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Au Japon, des cerisiers en fleurs pour faire le deuil du tsunami

mercredi 8 avril 2015 à 20:16
桜並木 - Row of cherry blossom trees

Photographie de l'utilisateur de Flickr IZAYOI YUKARI (CC BY-NC-SA 2.0)

C'est à nouveau la saison des cerisiers en fleurs au Japon. Bien que l'éclosion des délicates fleurs roses signifie que les médias sociaux vont se peupler de photos incroyablement belles, la floraison est aussi une occasion de réfléchir, espérer, rêver et faire son deuil.

A Iwaki, dans la préfecture de Fukushima, le project  Iwaki Manbon Sakura (qui peut se traduire, approximativement et poétiquement, par “les 10 000 cerisiers d'Iwaki”) représente exactement cela.

Iwaki est située à seulement 50 km au sud de la centrale nucléaire Fukushima Daiichi. Après le tremblement de terre de mars 2011, la ville fut atteinte par le terrible tsunami qui a frappé la côte pacifique du Japon. Iwaki fut également touchée par la catastrophe de la centrale nucléaire de Fukushima.

Le projet Iwaki Manbon Sakura a pour objectif de planter 99 000 cerisiers sur une colline surplombant la ville pour marquer le quatrième anniversaire de la catastrophe (le nombre “10 000″ dans le nom du projet est un mot poétique qui peut aussi vouloir dire “beaucoup” ou “une infinité”).

Tadashige Shiga, dont l'entreprise parraine ce projet, explique :

負の遺産を残してしまうことにすごい悲しさ、悔しさを今さらながら感じています。なんとかならないものなのでしょうか!春、桜の花が満開に咲いているのを見て、20年後、30年後の未来の子供達に、山一面の桜を見てもらえるようにしようと思いたちました。万が一いわきに住めなくなった時でさえ、いわきの土地を愛していた人達の気持ちが伝わるくらい、沢山の桜の木を植えたいと思っています。

Ici, les effets de la catastrophe de mars 2011 ont tout recouvert d'un voile de tristesse. Alors faisons quelque chose pour réparer ça ! Les cerisiers fleurissent chaque année. Donnons aujourd'hui aux enfants quelque chose à contempler quand, dans vingt ans, dans trente ans, ils dirigeront leurs regards vers les pentes de la montagne au-dessus d'Iwaki. Même si, pour une raison ou pour une autre, nul ne peut vivre à Iwaki, nous pouvons quand même exprimer l'attachement que nous ressentons tous et toujours pour notre ville, et nous pouvons faire cela en plantant des cerisiers.

L'idée de ce projet est d'utiliser les cerisiers et leur floraison printanière pour apaiser certains souvenirs de terreur et de tristesse causés par la tragédie de 2011.

La longue histoire des sakura

Le Japon a un lien très profond avec les fleurs de cerisiers, ou sakura. La courte floraison est citée dans le Man'yōshū, la plus ancienne collection de poésie japonaise au monde, écrite il y a près de 1 300 ans pendant la période Nara.

A travers toute l'histoire du Japon, les fleurs de cerisiers ont symbolisé les nouveaux départs, les espoirs et les rêves. Les fleurs sont belles à couper le souffle, et disparaissent ensuite rapidement. Elles suscitent de nombreuses émotions et occupent une place à part dans le coeur du peuple japonais.

De nos jours, leur éclosion chaque année à la fin du mois de mars marque plus qu'un changement de saison. Elle coïncide aussi avec la cérémonie de remise des diplômes, la fin de l'année scolaire fin mars, et le début de la nouvelle année scolaire début avril.

En cette saison, les utilisateurs japonais de Twitter ont publié des photos stupéfiantes des sakura en fleurs :

Le printemps est arrivé.

Les cerisiers sous Tokyo Skytree sont presque entièrement fleuris.

L'utilisateur de Twitter @7D_ITACHI a réussi à capturer une image intemporelle du Japon :

De retour à la maison à Joetsu pour la première fois en quatre ans. C'est vraiment paisible ici.

Alors que les sakura fleurissent, commence la saison des nouveaux voyages : 

Le printemps est toujours merveilleux, avec la floraison des magnifiques sakura. Bien que j'aie toujours aimé l'époque du printemps, aujourd'hui je la déteste car je vais devoir quitter de vieux amis.

Quand les pétales commencent à tomber par vagues, ils expriment un puissant sentiment de séparation :

“Une tempête de fleurs de cerisiers”  -> Des fleurs de cerisiers gisant sur le sol, au temple. (temple de Kokugon, Nagano)

Les fleurs de cerisiers semblent avoir un profond effet sur l'âme humaine.

J'ai aperçu les premiers cerisiers de la saison ! Bien que je sois très fatigué, je pense que je peux tenir le coup encore un peu plus longtemps.

Izumi Mihashi a contribué à ce billet.

Thaïlande: la nouvelle loi sur la sécurité ‘anéantit la liberté d'expression’

mercredi 8 avril 2015 à 16:26
File photo of General Prayuth Chan-ocha (right), the incumbent Prime Minister of Thailand. Prayuth signed a new security law to replace martial law in the country. Photo by Vichan Poti, Copyright @Demotix (9/4/2014)

Photo d'archive du Général Prayuth Chan-ocha, Premier Ministre en place en Thaïlande. Prayuth a ratifié une nouvelle loi sur la sécurité pour remplacer la loi martiale dans le pays. Photo de Vichan Poti, Copyright @Demotix (9/4/2014)

Après 11 mois, le 1er avril 2015, le gouvernement thaïlandais a levé la loi martiale qui s'appliquait au pays, mais il a rapidement ratifié une nouvelle loi sur la sécurité encore plus répressive selon certains groupes de défense des droits humains.

En mai dernier, l'armée thaïlandaise a opéré un coup d'état pour soi-disant mettre fin aux affrontements entre l'opposition et les forces gouvernementales. La loi martiale a été imposée et contrôlait les salles de rédactions des principaux organes de presse et interdisait les rassemblements politiques. Une constitution intérimaire a été rédigée et a mis en place un gouvernement civil soutenu par l'armée et mené par le Général Prayuth Chan-ocha. Ce nouveau gouvernement a pris le nom de Conseil National pour la Paix et le Maintien de l'Ordre. Malgré la nomination d'autorités civiles, la loi martiale était maintenue.

Au nom de l'article 44 de la constitution intérimaire, Prayuth a signé une ordonnance 3/2558 (3/2015) qui abroge la loi martiale mais impose des mesures de sécurité beaucoup plus sévères dans tout le pays. La nouvelle ordonnance prévoit la nomination “d'agents pour la paix et le maintien de l'ordre” parmi les militaires, ayant tout pouvoir pour défendre la sécurité de l'Etat. Ces personnels militaires peuvent perquisitionner les habitations, convoquer et arrêter les fauteurs de troubles, confisquer des biens immobiliers, emprisonner des individus suspects dans des centres de détention spéciaux pour une durée de 7 jours sans recours à une autorité judiciaire.

La liberté de se réunir est toujours limitée par l'article 12 de l'ordonnance qui interdit “les rassemblements politiques de 5 personnes ou plus”.

Les dessins humoristiques de ‏@stephffart donnent une image de ce que pensent de l'article 44 les activistes et défenseurs de la démocratie en Thaïlande :

La junte, personnifiée par Prayut Max : “Faites-moi confiance… J'exercerai le pouvoir absolu ‘de façon constructive’ ” – L'éléphant (la Thaïlande ; lisant l'Histoire de l'Humanité) : “Oui… Excusez-moi si j'exerce le scepticisme ‘de façon constructive’ “

Le chien – article 44 : “On y est déjà ?” – Sur la veste de Prayut Max : Attention, cette veste n'a ni boutons ni boutonnières – Pancarte : Route du bonheur-folie

L'ordonnance menace également la liberté d'expression. Son article 5 pourrait être utilisé pour réprimer les dissidents. En voici le projet :

Les agents de maintien de la paix ont le pouvoir d'émettre des arrêtés interdisant la diffusion de toute information ou vente ou distribution de tout livre ou publication ou ouvrage susceptibles d'inquiéter le public ou qui contienne de fausses informations à même de créer une incompréhension du public au détriment de la sécurité nationale ou de l'ordre public. (Traduction non officielle par iLaw, le Centre de Documentation pour la Liberté d'Expression)

En réaction à ce projet, tous les plus grands médias du  pays représentés par l'Association des Journalistes Thaï, Le Conseil National de la Presse de Thaïlande, l'Association des Journalistes de l'Audiovisuel et le Conseil de l'Information Audiovisuelle de Thaïlande, se sont réunis pour publier un communiqué critiquant l'article qui “est une menace plus grande pour la liberté de la presse et la liberté d'expression que ne l'était la loi martiale”.

Ils exhortent le Conseil National pour la Paix et le Maintien de l'Ordre à clarifier les intentions de l'article et à préciser la définition de “menace pour la sécurité nationale” et de “diffusion de fausse information”.

Sans une définition claire de ce qu'est la menace pour la sécurité nationale, de ce qui provoque l'inquiétude du public et de ce qu'est la diffusion de fausse information, les autorités pourraient outrepasser leurs droits et abuser de leur pouvoir, ce qui est en contradiction avec l'ordonnance du Conseil National pour la Paix et le Maintien de l'Ordre.

Ils craignent aussi que ce projet de loi particulier ne touche des millions d'utilisateurs d'internet :

Tout citoyen qui communique et discute en ligne sur les médias sociaux de sujets qui peuvent contenir des informations considérées par les autorités comme une menace pour la sécurité nationale, pouvant inquiéter le public, diffuser de fausses informations ou créer une incompréhension du public, pourra être passible des mêmes peines dans les mêmes conditions.

En faisant référence au même article, l'Alliance de Presse du Sud-Est Asiatique pose la question :

Sur quel critère se base-t-on pour dire qu'un contenu est ‘inquiétant’ ou est ‘une fausse information pouvant créer une incompréhension du public’ ? Si le contenu en question est vrai et basé sur des faits, la vérité peut-elle s'opposer à cette interdiction ?

Zeid Ra'ad Al Hussein, Haut Commissaire des Nations Unies pour les Droits Humains, est plus catégorique en s'en prenant à la nouvelle ordonnance du Conseil National pour la Paix et le Maintien de l'Ordre et qualifie cette mesure d’ ‘anéantissement de la liberté d'expression’ en Thaïlande. Il ajoute :

En temps habituel j'aurais accueilli chaleureusement la levée de la loi martiale, mais je m'inquiète de la décision de remplacer la loi martiale par quelque chose d'encore plus draconien, qui donne des pouvoirs illimités au Premier Ministre sans aucune supervision judiciaire.

La nouvelle de la levée de la loi martiale était accueillie avec méfiance en Thaïlande car elle a été annoncée le 1er avril. Mais la junte thaïlandaise ne plaisantait pas du tout en faisant passer une loi beaucoup plus rigoureuse en remplacement de la loi martiale.

Polémiques après le triomphe du film Timbuktu

mardi 7 avril 2015 à 23:39
Scene du film Timbuktu - femme en pleurs - CC-BY-20

Scene du film Timbuktu – femme en pleurs – CC-BY-20

Le film du mauritanien d'Abderrahmane Sissako a triomphé à la 40ème cérémonie des Césars, qui a eu lieu au théâtre du Châtelet à Paris les 20 et 21 février 2015. Il a raflé sept récompenses au total, dont celles pour la meilleure musique originale, le meilleur son, la meilleure photographie, le meilleur montage et le meilleur réalisateur. 

En France, le film a aussi été plébiscité par le public.  En effet, il a déjà enregistré près d'un million d'entrées, une audience qu'aucun film africain n'avait attiré auparavant. 

Sur le continent africain, le film a aussi provoqué de nombreux débats. De nombreux internautes partagent cet engouement, comme Dogon64, un lecteur sur Malijet. Dogon64 tient à affirmer qu'il a vu le film, contrairement à d'autres observateurs africains qui en parlent sans l'avoir vu.  Il partage ses sentiments sur malijet.com:

Oui bravo à Abderrahmane Sissako, contrairement à beaucoup de critiqueurs (sic) sur ce forum j'ai vu ce film et j'ai aimé !
Oui il a plein de lacunes, oui il ne raconte pas tout ce qui s'est passé, oui il évite le rôle du MNLA, mais il s'agit d'une fiction et Abderrahmane voulait simplement montrer l'hypocrisie de l'idéologie islamiste de ces djihadistes !
Et que vous le vouliez ou non, il a réussi !Maintenant vous les critiqueurs (sic) éternels, Kassin, Mossad, Balimamousso et autres, qu'attendez vous pour vous regrouper et faire un film à votre convenance, montrant la déviation de l'Islam de tous ces fous de dieu, les horreurs qu'ils perpetuent au Mali et ailleurs, ce qu'ils font des femmes, de leurs traffics de drogues et autres ! Qu'attendez vous ????
Peur peut-être de vous retrouver avec une fatwa sur le dos, comme les dessinateurs de Charlie-Hebdo ??
Ou vous auriez peut-être préféré que ce soit Abderrahmane qui prenne les risques ?
Il en a pris, c'est le seul film pour l'instant traitant de ce sujet ….en attendant le vôtre ?
Capture d'écran du film Timbuktu

Capture d'écran du film Timbuktu d'Abderrahmane Sissako

Le 28 mars 2015, le militant pour les droits humains Charles Sanches, qui vit à Dakar, a aussi donné une opinion positive sur le film:  

J'ai vu Timbuktu hier. Un film magnifique. Les 7 Cesar sont mérités. Ce film aurait dû avoir au moins 1 Oscar. Je regrette d'avoir été mauvaise langue sans l'avoir vu.

J'avais écrit une longue “critique” qui s'est effacée par inadvertance. Je vous recommande vivement ce film. Il est d'une beauté, d'une gravité et d'un esthétisme rares… Ce qui est une prouesse pour un sujet de film aussi délicat.

 Son commentaire a été suivi de plusieurs réactions de la part de ses amis sur Facebook. Sid-Lamine Salouka a écrit:

HEUREUX!!! Je suis particulièrement heureux! Le film de Sissako a été vilipendé par des gens qui lui reprochent sa proximité avec le régime mauritanien mais qui ne parlent pas du film. Je convoque Césaire (et sa Lettre à Maurice Thorez) pour dire qu'être de gauche n'est pas un gage de bonne foi ni un certificat d'anti- paternalisme. Charles Sanches, tu me rends la nuit douce.
 
 
Lamine Fall avoue avoir apprécié certains aspects du film, mais reste critique sur d'autres:
 
Je valide sur l'esthétisme et le tact, et surtout sur comment a été operé le choix de la petite fille. Neanmoins un peu critique sur le chevauchement de certaines scenes.
 
Une autre de ses amis vivant à Dakar Mia Toure a écrit:
 
J'ai fait la queue 2 fois aujourd'hui pour le voir au CCF. A chaque fois , la salle était pleine. 
 
 D'autres critiques du film tentent d'expliquer ce succès per l'influence de la politique du gouvernement français en matière de lutte contre l'extrémisme religieux. C'est le cas de Kassin qui invite ses compatriotes à se méfier sur le site malijet.com que:
 
 Ce film est plutôt une propagande mauritano-française pour présenter les touareg comme des victimes alors que ce sont les touareg du MNLA soutenus par la Mauritanie et la France qui sont à la base de la déstabilisation au nord du Mali.La charia a été appliquée en masse à Gao et à Tombouctou sur des populations majoritairement noires et non à Kidal où vivent la plupart des touareg rebelles.

Mais ce film passe sous silence la souffrance des Bellah qui subissent l'esclavage des touareg soutenus par la Mauritanie. Ce n'est pas maintenant que ce film est réalisé et il n'a rien eu aux festivités de Cannes 2014 alors pourquoi ce soudain couronnement? Faites très très attention à la propagande et cherchez toujours à savoir le pourquoi du comment. Salute.

 
Sur le meme site, KIBILLY SOUSSOKHO relève les aspects politiques du film de Timbuktu:
 
Je suis désolé ,mais sans mettre en cause la valeur réelle de son film ,je pense que ce prix ,surtout accompagné d'une telle razzia de statuettes ( prix d'interprétation ,meilleure musique etc ..),donc ce prix a une forte odeur politique .Et puis quand cet homme faisait le film Bamako avec Aminata Dramane Traoré ,on disait qu'il était Malien etc …et puis il devient brusquement Mauritanien .Et puis avec l'état de surislamisation avancée de la Mauritanie ils vont être bientôt obligé de faire assurer sa protection par des gardes de corps ,si ça se trouve, une  FATWA est déjà sur lui .En tout cas moi je ne suis pas surpris par ce Cesar, valeur absolue de consécration dans le cinéma; et comme la Mauritanie est la base de repli du MNLA, je vous laisse deviner la clarté du type de relation plausible entre la France et le MNLA. 
 
Sur le site africultures.com, le lecteur MlleMemr commente dans une publication intitulee STOP AU LOBBY DE TIMBUKTU:

Avant de lire mon texte, regardez ce lien

Un film pour les bons blancs de France perdus dans leur mythe de l'homme bleu. Timbuktu est une grosse farce qui magnifie l'indigne. Bravo pour les jihadistes “humanisés”. Ceux sont des barbares et ce film est trompeur. Bravo aux journalistes français pour leur soutien au scénario de ce film sans saveur. Suivez ce lien et Mr Barlet (auteur de l'article), merci de vous en inspirer avant de nous endormir avec vos critiques insipides dont on ne sait à qui elles s'adressent.

 De nombreuses parties du film ont été publiées sur Youtube générant un grand nombre de réactions. Mais les avis restent partagés. Au festival du cinéma africain de Ouagadougou, FESPACO, la présentation de ce film a soulevé de nombreuses polémiques à commencer par l'opportunité même de le projeter, à cause des risques d'attentats que cela aurait pu engendrer. Il a fallu l'intervention du gouvernement de la transition pour que les organisateurs l'admettent. 

 

Des enfants qui ont des enfants : pas d'école pour les jeunes mariées au Népal

mardi 7 avril 2015 à 21:30
Girls from Newar community wearing traditional wedding dresses take part in Bael Bibaha, a practice where a girl is wed to a bael fruit, representing one of the gods, before her marriage. Image by  Nabin Baral. Copyright Demotix (3/12/2011)

Des fillettes de la communauté Newar en robe traditionnelle de mariage prennent part au Bael Bibaha, une pratique où une jeune fille épouse un fruit du bael. Ce n’est pas un mariage d’enfants, mais un rite traditionnel qui symbolise qu’une fois mariées (adultes), elles ne seront jamais veuves parce qu'elles auront été mariées enfants à un symbole divin (le fruit). Copyright Demotix (3/12/2011)

(Billet d'origine publié le 3 mars 2015) Les enfants-parents sont une dure réalité en Asie du Sud où le mariage d’enfants reste très répandu malgré les efforts des gouvernements et de la société civile pour le combattre. Dans cet environnement, ce sont en particulier les jeunes filles qui souffrent d’être piégées dans un cycle de pauvreté. Le terme mis soudainement à leur éducation piège la prochaine génération d'enfants qui auront dans le même destin.

Dans le monde, environ 1 femme sur 4 était mariée avant l’âge de 18 ans, avec les plus hauts taux de mariage d’enfants en Asie du Sud.

Le Népal a la neuvième plus haute prévalence de mariages d’enfants au monde et compte un tiers des fillettes mariées…

L’année dernière, 4 000 jeunes mariées au Népal avaient moins de 15 ans, en dépit du fait que l’âge légal pour le mariage des filles et des garçons soit de 18 ans avec consentement parental et 20 sans consentement.

Affectant principalement la classe historiquement la plus marginalisée, les dalits (également connus comme ‘les intouchables’ pour leur position dans le moribond système de castes hindou), le mariage d'enfants est souvent conduit en secret ; en partie rituel en partie nécessité économique, dans les basses-terres du Sud du pays connues sous le nom de Terai. Dans certains districts de l’est du Terai, les données de 2012 montrent que plus de la moitié des mariages concernent des jeunes filles âgées de moins de 12 ans.

Le Népal a aboli le mariage d'enfants il y a 50 ans. Néanmoins, 4 femmes sur 10 sont mariées avant leurs 18 ans. Refus=enlèvement.

Une enfance perdue

Une fois mariées, les jeunes épouses doivent immédiatement faire face aux responsabilités d’adulte qui leur sont imposées par leurs communautés. La procréation — malgré le fait qu’elles ne soient prêtes ni physiquement ni émotionnellement — est une des principales attentes.

Selon le Fonds des Nations Unies pour la Population (FNUAP), lorsque une mariée trop jeune se retrouve enceinte, ses risques de mourir pendant l'accouchement sont cinq fois plus élevés que pour une jeune femme d'une vingtaine d'années.

Après avoir élevé des enfants, il est fort peu probable qu’elle ait la chance de reprendre son éducation, ce qui la laisse à la merci de l'analphabétisme, d’abus physiques et moraux, et de la pauvreté.

Selon un rapport réalisé en 2014 par le Partenariat Mondial pour l’Éducation, au Népal le taux d’alphabétisation des femmes est de seulement 57 %, comparé à 75 % pour les hommes, largement dû au taux élevé d'abandon scolaire dans le pays. De plus, des recherches indiquent que les jeunes filles qui se marient avant leur 15e anniversaire ont trois enfants ou plus que les femmes âgées de 20 à 24 ans.

Une des principales raisons pour lesquelles les jeunes filles sont mariées jeunes est liée à leur dot, la somme dont les parents doivent s’acquitter pour payer la famille du marié.

Quand une jeune fille prend de l'âge et devient plus éduquée, le prix de sa dot augmente. En effet, les prix allant de 200 à 20 000 dollars, selon l’âge de la mariée et ses qualifications, découragent les parents démunis d'envoyer leurs filles à l’école. Ses beaux-parents, eux-mêmes analphabètes, la forceront de toute façon à se consacrer aux tâches ménagères. Ceci explique pourquoi certains spécialistes ont affirmé que la meilleure manière de combattre la pratique serait de poursuivre pénalement les familles, mais la loi serait difficile à faire respecter dans des zones où la portée de l’État est limitée.

S’échapper est difficile. Mais certaines, comme cette enfant dalit de 13 ans kidnappée qui fut à la fois courageuse et chanceuse, peuvent retourner à l’école.

Les garçons souffrent aussi. Shashank Bengali, le correspondant du Los Angeles Times en Asie du Sud, explique que le mariage d'enfants est une manière courante de contrôler la sexualité des garçons et de se débarrasser d’eux dans les familles nombreuses.

À l’âge de 13 ans, nombre d’entre eux traversent la frontière avec l’Inde pour trouver du travail en tant que travailleurs migrants, laissant femme et enfants à la maison se débrouiller tout seuls.

Rompre un cycle

Avec le effets bien documentés de la pratique, de nombreuses personnes questionnent un apparent manque de progrès dans le combat contre cette pratique :

Voici Sonakshi Malik, marié, le mariage d'enfants est endémique au Népal, pourquoi le gouvernement est incapable d’y mettre fin ???

Le gouvernement népalais et des militants civiques ont tenté de s'attaquer au système de la dot :

Veuillez regarder & vous engager Vidéo pour changer les normes sociales afin de mettre fin au mariage d'enfants & à la dot au Népal

Une contribution totale de 146.000 roupies népalaises reçue lors de la Campagne Nationale pour l'Éradication du Mariage d'enfants et de la Dot, Népal, à ce jour.

Ces efforts sont entravés par d’autres réalités comme le fait que les écoles sont surchargées, et très éloignées des villages, rendant lla scolarisation difficile.

Mais il y a de l’espoir. 

Depuis 2009, les écoles ont été rendues gratuites pour les jeunes filles jusqu'à la 10e classe. Ceci a donné naissance à des histoires inattendues telle celle de jeunes filles gagnant une autonomie à travers la pratique du football ou choisissant réellement leur mariage.

Certains observent la montée de rendez-vous galants rendue possible par la pénétration de la culture hindi de Bollywood et des téléphones mobiles :

Il est stupéfiant de constater que 41 % de femmes au Népal sont mariées avant d’atteindre 18 ans. Que faites-vous quand c’est par choix ?

Des adolescents qui travaillent comme avocats dans l’ouest du Népal suggèrent que dans une société patriarcale comme le Népal, émanciper les jeunes filles pour créer du changement est plus pertinent que jamais :

Regardez ce que des adolescentes des districts népalais de Kapilvastu, Kavre et Sindhupalchowk disent à propos du mariage d’enfants :

Mettre fin à la pratique du mariage d’enfants, néanmoins, requerra beaucoup plus d’efforts :

Des interventions multi-sectorielles sont nécessaires à tous niveaux pour mettre fin au mariage d’enfants en Asie du Sud, dit l'UNFPA Népal

En novembre 2014, des Etats de l’Association Sud-asiatique pour la Coopération Régionale (ASACR) ont donné suite à l'adoption en août 2014 d’un Plan d’Action Régional pour mettre fin au mariage d'enfants avec un Appel à l'Action de Kathmandu pour mettre fin au mariage d'enfants in Asie.

Ces plans soutiennent l'objectif précis de mettre fin au mariage d'enfants à travers l’utilisation de l'état de droit et de stratégies légales qui promeuvent la responsabilité pour mettre fin au mariage d'enfants.

Il est à espérer que ces nouveaux pas en avant auront un impact fort.

Ce dernier tweet nous laisse avec de l’espoir que quel que soit l’âge d’une personne, un regard neuf est toujours possible :

“Mes petites-filles se marieront après l’école.” certains anciens discutaient école et mariage d’enfants…nous écoutions.

Une procureur anti-terrorisme assassinée en Ouganda

mardi 7 avril 2015 à 17:20
Joan Kagezi. YouTube screen capture.

Mme Joan Kagezi. Capture d'écran sur YouTube

Les Ougandais ont été plongés dans un état de choc le soir du 30 mars 2015 lorsque la Procureur Joan Kagezi a été abattue à Kiwatule, une banlieue de la ville de Kampala, rentrant du bureau au volant de sa voiture avec ses enfants. Mme Kagezi menait une enquête contre les auteurs des doubles attentats d'al-Shabab, en juillet 2010 lors de la Coupe du Monde de football, tuant 74 personnes et en en blessant 70 autres. Mme Kagezi devait interroger un témoin sur la façon dont les explosifs ont été assemblés et transportés à Kampala.

L'information s'est répandue d'abord sur les réseaux sociaux, sous le hashtag #KiwatuleShooting. Raymond Qatahar, un journaliste d'investigation, a donné l'information sur Twitter puis confirmé l'identité de la personne tuée :

Les infos reçues sont que la femme tuée était procureur dans l'affaire des suspects de terrorisme qui devait reprendre demain à la Haute cour.

DERNIERE MINUTE : Un témoin oculaire raconte qu'il y a eu une fusillade à Najjera Kiwatule. Une femme dans une voiture a été abattue à bout portant

Un témoin oculaire raconte: “Deux hommes sur un boda boda [moto-taxi] sont arrivés à la hauteur de sa voiture et un d'entre eux a tiré sur elle plus de quatre fois à bout portant”

Les citoyens inquiets ont immédiatement commencé à exiger des réponses des autorités :

Pourquoi une haute personnalité du rang de procureur se déplaçait sans aucune protection est également troublant

La grande question au gouvernement : Avons-nous même un semblant de programme de protection des témoins en Ouganda?

Qwenga, un blogueur ougandais, a souligné ce qu'il considère comme une faille dans l'infrastructure de la sécurité nationale du pays :

Le problème est que les services de sécurité ougandais pensent que les alertes terroristes concernent uniquement des explosions de bombes.

Angelo Izama, écrivain et blogueur ougandais, a écrit::

Mon analyse était que si la confiance publique était retirée aux institutions d'arbitrage de conflit, la justice entrerait au marché noir

 

Lorsque les règles de protection varient selon le statut social, l'impunité va augmenter

Benjamin Rukwengye, un autre utilisateur de Twitter, craint qu'on en fasse trop pour les personnalités de haut rang, tandis qu'un plus grand nombre de décès passent inaperçus par l'opinion publique :

Les pauvres meurent par dizaines, comme ça. Nous les utilisons comme des statistiques et ne posons pas les questions difficiles. Réflexions peut-être? 2/2

Sur Facebook, Nicholas Opio, un avocat ougandais qui a travaillé avec Mme Kagezi est affligé:

J'ai travaillé avec elle dans les affaires de Kwoyelo. J'ai parcouru le monde avec elle pour des réunions. Repose en paix Joan. Cet acte lâche et criminel n'a pas de place dans notre société. Ces lâches doivent être recherchés, arrêtés et ils doivent être tenus responsables et doivent faire face aux rigueurs de la loi.

Richard Anguria Omongole craint que les enquêtes de police ne puissent produire de résultats:

Terrible, terrible, ce acte de lâcheté. Mon inquiétude, comme pour de nombreux cas précédents, est que la police ne trouvera rien et commencera à chercher des querelles familiales. C'est ce qui nous met tous en danger. RIP Joan

Le maire de Kampala, Erias Lukwago, qui a été démis de ses fonctions, a exprimé sa tristesse:

Suis très attristé par la nouvelle de l'assassinat horrible de ma collègue juriste, JOAN Kagezi, procureur principal de l'Etat. Mon coeur va aux enfants traumatisés, qui étaient sur les lieux de ce crime odieux à Kiwatule. Que son âme repose dans la paix éternelle

Entre-temps, le chef de la police ougandaise, le Général Kale Kayihura a publié une déclaration sur Facebook:

Ce soir, lundi 30 mars 2015, la procureure Joan Kagezi, chef de la section antiterrorisme et crimes de guerre près la haute Cour ougandaise, a été abattue à 19h15, près de sa résidence à Kiwatule, une banlieue de la ville lorsqu'elle rentrait à la maison avec ses enfants.

Elle s'était arrêtée à son étal de fruits habituel au bord de la route, lorsque les criminels sur une moto de type boxer, de couleur rouge, se sont arrêtés à côté du véhicule stationné et lui ont tiré deux fois dans le cou et l'épaule, par la fenêtre du côté du conducteur. Elle conduisait le véhicule elle-même.

Le directeur du CIID, l'inspecteur général adjoint de la police Grace Akullo qui, par hasard conduisait à une certaine distance derrière elle, a été le premier policier à arriver sur la scène.

Elle a coordonné l'évacuation de la défunte à l'hôpital Mulago, où la victime a été déclarée morte à l'arrivée. Ses trois enfants qui étaient avec elle sont sortis indemnes.

Mme Joan Kagezi était en charge de la Division des crimes internationaux tels que le terrorisme, les crimes de guerre et la traite des personnes.

Au moment de sa mort tragique, elle était le procureur principal dans l'affaire des personnes soupçonnées dans l'attentat terroriste de 2010, maintenant devant la Haute Cour.

Elle travaillait aussi avec la police dans la poursuite des suspects dans la récente vague de meurtres, de vols et de terrorisme dans la région de Busoga et Kampala. Sa mort est une grande perte pour le pays.