally extracted, is completely untrue, to say nothing of ours.

Now we know that torture is the part of the Maekelawi ceremony that reveals the “truth” of a crime. I had long thought police interrogations were complex, involving sophisticated skills, knowledge and psychological tactics to establish facts. I now know that police interrogations in Maekelawi are not so elaborate. In fact they are simple. They are like machines that produce guilt in the detainees.

At Maekelawi, the driving principle of police interrogations is that you are guilty unless proven otherwise. Your pleas for innocence – or even for explanation – fall on deaf ears.

Dans notre cas, pour finir on nous a fait plaider coupables. Nous avons avoué sous la contrainte. Nous ne pouvions supporter la pression brutale et psychologiquement dégradante incessante. Nous ne pouvions pas continuer à survivre à l'enfer de Maeklawi. Nous avons fini par dire à nos interrogateurs ce qu'ils voulaient entendre. Pour leur plus grand plaisir, nous avons ajouté autant de phrases auto-accusatrices que possible. Mais des phrases comme “oui, nous voulions inciter à la violence” ne les contentaient jamais. Alors ils ont réécrit nos confessions pour les adapter à leur canevas. Certains d'entre nous ont essayé de s'expliquer. D'autres ont dû endurer des coups. Mais nous avons fini par succomber à la pression et signé les pages de confession soigneusement écrites, à l'exception de notre collègue Abel, qui a refusé de signer à ce moment-là. Il a survécu à la douleur qu'il a endurée depuis, et sa confession, une fois finalement extraite, est complètement fausse, pour ne rien dire des nôtres.

Nous savons maintenant que la torture est la partie du cérémonial à Maekelawi qui révèle la “vérité” d'un crime. J'ai longtemps pensé que les interrogatoires de police étaient complexes, impliquant des compétences sophistiquées, des connaissances et des techniques psychologiques pour établir des faits. Je sais maintenant que les interrogatoires de police à Maekelawi ne sont pas si élaborés. En fait, ils sont simples. Ils sont comme des machines à produire de la culpabilité chez les détenus.

A Maekelawi, le principe directeur des interrogatoires de police est que vous êtes coupable jusqu'à preuve du contraire. Vos plaidoyers d'innocence – ou même d'explication – tombent dans des oreilles de sourds.

Befeqadu a passé 18 mois dans les prisons éthiopiennes avec ses collègues avant d'être libéré en octobre 2015. Lui et ses collègues ont été acquittés sans jamais comparaitre devant un tribunal.

Les membres de Zone9 se sont réjouis de la libération de Befeqadu Hailu (deuxième à partir de la gauche avec une écharpe) en octobre 2015. Photo partagée sur Twitter par Zelalem Kiberet.

Befeqadu a également présenté les récits qu'il avait entendus de ses compagnons de cellule, qui avaient été amenés à Maekelawi après avoir souffert d'épreuves encore plus graves dans d'autres centres de détention du pays. “Ces détenus ont souffert d'une barbarie diabolique telle que l'extraction brutale des ongles de leurs doigts, la flagellation et la cagoule”, écrit-il.

The information extracted from detainees in the unnamed detention center is then verified through more interrogation at the pre-trial detention center. Detainees never know where they were taken for this brutal investigation because they are hooded throughout. The unnamed detention centers are like black holes.

Les informations extorquées aux détenus dans le centre de détention sans nom sont ensuite vérifiées par un interrogatoire plus poussé au centre de détention d'avant-procès. Les détenus ne savent jamais où ils ont été emmenés pour cette enquête brutale parce qu'ils sont cagoulés de bout en bout. Les centres de détention sans nom sont des trous noirs.

Faisant référence aux violations des droits de l'homme sous le régime du Derg [fr] dont le gouvernement actuel de l'Éthiopie cherche maintenant à s'éloigner, Befeqadu a comparé ces expériences à celles du passé.

“Il s'avère que l'angoisse des prisonniers éthiopiens, quelque chose qui semblait si lointain dans la mémoire, n'est pas si loin après tout”, a-t-il dit.

Répondant aux nouvelles de cette semaine, Befeqadu a écrit sur Twitter :

Le Premier ministre Hailemariam a déclaré: “Maekelawi était une maison de torture sous le régime du Derg” ; c'est trop peu. Je suis une victime vivante de cette chambre de torture sous son règne. À l'époque, je souhaitais me suicider au lieu de voir des interrogateurs le lendemain. Ces types rendent le pardon difficile.

Befeqadu et ses deux collègues Atnaf et Natnael ne sont pas vraiment libres, au sens propre du terme. Bien que leurs accusations de terrorisme aient été retirées, ils attendent des décisions sur d'autres chefs d'accusation, tous déclenchés par leurs critiques pacifiques du pouvoir.

Lire aussi [en anglais] :

Encore un journaliste éthiopien mort en exil

mercredi 10 janvier 2018 à 11:08

Ibrahim Shafi. Photo partagée sur Twitter par Abiye Teklemariam Megenta.

Dans un de ses derniers commentaires publics, le journaliste éthiopien Ibrahim Shafi a écrit sur sa page Facebook: “Réveillez-moi quand j'aurai un État”.

Deux semaines plus tard, Shafi mourait à Nairobi, au Kenya. Son commentaire a mis en lumière le lourd bilan individuel de la persistante crise politique éthiopienne qui a balayé le pays au cours des trois dernières années, conduisant Ibrahim à l'exil.

Ibrahim a travaillé comme journaliste couvrant le sport et la politique pendant près d'une décennie, jusqu'à ce qu'il soit obligé de fuir en 2014. Ibrahim, qui avait 40 ans au moment de sa mort, n'était pas seul. Il est parti pour Nairobi, au Kenya, en juin 2014, suivant un chemin emprunté par des centaines de journalistes éthiopiens au cours des vingt dernières années.

Selon des données du Comité pour la protection des journalistes, le gouvernement éthiopien a contraint à l'exil [fr] plus de journalistes que n'importe quelle autre nation en Afrique.

Les journalistes éthiopiens fuient leur pays souvent parce qu'ils craignent la prison et violence. En prélude aux élections de 2015, le parti au pouvoir, le Front démocratique révolutionnaire des peuples éthiopiens (EPRDF) a arrêté et accusé des journalistes et des blogueurs de crimes liés au terrorisme, parfois dans leurs écrits ou même leurs publications sur Facebook ou Twitter. Ils peuvent également faire face à des menaces extrajudiciaires et à la torture.

Pour Ibrahim, de telles menaces étaient familières. Près de dix ans avant de quitter son pays natal, il a été arrêté et battu par la police lors des violences post-électorales de 2005. Ses amis disent que la police l'a torturé si brutalement qu'une de ses jambes est restée définitivement handicapée.

Ibrahim Shafi. Photo : Diplômés du département de Sciences politiques et de relations internationales de l'Université d'Addis-Abeba.

Avant d'aller au Kenya, Ibrahim a vécu plusieurs vies créatives à Addis-Abeba, capitale de l'Éthiopie, où il est né en septembre 1977. Diplômé du Département des sciences politiques de l'Université d'Addis-Abeba en 2001, il a enseigné l'éducation civique aux lycéens. vénéré par ses élèves pour son travail acharné et son dévouement.

Il a également acquis une réputation de journaliste indépendant respecté et brillant. Il a été rédacteur en chef adjoint dans l'un des principaux journaux sportifs éthiopiens, ce qui en a fait une voix critique dans le journalisme sportif du pays. Il était une vedette des émissions de radio sur les sports à forte croissance à Addis-Abeba. Parallèlement à sa brillante carrière de journaliste sportif, il était éditorialiste, avant d'en devenir rédacteur en chef, d'Addis Guday, un hebdomadaire aujourd'hui disparu.

À Nairobi, Ibrahim a rejoint d'innombrables autres Éthiopiens qui ont été forcés de quitter leur pays d'origine, fuyant la persécution politique.

Alors que l'exil déjà en soi peut être une source de souffrance, le gouvernement éthiopien est connu pour rendre les choses encore plus difficiles en envoyant des agents de renseignement pour faire taire les membres des groupes dissidents exilés.

Malgré ces difficultés, Ibrahim a clairement fait savoir qu'il était incapable de se tenir tranquille. Il restait connecté à une vie en Éthiopie qui devait parfois lui sembler lointaine. Il partageait ses frustrations et ses joies sur sa page Facebook.

Le 3 janvier 2018, deux semaines après avoir écrit sa remarque prophétique sur Facebook, Ibrahim Shafi est décédé. La cause de sa mort n'a pas été rendue publique, mais ses proches amis au Kenya ont déclaré que vivre en exil avait eu des conséquences néfastes sur son bien-être physique. Certains ont suggéré que les blessures qu'il a subies de la part de la police éthiopienne ont pu contribuer à sa mort.

Peu de temps avant son décès, Ibrahim avait conclu le long et éreintant processus de sélection pour être réinstallé en tant que réfugié aux États-Unis, avant que l'administration du Président Trump ne le lui annule, ce qui rend sa mort prématurée encore plus tragique.

La petite blogosphère éthiopienne bourdonne sur la disparition d'Ibrahim depuis la semaine dernière, et sa mort est devenue un sujet tendance sur le plan local. Beaucoup de gens à travers le pays qui l'ont su avaient réagi à la nouvelle tandis que d'autres journalistes exilés ont exprimé leurs condoléances.

C'est déchirant d'apprendre la mort de mon ami très cher, Ibrahim Shafi. Son énergie, son amour pour les discussions, son esprit, son espièglerie, sa chaleur et son mépris pour l'autocratie me manqueront. Sa récompense pour avoir eu de la conscience dans un pays qui la criminalise a été la torture et la mort en exil.

Tom Rhoades, journaliste et ancien membre du personnel du Comité pour la protection des journalistes, a écrit :

It is with a heavy heart that I learn my friend Ibrahim Shafi from Ethiopia has passed away. Last time I saw him was a couple years ago at my house…we had a small party…no clue what we were celebrating. My final memories of Ibrahim were jovial –but I knew he and many other Ethiopian journalists in exile were experiencing huge challenges. The lack of work / opportunities, the constant harassment from local police and fear of Ethiopian security –many colleagues that I knew via email whose projects and words suggested a vibrant, active life grew listless and disconsolate while in exile. The journalist I would meet from Addis, forced to flee a hypersensitive oligarchy, would appear very different from the correspondences we previously shared from their home. I daresay colleagues told me Shafi was struggling here and I kept telling myself that “I must catch up with this guy”. Now it's too late. If only I had done more. R.I.P. Ibrahim Shafi Ahmed. You are greatly missed.

C'est le cœur lourd que j'apprends que mon ami Ibrahim Shafi d'Ethiopie est décédé. La dernière fois que je l'ai vu il y a quelques années chez moi … nous avons fait une petite fête … aucune idée de ce que nous célébrions.
Mes derniers souvenirs d'Ibrahim sont joviaux – mais je savais que lui et de nombreux autres journalistes éthiopiens en exil connaissaient d'énormes difficultés.
Le manque de travail et d'opportunités, le harcèlement constant de la police locale et la peur des services de sécurité éthiopienne – de nombreux collègues que je connaissais par e-mail dont les projets et les paroles suggéraient une vie active dynamique sont devenus prostrés et inconsolablesen exil.
Les journalistes d'Addis que je rencontrais, contraints de fuir une oligarchie hypersensible, se révvèleraient très différents de ceux avec qui je correspondais étant chez eux. Je crois bien que des confrères m'ont dit que Shafi sétait à la peine ici et que je me disais toujours «je dois rattraper ce type». Maintenant c'est trop tard. Si seulement j'avais fait plus. RIP Ibrahim Shafi Ahmed. Tu vas grandement nous manquer.

Le journaliste sportif éminent Mensur Abdulkeni a écrit sur sa page Facebook :

Words fall short of expressing my sorrow for your loss! Those hard days we shared together will never be forgotten. Goodbye the humble one, my beloved colleague and friend! Rest in peace Ibro!

Les mots sont loin de pouvoir exprimer mon chagrin de t'avoir perdu ! Ces jours difficiles que nous avons partagés ensemble ne seront jamais oubliés. Au revoir l'humble, mon cher confrère et ami ! Repose en paix Ibro !

Un fonds commémoratif en ligne créé sur GoFundMe a permis de recueillir plus de 10 000 dollars américains en quelques jours pour la mère d'Ibrahim, qui vit à Addis-Abeba.

Le projet de budget qui a embrasé la contestation en Iran

mardi 9 janvier 2018 à 18:45

Manifestation le 1er janvier à Téhéran pour protester contre la mauvaise situation économique. Photo IRNA news with the rights to republish.

This piece was originally published on January 8, 2017, on the website of Arseh Sevom, a non-governmental organization that promotes peace, democracy, and human rights for Persian-speaking communities.

A budget proposal that many workers and struggling households feel doesn't recognize their needs is at the heart of protests in the Islamic Republic of Iran.

Protests against the budget bill began as soon as it was introduced on 10 December. Teachers, bus drivers, unions, and retired people were among the first to take to the streets in front of parliament.

It was the first time that an entire draft budget was published at once. “By publishing the entire budget at once,” journalist Mostafa Khosravi told Global Voices, “the corruption at the heart of the system was more apparent.”

There are questions about funds going to religious and cultural organizations that lack transparency and accountability. Many of those organizations are unknown to many in Iran.

It's widely believed the national protests began in the north-eastern city of Mashad. However, 10 days before the break out of the national protest movement, citizens were already publicly expressing their anger on the streets at the draft budget. On the message sharing app Telegram, member of parliament Mohammad Taghi Akbarnejad shared his experience walking anonymously among people demonstrating in front of the parliament building:

در این حین بود که خانم ۵۵-۶۰ ساله ای که از سر و وضعش پیدا بود که هنوز از خودش نا امید نیست، با تندی جلو آمد و پرسید: شما نماینده مجلسید؟ گفتم: نخیر. بنده هم مثل شما مراجعه کننده هستم! گفت: آقا شما را به خدا اگر دستتان می رسد به اینها بگویید: من غلط کردم رفتم آموزش و پرورش. من گداخانه رفتم! به آقای خامنه ای بگویید به رئیس جمهور بگویید به هر کسی که دستتان می رسد بگویید ما واقعا بریده ایم. ما این انقلاب را نمی خواهیم. ما از شما آخوندها متنفریم!… زن ۶۰ ساله ای در دو قدمی من با یک آرامش آکنده به غروری گفت: حاج آقا عبا قبایتان را بذارید توی صندوقچه، مردم به خونتان تشنه اند!!! من به روی خودم نیاوردم. با آرامش به حرف ها گوش می دادم و ابراز همدردی می کردم.

I was in the middle of the protests, and a woman in her late 50s came to me and asked, ‘Are you an MP?’ I answered, ‘I am here like you.’ She told me, ‘If you can go to parliament, tell them I made a mistake becoming a teacher. You’ve turned as all into beggars. Please tell Mr. Khamenei, tell the president, tell everyone, tell them we are desperate. We don’t need this revolution. We hate the clerics.’

Later a woman in her 60s approached me calmly to tell me to hide my clerical robe. ‘The people are thirsty for your blood!!!’

I didn’t take any of this personally, I tried to show solidarity.

For many, the draft budget promises to exacerbate already desperate economic conditions.

Iran’s foreign policy is a particular target of anger. Protesters are irate that money is being directed to support wars in Syria and Yemen, as well as proxy actors in other countries such as Lebanon. One of the chants that has been heard in past demonstrations and again in these is: “Neither Gaza nor Lebanon, I give my life only for Iran.”

If parliament passes an increase on gasoline prices, the Revolutionary Guards will also receive a significant increase in funding: a 120% increase. The budget of Iran's militia, the Basij, is nearly the same as that of the regular military. In addition, the budget of The Quds Force (the secret wing of Iran’s Revolutionary Guards and active in Syria) is completely hidden from the public. While these grievances against this imbalanced national spending is not new, it seems it has come to a fever pitch after the high hopes expected for economic prosperity following the lifting of sanctions in January 2016.

“It’s corruption that people are railing against,” said analyst and journalist Pezhman Tavahori in an interview. “People feel that ending corruption will alleviate poverty.”

One objective of Iranian government is to spread Shia Islam in the region. That's an expensive mission, in terms of lives and finances. On Buzzfeed, journalist Borzou Daraghi wrote:

Ever since the US invasion of Iraq in 2003, Iran — a Shiite state — has had its eyes on its Shiite-majority neighbor, intent on taking over the levers of power, commerce, and the military. But this is just one part of Iran’s wider goal: to establish territorial dominance from the Gulf of Aden to the shores of the Mediterranean.

Can Iran’s Supreme Leader compromise on foreign policy goals in order to address some income inequality and financial suffering? Tavahori thinks not:

The current demonstrations may be suppressed, but the anger won’t end. I don’t think the Supreme Leader will give up this policy. Poverty and corruption will continue and before long people will be back on the streets