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Edward Snowden mérite de recevoir le prix Sakharov

mercredi 9 octobre 2013 à 19:16

Lettre ouverte pour soutenir l'attribution du Prix Sakharov à Edward Snowden

Aujourd'hui, 23 organisations non-gouvernementales européennes publient une lettre ouverte adressée à la Conférence des présidents du Parlement européen en soutien à la nomination d'Edward Snowden pour le Prix Sakharov de la liberté de penser 2013 (traduction publiée sur le site de la NURPA).

[MISE À JOUR : Le prix Sakharov 2013 a été décerné à Malala Yousafzai]

Chers Présidents,

Nous vous écrivons au nom de 23 organisations non-gouvernementales européennes qui défendent les libertés fondamentales, dont la liberté d'expression et d'information, pour vous faire part de notre support à la candidature d'Edward Snowden pour le Prix Sakharov.

Les récentes révélations d'Edward Snowden ont déclenché un débat public longuement retardé et nécessaire aux États-Unis (et au-delà) au sujet des limites acceptables de la surveillance dans un état démocratique, ainsi que de la légitimité et proportionnalité des activités de renseignements anti-terroristes. Les révélations ont également suscité des débats dans l'Union européenne.

Le prix Sakharov de la liberté de penser fût créé pour honorer les individus défendant de manière active les droits de l'Homme et les libertés fondamentales, plus particulièrement la liberté d'expression. Nous sommes persuadés que, par ses actions, Edward Snowden répond à ces critères. Sa nomination pour le prix est en elle-même une contribution au développement de la démocratie et à l'État de droit dans l'Union européenne, plus particulièrement en ce qui concerne la protection des lanceurs d'alerte. Cela envoie par ailleurs un message fort en faveur du respect du droit international. Décerner le prix à Edward Snowden enverrait un signal clair au monde que l'Union européenne valorise et protège toute personne qui subit une répression pour avoir dénoncé des atteintes aux droits de l'Homme. Daniel Ellsberg et d'autres lanceurs d'alerte de la NSA ont rendu hommage aux actions d'Edward Snowden. Nous sommes persuadés qu'Andrei Sakharov en aurait fait de même.

Sakharov - un physicien nucléaire devenu opposant d'un état répressif - a utilisé sa position au niveau de la sécurité nationale et de la défense pour soulever des problématiques au sujet de la préservation des droits de l'Homme. De la même manière, M. Snowden a utilisé ses connaissances professionnelles pour attirer l'attention sur des abus à l'encontre des droits fondamentaux et de leurs effets sur la société dans son ensemble. Dans leur transition d'employés au service de l'État à "défenseurs des droits civiques", ces deux personnes sont devenues des dissidents, pleinement conscients de ce qu'il pouvait leur en coûter. L'Union européenne a le devoir moral de reconnaître une personne qui se bat avec courage pour les droits de l'Homme, sachant le coût que son action aura sur sa liberté personnelle. Nous sommes pleinement conscients que chacun des candidats retenus mérite pleinement sa nomination et nous comprenons que ce choix est difficile.

Néanmoins, tous les candidats ne sont pas dans la même situation. Les autres nominés ont déjà été récompensés par de nombreuses autres distinctions et sont moins controversés, leur activisme étant dirigé à l'encontre de régimes totalitaires.

Lorsque vous déciderez du lauréat du Prix Sakharov, rappelez-vous que M. Snowden a dévoilé au monde que la surveillance globale et sans contrôle n'est pas l'apanage des dictatures, mais que les démocraties peuvent aussi nuire aux libertés fondamentales de leurs citoyens. Veuillez, par ailleurs, garder à l'esprit qu'une des seules choses que l'Union européenne puisse faire à l'heure actuelle est de soutenir M. Snowden.

Les actes de M. Snowden représentent un défi aux pouvoirs des États dépourvus de tout contrôle au niveau mondial, au-delà des simples dérives nationalistes. Une telle récompense paverait la voie pour une protection d'un activisme sans frontière dans un monde interconnecté. Jusqu'à présent Edward Snowden n'a reçu aucune distinction pour ses actes courageux ou support de la part de l'Union européenne dans son ensemble, de la part d'un État membre ou de la moindre institution européenne.

En tant que citoyens européens, nous estimons que le Prix Sakharov est la meilleure manière de changer cet état de fait indésirable. C'est pourquoi nous vous encourageons fermement à décerner le Prix Sakharov à M. Edward Snowden en honneur à son courage et à son engagement en faveur des valeurs que représente ce Prix.

Sincères salutations,

  • Alternative Informatics Association (Turkey)
  • ApTI (Romania)
  • Arbeitskreis Vorratsdatenspeicherung (Germany)
  • ARTICLE 19 (International)
  • Bits of Freedom (The Netherlands)
  • Chaos Computer Club e.V. (Germany)
  • DFRI (Sweden)
  • Digitalcourage (Germany)
  • Digitale Gesellschaft (Germany)
  • Electronic Frontier Finland
  • European Digital Rights (EDRi) (Europe)
  • Foundation for Information Policy Research (UK)
  • Initiative für Netzfreiheit (Austria)
  • Internet Society (Poland Chapter)
  • IT-Political Association of Denmark
  • Iuridicum Remedium (Czech Republic)
  • La Quadrature du Net (France)
  • Modern Poland Foundation (Poland)
  • Net Users' Rights Protection Association (NURPA) (Belgium)
  • Open Rights Group (UK)
  • Panoptykon Foundation (Poland)
  • Transnational Institute (The Netherlands)
  • Vrijschrift (The Netherlands)

[Vidéo] Happy Birthday to GNU! <3

vendredi 27 septembre 2013 à 09:54

30 ans de GNU
30 ans de logiciels libres


Merci de tout cœur à Richard Stallman, à toutes les personnes impliquées dans le projet GNU, et à tous les contributeurs et utilisateurs de logiciels libres !

<3

Pour plus d'informations, voir : https://www.gnu.org/gnu30/gnu30.html et https://www.gnu.org/gnu/initial-announcement.fr.html

Télécharger et voir la vidéo sur notre mediakit : http://mediakit.laquadrature.net/view.php?full=1&id=1178

Les robots de la police privée du copyright attaquent "Robocopyright"

jeudi 19 septembre 2013 à 13:03

Paris, 19 septembre 2013 — Avec une mordante ironie, la vidéo « Robocopyright ACTA » que La Quadrature du Net avait publiée en 2010 sur Youtube pour dénoncer les excès de la répression conduite au nom du droit d’auteur a été retirée cette semaine par la plateforme… pour violation du droit d’auteur ! Elle constituait pourtant incontestablement une parodie protégée par une exception au droit d’auteur en France et par le fair use (usage équitable) aux États-Unis. Cette atteinte caractérisée à la liberté d’expression ne fait qu’illustrer une fois de plus les risques de censure dont sont porteurs les systèmes d’application automatisée du droit d’auteur. Ce sont pourtant ces modèles qui sont montrés en exemple aujourd’hui en France, notamment à travers le concept « d’auto-régulation des plateformes », que l’on retrouve aussi bien dans le rapport Lescure, à la Hadopi ou au CSA.

La vidéo « Robocopyright ACTA » avait été réalisée par l’équipe de La Quadrature1 à partir du détournement d’une scène du film RoboCop, dont les droits appartiennent à la société de production MGM. Ce sont ces contenus que le système automatique de filtrage Content ID, mis en place par Google sur Youtube, a repérés et retirés, peut-être à la demande des ayants droit.

Content ID fonctionne sur une base contractuelle par le biais d’accords de redistribution des revenus publicitaires entre Google et les ayants droit. Il se substitue aux mécanismes prévus par la loi, aussi bien en Amérique qu’en France, concernant la responsabilité des hébergeurs. En laissant aux titulaires de droit la possibilité de décider arbitrairement du retrait de leurs contenus, Content ID occasionne très fréquemment des dommages collatéraux, en provoquant le retrait de mashups, de remix ou de parodies reconnues par ailleurs par la loi.

Ce système aboutit à la mise en place d’une police privée du droit d’auteur, s’exerçant en dehors du contrôle de la justice et dérivant graduellement vers un système de censure aveugle. Une possibilité de contre-notification a bien été prévue par le biais d’un appel, mais, outre la lourdeur de cette procédure pour les simples citoyens, l’impartialité de ce dispositif est douteuse, puisque certains ayants droit comme Universal ont obtenu des privilèges leur permettant d’obtenir les retraits comme ils le souhaitent.

Il est très inquiétant de voir que ces systèmes automatiques de filtrage sont pris pour exemple par les pouvoirs publics français, comme des dispositifs dont l’application pourrait être généralisée pour « réguler » Internet au nom du droit d’auteur. Mireille Imbert Quaretta, présidente de la Commission de protection des droits de la Hadopi, s’est ainsi vue confier par le Ministère de la Culture une mission de lutte contre la contrefaçon commerciale. Elle entend pousser les plateformes à « s’autoréguler » en mettant en place des dispositifs de filtrage, sous peine de voir leur responsabilité engagée. On retrouve la même idée dans les recommandations du rapport Lescure, qui vante les mérites de Content ID et envisage favorablement sa généralisation.

Face à ces dérives, qui pourraient amener un ACTA ou un SOPA contractuel en France, La Quadrature réaffirme que le retrait d’un contenu sur Internet ne devrait intervenir qu’après le contrôle d’un juge impartial dans le cadre d'une procédure contradictoire au sein d'un tribunal. Il n’appartient pas à des acteurs privés de définir à leur guise l’étendue de la liberté d’expression. Le mashup, le remix et la parodie doivent être consacrés comme des droits dans la loi, mais les abus de la censure ou de la sanction automatisée ne sont en rien limités à ces cas.

« Le retrait arbitraire de cette vidéo illustre le fait que l’application du droit d’auteur ne devrait jamais être confiée à des machines ou à des humains machinisés. C’est hélas une tendance lourde de la guerre au partage, inscrite dès l’origine dans le fonctionnement de la Hadopi. Le projet de confier au CSA la possibilité d’infliger automatiquement des amendes par voie d’ordonnances pénales participe de la même logique », déclare Philippe Aigrain, co-fondateur de La Quadrature du Net.

« Cette vidéo était l’un des symboles de la lutte contre l’accord ACTA et elle avait été vue par des centaines de milliers d’internautes. Le détournement parodique de contenus est devenu un mode d’expression à part entière sur Internet. Ce sont des pans entiers de notre culture qui sont menacés par cette application disproportionnée, injuste et dangereuse du droit d’auteur », déclare Jérémie Zimmermann, porte-parole de La Quadrature du Net.

La vidéo en question :

Droit des femmes : nouveau cheval de Troie de la censure du Net ?

lundi 16 septembre 2013 à 09:32

Paris, 16 septembre 2013 — Ce lundi et mardi 17 septembre, le projet de loi dit « pour l'égalité entre les femmes et les hommes » déposé par Najat Vallaud-Belkacem, sera discuté au Sénat en première lecture. Certaines dispositions de ce texte prévoient de modifier la responsabilité des intermédiaires techniques de l'Internet pour leur confier des missions de contrôle et de censure des communications. Ces dangereuses dispositions, ajoutées en commission des lois par la sénatrice Catherine Tasca, anciennement Ministre de la Culture et présidente d'une filiale du groupe Générale des eaux (futur Vivendi), chargeraient ces acteurs privés de missions de police et de justice. Leur adoption constituerait une dérive inacceptable pour la démocratie et la liberté d'expression.

Actuellement, aux termes de l'article 6.I.7 de la loi pour la Confiance dans l’Économie Numérique (LCEN), adoptée en 2004 et déjà responsable de nombreuses dérives1, les hébergeurs sont tenus de mettre en place un système permettant à toute personne de signaler certaines catégories de contenus (représentations de crime sexuel sur mineur, apologie de crime ou appel à la haine raciale), pour leur permettre ensuite d'avertir les autorités. En pratique, pour s'abriter de tout risque juridique, les hébergeurs sont aussi incités à considérer de tels contenus comme « manifestement illicites » et à les censurer dans un cadre extra-judiciaire.


Catherine Tasca

Au nom de la lutte légitime contre les discours sexistes et homophobes, la ministre des Droits des femmes et porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, souhaite profondément modifier ce régime de responsabilité et faire adopter des dispositions visant à élargir l'éventail des contenus que ces acteurs privés sont chargés de surveiller et donc incités à supprimer. Des amendements déposés par Catherine Tasca – encore une fois en pointe des mesures renforçant la répression sur Internet2 – et adoptés en commission des lois, modifieraient la LCEN3 et un article du code pénal relatif à l'enregistrement de scènes de délits4 dans le but d'accentuer un peu plus la responsabilité des intermédiaires techniques aux contenus pouvant être constitutifs de harcèlement sexuel.

Cet élargissement des fonctions de police et de justice privée qui incombent aux hébergeurs est précisément ce que réclament depuis des années les industries du divertissement pour mener leur guerre contre le partage de la culture sur Internet. En ouvrant une telle brèche, le Sénat laisserait le champ libre à d'autres élargissements ultérieurs accentuant un peu plus les problèmes déjà constatés dans l'application de la LCEN, alors qu'au contraire, cette dernière doit être modifiée pour mieux protéger la liberté d'expression et le droit au procès équitable.

Quelle que soit la légitimité des causes que ces dispositions sont censées servir, elles ne peuvent donner lieu qu'à des dérives inacceptables, notamment à cause de leurs larges possibilités d'interprétation et du manque de moyens de nombreux petits hébergeurs pour faire face à ces nouvelles obligations. Si le gouvernement Ayrault et le Parlement souhaitent réellement agir dans ces domaines tout en se montrant respectueux de l'État de droit, ils devraient réformer la LCEN pour mettre à fin à l'extra-judiciarisation de la censure sur Internet et œuvrer au renforcement des moyens d'action de la justice et à la poursuite des auteurs de ces infractions. Aussi, avant même l'examen de ce projet de loi par l'Assemblée nationale, les sénateurs doivent s'opposer à ces dangereuses mesures.

« L'instrumentalisation de la lutte contre le sexisme et l'homophobie pour encourager des dispositifs de surveillance et de censure reposant sur des acteurs privés est inacceptable et rappelle les pratiques du gouvernement précédent. Dans un régime démocratique, seule l'autorité judiciaire peut légitimement prononcer des mesures aussi graves que la censure. » déclare Jérémie Zimmermann, porte-parole et cofondateur de l'organisation citoyenne La Quadrature du Net.

Kroes précipite son inacceptable loi anti-neutralité du Net malgré les critiques

jeudi 12 septembre 2013 à 12:12

Paris, 11 septembre 2013 – Sous le feu de nombreuses critiques, formulées aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur de la Commission européenne, Neelie Kroes a fait le choix de précipiter l'adoption de sa législation sur les télécommunications et ses mesures anti-neutralité du Net très controversées. La commissaire, après avoir nié l'urgente nécessité de légiférer sur ce sujet tout au long de la législature, tente à présent de passer en force un texte dicté par les lobbies, dans le plus grand mépris des citoyens européens. À quelques mois des élections, la balle est maintenant dans le camp du Parlement européen.


Reconstitution générée par ordinateur
de Neelie Kroes préparant sa
proposition législative

Tout comme les documents de travail fuités des dernières semaines et malgré les critiques acerbes exprimées tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la Commission1, le projet de règlement adopté aujourd'hui par la Commission européenne comporte de dangereuses mesures feignant de protéger la neutralité du Net. Ce texte biaisé prétend protéger la neutralité du Net en interdisant le blocage et le ralentissement des communications en ligne2 mais vide ce principe de son sens en autorisant explicitement la discrimination commerciale par le biais de priorisation3.

Quelques mois seulement avant la fin de son mandat et après des années de promesses et de consultations sur la neutralité du Net, Neelie Kroes cède aux demandes insistantes des opérateurs, dans un cas flagrant de capture des politiques publiques par des intérêts industriels4 en enterrant dans le même temps les propositions de la société civile et la protection de l'intérêt général.

Ce dangereux texte législatif sera officiellement présenté ce jeudi par la Commission européenne. Plus que jamais, les citoyens doivent faire entendre leur voix et s'assurer que leurs représentants au Parlement européen s'opposeront au modèle poussé par Neelie Kroes. Au contraire, le Parlement doit garantir de solides protections pour un Internet libre et ouvert dans la loi.

« Neelie Kroes trahit sciemment les citoyens européens en cédant aux puissants lobbies télécoms. Le projet de Mme Kroes est biaisé par essence afin d'autoriser des violations commerciales de la neutralité du Net, des formes de discrimination mettant en péril notre liberté de communication, par nature anti-compétitives. Passer en force de telles mesures, quelques mois seulement avant les prochaines élections est inacceptable, et démontre la profonde et inquiétante déconnexion entre la Commission et les citoyens. Le Parlement doit remplacer cette section du texte par des mesures garantissant l'application réelle et inconditionnelle de la neutralité du Net afin de défendre l'intérêt général. » déclare Jérémie Zimmermann, co-fondateur et porte-parole de l'organisation citoyenne La Quadrature du Net.