PROJET AUTOBLOG


La Quadrature du Net

source: La Quadrature du Net

⇐ retour index

Lettre ouverte aux députés français sur la proposition de loi relative à la surveillance internationale

lundi 21 septembre 2015 à 15:47

Paris, le 21 septembre 2015 — La proposition de loi sur la surveillance internationale a été adoptée sans amendement et quasiment sans discussion le 16 septembre par la Commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale.

Avant l'examen du texte en séance plénière le 1er octobre, La Quadrature du Net veut mettre en garde les députés contre un texte qui, loin d'être une simple formalité législative, engage la France dans une logique délétère de course à la surveillance mondiale.

Madame la députée,
Monsieur le député,

Vous allez examiner le 1er octobre prochain une proposition de loi portée par Madame Patricia Adam et portant sur la surveillance des communications internationales. Cette proposition de loi a pour objectif de revenir sur les dispositions de la loi sur le renseignement qui ont été censurées par le Conseil constitutionnel le 23 juillet dernier.

Bien que très courte, cette proposition de loi n'en est pas moins très importante : elle légalise les pratiques des services de renseignement français à l'international, et par conséquent montre enfin quelles sont ces pratiques et les ambitions du gouvernement concernant l'espionnage international.

Comme nous l'avons détaillé dans notre analyse de la proposition de loi, plusieurs points sont particulièrement inquiétants :

Des avocats franco-américains saisissent la CNCIS contre la surveillance internationale

mercredi 16 septembre 2015 à 16:02

Paris, le 16 septembre 2015 — Après que le gouvernement a annoncé hier que la proposition de loi sur la surveillance internationale serait discutée en procédure accélérée, celle-ci a été adoptée ce matin en commission défense à l'Assemblée nationale en seulement vingt minutes et presque sans débat. Alors qu'une association d’avocats et juristes franco-américains vient de saisir la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS) à propos du décret secret de 2008, le gouvernement s'inquiéterait-il de l'ouverture d'un débat sur les pratiques de surveillance internationales ?

Alors que le député Damien Meslot (LR) annonçait ce matin que cette proposition de loi n'avait pour objectif que de corriger une petite erreur de forme, la rapporteure du texte et présidente de la commission défense, Patricia Adam (SRC) confirmait l'existence de ce décret .

Une première procédure contre ce décret a été initiée par FFDN, FDN et La Quadrature du Net le 31 août. Si la procédure d'urgence a été refusée par le Conseil d'État, la procédure au fond est toujours en cours. Pierre Ciric, vice-président de la French American Bar Association (FABA, association d'avocats franco-américains) vient juste de déposer une plainte (pdf) à la CNCIS pour atteinte au secret professionnel et au secret des correspondances. Ce recours fait suite à de nombreuses alertes lancées par la FABA ces dernières semaines, contre la loi sur le renseignement et les activités françaises en matière de surveillance internationale.

La Quadrature du Net soutient cette initiative et espère que des suites seront données à cette affaire qui met en jeu le principe de l'universalité des droits, et révèle les très fortes atteintes à la vie privée, ainsi qu'à la protection des personnes soumises au secret professionnel induites par les actions de la France en matière de surveillance. La proposition de loi sur la surveillance internationale, si elle légalise ces actions, n'atténuera pas les atteintes portées aux droits fondamentaux.

Lire la saisine de la French American Bar Association.

Un professionnel du secret-défense et de la raison d'État à la tête de la CNCTR !

mardi 15 septembre 2015 à 15:10

Paris, le 15 septembre 2015 — La composition de la future commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) augure mal de la défense des citoyens français face à la surveillance !

L'annonce de l'éviction de Jean-Marie Delarue, président de la CNCIS (Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité), de la composition de la future CNCTR (commission nationale de contrôle des techniques de renseignement) n'est pas une surprise, mais montre cependant à quel point toute volonté de discuter ou prendre en considération les réels problèmes d'étendue et de contrôle du renseignement est refoulée par les autorités. M. Delarue s'étant publiquement inquiété de la loi sur le renseignement et de la tendance à outrepasser de plus en plus souvent les avis de la CNCIS, a été dès que possible mis sur la touche par le gouvernement et avec lui vont disparaître certainement les meilleures garanties qu'il était possible d'avoir pour les citoyens : malheureusement l'effectivité du pouvoir de la CNCTR ne dépendra que de la personnalité de ses membres, la loi n'ayant pas suffisamment garanti le contrôle des services de renseignement et des demandes politiques en amont.

Cette annonce a été doublée d'un communiqué de l'Élysée annonçant son souhait de nommer à la tête de la future CNCTR monsieur Francis Delon, ancien secrétaire général de la Défense nationale : cette nomination serait un vrai signal que la CNCTR ne sera probablement pas au service des citoyens mais plutôt des services de renseignement, et que toutes les craintes exprimées ce printemps par les nombreux opposants à la loi renseignement étaient fondées.

Quoi de moins rassurant que de voir cette collusion manifeste de culture, de pratiques et d'objectifs au sein du seul maigre outil de contrôle du renseignement français ?

Sans préjuger de l'action future de la CNCTR, comment ne pas craindre qu'un praticien émérite du secret-défense et de la raison d'État ne soit pas la personne la mieux placée pour contrôler, questionner, enquêter sur les écoutes et accueillir les demandes de vérification de citoyens, inquiets de l'ampleur des moyens et objectifs des services de renseignement ?

Nous demandons aux parlementaires des commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat, qui devront ratifier cette nomination, de la refuser pour demander au président de la République qu'il nomme un président reconnu pour sa prise en considération des intérêts et de la vie privée des citoyens.

[NextINpact] Loi renseignement : des avocats franco-américains dénoncent la PPL sur la surveillance internationale

mardi 15 septembre 2015 à 12:45

ls s’étaient déjà plaints de la loi Renseignement auprès du Conseil constitutionnel puis de Manuel Valls. Des avocats franco-américains remettent le couvert à l’encontre de la toute récente proposition de loi sur la surveillance internationale. Next INpact diffuse la lettre qu’ils viennent d’adresser à Patricia Adam, présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées. [...]

En substance, selon eux, la PPL menace l’obligation de confidentialité pour les avocats situés hors du territoire national. L’affirmation doit faire l’objet d’une petite explication juridique : la loi sur le renseignement interdit la surveillance des magistrats, journalistes, parlementaires et avocats du moins s’agissant de l’exercice de leur mandat ou de leur profession. Le futur article L.854-1-.III, programmé dans le Code de la sécurité par la PPL, étend cette disposition à l’étranger.

Seulement, la FABA craint que cette mesure ne vaille que pour les Français, non par exemple pour les avocats étrangers, et notamment américains : « seuls sont protégés des techniques de renseignement (…) des avocats qui exercent en France uniquement. Par conséquent, les avocats présents en dehors du territoire national sont automatiquement soumis à ces techniques ». Or, ceux-ci sont de plus en plus appelés à gérer des dossiers confiés par des clients installés en France. Et pour eux, ce trou dans la raquette « serait de nature à annihiler le sacrosaint « secret professionnel » au-delà de l’encadrement judiciaire pourtant déjà existant, et affecterait l’intégrité de l’ « attorney-client privilege » américain et du secret professionnel imposé par les barreaux français, si la proposition de loi sur le renseignement était votée par le parlement ». [...]

http://www.nextinpact.com/news/96487-loi-renseignement-avocats-franco-am...

Surveillance internationale : les frontières ont des oreilles

lundi 14 septembre 2015 à 18:41

Paris, le 15 septembre 2015 — Après la censure par le Conseil constitutionnel des mesures concernant la surveillance internationale dans la loi sur le renseignement, le gouvernement revient à la charge avec une proposition de loi qui sera examinée dès la fin du mois de septembre à l'Assemblée nationale. La Quadrature du Net rejette avec vigueur les dispositions inacceptables contenues dans cette proposition de loi, qui instaurent une véritable course à la guerre du renseignement contre nos partenaires européens et internationaux.

Le Conseil constitutionnel avait censuré les mesures contenues dans la loi sur le renseignement concernant la surveillance internationale, arguant que la loi aurait dû contenir les mesures de contrôle et les conditions d'exploitation et de conservation des données interceptées. Après la révélation par L'Obs du décret secret organisant la surveillance de masse des communications internationales début juillet, il n'était plus possible pour le gouvernement de ne pas légiférer à nouveau sur le sujet. Faisant porter à des députés de la commission de la Défense nationale une proposition de loi rapidement rédigée, il ne renonce pas à ses ambitions de collecte et d'analyse massives des communications dans le monde entier.

La Quadrature du Net, après analyse de la proposition de loi, dénonce l'orientation prise par cette proposition de loi et appelle citoyens et parlementaires à s'y opposer :

L'étendue des finalités de la surveillance internationale recouvre celles de la loi sur le renseignement : elles sont toujours aussi larges et porteuses d'excès potentiels graves. L'aspect offensif de ces finalités, notamment la promotion (en sus de la défense) des « intérêts essentiels de la politique étrangère » et des « intérêts économiques et scientifiques essentiels de la France », est inquiétant pour les relations internationales de la France, qui affirmerait ainsi qu'elle compte pratiquer sans scrupule l'espionnage économique et scientifique. Les organisations citoyennes pourront aussi faire l'objet d'une surveillance. (alinéa 5).

La surveillance portera sur des techniques larges et non définies précisément par la loi, ce qui permettra de les étendre à l'avenir sans en référer à la représentation nationale. C'est le Premier ministre qui décidera quels systèmes de communication seront visés. (alinéa 9)

La proposition de loi ne régit pas des mesures de surveillance individuelle mais un régime de collecte de masse, avec des autorisations d'exploitation délivrées par zones géographiques ou pays (toute l'Afrique, tout le Canada, toute l'Amérique du Sud par exemple) ou par organisation (toute la société XX, ou l'ONG YY) : cette logique d'écoutes massives doit être mise en évidence pour que les citoyens et les parlementaires puissent questionner la politique de renseignement extérieur de la France au regard de ses engagements internationaux et de son rôle au sein de la communauté internationale. (alinéa 11) Il s'agit d'une rupture catégorique de l'universalité des droits entre les résidents et citoyens français et l'ensemble de la communauté internationale, amenant notamment à collecter en masse les données et communications de nos voisins européens.

Il faut également souligner que cette collecte de masse en dehors des frontières nationales prendra dans ses filets toutes les communications des français résidant ou voyageant à l'étranger, instaurant une rupture d'égalité flagrante des citoyens français devant la surveillance exercée à leur encontre, ou des citoyens européens vis-à-vis des personnes résidant en France.

Comme La Quadrature du Net l'a déjà souligné au moment de la loi sur le renseignement, la surveillance internationale se ferait avec une logique de collecte massive, où l'identification des identifiants rattachables à des citoyens ou résidents français ne sera fait qu'après la collecte, au moment du traitement : cela ne garantit absolument pas la vie privée des français, d'autant plus lorsqu'on sait qu'une part majeure des communications entre français passe par le réseau international. (alinéas 7 et 8)

En outre, seuls les avocats, journalistes, parlementaires et magistrats exerçant en France seront protégés et uniquement dans le cadre de leurs communications professionnelles – dont on ne peut déterminer la nature privée ou professionnelle que par leur exploitation. (alinéa 12).

La durée de conservation des renseignements collectés à l'international a été considérablement rallongée par rapport aux interceptions effectuées sur le territoire national : un an à compter de leur exploitation pour les correspondances (au lieu de 30 jours en France) ; six ans pour les données de connexion (au lieu de quatre ans) ; délai courant à partir du déchiffrement et conservation maximale de 8 ans pour les données chiffrées (au lieu de 6 ans). Aucune justification valable n'est apportée pour expliquer l'extension de ces durées de conservation qui fait peser sur l'ensemble des communications internationales une intrusion illégitime et massive dans la confidentialité des correspondances. (alinéas 14 à 20)

Ce principe de collecte de masse sera fait sous l'autorité seule du Premier ministre. La commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) ne sera informée des mesures de surveillance qu'a posteriori, et ne donnera aucun avis préalable. Son seul pouvoir sera d'adresser éventuellement des recommandations au Premier ministre, puis de saisir le Conseil d'État si ses recommandations ne sont pas suivies. (alinea 24)

La proposition de loi sur la surveillance des communications internationales telle qu'elle a été écrite est une arme de guerre tournée vers la population internationale. Basée sur le principe de la collecte de masse des communications internationales, elle veut légaliser les mêmes abus que ceux dénoncés par Edward Snowden à propos de la NSA (agence nationale de sécurité des États-Unis). Une part déterminante du trafic Internet mondial passant par les câbles sous-marins français, cette loi donnerait à la France une place dans le dispositif de surveillance mondial que les citoyens et les parlementaires doivent refuser de valider. L'absence de publication des accords d'échanges de données entre pays rend d'autant plus inquiétantes les possibilités de développement d'un marché de la surveillance inter-étatique faisant sauter tous les (maigres) verrous de contrôle des services de renseignement.

« Un tel dispositif de surveillance de masse participe de la course à l'espionnage mondial, et fait de la France un pays ennemi des libertés fondamentales. S'il semble clair que cette loi est une simple légalisation des pratiques secrètes mises en œuvre depuis 2008, alors il est plus que temps que l'opinion publique et les représentants de la Nation donnent clairement leur avis sur cette course à l'armement du XXIe siècle que représentent l'espionnage et la surveillance de masse » déclare Adrienne Charmet, coordinatrice des campagnes de La Quadrature du Net.

Fichier attachéTaille
PPL Surveillance internationale.pdf55.23 Ko