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Luis Carlos Diaz, journaliste, collègue et ami, est porté disparu au Venezuela

mardi 12 mars 2019 à 10:42

“Où est Luis Carlos ?” Illustration de la campagne numérique partagée par Provea. Le texte indique à quelle heure, le 11 mars, il a été en contact avec quelqu'un pour la dernière fois et l'heure de son dernier tweet.

Le 11 mars au soir, la commentatrice politique Naky Soto a twitté que son époux, le journaliste vénézuélien Luis Carlos Díaz, avait disparu depuis cinq heures. [Information récente] Le Syndicat des travailleurs de la presse (en espagnol, le SNTP) a rapporté que Luis Carlos est détenu par le service de renseignements vénézuélien (le SEBIN) :

URGENT Une commission du SEBIN confirme que le journaliste Luis Carlos Díaz est détenu par la police. Ils ont pointé des armes sur les journalistes [et membres du Syndicat de la presse] Marco Ruiz, Luz Mely Reyes et Federico Black.

Quelques heures auparavant, Naky Soto avait twitté que Luis Carlos Díaz avait disparu depuis cinq heures :

Cher tous : j'ai perdu contact avec Luis Carlos à 17h30 cet après-midi, quand il m'a dit qu'il rentrait à la maison pour se reposer, parce qu'il allait faire une émission spéciale à Union Radio Net de 22h à 5h. #OùEstLuisCarlos

Luis Carlos est en vélo, mais depuis 17h30 je n'ai pas eu de nouvelles de lui et :
– il n'est pas à la station de radio
– il n'est pas à la maison
– il n'a pas twitté
– il ne répond pas au téléphone
– il ne répond ni aux SMS ni aux messages sur WhatsApp
#OùEstLuisCarlos

[Information récente] Luz Mely Reyes a couvert en direct et sur place la perquisition du domicile de Díaz et Soto par des membres du SEBIN. Le SNTP a également commenté l'événement :

URGENT En ce moment, à 3h30 du matin, une commission du SEBIN arrive au domicile du journaliste et militant des droits humains Luis Carlos Díaz, porté disparu depuis 17h30. #OùEstLuisCarlos

D'autres organisations en faveur des droits humains et de la liberté d'expression se sont jointes à la campagne #DondeEstaLuisCarlos (Où est Luis Carlos), qui est en ce moment un mot-clic en tête des tendances dans la twittosphere vénézuélienne.

Díaz est un journaliste et militant des droits humains et de la liberté d'expression, bien connu et très apprécié au Venezuela et à l'étranger pour ses analyses et sa critique du gouvernement de Nicolas Maduro. Il travaille depuis longtemps avec son épouse Naky Soto, elle aussi commentatrice politique connue. Ils produisent des vidéos et des programmes radios numériques sur la politique et les droits humains au Venezuela. Il travaille aussi en tant qu'éducateur et promoteur de la création d'espaces de médias citoyens et de projets médiatiques indépendents. Il fait partie de la communauté de Global Voices depuis plus d'une décennie.

Pour moi, Luis Carlos est une personne formidable, très au fait de l'information et des réseaux dans notre Venezuela chaotique. Il a été capable de créer des liens avec la société (depuis la critique aux espaces culturels) #OùEstLuisCarlos

Seulement quelques jours avant sa disparition, le programme Con el Mazo Dando, affilié à l'État, a diffusé un clip vidéo d'une des émissions récentes de Díaz. Le présentateur du programme, le politicien Diosdado Cabello, a insinué que Díaz avait aidé à orchestrer la coupure d'électricité généralisée qui avait maintenu les Vénézuéliens dans le noir pendant plus de vingt-quatre heures les 7 et 8 mars.

Aucune preuve ne permet d'étayer cette affirmation.

Depuis 17h30, personne ne sait où est le journaliste Luis Carlos Díaz. Il a été accusé d'être un “influenceur similaire aux fascistes” sur le compte Twitter de “Con el mazo dando”. #OùEstLuisCarlos

Notre ami Luis Carlos est l'un des visages les plus visibles de la dissidence journalistique du Venezuela. Il y a quelques jours, [l'émission] Con el Mazo Dando de Diosdado a pris LC pour cible avec une propagande digne de théories de conspiration, le liant à la coupure d'électricité généralisée “planifiée par les États-Unis”. #OùEstLuisCarlos

Alors que le temps s'écoule sans information fiable, le SNTP a rejoint la campagne qui a commencé la recherche [de Díaz] au quartier général du SEBIN. [Information récente] Ils ont confirmé un peu plus tard que Díaz était en détention.

Cela fait sept heures que Luis Carlos Díaz a disparu. Il est journaliste pour l'Union Radio Noticias et militant des droits humains. Nous sommes au quartier général du SEBIN et ils nient le détenir. #OùEstLuisCarlos

Cependant, le journaliste Vladimir Villegas a dénoncé la détention de Díaz par les forces du gouvernement :

Nous avons été informés que le journaliste d'Union Radio Net Luis Carlos Díaz est détenu par les forces de sécurité de l'État. Nous exprimons notre inquiétude pour son intégrité physique. Nous réclamons toute information sur sa situation et le respect de ses droits humains.

La communauté de Global Voices est solidaire de Luis Carlos, de sa famille et de tous les autres journalistes indépendents qui demandent des comptes au pouvoir au Venezuela. Nous espérons qu'il sera bientôt libéré, sain et sauf, et nous continuerons à mettre les informations à jour au fur et à mesure qu'elles apparaîtront.

Une appli japonaise “traduisant” pour les maris les phrases de leurs femmes provoque des réactions en ligne violemment négatives

lundi 11 mars 2019 à 14:27

L'appli Cope, qui encourage au partage entre parents des responsabilités dans l'éducation des enfants, vise à faciliter la communication entre époux en faisant agir comme intermédiaire la mascotte Cope. Source image : site web officiel de Cope, largement partagée sur les médias sociaux.

Un confiseur japonais a été accablé de reproches pour avoir consolidé les rôles traditionnels de genre et facilité les manipulations émotionnelles en lançant une campagne publicitaire et une application mobile pour aider les maris à “traduire” ce que disent leurs femmes. Une partie du contenu promotionnel a été depuis retiré de la toile, mais pas avant d'avoir allumé une remise en question des pré-supposés sur les différences biologiques entre hommes et femmes.

Le populaire fabricant de confiseries Ezaki Glico établi à Osaka a créé l'appli “Cope” pour accompagner le lancement de son ‘Projet Co-Sodate (Co育てProject)’. ‘Co-Sodate’ est une adaptation du mot japonais pour élever les enfants, kosodate (子育て). Le “co-” vient des mots anglais “communication”, “coopération” et “co-parenting.”

Selon les termes de Glico, le but du projet (à côté de la publicité pour les produits Glico) est de “s'assurer que tous les enfants qui naissent grandissent en bonne santé et riches de cœur” (生まれてきてくれる子どもには、元気に、ココロ豊かなに育ってほしい!).

L’application gratuite “Cope” de la campagne permet aux époux d'échanger des messages, de lire des articles sur la grossese et l'éducation des enfants, et de garder les traces des soins aux enfants. Selon le journal japonais Asahi Shimbun, l'appli a été essentiellement développée par des salariées de Glico, mais le projet a été supervisé par Ihoko Kurokawa, auteur de plusieurs livres sur les relations homme-femme, dont “Comment s'occuper de sa femme” (妻のトリセツ, Tsuma no Torisetsu).

L'Asahi Shimbun explique que les conseils de l'appli Cope aux maris comprennent l'identification, l'interprétation et le décodage des “huit modèles” qui se présentent lorsqu'une épouse se fâche, et “traduit” la signification supposée véritable de ce qui est dit :

When she says, “It is meaningless for us to remain together,” the site says what she really means is, “How do you feel about me?”

When she says, “It is really hard to do this,” the site says she really wants to say, “Will you appreciate what I did?”

Quand elle dit : “Ça n'a pas de sens qu'on reste ensemble”, le site indique que ce qu'elle veut réellement dire est : “Que penses-tu de moi ?”

Quand elle dit : “C'est vraiment dur à faire”, le site indique que ce qu'elle veut  réellement dire est : “Tu seras content de ce que j'ai fait ?”

L'appli Cope s'est très vite attiré les critiques sur Twitter pour son apparent mépris des préoccupations des femmes.

Comme dit l'image : “C'est vraiment dur à faire” n'équivaut pas à “Tu seras content de ce que j'ai fait ?” mais à “Tu devrais le faire aussi”.

J'ai été vraiment choquée par cet étalage flagrant de dédain pour les femmes, fondé sur l'idée qu'il ne faut pas prendre au sérieux la parole des femmes, mais juste faire un geste montrant un peu de compassion et de gratitude.

Je l'ai corrigé pour vous. C'est beaucoup mieux, vous ne trouvez pas ?

La page web de Cope expliquait aussi comment les hommes peuvent manipuler et détourner les conversations loin des sujets sensibles.

Par exemple, si une femme demande : “Qu'est-ce qui est plus important pour toi, ton travail ou ta famille ?”, la campagne Co-Sodate propose à l'homme de répondre “Je suis désolé de te faire te sentir seule”, et de rapidement changer le sujet pour parler de ses propres problèmes au travail :

Cette appli n'est autre qu'une porte de sortie facile pour les hommes égoïstes qui veulent échapper aux responsabilités des tâches ménagères et de l'éducation des enfants, mais ne veulent pas que leurs femmes soient en colère contre eux. Les développeurs quant à eux ont fait preuve d'une insensibilité et d'une irresponsabilité extrêmes rien qu'en créant une telle appli.

La seule solution est que les maris (et pères) aident aux tâches domestiques et à l'éducation des enfants. Quand va-t-on le comprendre ?

Cerveau sexué

Du contenu retiré depuis du site web de Co-Sodate, mais copié et conservé sur plusieurs blogs, généralisait que les difficultés de communication entre hommes et femmes sont dues pour la plupart à des différences d'ordre neurologique :

脳を装置として見立ててみると、男性脳と女性脳では回路のかたちや信号の種類がちがうから、当然、おなじ入力に対しての出力も変わってくるよ。

Puisque les cerveaux masculin et féminin diffèrent en termes de structure des circuits et signaux, les sorties vont différer même si les entrées reçues sont les mêmes.

Les conseils comportaient des généralisations telles que :

男性脳には『察する機能』がついていないと思った方がいいよ![…] 女性脳は何より共感を求めているの。

La “fonction intuition” du cerveau masculin laisse beaucoup à désirer […]  Avant tout le reste, le cerveau féminin désire la compassion.

J-Cast News rapporte que les présupposés de la campagne Co-Sodate sur les différences entre les cerveaux masculins et féminins ont été critiqués comme étant de la pseudo-science.

Yuko Yotsumoto, professeur de neuropsychologie cognitive à l'Université de Tokyo, a critiqué les conseils de Co-Sodate avec ces arguments :

最近の研究では、『男女間には個人差を超えて一般化できるような脳の構造や機能の差はない』という説が有力です。したがって、これは事実だとは言えません。

La recherche récente indique que les disparités dérivant des différences individuelles sont supérieures à toute disparité relevant d'une généralisation sur le genre. Les assertions [faites par le site web] ne sont donc pas basées sur des faits.

Yotsumoto ajoutait que les différences basées sur le genre, quelles qu'elles soient, ne relevaient pas nécessairement d'une “structure différente des circuits et signaux” comme prétendu, mais pouvaient être dues à l'influence de l'environnement.

『男女で同じ入力に対する出力に違いがある』ということは否定できませんが、その理由を脳の構造や回路に求めるのは間違っています。『男女がおかれた立場の違い、家庭生活における役割の違い』のほうが、大きな要因なのではないでしょうか?」「他の要因についての言及もせず、安易に『脳科学』に理由を帰属させることは浅慮であると私は考えます。

Si je ne veux pas nier que les sorties des cerveaux féminins et masculins vont différer alors qu'ils reçoivent la même entrée, c'est une erreur que d'imputer cette différence à une différence de structure des circuits et signaux. Cela a peut-être plus à voir avec les postes différents occupés par les hommes et les femmes, et les rôles différents qu'ils assument dans le foyer. Se précipiter pour attribuer ces différences à une “science du cerveau” sans même envisager d'autres causes potentielles est dangereusement irresponsable.

L'interprétation de Yotsumoto est appuyée par les recherches récentes menées par d'autres spécialistes de neurosciences à travers le monde, qui raisonnent que la notion de cerveau sexué a germé “du besoin d'une justification scientifique du statut inférieur des femmes”, et sert à renforcer les stéréotypes de genre.

Dans une tribune, la chroniqueuse indépendante Ai Nakazaki critique le site web Co-Sodate, soulignant combien se centrer sur de tels stéréotypes de genre peut minimiser l'importance des différences individuelles.

このジェンダーステレオタイプに基づいて、「男は~」「女は~」と語る表現は、至るところにあふれている。男は理論的で女は感情的、男は狩猟本能があり女は母性本能がある、男はニブくて女は鋭い、男は解決策を求めるが女は共感を求めているだけ……など典型的なものがいくつもある。しかし男も女も「人それぞれ」で、こうした分け方に何の意味もない。

On voit partout ce type de langage basé sur les stéréotypes de genre : “Les hommes sont comme ci” et “les femmes sont comme ça”. Les hommes sont logiques et les femmes sont émotives, les hommes ont des instincts de chasseurs et les femmes des instincts maternels, les hommes sont émotionnellement nuls alors que les femmes sont intuitives… et autres lieux communs.

Pourtant, les hommes et les femmes sont tous des individus, les diviser ainsi en deux catégories distinctes ne rime à rien.

Comment les médias sociaux ont raconté la dernière poussée de fièvre entre l'Inde et le Pakistan

dimanche 10 mars 2019 à 12:05

Le mot-clic #DitesNonALaGuerre a été tête de tendance toute la semaine

Deux frères attendent devant un magasin fermé dans la vallée de Hunza, au Gilgit-Baltistan, Pakistan. Photo: Awais Yaqub, Everyday Pakistan sur Instagram, utilisée avec autorisation

Après la confrontation avec l'Inde dans la région disputée du Cachemire fin février, qui a mis les deux pays au bord d'une guerre totale, les gens ordinaires sont allés sur les médias sociaux pour raconter leur vécu, contrer la désinformation, et appeler à la paix.

Les relations entre les deux pays se sont gâtées après un attentat terroriste du 14 février au Jammu-et-Cachemire administré par l'Inde, qui a tué 14 soldats indiens d'un convoi de 40 militaires. Le 26 février, l'Inde a riposté en bombardant le village de Balakot, situé dans la partie du Cachemire contrôlée par le Pakistan, à quoi le Pakistan a contre-attaqué en abattant deux avions militaires indiens, avec pour résultat la mort de deux pilotes et la capture du commandant, Abhinandan Varthman.

Le 1er mars, le Pakistan a rendu Varthman aux officiels indiens en geste d'apaisement, et le Premier ministre du Pakistan invitait Delhi à des discussions.

Lire : Montée des tensions entre le Pakistan et l'Inde après les manoeuvres de représailles réciproques

Les deux voisins et possesseurs de l'arme nucléaire ont connu plusieurs épisodes de conflit armé pendant leurs 71 années d'existence de pays indépendants. La différence est qu'au 21ème siècle, les médias sociaux jouent un rôle de premier plan, puisque les acteurs gouvernementaux et les individus ordinaires de part et d'autre de la frontière rapportent en ligne les événements minute par minute.

Dès les premières heures des signes annonciateurs de querelle armée, le mot-clic #SayNoToWar (Dites non à la guerre) était en tête de tendance :

Regardez ce clip, les médias indiens. C'est vous, les guerriers du clavier et Modi qui en êtes responsables.
Elle n'est pas du Pakistan, elle est la femme du copilote Ninad dont l'avion a été abattu quand il a traversé la Ligne de contrôle.
Voyez la douleur des familles des deux côtés quand on leur remet les corps de leurs êtres aimés

Quand le Pakistan a fermé son espace aérien, de nombreuses personnes bloquées dans les aéroports ont confié leurs malheurs sur Twitter.

L'armée pakistanaise continue à craindre que l'Inde exécute des frappes aériennes punitives. Depuis la semaine dernière, l'espace aérien du Pakistan reste fermé aux survols internationaux. Quant aux vols intérieurs, ils sont limités à un étroit corridor à l'ouest, comme ce vol d'Islamabad à Karachi.

L'espace aérien du Pakistan est resté fermé plus d'une semaine avant de rouvrir progressivement au trafic intérieur le 1er mars. Les vols suivant certaines routes restent soumis à des restrictions. L'Inde a également fermé quatre aéroports pendant un bref laps de temps.

Le mari de l'écrivaine et poète Mina Malik Hussain est aussi resté bloqué :

Mon mari ne peut pas rentrer parce que notre espace aérien est fermé. J'ai dit aux enfants que son vol est retardé. Ma belle-mère et moi échangeons des regards au-dessus de leurs têtes. Je pense à toutes les épouses de l'armée et de l'aviation ici et de l'autre côté, et ça me donne mal au ventre. Arrêtez cette folie.

Fatima Ali Haider, fondatrice de l'organisation Grief Directory qui assiste les victimes de violences extrémistes, est restée bloquée une semaine à Karachi pendant son voyage de retour de Bangkok. Mère seule, elle avait laissé sa fille de six ans à la maison avec sa belle-mère. Je lui ai parlé, et voici ce qu'elle m'a dit :

I got stuck in a foreign country and that also to attend a conference which was on a topic of relevance. I had left my daughter behind and it was an emotionally traumatic experience.

My daughter also wanted to know why I wasn’t able to come home and when I told her, she asked me why India and Pakistan couldn’t be friends since it was easier to be friends than enemies.

Je me suis trouvée coincée dans un pays étranger et cela aussi pour assister à une conférence qui était sur un sujet pertinent. J'avais laissé ma fille à la maison et émotionnellement ç'a été une expérience traumatisante.
Ma fille a aussi voulu savoir pourquoi je n'ai pas pu rentrer à la maison, et quand je le lui ai dit, elle m'a demandé pourquoi l'Inde et le Pakistan ne pouvaient pas être amis puisqu'il est plus facile d'être amis qu'ennemis.

Omar Badi-uz-Zaman a raconté sur Facebook le calvaire subi par la professeure de sa mère qui se rendait au Pakistan depuis l'Inde. Après le décès de sa mère, elle n'a pas pu prendre de vol de retour en Inde, et la circulation du train de l'amitié avait aussi été interrompue, écrit Badi-uz-Zaman.

Pendant plusieurs nuits, les gens ont entendu et vu les chasseurs de l'armée de l'air pakistanaise survoler la capitale Islamabad. La microbiologiste Zeea Hassan Talib et Anas Mallick ont tweeté à ce sujet :

Réveillée à minuit par le bruit de nos jets Thunderbird faisant du surplace continuellement et plus tard à cause des éclairs et de l'orage. Une des nuits les plus effrayantes ici à Islamabad. Sois prudent, Pakistan

Avions de combat et tonnerre de l'orage, rugissant tous deux depuis les nuages d'Islamabad

Tandis que des gens à Sialkot [à quelques kilomètres seulement du Jammu] et dans des parties de Karachi auraient dit avoir eu instruction de rester chez eux, les autorités n'ont pas publié de communiqué officiel. Le ministère pakistanais de l'Intérieur a tweeté ce qui suit :

Merci de partager ceci !!!
Les gens de toutes les régions frontalières y compris l'Azad Cachemire, Sialkoy, sont priés de ne partager sur les réseaux sociaux aucune photo ou vidéo des mouvements de l'armée, ça vous apporterait quelques likes ou retweets mais ça donnerait aussi des INDICES à l'ennemi qui pendant une guerre sont cruciaux.
Abstenez-vous s'il vous plaît !

Les médias sociaux se sont aussi avérés un terrain fertile pour la désinformation, qu'individus et organisations se sont efforcés de parer. Sachee Khabar a tweeté un article d'Alt News :

Image sans rapport, prétendument de la mère du Lt Col Abhinandan se réjouissant de sa libération, rapporte Alt News

Le 7 mars 1929, Gandhi prônait une révolution pacifique en Birmanie 

dimanche 10 mars 2019 à 11:48

Une photo de la dernière rencontre entre U Nu et le Mahatma Gandhi, prise à Birla House à Delhi, Inde, le 4 décembre 1947. Photo et légende : The Irrawaddy.

Le présent article de Wei Yan Aung provient de The Irrawaddy, un site indépendant d'information au Myanmar, et est reproduit par Global Voices dans le cadre d'un accord de partage de contenu.

Le Mahatma Gandhi, leader du mouvement de l’indépendance de l’Inde contre le régime colonial britannique, arriva en Birmanie le 7 mars 1929, afin de recueillir des dons de ressortissants indiens pour la Handloom Association of India et partager son expérience avec le peuple birman.

Il s’adressa au peuple au Jubilee Hall et au Fytche Square (renommé Mahabandoola Park) à Rangoun (aujourd'hui Yangon) et s’entretint avec des moines bouddhistes à la pagode Shwedagon :

I am glad to find you telling me that the hponegyis (Buddhist monks) are leading the political movement in Burma, but you have a serious responsibility upon your shoulders when you undertake leading a political battle.

History shows that the clergy has not always interfered with the political matters to the benefit of mankind. Very often unworthy ambition has moved the clergy of the world as it has moved unscrupulous men to take part in politics, and if now you hponegyis aspire to lead the political movement of this, one of the fairest lands on the face of the earth, you are shouldering a tremendous responsibility.

Je suis heureux de vous entendre dire que les hponegyis (moines bouddhistes) sont les chefs de file du mouvement politique en Birmanie, vous avez cependant une lourde responsabilité sur les épaules lorsque vous vous engagez dans une bataille politique.

L’Histoire nous montre que le clergé n’est pas toujours intervenu dans les affaires politiques au profit de l’humanité.Très souvent, une ambition indigne a guidé le clergé du monde comme elle a guidé des hommes sans scrupules à se lancer en politique, et si vous, les hponegyis, aspirez à mener le mouvement politique de ce pays, l’un des plus beaux de la planète, vous assumez alors une énorme responsabilité.

Lors de sa visite de deux semaines, il se rendit dans plusieurs villes du centre et du sud de la Birmanie. Il déclara à Mandalay :

In India it is a common saying that the way to swaraj (which means independence for India) is through Mandalay. The British government has taught you too a great lesson by incarcerating one of India’s great sons here.

The way to swaraj is the way of suffering—indeed no country has come to its own without suffering.

On dit souvent en Inde que le chemin qui mène au swaraj (ce qui signifie l’indépendance de l’Inde) passe par Mandalay. Le gouvernement britannique vous a également enseigné une importante leçon en emprisonnant ici l’un des plus grands fils de l’Inde.

La voie du swaraj est celle de la souffrance — en effet, aucun pays n'est devenu indépendant sans souffrir.

En octobre 1924, le leader politique indien Subhas Chandra Bose avait été incarcéré à Mandalay pour une peine de deux ans et demi pour avoir défié le régime colonial. Au cours de sa visite, Gandhi déclara :

I have no other and no better guidance to offer to you than to commend to your attention the general principle of non-violence, in other words, self-purification.

Le seul conseil que je puisse vous donner, et je n’en ai pas de meilleur, est de porter une attention particulière au principe général de non-violence, en d’autres termes, à l’auto-purification.

Il termina sa troisième visite dans le pays le 24 mars. Avant 1929, il s’était rendu en Birmanie en 1902 et en 1915.

La non-violence prônée par Gandhi a par la suite inspiré la conseillère d’État birmane Daw Aung San Suu Kyi dans son combat pour la démocratie. Le Gandhi Hall et le Gandhi Hospital sont devenus des lieux importants dans les systèmes politique et de santé birmans. U Nu devenu le premier Premier ministre de Birmanie rendit visite à Gandhi à New Delhi en 1947, avant l'assassinat de ce dernier l’année suivante.

Après le meurtre d'un jeune désarmé dans un supermarché, témoignages d'internautes sur ce qu'est grandir au Brésil dans la peau d'un noir

samedi 9 mars 2019 à 22:52

Le vigile maintient Pedro au sol même après qu'il a perdu conscience. Capture d'écran d'une vidéo d'un auteur anonyme, largement diffusée au Brésil. Téléchargée par Poder360.

Dans une vidéo de deux minutes largement partagée sur internet, on peut voir Pedro Henrique Gonzaga, 19 ans, face contre terre dans un supermarché de Rio de Janeiro, Brésil, les deux mains immobiles le long de son corps tandis que le vigile Davi Amâncio est couché sur lui, l'agrippant par le cou .

Un passant hurle : “Ses mains sont inertes” ; un autre dit: “Il est inconscient”. Mais le vigile refuse de lâcher prise. A un homme qui s'approche tout en filmant la scène, il demande : “Pourquoi tu filmes ça ? T'es de la police ? Tu peux pas filmer dans le magasin !” Une femme remarque que Pedro n'a rien fait, et le garde la rabroue : “Tu mens !”

C'était un mercredi, le 14 février. Pedro a été emmené à l'hôpital et il a été déclaré mort par arrêt cardiaque moins d'une heure après.

La direction du magasin a fait paraitre une note spécifiant que Pedro avait tenté de voler l'arme d'Amâncio. Une vidéo de CCTV montre Pedro discutant avec lui et tombant par terre à deux reprises avant d'être maîtrisé.

Un jeune homme noir est asphyxié à mort, par un agent de sécurité blanc, dans un supermarché d'un quartier chic de Rio de Janeiro, Brésil

Amâncio a été arrêté sur place, mais aussitôt relâché sous caution. Il n'avait encore jamais été accusé de crime auparavant. Le chef de la police en charge du dossie, a déclaré à la presse qu'Amâncio “avait réagi de manière excessive en légitime défense”.

La famille de Pedro, qui était avec lui dans le magasin lorsqu'il s'est fait tuer, a déclaré à la police qu'ils étaient sur le chemin de la clinique de désintoxication pour soigner l'addiction de Pedro et qu'ils s'étaient arrêtés là pour faire des courses.

La mort d'un jeune homme noir désarmé tué par un agent de sécurité blanc est quelque chose d'habituel et de familier pour beaucoup de gens au Brésil.

Un tiers des 60.000 homicides enregistrés chaque année dans ce pays d'Amérique du Sud concernent des hommes noirs de moins de 20 ans. Toutes les 23 minutes, un homme noir est tué. Beaucoup ont grandi en prenant l'habitude d'être pris pour des criminels par les autorités ou la société dans son ensemble.

Fioti, un célèbre rappeur et producteur musical au Brésil, se souvient sur Twitter de la première fois qu'il a été arrêté par les flics :

La première fois que j'ai été arrêté et fouillé j'avais 11 ans. Croyez-le ou non, j'allais au centre commercial, avec mon frère, on allait au cinéma. À l'arrêt de bus, devant tout le monde, la police nous a fait enlever nos chemises et ils ont pointé leurs armes sur nous. J'ai bien cru que j'allais mourir, et c'était juste la première fois.

L'activiste Rene Silva se remémore les affaires passées d'enfants et d'adolescents noirs assassinés qui ont été ensuite décrits comme criminels dans les médias sociaux.

Je ne sais pas si vous vous en souvenez, mais quand Eduardo est mort, ici au Complexe do Alemão [une favela à Rio de Janeiro], ils ont essayé de toutes les façons d'accuser ce gamin de 10 ans qui était juste avec son téléphone portable devant la porte de sa maison. La photo d'un gamin brandissant une arme a même surgi de nulle part et ils ont dit que c'était lui.

[Avec] Maria Eduarda, qui est morte DANS SON ÉCOLE pendant un cours d'éducation physique, ils ont inventé qu'elle roulait à moto avec des mecs armés de fusils. C'est toujours la même histoire, ils essaient de nous incriminer de n'importe quelle manière.

Eduardo de Jésus, 10 ans, a été abattu en avril 2015 par un policier qui n'était pas en service. Les enquêteurs ont conclu qu'il avait agi en légitime défense, répondant à un coup de feu d'un tireur non identifié — ce qui contredit la déclaration d'un témoin affirmant qu'il n'y avait eu aucun coup de feu.

Maria Eduarda da Conceição, 13 ans, a été tuée de trois balles dans le corps en mars 2017 dans la cour de son école pendant une fusillade opposant la police et les membres d'un gang de la drogue. Un policier a été accusé de meurtre.

Sur un fil Twitter, la chanteuse MC Carol raconte sa précoce expérience du racisme. Après avoir été sélectionnée, dans son école, pour tenir le rôle de la “fiancée” au spectacle de la Saint Jean, une célébration traditionnelle au Brésil, elle a vu son partenaire, un garçon blanc, refuser de danser avec elle. Carol affirme qu'elle a grandi dans la crainte des blancs.

Ce fut un de mes premiers contact avec le racisme. À vrai dire, le tout premier fut au PREMIER JOUR D'ÉCOLE. Pour mon premier jour, j'ai été enfermée dans les toilettes par un groupe de filles blanches ! (j'ai déjà posté à propos de ça et on m'a demandé comment je faisais pour me souvenir de ça, alors que c'est si loin, ça doit être parce que quand ça fait très mal, ça marque)

L'écrivain Ale Santos, qui s'est fait connaître sur Twitter pour ses fils de discussions sur l'histoire brésilienne, résume ce que représente le meurtre de Pedro Gonzaga :

Le racisme brésilien est un crime parfait : il crée les conditions qui répandent la violence et au lieu de guérir la société, il préfère exterminer les jeunes qui correspondent au profil raciste d'un criminel.

C'est un vrai génocide, mis en évidence par les statistiques. #LesViesNoiresComptent

Trois jours après le meurtre de Pedro, des manifestations ont éclaté à travers le Brésil dans cinq des plus grandes villes du pays. On pouvait y voir des banderoles où était écrit “vidas negras importam” une traduction mot à mot de “Les vies noires comptent”, un mouvement né aux États-Unis en 2014 qui s'est répandu ces dernières années au Brésil.

Comme une étudiante de 19 ans, Lyz Ramos, l'a déclaré au  Guardian: “Nous devons prendre position contre ça pour rester en vie. C'est un sujet essentiel.”