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La Quadrature du Net

source: La Quadrature du Net

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#OurNETmundial : Notre Internet mérite mieux qu'une « gouvernance »

vendredi 25 avril 2014 à 13:06

São Paulo, 25 avril 2014 — Sous l'influence des gouvernements et de l'industrie, le document final du forum NETmundial est devenu un texte inefficace et décevant. Malgré le discours courageux de la présidente du Brésil, NETmundial montre simplement à quel point les efforts pour une gouvernance mondiale et multipartite sont risibles et inutiles. Si l'Internet devait être gouverné, ce devrait être par les citoyens directement, indépendamment de ces structures, et sans attendre un « consensus global ». Notre infrastructure de communication partagée doit être considérée comme un bien commun, défini politiquement et défendu comme tel.

Le discours courageux de la présidente Dilma Rousseff en faveur des libertés numériques, de la neutralité du Net et contre la surveillance de masse a eu un impact négligeable sur les conclusions de NETmundial. La version finale du document sur les « principes de gouvernance d'Internet » est pire que les brouillons antérieurs : des mentions de la non-discrimination des communications (neutralité du Net), qui étaient déjà très faibles, ont été enlevées, alors que des passages sur le respect du droit d'auteur ont été ajoutés. En même temps, les passages du texte consacrés à la surveillance de masse – la raison initiale pour laquelle NETmundial a été convoqué ! – sont ridicules, n'appelant à rien de plus que « davantage de dialogue », échouant totalement à appeler à une quelconque action concrète.

NETmundial a eu cependant un résultat positif majeur : il montre la « gouvernance globale et multipartite de l'Internet » telle qu'elle est, ce cirque absurde de dix ans de Forums pour la Gouvernance de l'Internet (IGF), de discussions stériles qui laissent les citoyens déçus, où les industries et les gouvernements ont le dernier mot, et dont rien de concret n'est jamais sorti pour la défense de l'intérêt général. La farce de la gouvernance de l'Internet par NETmundial doit servir à réveiller les citoyens qui veulent réellement la fin de la surveillance de masse et favoriser les libertés numériques.

« Nous devons mener un combat politique pour obtenir la protection de nos droits et libertés, en créant un contexte global qui forcera les gouvernements à protéger Internet comme un bien commun, inspiré par les précédents siècles de lutte pour les droits civiques et humains. Partout dans le monde, nous devons exiger de nos gouvernements qu'ils s'inspirent de la récente loi brésilienne Marco Civil da Internet : bien qu'elle soit loin d'être parfaite1, elle constitue un modèle que les citoyens courageux peuvent soutenir auprès de leur gouvernement pour agir concrètement pour la protection des droits et libertés fondamentales et l'Internet libre » déclare Jérémie Zimmermann, co-fondateur de La Quadrature du Net.

Intrusion massive de la DGSE dans les communications des clients d'Orange : libertés en danger !

mardi 22 avril 2014 à 10:07

Communiqué commun de l'Observatoire des libertés et du numérique (OLN)1

Paris, 22 avril 2014 — Dans un dossier publié le 20 mars 2014, Le Monde a révélé – sur la base d'un document de 2010 du GCHQ britannique (Government Communications Headquarters) – que la DGSE avait accès « libre et total » aux réseaux d'Orange et flux de données qui y transitent. L'article « Espionnage : comment Orange et les services secrets coopèrent » montre par ailleurs que les agents de la DGSE et d'Orange coopèrent à casser le chiffrement des flux de données correspondants. Ces activités ont lieu hors de tout cadre légal et judiciaire. Il est sidérant que ces informations n'aient donné lieu à aucune réponse du gouvernement. L'Observatoire des libertés et du numérique (OLN) exige que des réponses politiques, légales et pénales soient apportées à ces agissements.

L'échelle exacte de recueil des informations n'est pas connue mais le fait que « la DGSE dispose, à l'insu de tout contrôle, d'un accès libre et total [aux] réseaux [d'Orange] et aux flux de données qui y transitent » dépasse toutes les craintes précédemment exprimées sur le développement de la surveillance généralisée dans le cadre français. Cet accès porte aussi bien sur les citoyens français qu'étrangers, et la collaboration avec le GCHQ en aggrave les conséquences.

Les révélations du Monde, non démenties, n'ont donné lieu à aucune déclaration du (précédent) gouvernement, mais uniquement à une réponse dilatoire de Stéphane Richard, Président d'Orange, selon lequel « des personnes habilitées secret-défense peuvent avoir à gérer, au sein de l'entreprise, la relation avec les services de l'État et notamment leur accès aux réseaux, mais elles n'ont pas à m'en référer. Tout ceci se fait sous la responsabilité des pouvoirs publics dans un cadre légal » (extrait de l'article du Monde référencé plus haut). On aimerait savoir quel cadre légal.

En réalité, il semble bien que ce soit une véritable opération de surveillance généralisée conjointe conduite par des agents de la DGSE et d'Orange, issus des mêmes corps d'État, et passant de l'une des organisations à l'autre qui ait été mise en place. L'existence de ce type de dispositif renforce toutes les inquiétudes dont nous avions déjà fait état à propos des dispositions de l'article 20 de la Loi de programmation militaire. Que vaut la soi-disant protection résultant de ce que l'accès au réseau passe par des demandes à l'égard des opérateurs, dans un contexte où certains de leurs agents travaillent main dans la main avec les services de renseignement en vue d'une surveillance de masse hors de tout cadre légal ?

À la lumière de ces révélations, le recours à des partenariats public-privé pour la mise en place d'une plateforme centralisée pour les interceptions sur mandat judiciaire, la PNIJ (Plateforme Nationale des Interceptions Judiciaires), soulève elle aussi de graves inquiétudes.

L'Observatoire des libertés et du numérique (OLN) alerte les citoyens et interpelle avec force le gouvernement et les parlementaires sur ces révélations. C'est l'État de droit et la démocratie qui sont menacées lorsque tout citoyen voit ses communications et ses expressions personnelles surveillées hors de tout cadre légal. Le gouvernement a une obligation immédiate de faire toute la lumière sur ces dérives, de dire comment il entend y mettre un terme, et d'indiquer quelles procédures pénales seront engagées.

Égalité Femmes-Hommes : Le Sénat aggrave encore l'extra-judiciarisation de la censure sur Internet

vendredi 18 avril 2014 à 01:30

Paris, 18 avril 2014 — Cette nuit, les sénateurs viennent d'adopter en seconde lecture le projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes de Najat Vallaud-Belkacem. Plutôt que de supprimer les mesures de censure privée de ce texte, les sénateurs viennent d'en étendre la portée, risquant d'aggraver encore un peu plus les dérives de la loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN). Avant la prochaine et dernière lecture du texte à l'Assemblée nationale, il est maintenant urgent que les citoyens se mobilisent et appellent les députés à mettre en place des mesures permettant à la fois la lutte contre les propos haineux et la protection de la liberté d'expression.


Najat Vallaud-Belkacem,
Ministre des Droits des Femmes

Malgré un amendement de suppression déposé par Mmes Benbassa, Bouchoux et les membres du Groupe écologiste – mais retiré sans être voté –, le Sénat vient d'adopter en seconde lecture les dispositions de l'article 17 du projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Adopté en l'état, celui-ci modifierait le régime de responsabilité des intermédiaires techniques de l'Internet1 pour élargir leurs missions de contrôle et de censure des communications aux propos haineux diffusés en ligne. Pire, un amendement de la rapporteure du texte Virginie Klès (SOC d'Ille-et-Vilaine), adopté en commission des lois, vient de réintroduire les images de violence à la liste des contenus concernés par la loi de confiance dans l'économie numérique (LCEN), alors que l'Assemblée nationale avait supprimé ce passage.

Comme l'a déjà dénoncé à de multiples reprises La Quadrature du Net, cette extension poursuivrait la transformation des hébergeurs et autres plateformes en ligne en police privée du Net, les incitant à censurer automatiquement tous les contenus signalés, qu'ils soient légaux ou non, sans l'intervention d'un juge. Alors qu'elle était encore députée, la secrétaire d'État au numérique Axelle Lemaire avait d'ailleurs bien compris le problème puisqu'elle avait déposé un amendement proposant la suppression de l'article 17 de ce projet de loi, avant d'accepter de le retirer sur demande de Najat Vallaud-Belkacem.

En vue de la prochaine et dernière étape du processus législatif à l'Assemblée nationale, il est urgent que les citoyens se mobilisent et appellent les députés à refuser l'instrumentalisation de la lutte contre les discriminations pour promouvoir un régime de censure contraire à l'État de droit. Plutôt que la censure privée, le législateur doit donner à la police et à la justice les moyens d'agir contre les abus auxquels le texte entend s'attaquer, comme le prévoit la proposition d'amendement de La Quadrature du Net.

« À nouveau, au nom de la lutte contre les discriminations, le Parlement vient de sanctuariser la privatisation de la censure déjà encouragée par la LCEN. Comme l'a déjà indiqué le Conseil Constitutionnel2, le dispositif mis en place par cette loi comprend un risque inhérent de censure extra-judiciaire. Or, pour peu que l'on s'en donne les moyens, il existe des mesures alternatives plus proportionnées et respectueuses de l'État de droit. Lors du second et dernier examen du projet de loi à l'Assemblée nationale, les députés auront l'opportunité de corriger ce projet de loi en amendant son article 17, comme l'avait d'ailleurs proposé la secrétaire d'État Axelle Lemaire lorsqu'elle était députée. Au-delà, et notamment à l'occasion du projet de loi numérique annoncé par le gouvernement, la LCEN doit être réformée pour que la France respecte pleinement le droit international attenant à la liberté d'expression » conclut Félix Tréguer, cofondateur de l'association La Quadrature du Net.

Politique culturelle en France : les lobbies font toujours leur loi

mercredi 16 avril 2014 à 13:15

Paris, 16 avril 2014 — Alors que le projet de loi sur la création n'a pas encore été présenté en Conseil des Ministres, Pascal Rogard, directeur général de la SACD (l'une des principales sociétés d'auteur en France), se vante d'avoir déjà pu avoir accès au texte. Ce comportement traduit l'emprise du lobby des industries culturelles sur le gouvernement et un déficit criant de transparence dans l'élaboration des textes touchant au droit d'auteur. Ce dérapage intervient alors que le CSA dans son rapport annuel pousse l'extension de ses pouvoirs de « régulation » à Internet, faisant craindre la mise en place d'une censure larvée, en connivence avec les intérêts des titulaires de droits. Les citoyens doivent réagir pour condamner cette confiscation de la politique culturelle par des intérêts privés et la complaisance du Ministère de la Culture à leur égard.

Pascal Rogard avait déjà affirmé être à l'origine du cœur répressif de la loi Hadopi, à savoir le mécanisme de riposte graduée assorti de la coupure de la connexion Internet des usagers. Alors que le futur projet de loi sur la création va vraisemblablement transférer cette compétence de la Hadopi au CSA, le directeur général de la SACD se vante à présent d'avoir pu lire ce texte, attestant par là que les lobbyistes des industries culturelles bénéficient d'un accès « à discrétion » aux textes de loi à venir.

Cette nouvelle illustration des relations incestueuses entre le gouvernement et certains milieux culturels intervient alors que s'est tenu, il y a deux semaines, le forum de Chaillot sur l'avenir de la Culture en Europe, organisé par le Ministère de la Culture. Ces deux journées ont constitué une tribune à sens unique ouverte aux titulaires de droits pour réclamer un durcissement drastique du droit d'auteur (un « copyright éternel » demandé par exemple par Jean-Michel Jarre, président de la CISAC) et la mise en place d'une « régulation d'Internet ». Or comme l'avait rélévé le Canard enchaîné dans son édition du 26 février 2014, ce forum a été financé en grande partie par les sociétés de gestion collective françaises : SACEM, SCAM et encore une fois la même SACD de Pascal Rogard, expliquant l'absence criante de débats contradictoires.

C'est dans ce climat que le CSA a fait connaître, par le biais de son rapport annuel, ses ambitions d'étendre ses pouvoirs au-delà de la télévision et de la radio à Internet, à travers la nouvelle catégorie très vague des « services audiovisuels numériques ». Une telle notion pourrait englober les plateformes de partage de vidéos comme YouTube ou Dailymotion, des services de streaming musical comme Deezer ou SoundCloud ou encore les magasins en ligne d'applications. Le CSA entend leur appliquer les pouvoirs de contrôle dont il dispose, au nom de la protection de l'enfance, de l'interdiction des atteintes à la dignité humaine ou des incitations à la haine et à la violence. Une telle extension des pouvoirs du CSA ouvrirait la porte à une censure administrative exercée sur les contenus en ligne, alors que des recours au juge sont déjà prévus par la loi en matière d'abus de la liberté d'expression. Malgré les dangers évidents d'une telle réforme, ces propositions ont immédiatement reçu le soutien de sociétés de gestion collective, comme la SCAM qui y voient le moyen de forcer les plateformes en ligne à participer au financement de la création et à déployer une police privée du droit d'auteur pour lutter contre le partage des œuvres.

Le projet de loi sur la création pourrait être présenté en Conseil des ministres au mois de juin, et les citoyens devront faire preuve de la plus grande vigilance quant à son contenu. À nouveau, La Quadrature du Net appelle le gouvernement de Manuel Valls à saisir l'opportunité du récent remaniement pour orienter sa politique en direction de la protection des droits et libertés des citoyens, notamment dans le domaine culturel.

« Le pouvoir politique et les représentants des industries culturelles ne prennent même plus la précaution de préserver au moins les apparences de la démocratie. Depuis la remise du rapport Lescure, la préparation de la loi sur l'acte II de l'exception culturelle s'est effectuée dans l'opacité et sous le contrôle des lobbies, sans prendre en compte les aspirations des citoyens à la préservation des libertés et à l'évolution du droit d'auteur. Ces procédés discréditent la démarche du gouvernement et ne pourront qu'être sanctionnés par les citoyens », conclut Lionel Maurel, co-fondateur de l'association La Quadrature du Net.

La Quadrature du Net appelle le gouvernement Valls à agir pour les libertés sur Internet

jeudi 10 avril 2014 à 13:55

[MÀJ – 27 mai 2014 : Réponse de Harlem Désir, Secrétaire d’État aux Affaires européennes]

Paris, 10 avril 2014 — À l'occasion de la nomination du gouvernement de Manuel Valls, La Quadrature du Net publie les lettres qu'elle vient d'envoyer à tous les ministres et secrétaires d'État en charge des dossiers liés à nos libertés et droits fondamentaux en ligne. Loin de se détacher de celle de ses prédécesseurs, l'action du gouvernement Ayrault n'avait jusqu'à présent représenté aucun progrès dans ce domaine, voire avait empiré la situation1. La Quadrature du Net appelle les ministres nouvellement nommés ou et ceux confirmés dans leurs fonctions à se saisir de l'occasion que leur offre ce remaniement ministériel pour réellement orienter leur politique en faveur de la protection des droits des citoyens sur Internet.


Lettres envoyées aux Ministres

Après le vote de confiance à l'Assemblée nationale et la nomination des Secrétaires d'État, La Quadradure du Net vient d'envoyer des lettres à plusieurs membres du gouvernement afin d'attirer leur attention sur les sujets relatifs aux libertés numériques :

« Le changement de gouvernement doit être l'occasion de réorienter profondément la politique concernant les dossiers numériques en France, systématiquement abordés d'un point de vue répressif depuis près de 10 ans. Tant en faveur de la neutralité du Net, que de la liberté d'expression, de la transparence des accords commerciaux négociés au nom de l'Union européenne, des droits à la vie privée ou au partage de la culture, il est plus que temps de rappeler à nos dirigeants l'importance de la protection des libertés et droits fondamentaux, ainsi que leurs engagements passés. » déclare Lionel Maurel, cofondateur de l'association La Quadrature du Net.