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Crise, oh ma crise, Da Doo Ron Ron…

mercredi 16 octobre 2013 à 23:27

BankruptSpedometer

Il paraît, me souffle-t-on dans l’oreillette, que sur BFMTV, on annonce que la crise est passée, tout au moins dans certains pays comme l’Italie ou l’Irlande. Pourquoi pas, après tout ? Les présidents successifs de ce pays, Nicolas Sarkozy en tête n’ont ils pas martelé que tout était réglé ? Le FMI et autres institutions internationales ne se félicitent-elles pas à chaque accord sur un « plan de sauvetage de la dernière chance » ? L’ABE n’a-t-elle pas organisé des stress tests pour mesurer la bonne santé des banques européennes ? La plupart d’entre elles n’ont-elles pas passé haut la main ces tests ? Passons sous silence que des établissements qui avaient passé les tests sans souci ont fait faillite par la suite, c’est sans doute la « marge d’erreur » nécessaire et habituelle. Non, franchement, tout va bien.

D’ailleurs, si l’Irlande commence à aller mieux, c’est que tout va aller mieux car, vous le comprendrez aisément, la macro-économie c’est du binaire, on analyse un agent dans son coin et on le déclare sain ou pas. Impossible qu’il interagisse avec d’autres agents. Comme les autres pays de la zone euro ou le reste du monde.

Non, franchement, tout va bien.

Il n’y a que les mauvais coucheurs pour dire que rien n’est fini. Comme votre serviteur.

Mais pas uniquement.

Le FMI a publié une intéressante étude selon laquelle les banques espagnoles (qui ont déjà englouti 100 milliards d’euros pour être « sauvées ») et italiennes détiendraient un potentiel de créances douteuses auprès des entreprises pour un montant de 230 milliards d’euros. Une bagatelle.

S’il n’y avait que cela… Les banques européennes placent des créances sur les pays faibles de la zone comme collatéral auprès de la Banque centrale européenne qui à son tour accorde des liquidités aux banques en difficulté. Les banques mentent à la BCE sur la valeur réelle de ce collatéral, la BCE fait semblant de ne rien voir.

Non, franchement, tout va bien.

Ah, il y a aussi ces mauvais coucheurs qui font remarquer que les banques européennes ont un leverage ratio de 26 pour 1 (elles empruntent 26 lorsqu’elles ont 1 en caisse, pour faire simple), un chiffre que Lehman Brothers avait juste dépassé lors de sa faillite dont on connaît les effets.

Mais rassurons-nous, les banques européennes vont être auditées en profondeur par les autorités de la zone. C’est Peter Praet, responsable des ressources humaines et membre du directoire de la BCE qui le dit au Monde. Le Monde titre d’ailleurs ainsi son interview de Peter : La BCE fera une évaluation des banques « sans concession ». Entre nous, sachez que le secteur bancaire tremble depuis la publication de cet entretien, les téléphones sonnent, c’est le brans-le-bas de combat ! Pour preuve : toutes les lumières sont allumées aux derniers étages des tours des banques ce soir à Paris. Ça cogite. Ça flippe.

banker-small

Quelles sont les conditions pour que l’évaluation des bilans bancaires soit crédible ?

Elle devra être transparente et rigoureuse. Nous prenons cet exercice très au sérieux et nous mettrons tout en œuvre pour qu’il soit sans concession.

Notez que l’ABE disait la même chose à chaque exercice de stress tests. On sait à quoi cela a ressemblé…

Non, franchement, on est rassurés, tout va bien.

La crise est derrière nous.

Attention toutefois, elle court vite…

 

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La E-Cigarette : comprendre le succès du vapotage hackable et DiY

lundi 14 octobre 2013 à 17:43

modsAvec environ 1,5 million de vapoteurs rien qu’en France, il devient difficile de ne pas commencer à se poser des questions sur ce phénomène. Est-ce un bon moyen pour arrêter de fumer, est-ce dangereux pour la santé, les produits que l’on trouve dans le commerce sont-ils de bonne qualité, ces produits doivent-ils être distribués en pharmacie (…) ? Cet article sort un peu des sujets que nous avons l’habitude de traiter sur Reflets, mais au bout de 4 mois de tests de différents produits, de différentes techniques de vapes, votre serviteur va tenter de répondre à quelques unes de vos questions et surtout de vous expliquer pourquoi la vape est en passe de devenir bien plus qu’un substitut viable à l’arrêt de la cigarette traditionnelle. Bien évidemment, il s’agit ici d’avis personnels qui touchent à des questions de santé publique, la prudence reste donc de mise. L’objet de cet article n’est évidemment pas de convertir des non fumeurs à l’absorption de nicotine et s’adresse plus à un public majeur, avisé et conscient des risques que pourraient comporter cette pratique.

Arrêter de fumer

Avec 73 000 morts par an en France le tabac est une question de santé publique majeure. Il n’y a malheureusement aucune recette miracle pour arrêter de fumer, les patchs, les substituts nicotiniques, les recettes de grand-mères… la volonté. A chacun sa recette de sorcier  pour venir à bout de la sucette à cancer. Mais aujourd’hui on s’accorde facilement à dire que le meilleur substitut à la cigarette traditionnelle, c’est la e-cigarette.

Les premières cigarettes électroniques font leur apparition vers 2003/2004, suite à une invention d’un pharmacien chinois, Hon Lik qui déposera un brevet en 2005. Mais les cigarettes électroniques que nous connaissons aujourd’hui utilisent un autre procédé, vaporisant un liquide par le biais d’une résistance breveté vers 2009 par le chinois David Yunqiang Xiu. Ce procédé produit des effets qui permettent à beaucoup de se passer de la cigarette traditionnelle en produisant sur la santé des effets supposés moindres.

Mes débuts dans le vapotage

Le Kite Ego traditionnellement refourgué aux débutantds

Le Kite Ego traditionnellement refourgué aux débutants

Cela faisait plus d’un an que plusieurs personnes de mon entourage vapotaient. Leurs retours étaient dans l’ensemble plutôt positifs, ce qui n’était pas du tout le cas avec les générations de e-cigarettes que l’on trouvait dans le commerce début 2010. Mes amis « suceurs de stylos » m’assuraient qu’ils avaient très nettement diminué leur consommation de tabac, mais au final, peu avaient réellement arrêté la cigarette. Début juin 2013, je me décide à franchir le cap. Je passe alors la porte d’un magasin parisien et j’en ressors avec un kit EGO : deux batteries, deux chargeurs, deux atomiseurs, et quelques liquides (à 12 mg de nicotine) avec différents arômes. Très vite, je me rends compte que les têtes et mèches d’atomiseurs doivent être changées régulièrement, ces consommables sont aussi vendus en boutique. Ce point me contrarie alors un peu car au final, on sent bien qu’on a entre les mains une mécanique relativement simple mais que les consommables de ces atomiseurs (des clearomizers Stardust) sont surtout un business lucratif pour les vendeurs de e-clopes, carrément pas écolos puisqu’on balance à la poubelle toutes les deux semaines une pièce de métal usinée…

Au bout des 3 à 4 premiers jours d’utilisation, une conclusion s’impose à moi : ça fonctionne. Je n’ai pas du tout envie de fumer une cigarette traditionnelle, je prends même un certain plaisir à passer d’un arôme à l’autre, moi qui était accroc à mon tabac à rouler, celui là et pas un autre. Je trouve ce signe plutôt encourageant et effectivement, après plusieurs semaines d’utilisation, impossible pour moi de revenir aux cigarettes que je fumais, je trouve alors le goût tout bonnement infecte. Mais au bout de deux mois, c’est le drame, je casse ma batterie, le bouton reste enfoncé, mon autre batterie donne aussi des signes de faiblesse, mes atomiseurs font des bulles et j’avale même du liquide de temps en temps. J’en viens vite à la conclusion que si le vapotage fonctionne pas mal du tout pour moi, le matériel, un kit payé un peu plus de 80 euros, est au final de bien mauvaise qualité. Il faut que j’essaye autre chose.

Un ami m’avait mis en garde sur ce type de kits grands publics, les plus vendus aux vapoteurs débutants… il vapote depuis 6 mois, et c’est un véritable geek… vous allez comprendre par la suite pourquoi ce détail est d’une importance capitale.

Mods, atomiseurs, batteries, mèches, résistances, e-liquides… le vapotage hackable et DiY

A ce moment là, je ne me doutais pas encore que j’allais très vite passer du stylo sucette à nicotine à l’œuvre d’art à vapotage et sans nicotine (ou presque)… mais après 6 mois de vapotage, mon ami bien avisé et plein d’excellents conseils, me fait découvrir l’univers des mods et des différents types d’atomiseurs. J’allais glisser en 48 heures du statut de vapoteur un peu frustré d’avoir à exhiber en public son stylo sucette à nicotine à la découverte de beaux objets très efficaces en terme de stimulation pour se substituer à la cigarette, et qui en plus de ça allaient me procurer de joyeux moments de bidouille. Et assez étrangement, j’allais enfin pouvoir assumer parfaitement le passage au vapotage.

Les mods

Un mod, c’est une sorte de réceptacle pour batterie, souvent sous forme de tube dans lequel on peut placer une batterie rechargeable (un accu), il en existe des tonnes, des gros, des petits, des télescopiques, en aluminium, en acier, en bois, en cuivre… Ces mods peuvent inclure un peu d’électronique (contrôle du voltage, des résistances ou du wattage), ou sont au contraire complètement mécaniques, sans aucune électronique. Certains sont gravés par des artistes, en petites séries numérotées et s’échangent plusieurs milliers d’euros. Mais les marques « ténors » se voient souvent remarquablement clonées par des fabricants chinois. Ainsi on trouvera d’excellents mods chinois pour une vingtaine de dollars, copies parfaites de mods de fabrication américaine, grecque ou coréenne qui s’échangent entre $ 100 et $ 300… et encore, quand ces derniers sont disponibles, ce qui a souvent pour effet de faire grimper les prix de particuliers à particuliers. Et tout de suite, ça a quand même une autre tête que l’EGO distribuée dans toutes les boutiques françaises aux vapoteurs débutants…

collection022013

Les atomiseurs

Le fonctionnement des différents atomiseurs est probablement ce qu’il peut y avoir de plus complexe à comprendre pour un néophyte de la vapote. Les atomiseurs et les différentes techniques utilisées sont des mondes en perpétuelle évolution. On en distingue plusieurs catégories :

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Quatre excellents petits atomiseurs Dry (entre 4$ et 15$)

Ces atomiseurs peuvent être single ou dual-coils (une ou deux résistances) et il existe probablement autant de techniques de montages que de vapoteurs. Chacun a ses préférences en fonction de ses goûts et des liquides qu’il consomme. De fait, on sent tout de suite que l’on accède ici à une palette de sensations bien plus vaste que la consommation de cigarettes traditionnelles.

Les batteries

On retrouve généralement 3 types de batteries dans les mods (certains sont compatibles avec les 3, d’autres pas, en fonction de leur taille et de leurs caractéristiques). Ces batteries sont évidemment rechargeables, de types 18350 (les plus petites), 18500 ou 18650 (les plus grosses avec en principe les plus grandes capacités). Plus rarement, dans des mods plus fins, vous trouverez des 10440. Attention, le critère de choix de vos batteries est crucial, certaines peuvent endommager votre mod. Sur un mod full mécanique par exemple, il est impératif de privilégier des batteries de type IMR beaucoup plus stables.

Mèches et résistances

On utilise en général 3 matériaux pour les mèches : la silice (ou fibre de verre), l’acier inoxydable ou le coton. Une bonne mèche c’est une mèche avec une bonne capillarité. Si la majorité des atomiseurs est livrée avec des mèches en silica (silice ou fibre de verre), il faut savoir qu’il plane comme une incertitude sur les effets à long terme de l’inhalation de cette substance et certains soupçonnent un effet « amiante », à savoir de fines pellicules de fibre se déposant sur les poumons et pouvant à terme causer des problèmes pulmonaires… mais en l’absence d’étude sur le long terme, ceci reste de la spéculation, le principe de prudence doit donc être observé. Ainsi, mon gourou vapoteur, qui souhaite conserver l’anonymat, a fait le choix du coton moins susceptible de dégager des microparticules dans les poumons et pouvant être nocives sur le long terme.

Du côté des résistances, on utilise du Kanthal, du fil résistif, de différents diamètres en fonction du montage et de la résistance que l’on souhaite. Les mods électroniques sont recommandés pour les débutants afin de pouvoir mesurer ses résistances, roulées sous les aisselles. Faire ses mèches et ses résistances est probablement l’un des meilleurs moyens d’apprendre à contrôler ce que l’on vapote.

Les e-liquides

Beaucoup de questions de santé sont posées sur les e-liquides. Ces derniers se composent généralement de 4 ou 5 ingrédients : de la glycérine végétale, du propylène glycol, des arômes, de l’eau purifiée, de la nicotine. La majorité des e-liquides que l’on trouve en boutique sont composés à 80% de propylène glycol (certainement parce que ce dernier est 1,5 fois moins cher que la glycérine végétale que l’on trouve par exemple en pharmacie). Cependant, certaines boutiques, comme CleanSmoke, vous proposent des e-liquides sans propylène glycol, que je ne saurai trop vous recommander.

Mais vous pouvez aussi faire vos liquides vous même. Là encore, il ne faut pas faire n’importe quoi. Vous trouverez par exemple d’excellentes bases sur le site allemand 123liquids et d’excellents arômes sur Flavourart. Attention, tous les arômes alimentaires ne sont pas bons pour une consommation en inhalation et peu de fabricants sont à même de garantir que les produits utilisés ne sont pas nocifs pour une consommation en vapotage. En plus de dépenser beaucoup moins d’argent dans vos e-liquides si vous les faites vous-mêmes, vous, vous redécouvrirez une passion pour la chimie en mariant différents arômes.

Une vaste communauté de passionnés

Le monde des vapoteurs est un monde de hackers, un monde de bidouilleurs qui partagent et échangent très facilement leur savoir. Il est donc aisé de trouver des personnes très compétentes qui sauront vous donner d’excellents conseils pour bien débuter ou tirer le meilleur parti de votre matériel en fonction de vos goûts… et croyez moi sur parole, ça dépasse de très loin le « vapeur chaude vs vapeur froide » qu’un vendeur vous servira dans la majorité des grandes enseignes physiques.

S’il vous prend l’envie d’arrêter la cigarette en vous mettant à vapoter, commencez donc par aller écumer les forums qui regroupent ces passionnés, questionnez les, ils vous apporteront de très précieux conseils pour bien débuter et pour éviter d’avoir à acheter du matériel de piètre qualité deux fois plus cher que du matériel bien plus robuste et adapté à vos besoins de substitution de la cigarette traditionnelle, en profitant par exemple d’achats groupés (certaines belles pièces se commandent en Chine avec un minimum requis en terme de quantités).

Ma conviction aujourd’hui, c’est qu’en plus de vous permettre d’arrêter de fumer, la vape est un véritable univers, passionnant, vous permettant de découvrir plein de choses et d’échanger avec de nouvelles personnes. Si vous assumez de vapoter, vous deviendrez probablement un hacker sans même vous en rendre compte.

Enorme THX à mon Vape Guru qui se reconnaitra pour m’avoir fait découvrir cet univers

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Qosmos, raconte-nous une histoire (de protocoles)

lundi 14 octobre 2013 à 16:44

shadoks_simple-compliqueSe construire une image…, tout un programme pour une entreprise. Le scandale Amesys a poussé les acteurs du Deep Packet Inspection à revoir leur communication. Pour Amesys, cela a consisté à « vendre » son activité d’écoute des réseaux à un actionnaire de la holding détenant Bull et Amesys, histoire de sortir cette activité du « périmètre » de Bull et d’Amesys. Pour Qosmos, dont c’est le seul véritable métier, la donne était plus compliquée. Depuis des mois, son PDG Thibault Bechetoille construit patiemment et  sûrement une nouvelle image pour sa société. Selon la nouvelle légende officielle, Qosmos ne fait pas d’écoute massive à l’échelle d’une nation, elle fait de la mesure d’audience et de la gestion de flux dans le secteur des télécoms.

Oui, mais non.

Aujourd’hui, Reflets est en mesure d’expliquer que les sondes de Qosmos sont capables d’identifier des cibles, qui, vous allez le comprendre, n’ont absolument aucun intérêt pour la mesure d’audience ou la gestion des flux chez un opérateur…

Qosmos, une vieille connaissance…

Qosmos est un grand habitué des pages de Reflets. Cette société française est connue pour être l’un des fleurons technologiques de l’hexagone, mais un fleuron dual. L’un de ses fleurons dont on en est encore à se demander si l’on doit en être fier ou sur lequel on doit émettre certaines réserves. Au coeur des interrogations : les métiers de Qosmos.

Pionnière de l’inspection en profondeur de paquets, Qosmos a su se hisser dans le peloton de tête des marchands d’armes numériques. Une stratégie que l’entreprise dit avoir abandonnée au profit de secteurs moins critiquables d’un point de vue éthique. Comprendre l’inspection en profondeur de paquets, c’est comprendre les différentes applications de cette technologie, et donc comprendre les différents métiers de Qosmos.

Quand Reflets a commencé à s’intéresser au marché de la surveillance électronique, le nom de Qosmos est revenu très fréquemment. Même si son PDG Thibault Bechetoille nous assurait par exemple que son coeur de métier était la médiamétrie, nous avions du mal à envisager que nous ne retrouverions pas les technologies de Qosmos au coeur de systèmes de surveillance électronique à l’échelle d’une nation.

Nos craintes se sont rapidement confirmées, elles venaient contredire les déclaration de monsieur Bechetoille qui assurait ne pas vendre ses produits à des Etats. Un mensonge par omission car la technologie de Qosmos est intégrée par des entreprises tierces dans ces systèmes de surveillance massive. Ainsi, on retrouvait Qosmos en 2011 au coeur du projet ASFADOR, au sein d’un consortium le liant à l’allemand UTIMACO et à l’italien AreaSPAS. Alors même que Thibault Bechetoile martelait que ses produits n’étaient pas destinés à la surveillance de masse, l’un de ses ingénieurs se trouvait alors en Syrie aux côtés d’Utimaco pour apporter l’expertise française en matière d’interception de masse au régime de Bachar al Assad.

L’épisode troublant du LIP6

Un peu plus tard, Reflets publiait un enregistrement des propos d’Eric Horlait, co-fondateur de Qosmos, venu expliquer aux chercheurs du LIP6 pourquoi et comment leurs emails se retrouvaient dans la proposition commerciale du projet Homeland Security d’Amesys à destination de la Libye de Kadhafi. Là encore nous soulignions le décallage entre les propos de Monsieur Bechetoile et ceux d’Eric Horlait, bien plus explicites, sur les activités de Qosmos :

« Le marché sur lequel vit Qosmos est celui que l’on appelle « L’interception légale » – l’interception légale c’est un marché qui s’est développé pour tout un tas de raisons, qui permet de construire des équipements qui écoutent ce qu’il se passe sur un réseau.
Une partie du business de Qosmos c’est cette écoute qui a été vendue – j’ai moi même installé en Espagne chez Telefonica un opérateur que tout le monde connaît en Espagne, qui s’en sert pour faire de la facturation internet sur les mobiles (…) un autre exemple très connu en France c’est Médiamétrie (…) et avec la technologie Qosmos ils ont embarqué dans les décodeurs une technologie qui [repère qui regarde quoi] à partir des décodeurs (…) voilà des exemple d’application des technologies Qosmos.

Et puis il y a l’écoute légale, l’écoute légale, c’est répondre soit à des appels d’offre, soit à des commandes, soit à un certain nombre d’activités d’agences de renseignement pour leur fournir des outils qui leur permettent de développer des outils qui répondent à un certain nombre de leurs besoins pour exercer leur métier.

[...]

Dès qu’on parle de ce genre de marchés, ce genre de marchés a une petite spécificité. Entre autre chose, moins on parle des acteurs, plus on est content.

[...]

Question : Dans ce cas là on peut dire que la frontière est un peu floue entre démocratie et dictature, mais est-ce que Qosmos travaille ou pourrait travailler pour les RG Français ? Par exemple. Et si elle l’a fait, est ce que ce serait couvert par un secret ?

EH : écoutez mes propos, vous aurez la réponse. C’est un problème de déchiffrage, hein, c’est pas très compliqué. Encore une fois, des contrats de déontologie, c’est difficile, il y a un moment ou plus de dix fois sur quinze, c’est mauvais, ou alors c’est bien… on sait pas. La déontologie, c’est quelque chose qui se passe très très vite. Oui, je ne sais pas répondre.

Le deuxième point, c’est que quand je vous ai dit que Qosmos avait une déontologie sur le sujet, c’est que chaque fois qu’on a eu connaissance du client, on a la liberté de cette analyse, à l’époque, la structure de décision c’était le conseil de direction dans lequel il y avait un certain nombre de personnes, dont moi et d’autres fondateurs, et on discutait de chacune des affaires et on disait ‘on y va’ ou ‘on y va pas’… bon… il y a des affaires sur lesquelles on est pas allés, connaissant le client final. Je ne vais pas parler de la Libye parce que nous n’avons jamais eu connaissance de la Libye comme potentiel client final, ni Qosmos en direct, ni la technologie Qosmos.

En revanche, il y a d’autres pays où on avait connaissance de la façon dont notre technologie pourrait être utilisée et on a dit non. Et il y a certainement des pays où la technologie est utilisé et où le niveau de démocratie est – dans l’esprit de chacun d’entre nous autour de cette table – tout à fait insuffisant.

[...]

Et à un moment donné, quand vous développez des technologies de ce type là…

Je suis certain, un jour ou l’autre, peut être passé, peu être futur, que les technologies de Qosmos se retrouveront dans des usages parfaitement critiquables, sur le plan déontologique. Est ce que c’est une raison suffisante pour ne pas développer cette société, je n’en sais rien.

Il y a quelques semaines, c’est Wikileaks qui enfonçait le clou en publiant un whitepaper on ne peut plus explicite sur la nature de certains travaux de Qosmos. On parle bien d’interception « légale », pour « un pays entier », à 550Gbps. Mais puisqu’on vous dit que c’est grand public !!!

caramba

Dans une interview aux Echos parue le 14 octobre 2013, Thibaut Bechetoille explique benoîtement :

« Il  y a deux ans, nous avons décidé de  sortir du marché dit de  l’interception légale indirecte, car le DPI est  une technologie duale et  sensible, qui pose de vraies questions  juridiques et éthiques. Nous avons perdu d’un coup 20 % de notre chiffre d’affaires. »

Oh, le beau storytelling…

Reflets dispose aujourd’hui de nouveaux éléments nous en apprenant beaucoup sur le coeur applicatif de sa solution, sur son fonctionnement et les cibles constituant le champ opérationnel de ses sondes, qui servent à classifier et intercepter le trafic Internet.

Sur Internet, les applications communiquent par le biais de protocoles, ces protocoles sont autant de modes opératoires décrivant comment une communication va s’établir. On envoie une requête, on reçoit une réponse. Il existe différents moyens de reconnaître un protocole, et de reconnaître qu’un internaute a accéder à tel ou tel service, ou à tel ou tel site Web. Ces protocoles peuvent être regroupés par grandes familles. Par exemple pour les mails, on reconnaîtra les protocoles permettant de recevoir des emails (POP, IMAP, IMAPS…) ou d’envoyer des emails (SMTP, SMTPS…). Pour les protocoles web, on reconnaîtra plutôt des certificats SSL, ou tout simplement le nom de domaine. Onpourra également corréler différentes métadonnées pour identifier un protocole.

Le coeur de métier de Qosmos est donc de reconnaître un maximum de protocoles afin de pouvoir :

qosmosplugins

Evidemment, on se demande assez naturellement ce que Qosmos sait reconnaître, comment il le reconnaît, et dans quel but. C’est justement à ces questions, sans réponse officielle, que nous allons vous apporter quelques  éléments de réponses.

bustedQuand Thibault Bechetoille affirme que son logiciel n’est qu’une brique, on le croit volontiers. C’est quand on se penche sur les protocoles, vendus aux clients par la société sous formes de « plugins » (lesdites briques), que l’on commence à se gratter la tête.

Chez Reflets, nous avons par exemple un peu de mal à nous imaginer que Qosmos soit soucieux de garantir à ses clients une bonne qualité de service à l’accès aux updates d’OpenBSD ou un stream fluide sur Youporn… mais peut-être avons-nous un mauvais esprit.

Une autre interrogation concerne cette passion que Qosmos semble vouer à la Chine. Mais il y a peut-être d’éminents sinologues chez Qosmos. Nous avons sûrement très mauvais esprit.

Autre explication, Qosmos veut vendre ses équipements, du matériel « grand public«   comme l’ont répété successivement Gérard Longuet et Laurent Fabius à l’Assemblée Nationale, aux 500 plus grosses fortunes chinoises. Histoire de décorer son salon, une solution Qosmos, c’est tellement chic… ixEngine, en 2013, c’est hipster. Ce qui expliquerait pourquoi une brique de Qomsos permet d’écouter le trafic lié au site Fortunechina ?

Plus intéressant maintenant, pour les personnes qui se demandent comment un pays, prenons au hasard l’Iran, arrive à bloquer TOR… sachez que Qosmos reconnaît ce protocole par pattern matching (filtrage par motif) : les sondes reconnaissent des séquences propres à la manière dont Tor communique et le dispositif bloque alors le trafic de la communication dans laquelle elle reconnaît les séquences.

On n’arrête pas le progrès…

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La fin du monopole de la richesse (ou comment un peu mieux comprendre l’état du monde)

dimanche 13 octobre 2013 à 18:09

20 ans après la sortie de cet ouvrage un constat troublant vient immédiatement à l’esprit : comment Farlan Carré, son auteur, a-t-il pu analyser avec autant de précision et de justesse l’état du monde actuel ?

Farlan

« La fin du monopole de la richesse — La civilisation européenne face au monde : entente ou conflits sans fin ? » est une lecture essentielle pour qui veut prendre du recul dans sa compréhension globale du monde actuel. Cet ouvrage est en quelque sorte un manuel de macro-histoire, macro-économie, macro-sociologie qui parvient en moins de deux cent pages à remonter le cours de l’évolution des différentes civilisations, dont plus particulièrement la civilisation européenne, pour envisager la suite de l’aventure humaine à l’échelle planétaire. Prétentieux ? Cela pourrait l’être, si celui qui effectuait l’analyse n’avait annoncé dans cet ouvrage toutes les grandes crises des vingt dernières années. Crise économique asiatique de 1997, « guerre des civilisations » américaine, grande crise financière et économique de 2008 dans laquelle nous sommes encore empêtrés, crise écologique et…fin potentielle du système capitaliste.

Machine à remonter le temps

De l’antiquité à la révolution industrielle, débutée en Angleterre, le fonctionnement de la civilisation européenne (instigatrice du système capitaliste, moteur de changements humains massifs et uniques à l’échelle planétaire), est dépecé méthodiquement dans ses grandes largeurs : rôle de la science, des religions, de la spiritualité, de la démographie, du développement agricole, des échanges, des techniques et des technologies, rien n’échappe à l’analyse de Farlan Carré. Cette plongée dans l’histoire, les conséquences directes et indirectes des choix des sociétés humaines sur leur évolution ont une unique préoccupation, qui avec l’éclairage de 2013, s’avère passionnante : savoir comment la civilisation européenne, capitaliste et purement matérialiste, peut s’écrouler…ou pas. Si en 1993, « la fin du monopole de la richesse » pouvait faire sourire les supporters du système néo-libéral mondialisé, chantres des théories économiques néo-classique — et balayer toutes les prévisions contenues dans cet essai — il n’en est plus rien aujourd’hui.

Questionnements d’actualité

Farlan Carré amène de nombreux questionnements sur les grands tournants qui ont accéléré le changement du monde. Des techniques agricoles sont restées au même stade plus de 1000 ans en Europe, des systèmes d’imprimerie existaient en Chine 1500 ans avant Gutemberg, les machines à vapeur sont une invention antique : si la population occidentale se met à croître, que le bien-être matériel se développe à partir du XVIIIème siècle, c’est avant tout par l’éviction de la croyance religieuse au profit de la « philosophie matérialiste ». Ce bien-être matériel qui découle de la révolution industrielle devient à partir du XXème siècle une course effrénée sans limites, et l’auteur en vient à des questions qui, si elles pouvaient encore passer pour étranges en 1993, sont totalement d’actualité en 2013 :

(…)Pouvons-nous réellement augmenter indéfiniment le bien-être matériel sans détruire notre milieu naturel ? Souhaitons-nous réellement vivre sans idéal, sans risque, sans rêve, sans défis à surmonter ? Et s’il n’y a rien au delà de ce monde, comment convaincre les riches, les forts, les intelligents, de ne pas abuser de leurs avantages ? (…)

L’opulence, jusqu’où ?

C’est au sein de ce paragraphe de « la fin du monopole de la richesse » que l’auteur prévoit, avec 20 ans d’avance,  la situation occidentale actuelle :

(…) Sur le chemin du progrès matériel, une première série de difficultés ne va pas manquer de bientôt apparaître pour les pays riches, quand ils constateront que « l’univers minimal » qui les entoure ne croît pas aussi vite qu’ils le souhaiteraient (…)Le long délai qui sera nécessaire pour que la majorité des pays du Tiers Monde accèdent à l’affluence signifie que les pays riches risquent bien, en attendant, de voir leurs taux de croissance s’évanouir ou devenir très faibles — de l’ordre de 0,5% par personne et par an — pendant de longues décennies. (…) »

Pour l’auteur, la seule solution permettant d’éviter le déclin et la tentation militaire qui y est immanquablement reliée, est la création d’une Fédération des Nations Unies :

(…)Il serait donc illusoire de penser que la civilisation européenne restera à l’avenir la principale force motrice de l’ordre mondial. (…) Au cas contraire où les pays de civilisation européenne se laisseraient aller à leur désir de continuer à dominer par la force, il me paraît peu douteux qu’ils se condamneraient eux-mêmes à une décadence irrémédiable, analogue à celle de l’Empire romain. Et il se passerait sans doute longtemps avant que de nouvelles civilisations puissent reprendre le flambeau. Il vaudrait certes mieux, pour la civilisation européenne comme pour les autres, éviter la politique du pire, dans la mesure où cela est possible, en commençant à organiser dans un proche avenir la collaboration des civilisations.(…) C’est à quoi correspond l’idée, suggérée dans cet essai, d’une Fédération des Civilisations Unies — idée peut-être utopique, et néanmoins nécessaire, du moins si l’on veut éviter les affrontements violents entre les civilisations et entre les peuples.(…)

En guise de conclusion

Il faut lire « La fin du monopole de la richesse » de Farlan Carré, avec lenteur, pour mieux déguster la qualité d’analyse impressionnante que cet essai restitue. Il y a peut-être de la naïveté dans les solutions préconisées par son auteur pour sortir du « grand vide moderne » dans lequel nous sommes plongés, mais comment ne pas adhérer avec celles-ci ? Un dernier extrait en guise de conclusion, extrait que nos dirigeants, mais aussi les citoyens, de plus en plus convaincus par le repli sur soi, pourraient méditer :

(…)Seule la reconnaissance de la diversité des civilisations, des religions et des cultures permettrait un dialogue de grande ampleur et, progressivement, une harmonisation des politiques des ressources naturelles, de l’économie, du développement des régions pauvres, et de l’environnement naturel.(…) Il s’agit en fait d’inventer de nouvelles institutions, de nouvelles méthodes de travail et de coopération, de nouvelles manières d’informer et de décider. On ne peut guère imaginer à l’avance les formes que prendront ces nouvelles activités, mais on peut se tenir prêt à les promouvoir. Avec Confucius, retenons que celui qui s’est préoccupé de l’avenir lointain risque moins de réagir mal aux événements journaliers faute d’avoir compris leur vraie nature et leur portée réelle.(…) »

Farlan Carré est mort le 22 juillet 2012 à l’âge de 89 ans. Après des études de mathématiques, physique, chimie, astronomie et économie, diplômé de l’Ecole Polytechnique, il a travaillé plus de trente ans au soutien du développement économique du Tiers Monde au sein d’organisations des Nations Unie, comme l’ONUDI (Développement industriel du Tiers Monde) dont il a été le directeur adjoint pendant sept ans.

La fin du monopole de la richesse est en ligne ici : http://www.subud-sica.fr/farlan/la-fin-du-monopole-de-la-richesse
La totalité de ses ouvrages ici : http://www.subud-sica.fr/farlan

Il est possible d’acheter les ouvrages papier d’occasion via des sites de vente ligne (pour une somme modeste).

Petit bonus musical :

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L’information, l’indignation, la politique, le journalisme, les réseaux sociaux en 2 tableaux

dimanche 13 octobre 2013 à 15:35

Attention merveilleux public ultra attentif à l’esprit plus critique qu’une armée de philosophes pré-socratique, ceci est un exercice moderne d’analyse de la situation de patinage dans la semoule dans laquelle se trouve ton pays chéri, la France.

Mais ça pourrait s’appliquer ailleurs aussi.

La question de départ est : mais comment que ça se fait qu’avec autant d’outils d’informations, de gens connectés qui crient au scandale, rien ne change et qu’on a Fabius dans un ministère (c’est un exemple) ?

Hein ?

Pourquoi ?

C’est dingue quand même ! Avec les murs Fesse de bouc, les gazouillis incessants d’affaires terribles de corruption en veux-tu en voilà, y’a rien qui s’passe. Bizarre. Les journalistes sont sur tous les fronts, ils ont des zordinateurs raccordés aux zinternets, les gens peuvent s’abreuver à des tas de sources d’info comme jamais avant, et pourtant, ça bronche pas. Alors, le Docteur Menkevick vous a concocté deux infographies pour tenter une explication du phénomène. Attention, rien ne vous oblige à adhérer à cette explication, et ce n’est pas la peine  non plus d’insulter l’auteur des ces superbes dessins. Mais p’têtre qu’il y a un truc à réfléchir. P’têtre bien, non ? Même si c’est gênant…

Avant :

journalisme-1

 

Après :

journalisme-2

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