PROJET AUTOBLOG


Global Voices (fr)

Archivé

source: Global Voices (fr)

⇐ retour index

Le système judiciaire de l'Equateur laisse  impunis les crimes de torture contre la communauté LGBTQ

lundi 19 mars 2018 à 19:46

Les institutions judiciaires créent de grandes difficultés pour les organisations LGBTQ en Equateur, laissant impunis les responsables de tortures dans les soi-disant “cliniques de déshomosexualisation”. Illustration de Mónica Rodríguez. Utilisée avec permission.

Le texte qui suit est le deuxième d'une série en trois parties, la republication d'un article écrit par Carlos E. Flores, publié à l’ origine par Connectas et adapté avec l'aide de l'auteur. L'article complet présente des données et des analyses de cas qui contrastent avec la position de l'Équateur devant les institutions internationales qui protègent les droits de l'homme. La première partie de cette série présente les témoignages des victimes de l'emprisonnement forcé et peut être lue ici [fr]. Cette partie-ci est consacrée à l'exposition des circonstances légales qui maintiennent les personnes LGBTI vulnérables, les laissant sujet à l'enlèvement et à la torture dans des “cliniques de déshomosexualisation”.

En une décennie, La Fundación Causana, une organisation dédiée à la défense des droits des personnes LGTBI en Équateur, a documenté une cinquantaine de cas d'homosexuels enfermés contre leur gré. Cette organisation estime qu'il n'y a pas assez d'informations sur la judiciarisation des cas présentés.

La situation a attiré l'attention des organismes des Nations Unies sur l'application la loi par l'État équatorien, qui punit d'emprisonnement la torture et les crimes de haine, conformément au Code pénal organique complet du pays.

Un rapport alternatif réalisé en décembre 2016 par plusieurs organisations sociales pour le Comité des Nations Unies contre la torture indique que la première plainte documentée contre les soi-disant “cliniques de déshomosexualisation” remonte à 2000.

Cependant, seulement six cas impliquant ces cliniques ont été traités par le Conseil de la magistrature, avec une condamnation des coupables dans seulement une affaire pour enlèvement. La sanction consistait en dix jours de prison correctionnelle et le paiement d'une amende (l'équivalent de 6 USD).

Pour cette raison et d'autres, les organisations LGBTQ insistent sur le fait qu'il n'y a pas de réponse efficace de la loi, et aucune information concluante n'est fournie par les autorités lorsque des précisions sur les condamnations sont demandées.

L'un des centres fermés par les autorités était le même que celui où Jonathan Vásconez a été détenu et a subi de violents abus et harcèlements en 2010 (le témoignage de Vásconez a été inclus dans la première partie [fr] de cette série).

Le centre a été fermé en avril 2012 après que les autorités gouvernementales eurent visité et pris la décision pour “violation des règles et des exigences” tel que publié sur le site Web du ministère de la Santé publique. Pas un mot n'a été dit sur les crimes subis par des gens comme Vásconez, qui dit avoir enduré des tortures physiques et psychologiques. Le seul défendeur jugé dans l'affaire, le directeur de l'institution, a été licencié.

Le Bureau du Procureur a d'abord jugé une accusation de torture, mais a inévitablement conclu sur une accusation d'enlèvement, selon le verdict prononcé par le tribunal. Le tribunal a rejeté l'accusation parce que, entre autres raisons, l'internement de la victime a été demandé par la famille.

L'Équateur vu par les organisations internationales de défense des droits de l'homme

En mai 2017, lorsque l'Équateur a diffusé l'Examen Périodique Universel III pour le Conseil des Droits de l'Homme (CDH) des Nations Unies, il n'a fourni aucune information concernant les sanctions contre les responsables de l'utilisation de “thérapies” de réorientation sexuelle. La même réponse a été donnée au CDH des Nations Unies par l'État équatorien dans l’Examen périodique universel II (EPU II) de 2012 et l’EPU I de 2008.

Toutefois, l'État équatorien a fourni des informations au Comité des droits de l'homme en août 2016. Il a été noté que l’Équateur avait judiciarisé quatre affaires, mais que le CDH “[regrettait] de ne pas avoir reçu d'informations détaillées sur les poursuites pénales engagées contre les responsables de ces traitements et leurs résultats.”

En janvier 2017, le Comité des Nations Unies contre la torture s'est déclaré

préoccupé par les allégations d'internement forcé et de mauvais traitements infligés à des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres dans des centres privés où sont pratiquées des «thérapies de réorientation sexuelle ou de déshomosexualisation». Malgré la fermeture de 24 centres de ce type, le Comité note avec inquiétude qu'à ce jour, les procédures engagées par le Bureau du Procureur n'ont abouti à aucune condamnation.

Au moment de la publication de ce billet, on ne sait pas quels sont les 24 centres fermés, les raisons pour lesquelles ils ont été fermés, qui étaient les individus coupables, ni s'ils ont continué à offrir des services sous un autre nom.

En juin 2017, le Conseil de la magistrature a fourni une liste de six cas survenus dans les provinces de Pichincha, Napo, Guayas, El Oro et Manabí, grâce à des informations obtenues auprès du service de gestion de la procédure du Bureau du Procureur.

Les affaires ne portent que les initiales des victimes et il est évident que la moitié des procédures ont été négligées. Les cliniques en question n'ont pas été spécifiquement identifiées et les raisons de l'enquête n'ont été clarifiées que dans trois cas : deux correspondaient à des tortures corporelles et un à un enlèvement.

Les données officielles sur les processus judiciaires sont rares et suscitent des inquiétudes parmi les organisations de défense des droits humains et la communauté LGBTQ.

Selon Ane Barragán de La Fundación Causana, le manque d'informations de la part du ministère public complique les choses :

Pour nous, société civile, il est très difficile d'obtenir tous ces détails. Selon un document publié dans le dernier EPU de l'Équateur, l'atelier de communication pour les femmes a déclaré que les sanctions contre ces centres étaient “essentiellement de nature administrative et qu'il n'y avait pas de données sur les affaires ayant fait l'objet de poursuites”.

Complication supplémentaire, les parents directs des victimes soutiennent souvent l'emprisonnement. Généralement, les victimes ne veulent pas soumettre leurs proches à une procédure judiciaire. En fin de compte, elles décident de ne pas signaler les crimes dont elles ont fait l'objet, choisissant plutôt de prendre leurs distances avec leurs familles.

Avancées ou reculs ?

Il y a dix ans, les centres de traitement de la toxicomanie pouvaient pratiquer des thérapies de changement forcé d'identité sexuelle sans réglementation. Efraín Soria de Fundación Equidad (Fondation pour l'égalité) explique:

Peu à peu, l'État et le gouvernement […] prenaient les choses en main et faisaient quelques pas – parmi lesquels, l'établissement de règles pour les cliniques, [ce] qui n'existait pas auparavant.

Le Conseil national des substances psychotropes et des stupéfiants supervisait les centres de toxicomanie jusqu'à ce que le ministère de la Santé publique prenne la tutelle et publie le règlement 339 en 2010. Ce règlement stipulait que l'homosexualité était une maladie à traiter dans ces cliniques, et les militants soulignent l'ambiguïté de cette réglementation.

Le neuvième article indiquait que la création de centres spécialisés serait encouragée pour les patients, y compris les “personnes ayant des troubles de leur identité ou des orientations sexuelles qui sont les principales causes de leur dépendance…”

Le règlement susmentionné a été abrogé deux ans plus tard, lorsque Carina Vance, une militante lesbienne, a été nommée ministre de la Santé. Sous sa direction, l'accord ministériel 0767 a été approuvé, ce qui a éliminé toute ambiguïté et a établi une série de procédures de suivi des cliniques avec l'interaction des différents organes de l’État et la participation des collectifs et des organisations de la société civile.

Pendant que Mme Vance était ministre, il y a eu 290 inspections selon un rapport du ministère de la Santé, un niveau de déploiement qui ne se produit plus aujourd'hui. Selon Patricio Aguirre, de la Direction nationale des droits de l'homme, du genre et de l'inclusion du ministère de la Santé, ces règlements (de Vance) ont aidé à superviser correctement ces cliniques, réduisant ainsi le besoin d'inspections surprises.

Cependant, des changements substantiels sont nécessaires au sein d'une société qui continue à considérer l'homosexualité et les variantes d'expressions de genre comme des comportements qui doivent être punis ou reclus.

Des lois insuffisantes rendent difficile la protection des droits des personnes persécutées, en particulier lorsque les membres de leur famille participent à leur persécution sous couvert de conventions sociales.

Les yeux levés au ciel, image virale de la censure de l'Internet chinois

lundi 19 mars 2018 à 16:56

Capture d'écran de CCTV.

Ces deux dernières semaines, l'Assemblée nationale populaire chinoise (ANPC) a planché sur l'abolition de la limitation à deux mandats de la présidence.

Conjointement avec cette réforme, les censeurs chinois de l'internet imposent des mesures strictes pour empêcher les citoyens de commenter cette modification en profondeur de la constitution et ainsi maintenir l'harmonie — du moins en surface.

Mais ce silence contraint a été rompu par un éclat de rire virtuel quand les caméras filmant en direct une conférence de presse de l'Assemblée ont surpris une journaliste, Liang Xiangyi, en train de lever les yeux au ciel et d'adresser une grimace à une consœur, Zhang Huijun, qui venait de poser une question interminable au sujet du projet chinois de Nouvelle route de la Soie. La conférence de presse était diffusée sur la télévision centrale chinoise le 13 mars 2018.

Par la suite, une conversation privée en ligne entre Liang et une collègue a fuité sur l'internet. Liang y disait qu'elle avait pensé que “la femme à côté [d'elle] faisait l'idiote.”

Presque aussitôt, clips et arrêts sur images de la mimique sceptique de Liang sont devenus viraux sur les médias sociaux, et des dizaines de milliers d'internautes se sont mis à suivre le compte Weibo de Liang, la félicitant pour sa spontanéité. Les mèmes d'yeux au ciel se sont répandus comme une traînée de poudre, jusqu'à ce que les fonctionnaires de la censure internet ne distribuent les avertissements interdisant les conversations en ligne sur les yeux levés au ciel.

Qu'est ce qui est censuré ?

Qu'est-ce qui est réellement censuré ? Voici quelques expressions pourchassées par la surveillance de l'internet, selon une liste qu'a fait circuler @Yorkson sur Twitter :

“La nuit sombre m'a donné des globes oculaires sombres, mais tout ce que je peux faire c'est lever les yeux au ciel.”

“La blancheur de mes yeux a fait écrouler le pays et conquis le monde entier.”

“Privés de liberté de parole, les gens d'autrefois avaient des clins d’œil pour code secret. Dans la nouvelle ère, nous avons la liberté de lever les yeux au ciel.”

“Tout le monde lève les yeux au ciel, mais il n'y a pas assez de caméras pour les capter tous.”

“Les yeux blancs sont les plus jolis sur un visage maquillé, les yeux exposent un paquet d'indécence sans visage.”

Toutes les expressions ci-dessus disaient le mécontentement devant la censure de l'incident. Depuis la nouvelle de l'amendement constitutionnel chinois sur la limitation des mandats présidentiels, tous les mots et expressions s'y rapportant sont censurés en ligne.

Depuis le début de mars, les services de propagande ont émis des instructions pour qu'aucune place ne soit laissée aux opinions critiques, que ce soit sur les journaux traditionnels ou sur l'internet durant les “Deux Sessions” — les congrès annuels de l'ANPC et de la Conférence consultative politique du peuple chinois (CCPPC) à Pékin.

Comme attendu, l'ANPC a adopté l'amendement constitutionnel qui pavera la voie au président actuel Xi Jinping pour diriger indéfiniment le pays. Tout paraissait harmonieux pendant les Deux Sessions, jusqu'à ce que les yeux levés au ciel de Liang apparaissent sur CCTV le 13 mars.

Un article non vérifié diffusé par Apple Daily indiquait que la licence de journaliste de Liang a été suspendue et son accréditation supprimée pour les conférences de presse pendant les Deux Sessions.

Même absente, ses yeux restent levés au ciel, du moins en ligne. @changhan327 a fait l'éloge d'un moment de vérité :

Ces deux yeux levés au ciel sont épiques. Ils ont déclenché le rire et fait écrouler le temple sacré des images soigneusement préparées et mises en scène. C'est un coup d'épingle dans les fesses de l'époque, un rat qui court à travers une salle de banquet. Cette paire d'yeux levés au ciel deviendra une épopée, pendant que d'autres épopées auto-déclarées se décomposent. Les yeux au ciel sont comme un coup de foudre qui détruit des dizaines de milliers d'expressions louangeuses et éclipse les discours débités par des centaines de milliers de gens en état de mort cérébrale. L'Histoire en fera l'éloge.

L'appareil chinois à l'étranger dévoilé

Les yeux au ciel n'ont pas seulement inspiré quelques rires. Ces jours-ci, certains ont commencé à creuser l'identité et les antécédents de Zhang Huijun, la journaliste à laquelle réagissait Liang. Zhang se présentait comme la directrice de la Télévision multimédia américaine (AMTV) et a bénéficié du rare temps de question de 45 secondes diffusé par CCTV à la conférence de presse.

Il apparaît que Zhang représente plusieurs organes de médias étrangers aux Deux Sessions depuis 2011. Les internautes explorant les origines de cette télévision sont arrivés à la conclusion qu'AMTV est très probablement une filiale outre-mer de l'appareil de publicité de la Chine. Une pétition a été lancée sur le site de pétitions de la Maison Blanche des USA, appelant à enquêter sur cet organe de média :

Nous pensons qu'AMTV est très probablement une agence non enregistrée du Département de publicité du Parti communiste chinois, et une filiale secrète de la Télévision centrale chinoise (CCTV).
Les journalistes d'AMTV collaborent avec les officiels chinois qui répondent à leurs questions approuvées avec du matériau propagandiste, tout en échappant aux questions réelles des médias libres. Ses programmes transmettent les mensonges du gouvernement chinois et les idées anti-américaines de la population parlant le mandarin sur le sol américain.

En vertu du Foreign Agents Registration Act (loi sur l'enregistrement des agents étrangers), nous demandons une enquête sur son financement et sa coopération avec le PCC, et sa fermeture en cas d'infractions constatées à la loi.

De fait, le président actuel d'AMTV est Jason Quin, dont le profil LinkedIn indique qu'il est le président de l'Institut Confucius, un organisme financé par le gouvernement chinois et directement lié à son Département Front Uni.

Pour autant, tous les termes liés aux yeux au ciel de la journaliste restent censurés en ligne. Mais désormais, lever les yeux au ciel comportera une couche supplémentaire de signification pour les journalistes et citoyens politisés de Chine.

L'exploitation minière du sable en Ouganda menace sérieusement l'environnement

dimanche 18 mars 2018 à 13:44

Une capture d'écran d'une vidéo YouTube de NTV Uganda montrant une partie des excavations dans la zone humide de Lwera.

Sauf mention contraire, les liens de ce billet renvoient vers des pages en anglais.

Les écologistes ougandais affirment qu'une importante zone humide qui longe une autoroute reliant la capitale Kampala à la ville de Masaka, au sud-ouest du pays, est endommagée par un dragage agressif pour l’extraction de sable.

La zone humide de Lwera sert de bassin versant pour plusieurs rivières qui se jettent dans le lac Victoria, et le sable fait office de purificateur d'eau. On y trouve diverses espèces terrestres et aquatiques, et on craint que le dragage, qui atteint plus de 12 mètres de profondeur, n'altère ou ne détruise l'habitat des poissons dont dépendent les pêcheurs locaux pour leur subsistance.

La Conférence sur le développement urbain et les infrastructures a averti sur Twitter que la route Kampala-Masaka pourrait également être menacée d'inondation :

[Est-ce que @UNRA_ED (le Services des routes de l'Ouganda) projette un pont à Lwera ? D’après le peu que je connais sur la géographie de l'Ouganda, il y a du sable à Namutumba, Nabiswera après Lwampanga et dans d'autres zones qui étaient visiblement des fonds de lacs asséchés !]

Quel est le niveau d'eau entre le lac Victoria et les terres humides de Lwera qui empêchera l'eau d'inonder la base et la surface de la route ? Y a-t-il eu des relevés hydrologiques et géologiques avant l'extraction de sable pour évaluer les risques sur l'autoroute ?

Il existe des règlements pour contrôler l'exploitation du sable. Mais l'Autorité nationale de gestion de l'environnement (National Environment Management Authority (NEMA)) n'a pas le budget pour financer les agents de surveillance.

Le président de la commission parlementaire des ressources naturelles, Alex Byarugaba, a estimé que cela contribuait au fait que la NEMA n'avait pas réussi à protéger l'environnement en permettant aux entreprises de détruire les habitats des espèces aquatiques et terrestres :

NEMA is duty bound to regulate activities that happen on wetlands but because of the organization’s reluctance, environmental degradation is on the increase around areas where sand mining is being carried out such as the shores of Lake Victoria and Lwera

La NEMA a le devoir de réglementer les activités qui se déroulent sur les zones humides, mais en raison de la réticence de l'organisation, la dégradation de l'environnement s'accentue autour des zones où se déroule l'extraction du sable, comme les rives des lacs Victoria et à Lwera.

Il n’y a pas beaucoup d’envie d’arrêter l'extraction parce que cela entraverait la « création d'emplois », disent ses partisans. Le ministre ougandais chargé de l'eau et de l'environnement a déclaré que, pour cette raison, les entreprises qui exploitent du sable ne peuvent pas être arrêtées, bien qu'il insiste pour que toutes les entreprises le fassent d’une façon appropriée.

Selon le journal Daily Monitor, plusieurs responsables gouvernementaux de la NEMA se sont rendus sur le site pour arrêter les excavations de plus de 12 mètres de profondeur, mais leurs opérations ont été interrompues faute de financement :

So far, according to Ayazika Waiswa, the Nema environment monitoring and compliance director, the mining companies in the areas have contravened their license obligations.

Most of the sand companies, according to Waiswa are scooping sand 12 meters underneath instead of the recommended three meters which enables easy regeneration of the resource.

“Through our routine inspections, we came and stopped them [sand miners] but later, our officers withdrew due to financial constraints and they [miners] came back,” Waiswa, said during a Nema board inspection recently.

But that is not the only violation; “…among the conditions we set out, they were not supposed to do mining in 200 meters from the road but they are not complying,” Waiswa, adds.

Dredging the sand 200 meters towards the highway puts the busy road, which connects Uganda to Tanzania on the brink of soil erosion through constant flooding and degradation.

Jusqu'à présent, selon Ayazika Waiswa, directrice de la surveillance de l'environnement et de la conformité à la Nema, les sociétés minières des régions ont enfreint leurs obligations en matière de permis.

La plupart des entreprises de sablières, selon Mme Waiswa, ramassent le sable à 12 mètres de profondeur au lieu des trois mètres recommandés qui permettraient une régénération facile de la ressource.

« Grâce à nos inspections de routine, nous sommes venus et nous les avons arrêtés [les mineurs de sable] mais plus tard, nos agents se sont retirés en raison de contraintes financières et ils [les mineurs] sont revenus », a déclaré Mme Waiswa, lors d'une inspection récente de la commission Nema.

Mais ce n'est pas la seule violation ; « … parmi les conditions que nous avons établies, elles n'étaient pas censées excaver à 200 mètres de la route, mais elles ne s’y conforment pas », ajoute Ayazika Waiswa.

Le dragage du sable à 200 mètres de l'autoroute met la route très fréquentée, qui relie l'Ouganda à la Tanzanie, à la limite de l'érosion du sol par des inondations et une dégradation constantes.

Après avoir vu des véhicules lourdement chargés transportant du sable de Lwera, un utilisateur de Twitter, Moriati X, a posé une question à la police ougandaise au sujet de sa déclaration selon laquelle tous les véhicules surchargés doivent obtenir une licence pour transporter des marchandises.

[Le nouveau règlement du Service des routes exige que ces cargaisons hors-jauge ne soient déplacées qu'avec un permis délivré par le ministre des Travaux publics et des Transports.]

Et ces remorques qu'on a vues transportant du sable pour Mango Tree à Lwera. Les avez-vous interceptées ? C’est juste une question.

De plus, la compagnie chinoise Mango Tree a été sous les feux des projecteurs concernant l'exploitation du sable sur les rives du lac Victoria.

Mango Tree a été accusée d'avoir exploité du sable en vertu d'un permis de construction navale sur le lac. Selon une déclaration de la NEMA :

a criminal case was opened against Mango Tree following a tip off that a large ship on Lake Victoria had been mining and dumping sand at Miami Beach in Luzira.

une procédure pénale a été ouverte contre Mango Tree suite à une dénonciation selon laquelle un grand navire sur le lac Victoria avait exploité et déversé du sable sur Miami Beach, à Luzira.

Dans une émission de NTVUganda, le député et militant John Baptist Nambeshe a cité la corruption comme un moyen pour ces entreprises d'obtenir des permis.

Bien que l'Ouganda soit signataire de plusieurs accords multilatéraux des Nations Unies sur l'environnement tels que la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique, la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques [fr], la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification, la Convention de Ramsar relative aux zones humides [fr] et bien d'autres, le gouvernement ougandais n'a pas été en mesure de protéger efficacement et d'assurer une utilisation durable des ressources environnementales.

Le journaliste et agriculteur Brian Luwaga sur Twitter pense que c'est vraiment dommage (« kitalo nnyo » en luganda signifie « c'est triste ou mauvais ») :

La destruction des terres humides de Lwera par l'industrie extractive.

La communauté LGBTI continue d'être punie 20 ans après la décriminalisation de l'homosexualité en Équateur

dimanche 18 mars 2018 à 13:22

Les familles des victimes séquestrées et confinées dans des cliniques de “déshomosexualisation” font appel aux “services” de ces institutions et paient pour que les membres de leur famille y soient gardés. Illustration de Mónica Rodríguez. Utilisée avec permission.

Billet d'origine publié le 18 février 2018 – Ce qui suit est une republication de l'article écrit par Carlos Flores, publié à l'origine par Connectas et adapté avec l'aide de l'auteur pour former une série en trois parties reproduite et traduite par Global Voices. L'article complet contient des témoignages détaillés et une analyse des incohérences légales qui facilitent la violence et la discrimination perpétuées contre les personnes gay et transgenres/transexuelles en Équateur.

La première partie ci-dessous regroupe les témoignages des victimes d'institutions ayant déclaré pouvoir “soigner” l'homosexualité ; les autres parties examinent les échecs du système judiciaire, ainsi que les obstacles sociaux qui limitent la protection des droits de toute personne lesbienne, gay, bisexuelle, transgenre et intersexuée (LGBTI).

Vingt ans après la décriminalisation de l'homosexualité en Equateur, la communauté LGBTI continue d'être punie par la société et est rarement protégée par la loi. En effet, des institutions échappant au contrôle de l’État pratiquent diverses formes de maltraitance et de discrimination envers celles-ci. Certaines de ces institutions pratiquent des “traitements” contre l'homosexualité dans des prétendues cliniques de désintoxication. Dans ces cliniques, les abus sont nombreux et de toutes sortes.

D'après l'opinion générale, ces soi-disant “thérapies de déshomosexualisation” existent “depuis longtemps” en Équateur. Parmi elles, des tortures physiques et psychologiques, notamment des insultes, humiliations, un régime alimentaire malsain, des passages à tabac, des chocs électriques, et même des “viols de redressement”.

Certains témoignages de victimes de ces institutions ont donné naissance à des travaux artistiques comme ceux de Paola Paredes, qui a révélé les maltraitances que des femmes enduraient dans ces cliniques. D'autres témoignages racontent comment les familles des victimes sont aussi complices de ces cliniques, et combien de femmes sont internées par des organisations religieuses.

Le manque de contrôle et de protection de la part des autorités est évident, comme pour le cas de Jonathan Vásconez, un homme transgenre ayant vécu en confinement pendant un an et demi et ayant tenté deux fois sans succès de s'évader du Centro La Estancia (Le Ranch) à Patate (Tungurahua) dans le nord-ouest de l'Équateur.

Tout a commencé lorsqu'il avait 23 ans. Il était déjà père d'une fille, et utilisait encore le nom féminin que ses parents lui avaient donné à sa naissance : María de los Ángeles. Lorsqu'il est allé récupérer sa partenaire de l'époque, des inconnus l'ont intercepté, battu et menotté, déclarant être de la police. Jonathan Vásconez dit que l'ordre contre lui avait été commandité par sa famille, sous la fausse accusation d'être un toxicomane. Au centre, il a été soumis à de nombreux abus et agressions :

Pidieron a tres compañeros que se levantaran y trajeran un tanque café, que me llegaba a la cintura, lleno de agua. Entre los tres me metieron al tanque, de cabeza, unas ocho veces. Puedo decir que ahí vi la muerte. El director de la clínica me grababa con un celular y me pedía que dijera que había ido a robar a mi hija, cosa que no era cierta. Cuando vieron que me moría, me dejaron […] Estuve un mes y una semana, esposado a la cama, y me hacían comer en el piso…

Ils ont demandé à trois personnes d'apporter un grand bassin marron, rempli d'eau jusqu'au niveau de ma taille. Les trois mis la tête dans le bassin, environ huit fois. Je peux dire que j'ai frôlé la mort. Le directeur de la clinique a tout enregistré sur son téléphone et m'a ordonné de dire que j'allais kidnapper ma fille, ce qui était faux. Quand ils ont vu que j'allais mourir, ils m'ont laissé […] J'y suis resté pendant un mois et une semaine, menotté au lit, et ils m'ont fait manger à même le sol…

Jonathan Vásconez réussit à s'échapper rapidement, mais sera recapturé sous l'ordre de sa sœur.

Utiliser la religion et échapper à la justice

Les cliniques, ainsi que leurs responsables ne sont pas souvent amenés à faire face à la justice, mais si cela arrive, apparemment ils disparaissent et changent de nom. Plusieurs institutions se servent des lois et des valeurs religieuses afin de donner une structure et un objectif à leur travail. Dans tous les cas, il n'est pas clair si, à la suite d'une plainte ou de l'intervention de l’État, ces cliniques continuent d'opérer sous un autre nom ou alors dans des locaux différents.

Et malgré cela, des victimes évitent de porter plainte par peur de représailles des personnes les ayant maltraitées dans les centres.

Comme le cas de Luisa (prénom modifié), qui a été confée à un de ces centres suite à la décision de ses parents. Ceux-ci n'arrivaient pas à se faire à l'idée que leur fille pouvait être lesbienne et encore moins, amoureuse de sa cousine, avec qui elle habite maintenant. Elle se souvient très bien de sa “thérapie” : le bain matinal et en exactement cinq minutes, la prière, l'application du traitement en 12 étapes pour les toxicomanes, la malnutrition, et des phrases qu'ils lui répétaient jour après jour en mettant leurs mains sur sa tête : “Toi, tu n'es pas lesbienne, nous allons te guérir ici, tu es très confuse dans ta vie, tu verras tu finiras par aimer les hommes.”

Elle a enduré cette expérience traumatisante à 24 ans, en 2012, pendant quatre mois, partageant un espace avec d'autre lesbiennes. Certaines étaient toxicomanes et d'autres, comme elle, ne l'étaient pas. Après avoir quitté le centre elle est rentrée chez elle, mais cette fois avec un esprit complètement perturbé. Deux semaines plus tard, son père est redevenu violent contre elle, et elle a pris peur d'être internée encore une fois. C'est donc pour cela qu'elle a décidé de partir.

En ce qui concerne Hogar Renacer (en espagnol Maison Renaître, la “clinique” dans laquelle elle avait été confinée), Luisa a voulu ne plus rien avoir à faire avec eux : “Je n'ai jamais porté plainte. Je ne voulais pas avoir d'ennuis. Les gens qui travaillaient la-bas étaient un peu dangereux.”

Les services du procureur ne donnent pas de détails sur les cas résolus ou sur les mises en accusation de ceux connus comme des “cas emblématiques”, à cause du niveau d'influence qu'ils ont sur l'opinion publique. Ils ont assuré malgré tout, que les incidences du phénomène ont été réduites, ce que contestent les collectifs et associations.

La Fundación Causana, un “collectif lesbien et féministe” qui se bat pour la défense des droits des personnes LGBTI, affirme avoir déjà travaillé sur huit cas d'empêchement de confinement, rien qu'entre 2016 et 2017. Les conditions sociales qui affectent les victimes de ce traitement ont peu changé, en dépit de l'évolution de la loi. En conclusion, même s'il est affirmé que la législation d'aujourd'hui a ouvert la porte au respect et à l'égalité pour tous, l'Équateur est encore très loin de pouvoir tirer un trait sur ce problème.

ANA TELE : une école de langue tatare en ligne

dimanche 18 mars 2018 à 12:56
Скриншот стартовой страницы проекта "АНА ТЕЛЕ"

Capture d'écran de la page d'accueil du site Ana Tele.

[Billet d'origine publié en russe le 16 août 2016] Comme on le sait, la Russie est un pays multinational. En accord avec l'article 68 de la Constitution de la Fédération de Russie, la langue officielle sur le territoire fédéral est le russe. Conformément à l'article 2 de cette même constitution, les républiques de la Fédération sont en droit d'établir leur propre langue nationale. Ce qui, malheureusement, ne veut pas dire que tous les représentants de nombreux peuples de Russie parlent couramment leur langue natale.

Dans leur ouvrage «Comment et pourquoi préserver les langues des peuples de Russie», les chercheurs К. Zamiatine, А. Passanen et Y. Saarikivi notent que la situation des langues nationales en Russie, sans être catastrophique, n'est pas particulièrement rassurante. En effet, la théorie et la pratique ne coïncident pas toujours. Dans les faits, seuls quelques rares entités parmi les 83 sujets de la Fédération de Russie proposent un enseignement dans leur langue nationale. Dans ces «écoles nationales», les cours sont souvent dispensés en russe, la langue locale étant circonscrite au cours où elle est étudiée. Il n'est donc pas possible d'acquérir à l'école les compétences permettant de débattre de sujets d'actualité dans cette langue, ni de s'entraîner à l'utiliser à l'écrit. L'enseignement des langues minoritaires n'a droit, le plus souvent, qu'à quelques heures dans la semaine, souvent facultatives et reléguées à la fin de la journée de cours. Si la langue n'est pas pratiquée à la maison, ce n'est pas avec un tel enseignement qu'on l'empêchera de disparaître. Quant à recevoir une formation professionnelle dans une langue minoritaire, c'est pratiquement impossible — à l'exception de la formation des professeurs qui se destinent à enseigner cette langue.

Cependant, comme le notent les auteurs du livre, il existe quelques régions où la situation de l'enseignement des langues minoritaires est notablement meilleure que dans le reste du pays. Dans les républiques du Tatarstan et de Bachkirie, on peut suivre une scolarité dans la langue locale (respectivement le tatare et le bachkir) et même, dans certains établissements, dans la langue d'autres minorités telles que Maris et Ourdmoutes. Ce qui n’empêche pas que même là où un enseignement scolaire est disponible dans d'autres langues que le russe, de nombreux écoliers issus des minorités nationales fréquentent une école où les cours se font en langue russe.

Poupée en costume national tatare. Illustration fournie par le site russiandolls.ru.

Il faut rappeler qu'une part significative des peuples de Russie vit hors de son territoire national. Il n'y a alors aucune possibilité d'apprendre sa langue maternelle, même en tant qu'objet d'étude. Dans certains cas, c'est une écrasante majorité qui réside en dehors de la République dont elle a la nationalité : 60% des Tatares et des Mordves, par exemple.

Si l'on se fie aux données de 2010 sur le recensement de la population dans toute la Russie, il est clair que l'appartenance à une nationalité ne signifie pas toujours que l'on en possède la langue. La langue tatare est la deuxième en termes de répartition dans la Fédération de Russie, elle est maîtrisée par 6% du nombre total de Russes possédant d'autres langues, et elle arrive en troisième position après le russe (99%) et l'anglais (5%). Dans toute la Russie, les Tatares sont en moyenne 68,5% à parler leur langue maternelle, sachant que la connaissance de la langue est très variable selon les régions du pays. En tête, les sujets (régions administratives) du District fédéral de la Volga : Tatarstan, République de Tchouvachie, oblast de Penza, Mordovie, République des Maris, oblast de Nijni-Novgorod, oblast d'Astrakhan. La maîtrise de la langue tatare y est supérieure à la moyenne pour la population tatare, et atteint presque 93% au Tatarstan. Ceux qui connaissent le plus mal leur langue nationale sont les Tatares qui vivent dans le District fédéral d'Extrême-Orient (kraï de l'Amour, région autonome juive, kraïs du Kamtchatka et du Primorié, oblast de Sakhaline), au nord (région autonome de Nénétsie) et dans les régions occidentales (oblast de Kaliningrad). Bon dernier, le kraï de Khabarovsk, où seuls 23% des Tatares maîtrisent la langue tatare.

Si la langue nationale est parlée en famille, c'est plus simple, car elle sera ainsi apprise dès l'enfance de façon naturelle. Mais comment faire quand la langue maternelle n'a jamais été apprise et qu'on veut l'acquérir à l'âge adulte ?

C'est justement à ces personnes-là que s'adresse le projet évoqué dans ce billet, un projet mis au point par l'école de langue anglaise EF English First et le ministère de l’Éducation et de la Science de la République du Tatarstan : l'école en ligne de langue tatare «АNA TELE» (tatare «langue maternelle»), qui a ouvert en février 2013. L'école a été fondée à la demande du président du Tatarstan R. N. Minnikhanov après les nombreuses réclamations d'habitants du Tatarstan, d'autres régions ou de personnes résidant à l'étranger.

L'école «ANA TELE» ne ressemble pas aux écoles traditionnelles avec tableau noir, pupitres et manuels scolaires. Évidemment, l'apprentissage d'une langue ne se conçoit pas sans exercices (il y en 3.000 au programme), mais «ANA TELE», c'est aussi 54 vidéos, 10.000 enregistrements audio et 5.000 photos. Chaque cours commence par une leçon en vidéo et se termine par un exercice en rapport avec celle-ci, ce qui permet de fixer les notions apprises – et d'éviter l'exercice supplémentaire du vocabulaire à écrire et à apprendre. Sont aussi prévus des cours de conversation avec l'enseignant, une option que l'école elle-même signale aux étudiants (par téléphone ou par mail). A noter aussi la qualité de l'équipement technique: pas un seul problème technique en plusieurs mois. Sans parler de confort d'utilisation : on peut pratiquer n'importe où et n'importe quand, il suffit d'avoir accès à internet.

D'ailleurs, le succès du projet dépasse les frontières russes:

Cher Roustam Nourgaliévitch ! Un grand merci à vous pour le programme “ANA TELE” ! J'apprends le tatare depuis l'Amérique, et cela m'est très utile.

Depuis que le projet existe, plus de 30.000 personnes en ont bénéficié. L'école accueille chaque année 10.000 nouveaux utilisateurs. Rejoignez-nous vous aussi! Рәхим итегез! (Bienvenue!)