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La Quadrature du Net

source: La Quadrature du Net

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La commission ITRE du Parlement européen s'apprête à prendre une décision cruciale pour la neutralité du Net

vendredi 14 mars 2014 à 18:38

Paris, 14 mars 2014 — Mardi 18 mars à 10h, la commission « industrie » (ITRE) du Parlement européen prendra une décision majeure pour l'avenir de la neutralité du Net en Europe. L'adoption de ce rapport pourrait marquer un point de non-retour. Deux visions opposées du futur d'Internet divisent les deux plus grands groupes politiques du Parlement européen, le parti social-démocrate (S&D) et le parti conservateur (PPE). L'issue du vote pourrait reposer sur les députés du parti libéral (ADLE), qui semblent n'avoir pas encore choisi quelle version soutenir, bien que leur rapporteur, Jens Rohde, les pousse à l'adoption des dispositions anti-neutralité du Net. Si elles étaient votées, ces mesures mettraient fin à l'Internet tel qu'il existe aujourd'hui, portant une atteinte significative à la liberté de communication et d'innovation.

Initialement, le vote de la commission ITRE concernant la proposition de Neelie Kroes sur le Marché Unique Européen des Télécommunications était prévu pour le 24 février dernier. Cependant, les amendements n'ayant pas été traduits dans les 22 langues officielles de l'UE, les membres de la commission ITRE ont finalement décidé de reporter le vote après une heure et demie de discussions animées.

Avant cela, le travail des rapporteurs s'est révélé particulièrement intense à cause de la division des groupes politiques sur le chapitre consacré à l'Internet ouvert. La proposition de Pilar del Castillo Vera (ES – PPE), la rapporteure ITRE sur le dossier, déforme le principe de neutralité du Net afin de plaire aux lobbys télécoms. Ses amendements de compromis (pdf commenté par LQDN) autorisent le contournement de la neutralité du Net en permettant aux opérateurs télécom de conclure des accords avec les fournisseurs de services (par exemple YouTube ou Netflix) afin de prioriser leurs flux au travers des soi-disant « services spécialisés ». Malheureusement, bien que les membres PPE de la commission LIBE aient largement soutenu des dispositions pro-neutralité du Net, les propositions de Pilar del Castillo Vera sont suivies par son groupe politique (PPE) en ITRE.

La députée Catherine Trautmann (FR – S&D), rapporteure fictive de son groupe, a adopté une position ferme en faveur de l'innovation et de la libre concurrence dans l'économie numérique, et a proposé une autre version du même amendement de compromis. Celui-ci énonce clairement que les « services spécialisés » ne peuvent être utilisés par les gros opérateurs télécom pour nouer des partenariats avec les géants de l'Internet afin de contourner le principe de neutralité du Net et asseoir leur position dominante sur Internet et l'économie numérique en général (voir un tableau comparatif de ces deux amendements).

À ce stade, la bataille pour un Internet ouvert est loin d'être gagnée. Les membres du groupe libéral1 (ALDE) – dont les voix seront déterminantes pour l'issue du vote – ont juqu'ici refusé de s'associer au vote des Socio-démocrates et des Verts, préférant soutenir la dangereuse proposition de la rapporteure Pilar del Castillo.

Il est primordial que les citoyens européens exigent de chaque membre de la commission ITRE, et particulièrement de ceux du groupe ALDE, qu'il protège l'intérêt public en adoptant l'amendement de compromis de Catherine Trautmann sur un « Internet ouvert », plutôt que celui de Pilar Del Castillo.

« Le Parlement doit profiter du prochain vote de la commission "Industrie" pour défendre Internet contre les opérateurs télécoms et les géants US du numérique. Les dispositions proposées tant par la commissaire européenne Neelie Kroes que par la rapporteure du Parlement Pilar del Castillo Vera contiennent d'importantes failles qui menacent la neutralité du Net, la concurrence et la liberté de choix des utilisateurs. Il est impératif de les rejeter. À l'approche des élections européennes, les citoyens doivent demander des comptes à leurs représentants et s'assurer que l'Internet tel que nous le connaissons soit protégé des intérêts à court terme de certaines entreprises dominantes » conclut Félix Tréguer, cofondateur de l'association La Quadrature du Net.

Chaque citoyen peut agir pour défendre la neutralité du Net en contactant ses eurodéputés et en les appelant à mettre en place de solides protections pour un Internet libre. Pour participer à ces actions, rendez-vous sur le site savetheinternet.eu.

Agissons maintenant !

La Commission européenne doit entendre l'appel du Parlement contre les programmes de surveillance

jeudi 13 mars 2014 à 13:35

Paris, le 12 mars 2014 — Aujourd'hui, le Parlement européen a adopté une résolution importante condamnant les programmes de surveillance européens et américains. Bien que cette résolution ne soit pas contraignante, La Quadrature du Net salue son appel à la suspension de l'accord « Safe Harbor » et des programmes illégaux de surveillance de masse, et sa réaffirmation de l'importance de la protection du droit fondamental des citoyens à la vie privée. À l'approche des élections européennes, les citoyens doivent s'assurer dès aujourd'hui que la protection de leur vie privée occupera une place centrale dans les débats du prochain Parlement, afin que cet appel soit entendu par la Commission européenne.

La résolution adoptée aujourd'hui par le Parlement européen découle du rapport de Claude Moraes (S&D – UK), voté en février 2014 par la commission « libertés civiles » (LIBE) en réaction aux révélations d'Edward Snowden sur les programmes de surveillance de masse mis en place par les États-Unis avec le soutien volontaire de plusieurs États Membres de l'Union européenne. En adoptant ce rapport, le Parlement européen vient de réaffirmer quelques évidences, telles que le fait que les droits des citoyens sont violés par la surveillance de masse, en particulier lorsque des journalistes, avocats ou médecins sont pris pour cible. Ce rapport appelle également à des actions essentielles, bien qu'évidentes, telles que l'arrêt des programmes illégaux de surveillance de masse.

Mais le signal le plus important envoyé par cette résolution est sans aucun doute son appel à « la Commission à présenter des mesures entraînant la suspension immédiate » de l'accord « Safe Harbor », comme l'exigent La Quadrature du Net et d'autres organisations de la société civile depuis le début des révélations d'Edward Snowden. Si la Commission européenne l'exigeait, la suspension de cet accord représenterait une mesure concrète et effective, étape indispensable pour mettre un terme à la surveillance massive des citoyens européens. Elle conduirait également à une renégociation des relations transatlantiques à ce sujet. Malheureusement, les résolutions du Parlement européen ne sont pas contraignantes : la Commission européenne a maintenant le devoir d'instaurer des mesures effectives, afin de mettre un terme au transfert illimité de données personnelles vers les États-Unis, et par conséquent de les encourager à adapter leurs lois aux standards existants et à venir de l'Union européenne dans ce domaine.

Cependant, le rejet des amendements1 appelant au soutien à Edward Snowden est particulièrement regrettable compte-tenu de son rôle clé dans la révélation de l'existence des programmes de surveillance de masse contre lesquels le Parlement s'élève aujourd'hui. De même, le timide avertissement selon lequel l'accord commercial trans-atlantique, TAFTA, « pourrait être menacé » par les activités de surveillance, est également encourageant, mais insuffisant car bien trop faible. Cette décision s'avère d'autant plus regrettable qu'un document récemment fuité démontre que les inquiétudes de la société civile à son sujet sont parfaitement justifiées2, et que des amendements positifs appelant à une suspension immédiate des négociations3 avaient été déposés.

« Parce qu'il appelle à la suspension du "Safe Harbor", le vote d'aujourd'hui est une puissante déclaration d'intention. Cette résolution affirme que la violation massive des droits fondamentaux des citoyens européens est inacceptable et doit cesser sans attendre. La Commission européenne a maintenant le devoir d'entendre cet appel et de le transformer en mesures effectives. À l'approche des élections européennes, La Quadrature du Net appelle les citoyens à exiger des actes fermes et significatifs, et à s'assurer que la suspension du "Safe Harbor" devienne une réalité » conclut Benjamin Sonntag, cofondateur de La Quadrature du Net.

Des failles majeures subsistent dans le règlement du Parlement européen sur la protection des données

mercredi 12 mars 2014 à 17:05

Paris, 12 mars 2014 — Le Parlement européen vient d'adopter en première lecture le rapport de Jan Philipp Albrecht concernant le règlement général sur la protection des données. Les eurodéputés sont finalement parvenus à résister aux pressions des lobbys et ont rejeté la plupart de leurs propositions préjudiciables. Bien que d'importants progrès ait été réalisés aujourd'hui, les dangereuses notions d'« intérêt légitime » et de « données pseudonymisées » ont été conservées, et pourraient empêcher le texte définitif de protéger les citoyens de manière effective.

Le 21 octobre 2013, la commission « libertés civiles » (LIBE) a adopté son rapport relatif au règlement général sur la protection des données, avant de donner mandat à son rapporteur, Jan Philipp Albrecht (Verts/ALE – Allemagne), pour négocier à huis clos un accord avec la Commission européenne et le Conseil des Ministres (trilogue). Ces négociations n'ayant pas débouché sur un consensus, le Parlement européen a finalement adopté un texte identique à celui de LIBE.

Malgré une campagne de lobbying sans précédent menée à Bruxelles par les secteurs de la banque, des technologies et des gouvernements étrangers, la mobilisation de la société civile est parvenue à convaincre les députés de préserver la plupart des progrès introduits par la Commission européenne en 2012 : le consentement explicite, des sanctions effectives (pouvant à présent atteindre 5% du chiffre d'affaires mondial d'une entreprise), un champ d'application territorial large et clairement défini, ainsi que des droits plus forts et équilibrés pour les citoyens.

Malheureusement, les députés ne sont pas parvenus à corriger la faille la plus dangereuse laissée dans la proposition initiale par la Commission en 2012 : la définition bien trop large de la notion d'« intérêt légitime ». En tant que tel, l'« intérêt légitime » de quiconque peut être utilisé comme fondement légal permettant d'outrepasser le consentement d'un individu afin de traiter les données le concernant. En outre, le rapport introduit le concept insidieux de données « pseudonymisées », si cher aux lobbys des technologies.

La publication de la position du Conseil sur le règlement est prévue pour les 5 et 6 juin prochains.

« Le vote d'aujourd'hui ferme le premier chapitre d'un long processus qui déterminera si les citoyens européens regagneront le contrôle de leur vie privée. Bien que la société civile se soit fermement opposée aux lobbys des banques, des géants de l'Internet et de certains gouvernements, les eurodéputés ne sont pas parvenus à corriger les failles majeures du texte. Les citoyens doivent exiger de leur gouvernement qu'il corrige ces failles, préserve les avancées, et n'introduise pas de nouvelles exceptions dans le texte. Ce règlement devant être finalisé par le prochain Parlement, les citoyens doivent attirer l'attention des candidats à l'élection européenne sur ces questions. », déclare Miriam Artino, analyste politique à La Quadrature du Net.

Réforme du droit d'auteur : la Commission européenne doit publier les réponses à la consultation sans attendre

vendredi 7 mars 2014 à 09:09

Paris, 7 mars 2014 — La consultation de la Commission européenne sur la future révision du droit d'auteur s'est achevée le 5 mars 2014 (voir la réponse de LQDN). Il est à présent essentiel que la Commission publie sans attendre l'ensemble des réponses et assure la transparence de son processus décisionnel.

Dès le 4 février 2014, date butoir initiale de la consultation sur le droit d'auteur, 2 500 réponses avaient déjà été envoyées à la Commission. Finalement, ses services ont indiqué sur twitter la participation de plus de 11 000 personnes ou organisations, record historique pour une procédure de ce type.

Deux ans après la large mobilisation contre l'accord commercial ACTA, cette participation démontre à nouveau l'importance du débat sur le droit d'auteur, qui concerne tous les citoyens. Le défi que représente l'adaptation du droit d'auteur à l'environnement numérique ne doit pas conduire à l'instauration de systèmes plus répressifs et criminalisant de larges pans de la création citoyenne, ni à freiner l'innovation en Europe. Au contraire, elle doit promouvoir les droits culturels des créateurs, mais aussi ceux de leur public.

Afin d'assurer que la suite du processus de la consultation soit digne de confiance, La Quadrature du Net appelle la Commission à publier sans attendre l'ensemble des réponses. Au cours d'un échange de messages, les services de l'institution ont affirmé qu'ils « tenteraient de publier les données brutes des contributions dès que possible »1. Une telle publication permettrait aux acteurs de la société civile de mener leurs propres analyses des réponses à la consultation, en parallèle de celle de la Commission, et ainsi de contribuer au débat à venir sur la réforme du droit d'auteur. La publication des réponses après celle de l'analyse ne pourrait qu'alimenter les doutes quant à leur interprétation par la Commission, et réduirait d'autant la légitimité de l'action politique à venir.

La Quadrature du Net invite les citoyens à s'informer dès maintenant sur la réforme du droit d'auteur, ses enjeux pour leur vie quotidienne, et la position de leurs élus dans ce domaine, particulièrement à l'approche des élections européennes de mai. Pour obtenir plus d'information sur la manière dont chacun peut contacter ses représentants et s'assurer que le prochain Parlement européen protège nos libertés et nos droits culturels sur Internet, rendez-vous sur wepromise.eu.

La Quadrature du Net participera au débat sur "L'affaire Snowden" le 11 mars à 19h

mercredi 5 mars 2014 à 20:04

[MÀJ : un enregistrement du débat est disponible ici]

Paris, 7 mars 2014 — À l'occasion de la parution du livre L'affaire Snowden aux Éditions La Découverte, son auteur, Antoine Léfébure, Philippe Aigrain, cofondateur de La Quadrature du Net, Duncan Campbell et Maurice Ronai participeront à un débat à la Maison de l’Amérique Latine (217 boulevard Saint Germain 75007 Paris) le mardi 11 mars à 19h.

Extrait de la couverture du livre

Présentation de l'éditeur

Il aura fallu la révolte du jeune Edward Snowden, informaticien travaillant pour la National Security Agency (NSA) américaine, pour que le monde entier découvre l'étendue de la surveillance menée en secret par les États-Unis : écoutes téléphoniques, interceptions d'e-mails, espionnage d'entreprises et de gouvernements alliés. Depuis juin 2013, Edward Snowden, puis ses relais Glenn Greenwald, journaliste britannique, et Laura Poitras, documentariste américaine, ont ainsi distillé dans la presse internationale les documents les plus secrets de la première puissance mondiale.

Créant un mouvement d'indignation parmi les citoyens, ces révélations poussent les gouvernements à s'interroger : la sécurité nationale est-elle la seule finalité des écoutes de la NSA ? Comment et pour qui travaille l'agence américaine ? Pourquoi utilise-t-elle les multinationales américaines afin de faire d'Internet un espace de surveillance généralisée ?

Commentaire de La Quadrature du Net

La Quadrature du Net salue la parution de ce livre qui fournit un tableau complet et détaillé des mécanismes de surveillance mis en place par les États-Unis et d'autres pays, du déroulement des révélations d'Edward Snowden, et des événements qui ont suivi. Le livre revient sur la mise en place d'une surveillance généralisée des communications sur Internet dans le contexte d'une approche sécuritaire transformant chaque individu en un suspect potentiel, aujourd'hui ou demain, et où les grandes entreprises du Web et les contractants privés des services de sécurité participent à des politiques échappant à tout contrôle démocratique réel. Antoine Léfébure y ouvre une discussion plus que nécessaire sur le rôle et la protection des lanceurs d'alerte et des journalistes critiques et sur les réactions sociétales possibles pour éviter l'univers dans lequel la généralisation de la surveillance justifiée par des prétextes sécuritaires nous conduit.