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La Quadrature du Net

source: La Quadrature du Net

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Loi Cazeneuve : bientôt tous présumés terroristes ?

lundi 21 juillet 2014 à 12:55

Paris, 21 juillet 2014 — Le projet de loi « sur le terrorisme » présenté par Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur du gouvernement de Manuel Valls, sera étudié au sein de la commission des lois de l'Assemblée nationale ce 22 juillet. Le texte adopté par ces députés sera ensuite soumis au débat en séance publique à la mi-septembre. C'est un test majeur pour la défense des droits et libertés contre l'instauration de mesures très graves de police préventive de l'intention, contournant le judiciaire au nom de la lutte contre le terrorisme.

L'ensemble de ce projet de loi instaure un état d'exception permanent d'Internet, contournant largement le juge pour s'orienter vers des solutions policières et administratives, non contradictoires, disproportionnées et pour la plupart inefficaces quant au fond du problème : la lutte contre le terrorisme. Des mesures éparpillées dans au moins 7 articles, reposant à chaque fois sur des concepts vagues et extensibles comme « l'apologie du terrorisme » et qui portent atteinte à la liberté de circulation (art. 1), au droit de la presse (art. 4), à la liberté d'information et de communication (art. 9), à la protection des sources (art. 11), aux procédures pénales équitables (art. 13) ou sont profondément disproportionnées (art. 12, 14).

Ces dispositions ont provoqué des oppositions massives des associations de professionnels de la justice, de défense des libertés et du droit d'informer, de défense des droits de l'homme, ainsi que d'organes consultatifs. Voir par exemple le dossier du Syndicat de la Magistrature, le communiqué de presse de Reporters Sans Frontières, l'avis du CNNum et la tribune de certains de ses membres. La commission numérique de l'Assemblée nationale s'apprête également à faire une recommandation critique à la commission des lois sur ce projet.

« Nous ne pouvons laisser le gouvernement nous imposer les mêmes politiques répressives que Nicolas Sarkozy en son temps, et installer par petites touches une suspicion généralisée et une police préventive de l'intention contournant le judiciaire. La censure par le gouvernement, les atteintes à la liberté de communication et d'information ne sauraient être justifiées par cette grossière instrumentalisation de la peur. Le parlement joue gros dans ce débat : si nos élus ne sont pas capables d'obtenir le retrait du projet de loi ou de l'amender au fond, un nouvel et grave affaiblissement des droits fondamentaux en résultera. Serons-nous tous bientôt des terroristes potentiels, comme aux États-Unis, avec la surveillance massive de la NSA ? Nous devons réagir ! » déclare Jérémie Zimmermann, co-fondateur de La Quadrature du Net.

ALERTE CITOYENNE ! Libertés en danger sous prétexte de lutte contre le terrorisme

vendredi 18 juillet 2014 à 12:19

Paris, 18 juillet 2014 — Le 22 juillet prochain, la commission des lois de l'Assemblée nationale étudiera le projet de loi « renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme », présenté par le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve. La Quadrature du Net appelle les citoyens à se mobiliser en contactant les membres de cette commission pour contrer cette loi dangereuse, inefficace et disproportionnée.

La plupart des articles contenus dans ce projet de loi instaurent des mesures disproportionnées ou inefficaces au regard de l'équilibre indispensable à conserver, dans une démocratie, entre libertés publiques et lutte contre le terrorisme. L'attention a été portée d'abord sur l'article 9 – qui propose une extension de la responsabilité des hébergeurs dans la surveillance des contenus – et l'instauration de mesures de censure administrative sans juge de sites Internet. Mais c'est la quasi-totalité de ce projet de loi qui tend au contournement du judiciaire dans le cadre des actions policières anti-terroristes, particulièrement dans le domaine numérique.

L'ensemble du projet de loi s'attache à traiter dans le cadre anti-terroriste des actes ou des propos qui sont considérés comme « faisant partie du parcours des terroristes », avant que les actes de terrorisme ne soient eux-même commis ou même directement préparés. C'est une société de la surveillance et de la suspicion qui est ici proposée, dans laquelle la police ou le gouvernement décideraient de censurer Internet, et c'est en ces termes que le débat devra être mené.

La Quadrature du Net s'associe aux nombreuses voix1 s'élevant contre ce projet de loi et s'oppose vigoureusement au texte dans son ensemble. Il est par ailleurs indigne qu'un texte aussi lourd de conséquences soit examiné en procédure d'urgence, avec une seule lecture par le Parlement. Les nombreux articles s'attaquant à nos libertés fondamentales et l'extrajudiciarisation de la répression sur Internet doivent être supprimés ou revus dans le respect de l'État de droit et des principes démocratiques, comme le PS l'exigeait lorsque Nicolas Sarkozy proposait de telles mesures.

La Quadrature du Net appelle tous les citoyens soucieux de défendre les valeurs fondamentales de la démocratie à contacter les membres de la commission des lois de l'Assemblée nationale sans attendre, pour les exhorter à rejeter le texte dans son ensemble, ou a minima son article 9. Pour cela, l'organisation citoyenne met à disposition le PiPhone, un outil permettant d'appeler gratuitement les députés.

Droit à l'oubli : ne pas oublier l'État de droit !

jeudi 10 juillet 2014 à 16:07

Paris, 10 juillet 2014 — Aujourd'hui, le DAPIX, groupe de travail du Conseil de l'Union Européenne en charge du règlement relatif à la protection des données personnelles, s'est penché sur l'article 17 de ce règlement, dit « droit à l'oubli numérique et à l'effacement ». Dans ce cadre, le législateur européen doit impérativement prendre en compte les atteintes à la liberté d'expression auxquelles le droit existant a déjà donné lieu et doit assurer aux citoyens des procédures garantissant efficacement sa protection.

Les travaux du DAPIX – qui ne sont pas accessibles au public – font suite à l'arrêt du 13 mai 2014 rendu par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) dans une affaire opposant l'Agence espagnole de protection des données (AEDP) à Google. Cet arrêt établit de manière claire qu'un moteur de recherche est un responsable de traitement de données personnelles, tenu de faire droit aux demandes d'opposition et d'effacement des titulaires des données qu'il traite, lorsque les conditions posées par la directive 95/46/CE sont réunies.

Si la décision de la Cour affirme à juste titre la nécessité d'une garantie étendue du droit à la protection des données personnelles, elle n'approfondit guère le point crucial de la mise en balance de la protection des données personnelles avec celle de la liberté d'expression et d'information. De fait, par son arrêt du 13 mai 2014, la CJUE a confié aux moteurs de recherche la gestion de l'équilibre des droits en cause, alors mêmes qu'ils n'ont ni la compétence, ni la légitimité de se substituer à un juge, ce qui remet en cause les principes les plus fondamentaux de l’État de droit. De ce fait, la décision de la Cour a semblé ignorer les avertissements de l'avocat général quant à la nécessité de préserver la liberté d'accès à l'information. Or, le référencement par le biais de liens hypertextes est un mode d'accès et de partage de l'information protégé par la liberté d'expression.

Cette atteinte aux principes de l'État de droit est d'ailleurs confirmée par la pratique de Google suite à l'arrêt de la CJUE. Google a ainsi réagi à l’arrêt en établissant un formulaire en ligne, permettant à tout internaute de revendiquer son propre droit à l'oubli. Alors que l'entreprise américaine a reçu plus de 70.000 requêtes, (1000 par jour en moyenne), des médias d'envergure tels que The Guardian et la BBC se sont vus notifier le désindexation de certains de leurs articles la semaine dernière. Le cas de la BBC est particulièrement intéressant car il concerne M. Stan O'Neal, l'ancien directeur de la banque d'investissement Merrill Lynch, soupçonné d'avoir fait des investissements imprudents ayant provoqué l'écroulement du géant de la finance. Or, il s'est avéré que la requête ne vienne pas de M. O'Neal, mais d'un lecteur qui revendiquait le déférencement de son commentaire en bas de l'article. Un cas de ce type remet en question l'importance et la responsabilité de l'expression publique et montre les potentielles dérives d'un système mal conçu, qui confère des pouvoirs de censure à un organe privé, alors qu'ils devraient être l'apanage d'une autorité judiciaire.

La jurisprudence de la CJUE montre de manière évidente qu'en l'état, la liberté d'expression est insuffisamment protégée par les dérogations prévues par l'article 9 de la directive 95/46/CE et reprises à l'article 80 de la proposition de la Commission européenne en discussion depuis janvier 2012. En effet, alors que la législation européenne en vigueur prévoit des dérogations aux droits des titulaires de données personnelles aux « fins de journalisme », la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme a rendu plusieurs arrêts montrant à quel point les « fins de journalisme » ne sont pas toujours d'une évidence cristalline. Par exemple, dans l'affaire Von Hannover c. Allemagne, la princesse Caroline de Monaco n'a pas eu gain de cause lorsqu'elle s'opposait à la publication d'une photographie prise pendant des vacances au ski. La Cour n'a pas constaté la violation du droit au respect de la vie privée, non pas parce que Caroline de Monaco était un personnage public, mais parce que les images étaient accompagnées d'un article faisant état de la santé précaire du Prince Rainier, information, elle, considérée d’intérêt général.

L'arrêt de la CJUE et les dérives constatées dans la mise en œuvre du droit à l'oubli montrent que la mise en balance de la protection des données personnelles et de la liberté d'expression mérite la plus grande attention de la part du législateur. Tout d'abord, elles soulignent que les exceptions à la protection des données personnelles prévues pour la liberté d'expression s'avèrent parfaitement insuffisantes. Ensuite, elles montrent à quel point la pondération des droits concernés demande la prise en compte de plusieurs éléments, nécessitant d’être traités dans le cadre d'un procès équitable et qui ne peuvent en aucun cas faire l'objet d'une décision extra-judiciaire et donc arbitraire. Enfin, de manière plus générale, elles posent la question de savoir si la législation sur la protection des données personnelles constitue le bon véhicule pour la mise en œuvre du droit à l'oubli, lorsque les informations visées ont fait l'objet d'une communication au public et relèvent de la liberté d'expression.

« Il n'est pas acceptable que le droit de l'Union laisse place à des formes de censures extra-judiciaires. Seules les règles du procès équitable nous permettront de concilier les droits et intérêts de chacun. De ce fait, l'autorité judiciaire, garante de nos libertés, est la seule capable de trouver un juste équilibre entre vie privée et liberté d'expression. Il est primordial que les citoyens puissent, au plus tôt, faire valoir leurs prétentions devant le juge » déclare Jean Cattan, membre du comité d'orientation stratégique de La Quadrature du Net.

« Afin de réaffirmer un juste équilibre entre le droit à la protection des données et la liberté d'expression, nous appelons tout d'abord le Conseil à créer un droit commun européen non seulement en matière de protection de données, mais aussi en matière de liberté d'expression. Le sujet exige un traitement harmonisé, endiguant les dérives anti-démocratiques qui malheureusement existent déjà dans certains pays de l'Union » déclare Miriam Artino, en charge de l'analyse juridique et politique à La Quadrature du Net.

Terrorisme : le gouvernement Valls veut la censure administrative du Net !

mercredi 9 juillet 2014 à 19:19

Paris, 9 juillet 2014 — Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur, a présenté aujourd'hui en Conseil des ministres son projet de loi de lutte contre le terrorisme. Véritable arsenal de mesures de surveillance et de restrictions des libertés, ce texte réintroduit notamment le blocage administratif et sans juge de sites Internet, et propose d'étendre à nouveau l'extra-judiciarisation de la censure des contenus en ligne.

Le projet de loi de lutte contre le terrorisme présenté ce matin en Conseil des ministres par Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, rappelle douloureusement les projets similaires régulièrement présentés alternativement par l'UMP ou le PS.

Une fois encore, un sujet parfaitement légitime – ici la lutte contre le terrorisme – est instrumentalisé pour justifier la restriction de la liberté de communication et la fuite en avant vers la surveillance en France. Cette fois-ci, le gouvernement souhaite non seulement étendre encore les responsabilités des intermédiaires techniques dans la suppression de contenus en ligne encadrée par la Loi pour la Confiance dans l'Économie Numérique (LCEN) (à charge pour eux, acteurs privées, de déterminer ce qui est licite ou non, hors de tout contrôle judiciaire), mais il pousse encore plus loin la volonté de censure extra-judiciaire en remettant en avant les mesures de blocage administratif dans l'article 9 du texte (dans un premier temps article 6).

Comme l'indiquait le parti socialiste avant d'accéder au pouvoir, la censure administrative de sites Internet porte gravement atteinte à nos droits fondamentaux1. Elle banalise des restrictions de liberté sans intervention préalable d'un juge, et donc les mesures d'exceptions. Quant à la mention d'un magistrat chargé d'assurer le soi-disant contrôle de ces mesures, il ne s'agit que d'une parodie de justice dès lors que ce dernier, nommé par le ministère de la Justice et travaillant seul, ne présentera aucune garantie d'indépendance, sera dépourvu de moyens, et agira a posteriori sans aucun pouvoir de suspension des mesures de blocage ordonnées.

Cette mesure de censure administrative, qui reprend celle votée au nom de la lutte contre la pédopornographie en 2011, s'appuie sur les fournisseurs d'accès à Internet (FAI) pour faire appliquer les blocages de sites. La Quadrature du Net tient à mettre particulièrement en garde les citoyens et le législateur contre les risques de dérives des techniques permettant de tels blocages :

Par l'extension de l'article 6 de la LCEN à l'incitation ou à l'apologie de terrorisme, le projet de loi de Bernard Cazeneuve continue également l'interminable élargissement de la liste des contenus pour lesquels la responsabilité des hébergeurs peut être mise en cause (le troisième en moins d'un an). Comme La Quadrature du Net l'a expliqué à maintes reprises aux parlementaires ces derniers mois, l'état du droit et de la jurisprudence poussera les hébergeurs à censurer largement tous les contenus signalés, là encore sans aucune intervention judiciaire. Cette nouvelle extension des obligations de signalement est proposée alors même que la définition de l'incitation au terrorisme est floue et particulièrement difficile à déterminer, renforçant la nécessité d'une procédure contradictoire et équitable pour s'assurer du respect de la liberté d'expression.

Ces mesures, qui visent à rendre inaccessibles aux internautes français les contenus de ces sites et non à lutter effectivement contre les réseaux terroristes, rappellent celles votées en décembre 2013 avec la loi de programmation militaire. Elles inquiètent par leur caractère attentatoire et disproportionné aux libertés fondamentales, et ce d'autant plus que les contenus violents ou appelant à la violence sont déjà couverts par la LCEN et que des procédures judiciaires d'urgence sont déjà prévues.

« Les mesures proposées pour censurer les sites qui font l'apologie du terrorisme mettent directement en cause la liberté d'expression et le droit au procès équitable, deux composantes essentielles de l'État de droit. La force de notre démocratie est de savoir se défendre sans abdiquer ses principes ni les libertés fondamentales de ses citoyens. Nous appelons donc le gouvernement de Manuel Valls, et particulièrement Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, à renoncer à ces mesures extra-judiciaires et à œuvrer pour que la lutte contre le terrorisme se fasse dans le strict respect de l'État de droit » déclare Adrienne Charmet, coordinatrice des campagnes de La Quadrature du Net.

Le nerf de la paix

vendredi 4 juillet 2014 à 16:09

Tribune de Philippe Aigrain, co-fondateur de La Quadrature du Net, publiée sur son blog le 4 juillet 2014

Il y en a qui disent que le fric c'est le nerf de la guerre, mais ici, je voudrais vous convaincre que dans le cas particulier des dons à La Quadrature du Net (et à des organismes similaires), c'est le nerf de la paix. Allez, vous me connaissez, on va commencer par un détour. Dans le local de La Quadrature du Net (le garage pour les intimes), il y a un bout de papier auto-adhésif sur lequel j'ai gribouillé une liste des devoirs qu'une association comme La Quadrature du Net a selon moi à l'égard du public.

Le troisième point, portant sur qui y décide quoi et comment, affirme un devoir de transparence sur les processus de décision (collégiale au sein du conseil d'orientation stratégique et en pratique aussi avec l'équipe opérationnelle). Ce point affirme : « La Quadrature du Net n'est pas une organisation démocratique, mais collégiale et à l'écoute ». Le caractère collégial n'est pas un vain mot : en 5 ans comme association de fait, et en un an et demi comme association loi de 1901, il n'est pas une décision que nous n'ayons prise à l'unanimité (dans certains cas, une personne concernée par la décision s'abstenait d'y participer). Le devoir d'écoute non plus et il s'exerce aussi bien à l'égard de nos adversaires qu'à l'égard de ceux qui nous soutiennent. Mais c'est une autre partie de mon énoncé qui mérite débat : « La Quadrature du Net n'est pas une organisation démocratique ». Oui, alors que nous agissons chaque jour avec le souci de préserver les biens communs et les capacités de chacun à s'exprimer, créer, collaborer, se coordonner et innover, nous ne pouvons et ne devons pas prétendre être une organisation démocratique. Nous sommes porteurs d'une vision spécifique de l'intérêt général, et pour que nous puissions la porter avec efficacité dans un monde qui la refuse encore, nous avons des processus de décision qui ne mobilisent qu'un petit groupe. Si vous nous soutenez, et nous en avons besoin de façon critique, qu'il s'agisse de participation à nos actions ou de soutien financier, cela signifie que vous considérez, temporairement et non exclusivement, comme utile qu'existent des groupes comme le notre qui rendent publique leur vision et s'engagent à la défendre.

Les deux dernières campagnes de sollicitation de dons en juin-juillet 2013 et en décembre 2013 ont été des succès relatifs. Pourquoi ? Parce que nous avions de puissants alliés : la peur et l'indignation. Peur et indignation des faits révélés par Edward Snowden, et des persécutions dont, après d'autres, il est l'objet. Peur et indignation de l'article 20 de la loi de programmation militaire et d'autres textes manifestant que notre gouvernement ne se préoccupait1 que de légaliser en toute hâte les pratiques a-légales de surveillance qui par malchance pour lui ont été révélées au public et non de retrouver le chemin du respect des droits fondamentaux. Pas de problème : nous pourrions continuer à vous faire peur. Il y a l'inimaginable obstination conjointe de la Commission européenne et des gouvernements à inventer sans cesse de nouvelles façons de tenter d'éradiquer le partage non marchand des œuvres numériques (aujourd'hui en attaquant toute fourniture de moyens à ce partage). Il y a la négociation pour le traité TAFTA/TTIP et sa généralisation de l'arbitrage privé permettant mettre en cause des lois démocratiquement adoptées. Il y a toujours, avec d'importantes exceptions, l'ignorance de la culture et de la socialité numérique réelles de la part de décideurs qui font de chacun de nous des orphelins numériques même quand, comme moi, nous sommes plus âgés que la plupart d'entre eux.

Mais ce coup-ci on a mieux dans les cartons comme nouvelle façon de vous faire peur et surtout j'espère aussi de vous donner envie et espoirs. C'est l'ami Jérémie (tiens, au fait il va de nouveau être par ici, et pas seulement chez La parisienne libérée) qui en a eu l'idée. Et c'est le genre d'idées qu'il faut voler d'urgence. C'est une idée qui va prendre du temps à être comprise (autant donc commencer tout de suite). C'est une question de paix. Parce que ce que nous promet le développement de nos sociétés et du numérique version NSA & compagnies (et celui de ses imitateurs jaloux), c'est une guerre civile planétaire qui débouchera probablement sur des guerres tout court. La guerre civile planétaire résulte du développement conjoint de la suspicion généralisée et de la surveillance généralisée. Oui, chacun de nous est devenu suspect, jusqu'à qu'il ait apporté la preuve jamais complète et toujours provisoire de son innocence. Les raisons d'être soupçonnées varient selon les espaces géopolitiques. Chez nous, c'est genre mauvais consommateur, pirate, inemployable, membre d'une mouvance insurrectionnelle dont les actions relèvent du sit-in numérique, détenteur de mauvais gènes qui vont coûter cher ou de mauvais indicateurs de performance, peu importe finalement la raison. Et c'est là que nous avons un projet de paix. Un peu moins ambitieux que la paix perpétuelle dans les nations, dont l'instrument (la concurrence dans le commerce, aka guerre économique) est aujourd'hui lui même source de dangers guerriers. Ce dont il s'agit c'est de pouvoir construire notre autonomie dans l'espace numérique, notre personnalité dans l'usage que nous en faisons comme dans nos interactions dans l'espace physique. De déposer les armes qu'on nous a forcés à porter les uns contre les autres et de construire les liens de la collaboration, de l'émulation et de la mutualisation entre les individus, les groupes et les sociétés.

On va essayer d'y contribuer, par la promotion inlassable des conditions du développement humain et de la collaboration dans l'espace numérique puisque c'est sur lui que nous agissons2. Mais on est à la limite, la limite de la possibilité de certains de travailler dans les conditions actuelles, la limite du stress parfois. Il y a des dizaines d'autres formes d'action importantes. Soutenez La Quadrature du Net, si vous voulez qu'on puisse continuer à promouvoir le soubassement numérique de leurs activités. Nous avons besoin de passer de 2200 à 4000 donateurs. Si vous êtes déjà donateur, parlez-en à votre grand-mère, à ceux que vous aimez, à vos collègues, aux passants dans la rue.