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Khrys’coronalungo du lundi 11 mai 2020

lundi 11 mai 2020 à 07:42

Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.

Brave New World

Spécial France

Spécial médias et pouvoir

Spécial Coronavirus – données (plus ou moins) scientifiques

Spécial mauvaise gestion et casse du système de santé

Spécial travail et inégalités par temps de coronavirus

Spécial répression, violences et abus de pouvoir

Spécial la démocratie et nos droits en prennent un coup

Spécial résistance

Soutenir

Spécial GAFAM et cie

Les autres lectures de la semaine

Les BDs/graphiques/photos de la semaine

Les vidéos/podcasts de la semaine

Les autres trucs chouettes de la semaine

Deux personnages prennent le café. Le personnage de gauche dit : Eh ben, toujours aussi long ! - la personne de droite répond : Yep, et ça risque de durer encore un petit bout de temps, vu comment nos dirigeants
Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.

Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).

Faire un pas de côté

samedi 9 mai 2020 à 12:32

L’association Framasoft tient à partager, même de manière irrégulière et foutraque, le résumé de ce qu’il se passe lorsqu’on héberge des outils d’échange et de collaboration en ligne en pleine période de confinement.

Ce journal, nous l’écrivons pour lever un coin de voile sur Framasoft, mais aussi pour nous, parce que ça nous fait du bien. Ne vous attendez donc pas à ce que tous les éléments de contextes vous soient systématiquement donnés, on livrera les choses comme elles viennent, plus cathartiquement que pédagogiquement.

L’accès à l’ensemble de articles : https://framablog.org/category/framasoft/framaconfinement/

La semaine des réunions

Cette semaine du 20 au 24 avril aura été celle de la reprise des réunions, des rendez-vous, des interviews. Il faut dire que pendant un mois, j’avais quasiment tout refusé par défaut et par principe, pour me concentrer exclusivement sur notre fonctionnement interne et nos missions « vitales ».

Mais cette semaine, tout s’est enchaîné. Vite. Très vite.

Préparer mon intervention aux Ludoviales (compte rendu), décliner celles des Colères du Présent (c’est Framatophe qui répondra présent), préparer une audition avec une députée France Insoumise, répondre à des interviews pour la radio des CEMEA, Le Monde, Politis, AEFE, etc. et partager mes retours sur un mémorandum (publié le 29 avril).
A cela s’ajoute les réunions « internes » : notre réunion d’équipe hebdomadaire, une réunion Mobilizon, une réunion PeerTube. Sans compter les membres de l’asso qui ont organisé une « framapapote » (une espèce d’apéro-Framasoft), et celles et ceux qui auront participé activement au premier « confin’atelier » (le compte rendu vient de paraître !).

J’aurais aussi eu plusieurs échanges avec l’équipe « Services Numériques Partagés » qui produit l’offre https://apps.education.fr, une suite de services pour l’Éducation Nationale basée exclusivement sur du logiciel libre.
Nous avons d’ailleurs été beaucoup sollicité⋅es pour donner notre avis sur cette initiative. Pour le redire encore une fois ici : nous accueillons la publication de ces services avec un très grand plaisir. Nous pensons que des services libres et décentralisés sont la meilleure solution pour la résilience de l’infrastructure numérique de l’Éducation Nationale. Nous suivions le projet depuis plusieurs mois, les services devaient être annoncés plutôt fin 2020, d’où le fait qu’ils soient aujourd’hui annoncés comme « temporaires » car non encore dans leur forme définitive. Sachant que leur planning a été bousculé, et les équipes mises sous pression, nous ne pouvons que féliciter chaleureusement toutes les personnes qui ont rendu l’émergence de ces services possible. Cependant, nous ne crions pas victoire pour autant. Le Covid aura fait tomber des murs, à la fois en faveur du logiciel libre, mais aussi en faveur des Google Classrooms, Zoom, et autres Discord. C’est certes un pas en avant très positif, mais après 15 ans de « 2 pas en avant, 3 pas en arrière » du MEN concernant le logiciel libre, il ne faudra pas nous en vouloir d’attendre encore 2 ou 3 ans avant de modifier notre position officielle.

Il y aura donc eu beaucoup de demandes à gérer. Et chaque rendez-vous exigeant en amont jusqu’à une dizaine d’échanges (mails, téléphone, etc.), j’ai eu le sentiment frustrant de passer ma semaine à « répondre » plutôt qu’à « faire ».

J’aurais malgré tout trouvé le temps d’enrichir notre dossier StopCovid avec les reprises des articles de Stéphane Bortzmeyer et de Loïc Gervais. Gee, lui, publiera sa BD « StopConneries » et l’infatigable Goofy reprendra les principaux scénarios du collectif de 14 spécialistes en cryptographie « Le traçage anonyme, dangereux oxymore, Analyse de risques à destination des non-spécialistes ».

Quand Lise, notre stagiaire CHATONS, s’interroge sur l’état du processus démocratique de son pays…

 

Le Framablog verra aussi publié cette semaine là un article touchant et emprunt de retenue de Cyrille Largillier, membre de Framasoft et directeur d’école, sur son vécu des premières semaines de pandémie.

Comme chaque semaine, notre équipe technique aura multiplié les serrages de boulons sur nos serveurs et les changements de disques en urgence. Elle a notamment réparé la machine MyPads2 et mis à jour MyPads dans sa dernière version, ou mis en place une page permettant d’éviter la saturation du disque du service Framadrop (qui permet le partage de fichiers volumineux) en nous appuyant sur les CHATONS volontaires.

Chocobozzz a repris le développement de PeerTube, et tcit celui de Mobilizon.

Mais une des plus belles actions (selon moi !) de la semaine est le passage en production des nombreuses corrections que Théo a apporté à Framaforms. En plus, je lui ai « un peu » mis la pression en lui demandant de mettre en ligne de façon anticipée des corrections qui devaient servir en urgence pour la tribune publiée sur Le Monde par (notamment) Antonio Casilli. Finalement, Antonio n’aura pas eu besoin de ce formulaire, mais je suis fier que Théo (qui est en stage, rappelons-le) se soit senti légitime et capable de valider des modifications qui pouvaient impacter plusieurs centaines de milliers de personnes. Car Framaforms c’est notre service le plus visité (100 000 visites rien que la journée du 4 mai), après Framadate, et devant Framapad. Plus de 170 000 formulaires et 4 millions de réponses ont été hébergés depuis la mise en place du service. Autant vous dire qu’on n’a pas envie d’oublier un point virgule quelque part qui rendrait le service indisponible.

Statistiques Framaforms

Bientôt 100 000 utilisateur⋅ices pour Framaforms, et 170 000 formulaires créés depuis le lancement du service.

 

StopCovid

Dans mon précédent billet, j’annonçais (sans me faire prophète, c’était juste une probabilité statistique de 100 %) que le gouvernement allait vouloir s’adosser à la technologie pour à la fois regagner des points de confiance, mais surtout mettre en place des dispositifs de contrôle du peuple.

Les semaines passées, sur cette thématique, c’est donc l’application StopCovid qui aura donné le tempo médiatique côté numérique.

Des centaines d’articles auront été écrits en quelques jours sur cette application. Et Framasoft a aussi apporté sa pierre :

Le positionnement de Framasoft est assez clair : ce type d’application est un leurre. Un mirage. Comme en magie, c’est une illusion. Et cette illusion permet de glisser dans la tête de #lesgens quatre idées très dangereuses :

1. Elle nous prépare à accepter une application de surveillance de nos comportements, qui nous suivrait partout « pour notre bien et celui des autres », sans que cela n’impacte nos libertés fondamentales. C’est faux. Grâce au (fabuleux) travail de Khrys, nous présentons chaque semaine une « revue hebdomadaire » listant des articles, vidéos, etc. traitant notamment de ce sujet. Nous en sommes au n°103 de cette revue, je pense donc qu’il n’est pas nécessaire de revenir là-dessus ;

« Nan, mais à Singapour, ils ont une app, et ça va hein. » Non, cette vidéo n’est pas un fake. (Source)

 

2. Elle persiste à laisser croire que la technologie est neutre, et qu’elle peut être invoquée, telle une divinité, pour résoudre nos problèmes. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que parmi les plus ardents défenseurs de StopCovid (et ses successeurs), on retrouve pas mal d’ingénieur⋅e⋅s et d’informaticien⋅ne⋅s, convaincu⋅e⋅s qu’avec le bon design et le bon protocole, les avantages surpasseront les risques.
Rien de nouveau à ce que l’Homme cherche à se prendre pour Dieu, puisque Dieu est mort (© Nietzsche). Mais cette quête du pouvoir divin semble surtout nous avoir rendu complètement cons. En effet, je n’ai pas trouvé un seul article vraiment sérieux indiquant que cette technologie pourrait, à coup sûr, sauver des vies (sauf si elle était imposée à toute la population, et encore, cela reste sans preuve). Même l’auteur de « TraceTogether » (l’application singapourienne, qui inspire « StopCovid ») le reconnait lui-même : ce n’est clairement pas la panacée, et cela génèrera de toutes façons de nombreux faux-positifs et au moins autant de faux-négatifs. D’ailleurs, Singapour vient de rendre obligatoire une application similaire, qui au départ ne l’était pas. On dit ça, on ne dit rien, mais enfourcher un tigre, c’est quand même vachement dangereux, hein.

Nous avons un président (sous) stupéfiant.

 

3. Elle dédouane les agents de l’État de leur responsabilité, en faisant reporter sur des comportements individuels ce qui doit relever d’une action collective, et notamment celle des pouvoirs publics. « Si ça sauve 100 vies, ou même 1 seule, ça sera déjà ça et donc il faut donner toutes les chances à cette appli. », nous explique en substance Cédric O. sur… Medium (Oui, une plateforme cofinancée par Google. Ne cherchez pas à comprendre, c’est pas comme si cette personne n’était pas secrétaire d’État au numérique. Il n’avait sans doute pas de site web à sa disposition… #OhWait). Ha ben oui mais non, si votre but c’est de sauver 100 vies, ou même une seule, alors ce n’est pas le moment de déshabiller Paul (les brigades sanitaires, dont des décennies d’études ont prouvées l’efficacité, et pour lesquelles le Conseil Scientifique recommande 30 000 personnes, mais qui seront sous-payées) pour habiller Jacques (j’attend impatiemment l’annonce du coût total de développement d’un StopCovid, dont l’efficacité, elle, n’est pas prouvée). En attendant, ni vu ni connu, l’État vous aura embrouillé, et quand viendra le temps de juger les responsables, ils pourront se cacher derrière l’argument « Mais on a fait StopCovid, c’est pas de notre faute si #lesgens ne l’ont pas tous installé ! ». Ha ben si, si vous êtes élus et que de très nombreux experts et la société civile vous préviennent que votre mesure n’aura pas d’impact mais que vous choisissez d’investir du pognon pour la mettre malgré tout en place, alors c’est vous qui êtes responsable, pas #lesgens.

 

4. Un autre souci à faire peser cette injonction à installer une application est plus insidieux. Il pousse l’idée d’une « désunion nationale », avec d’un côté les « bons citoyens » qui auront installé l’application, et de l’autre côté les « mauvais citoyens » qui mettraient en jeu la vie de leurs proches comme d’inconnus, en refusant à participer au fameux « effort de guerre ». On en revient donc à l’argument pourtant mille fois entendu (et mille fois prouvé faux) du « Si vous voulez plus de sécurité, il faut accepter des pertes de libertés ».
Comme le dit fort bien Antonio Casilli dans le journal du CNRS (journal qu’on ne peut pas soupçonner de manque de sérieux scientifique), « Il n’existe pas d’application capable de remplacer une politique de santé publique ». Les prochains mois seront donc très rock’n roll avec des intiatives très agressives (du type caméras thermiques, dont l’aspect bordeline et même reconnu par… Muriel Pénicaud).

This is not a mème. (Même si la citation est plus complexe que cela.

 

Bref, déployer ce type de technologie, c’est une triple défaite :

Quelque part, et de manière anecdotique (ou pas), c’est aussi une défaite sémantique et linguistique : nous pouvons aussi nous interroger sur les signifiants et les signifiés des divergences entre « StopCovid » (France), « Immuni » (Italie) ou « TraceTogether » (Singapour) et ce que ces termes « vendent » aux utilisateur⋅ices.

EDIT : le temps que je rédige cet article, de nouveaux faits semblent aller dans mon sens : le développement de StopCovid, initié au départ par des équipes de la DINUM *et* des membres de la société civile est finalement confié à un consortium de grosses boîtes privées (CapGemini, Orange, Dassault Systèmes, etc), ce qui a créé pas mal de tensions. Sachant qu’on a découvert « par hasard » qu’Orange travaillait déjà sur une telle application *avant* l’annonce officielle du gouvernement ou que la startup Withings planche officiellement sur des bracelets connectés StopCovid (mais c’est une boîte française, hein, alors ça va), ça va évidemment exciter toutes celleux et ceux qui penserait que cette histoire se confirme comme étant bien plus une histoire de gros sous politique qu’une histoire de solution d’intérêt général.
En parallèle, on apprenait que deux nouveaux fichiers seraient créés (SIDEP et Contact Covid), et que ça allait être un beau merdier. Lire l’article de NextINpact à ce sujet (abonnez-vous si vous le pouvez). Bref, les scénarios évoqués dans le documentaire de Sylvain Louvet « Tous surveillés : 7 milliards de suspects » semblent se confirmer (profitez-en pour le voir, ArteTV le propose gracieusement jusqu’au 19/06, et c’est aussi flippant que passionnant).

Au final, que StopCovid voit le jour ou pas, le gouvernement aura de toutes façons gagné : si l’application est finalisée, ça sera le jackpot et la voie ouverte à de futures applications StopZad, StopGiletJaunes, StopDélinquance, etc. ; si le projet d’application n’est pas finalisé (à quel coût ? Car aux dernières nouvelles, Dassault Systèmes ou CapGemini ne sont pas des philanthropes) ou abandonné politiquement, le débat médiatique sur StopCovid aura ouvert la fenêtre d’Overton sur l’acceptabilité d’une telle solution (« Bon, pour StopCovid, on était pas prêts, mais pour StopTerrorisme, là, promis, avec les premiers de cordée de la StartupNation on est au taquet »). Alors évidemment, une défaite aura plus d’impacts (immédiats) que l’autre (qui reste potentielle), mais du coup, nous, Framasoft, on va s’arrêter là. On a fait le job : en dehors de la face visible que sont la publication des articles, on a relayé, conseillé, produit des argumentaires, fournit des outils aux militant⋅e⋅s, relu et amendé des tribunes, etc. Il est donc temps pour Framasoft de passer à autre chose car nous ne sommes pas une association de plaidoyer. Nous avons (très) modestement contribué à éclairer ce débat, à chacun et chacune, individuellement et collectivement de s’informer et de prendre non seulement position, mais aussi une responsabilité dans les actions possibles à venir.

Voilà, je n’ai plus qu’à attendre en commentaire les rageux qui vont me dire que puisque je suis par principe opposé à ce type d’application, je suis donc un dangereux arriéré criminel qui va causer la mort d’innocents, en plus de celle de l’économie. Qu’ils viennent me chercher.

Je sens que ce mème n’a pas fini de servir…

Faire un pas de côté

Un des articles qui m’aura le plus marqué ces dernières semaines, peut-être parce qu’il ne s’agit ni d’une analyse froide, ni d’une réaction à chaud nous servant la soupe d’un « monde d’après », est sans doute l’interview de l’éco-socialiste Corinne Morel-Darleux dans Bastamag (j’invite celles et ceux qui le peuvent à faire un don à ce média. Ce que j’ai fais, d’ailleurs). Pour celles et ceux qui souhaiteraient découvrir quelques éléments de pensée de Corinne Morel-Darleux, je vous propose de lire en préambule cette longue mais passionnante interview du média d’opinion indépendant « Le Vent Se Lève ». Vraiment, prenez le temps de lire ces deux articles afin d’éclairer les concepts que je vais aborder par la suite.

Je ne vais pas reprendre ici ce qu’elle dit : d’une part l’article est public (et c’est une raison de plus, et pas une raison de moins, pour leur faire un don), d’autre part j’avais déjà « invoqué » Corinne Morel-Darleux dans un précédent article sur l’archipélisation de Framasoft. Elle y reprend des idées et concepts qui lui sont chers comme l’archipélisation ou la dignité du présent.

Ce qui me semble ici intéressant, c’est que ces idées prennent une dimension particulière quand on les met en perspective de la situation pandémique actuelle. Ils permettent, en quelque sorte de faire un « pas de côté ».

Après avoir « pris la mesure », et « pris de la hauteur », c’est donc à cet exercice du « pas de côté » que je voudrais essayer de me prêter ici, concernant Framasoft.

Je suis payé (entre autre par vos dons, merci !) pour prendre des décisions pour Framasoft. Le plus collectivement possible, et parfois seul et dans l’urgence afin d’éviter tel ou tel écueil. Ces dernières semaines, nous avions « le nez dans le guidon », et Framasoft a donc pris un paquet de décisions, et engagé pas mal d’actions (cf. nos articles Framaconfinement). En gros, comme tout le monde, nous nous sommes pris la tempête, et on a essayé de réagir au mieux. En nous protégeant nous mêmes d’abord, parce qu’il n’est pas possible de prendre soin des autres dans la durée sans prendre soin de soi.

Ensuite en faisant ce que l’on fait de mieux : « faire ». Sans se poser des milliards de questions, on a agit là où on le pouvait. « Agir là où on se sent fort » est une façon de reprendre le contrôle quand on se sent perdu. Une façon de reprendre courage. De se sentir utile.

Enfin, on a essayé de réfléchir, individuellement et ensemble. Afin que notre « Faire » ne soit pas déconnecté des changements individuels et sociétaux en cours. Chacun⋅e a pu évoquer, en interne ou publiquement, ses analyses, ses ressentis, ses colères. J’ai évoqué les éléments d’un « plan », Pouhiou sa volonté de ne pas suivre de prophète, Christophe a fait des liens entre pistage et capitalisme de surveillance, Angie a exprimé sa colère, et la team mèmes a allégé nos cœurs dans un article « poisson d’avril » en retard, etc.

Mais faire un pas de côté, c’est quoi ?
C’est essayer de nouvelles choses, casser des préjugés internes, essayer d’avoir un regard extérieur, sortir de sa zone de confort en quelque sorte.

Me concernant, cela m’a poussé à accélérer une décision prise il y a longtemps : passer à une co-direction à trois têtes. J’avais annoncé cette volonté, qui me trottait dans la tête depuis deux ans, lors de notre assemblée générale de février. Mes collègues Angie et Pouhiou étaient d’accord pour une phase d’expérimentation en tant que co-directeur⋅ices. Mais la pandémie m’ayant pas mal occupé, j’avais dû laisser la mise en pratique de côté. Nous allons pouvoir en rediscuter, et cela promet d’être passionnant à mettre en œuvre.

Plus proche de vous, concernant Framasoft, faire ce « pas de côté » a consisté à réinterroger notre agenda de campagne. Framasoft ne vivant que des dons, sans campagne de dons, nous n’aurons à terme plus de moyens.

Enfin, ça, c’est la théorie. Construite sur l’expérience de ces dernières années. Mais n’est-ce pas un cliché ? Ne nous sommes-nous pas enfermé⋅es dans cette espèce d’injonction à « réussir » nos campagnes ? Si on pousse encore plus loin, « A quoi nous sert cet argent ? » (certes, à payer mon loyer, ainsi que les salaires de mes 8 autres collègues, mais est-ce le seul, ou le meilleur moyen de l’utiliser ?). Et, pour aller plus loin que plus loin « A quoi sert réellement Framasoft ? ». Ce n’est pas ici notre utilité que je questionne avec légèreté, je constate que nous sommes utiles (vos messages, vos dons, et les ~700 000 utilisateur⋅ices mensuels le prouvent), mais bien le sens de cette utilité : est-ce que l’on renforce des pratiques délétères ? Ne participe-t-on pas à enfermer nos utilisateur⋅ices dans des pratiques finalement peu émancipatrices (visioconférences, travail collaboratif, etc.) ?

Que resterait-il de Framasoft si nous venions à disparaître demain ? Quels héritages aurons-nous laissé de plus de 15 ans de militantisme ?

Pour répondre à ces questions, voilà maintenant deux ans que nous nous questionnons régulièrement en interne sur notre propre « compostabilité » : que resterait-il de Framasoft si nous venions à disparaître demain ? Quels héritages aurons-nous laissé de plus de 15 ans de militantisme ?

Je trouve la question intéressante, car elle nous force à regarder derrière nous, et non à chercher à voir ce qui se dessine devant. Car ce qui est devant nous est aujourd’hui dans le brouillard, rempli d’incertitudes sur les impacts économiques, sociaux, politiques qui vont découler des suites de cette pandémie.
Elle nous oblige aussi à penser notre présent, et nos actions, en fonction de cette notion d’héritage, de trace, de « don fait à l’avenir ».

Les éléments de réponses à cette question de la compostabilité de Framasoft me semblent plutôt encourageants : nous avons produit des milliers de ressources (fiches logicielles, documentations, articles, livres, vidéos, interviews, conférences, Mooc, etc.), nous avons développé des solutions logicielles, nous avons affirmé des points de vue et généré du débat et de l’intelligence collective. Nous avons démontré qu’il était possible, pour une association comptant moins de membres qu’un club de pétanque local, et pour un coût inférieur au coût moyen de 80 mètres d’autoroute, de produire, mettre à disposition, maintenir, améliorer des dizaines de services alternatifs à ceux des plus grosses capitalisations mondiales. Ce qui a, je pense, inspiré et donné confiance aux structures du collectif que nous avons impulsé et structuré et qui nous survivra probablement. Tout cela de façon libre, réutilisable, copiable, documentée. Mais aussi en essayant, autant que possible, de rester dignes (« principe selon lequel une personne ne doit jamais être traitée comme un objet ou comme un moyen, mais comme une entité intrinsèque »).

L’avenir jugera. Mais pour l’instant, nous sommes dans une situation plutôt privilégiée : grâce à vos dons, et grâce à notre volonté de ne pas « croître pour croître » et de limiter notre croissance, même en situation de succès – qui n’est pas sans rappeler le « refus de parvenir » qu’évoque Corinne Morel-Darleux en citant le navigateur Bernard Moitessier – Framasoft se porte bien. En tout cas, nous sommes dans une situation bien moins inquiétante, et surtout moins anxiogène, que des milliers d’associations survivant grâce aux subventions publiques ou à quelques financements privés. Les associations culturelles, de solidarités, d’urgence sociale sont touchées de plein fouet. Pourtant, si l’on regarde les choses froidement, ces associations sont par bien des aspects plus utiles que Framasoft.

Puisque nous ressentons ce sentiment d’accomplissement vis-à-vis du travail déjà effectué, et puisque nous avons les moyens de ne pas nous inquiéter du futur immédiat, se pose alors la question de ce que nous pouvons faire aujourd’hui. C’est ici que je fait le lien avec la notion de « dignité du présent » évoquée par Corinne Morel-Darleux. Quels gestes pourrions nous avoir qui seraient réellement en accord avec ce que nous sommes ?

Nous lancer dans la campagne de crowdfunding PeerTube v3, comme cela était prévu pour mai/juin 2020, ne me parait pas un acte décent en ce moment. Organiser une communication médiatique subordonnant la réalisation de développements logiciels à l’obtention de paliers de dons, à l’heure où l’hôpital public est en souffrance, où les français⋅es reçoivent l’injonction contradictoire de retourner travailler individuellement mais de collectivement rester chez eux, à l’heure où personne (y compris les gouvernements) ne sait de quoi l’avenir sera fait, m’apparaît clairement comme impudique et inconvenant.

Pourtant, je pense – cette fois très immodestement – que le monde à besoin d’un PeerTube v3.
Cette nouvelle version, comme annoncé précédemment, intègrerait les premières briques permettant une diffusion vidéo en direct à des centaines ou milliers de personnes. Le tout de façon libre, décentralisée, et fédérée. Comme beaucoup, je pense qu’il n’est pas possible de se passer d’un système tant qu’on utilise les outils de ce système. Il me parait ainsi impossible de tourner la page du capitalisme tant qu’on utilisera massivement YouTube ou Twitch, par exemple. Cela ne se fera pas en un jour, ou même en un an. Mais même si cette bataille paraît perdue d’avance, elle vaut à mon sens la peine d’être menée.

Il en va de même pour Mobilizon (notre alternative aux événements, pages et groupes Facebook) : il me paraît impossible de construire des mobilisations contre le réchauffement climatique en utilisant Facebook. Oh, Facebook peut être *utile*, oui, notamment en offrant une audience captive potentielle de plus de deux milliards de personnes. Mais le modèle économique de Facebook étant basé sur la publicité et donc la consommation, la plateforme de Mark Zuckerberg ne permettra jamais que l’on s’attaque aux fondements du système qui le fait vivre et lui permet de croître encore et encore.

Développer et faire advenir PeerTube v3 et Mobilizon v1 me paraît donc essentiel. Non pas parce que ce serait fun, ou pour rajouter une alternative de plus au foisonnement d’outils existants. Et surtout pas pour « renverser » YouTube ou Facebook. Nous ne voulons pas que nos outils prennent la place de ceux préexistants : nous souhaitons décoloniser l’imaginaire d’une impossibilité de faire face à des entreprises un million de fois plus puissantes que nous. Car il est possible de faire face. Et si nous échouons, il vaudra alors sans doute mieux « couler en beauté que flotter sans grâce ».

Comment assurer le développement de Mobilizon, qui a des chances de devenir un outil stratégique de mobilisation citoyenne, sans s’assurer d’un modèle économique pérenne ?

Cela m’a beaucoup travaillé ces dernières semaines : comment réussir à proposer un PeerTube v3, dont je pense sincèrement qu’il serait utile pour permettre une libre transmission des savoirs sans pour autant conditionner son développement à un processus de crowdfunding inconvenant dans la situation actuelle ? Comment réussir à assurer dans les années à venir le développement de Mobilizon, qui a de fortes chances de devenir un outil stratégique de mobilisation hors des plateformes régulées par les géants du numériques, sans s’assurer d’un modèle économique pérenne ?

La réponse nous est venue assez naturellement : faisons-le, et on verra bien. Faire. Faire sans eux. Faire malgré eux.

Pour la réhabilitation de l’action directe

Premier exemple : faire PeerTube v3

À l’heure où vous lirez ces lignes, nous venons de publier un article et notre newsletter précisant que nous allons donc faire ce PeerTube v3 et ce Mobilizon v1. Les dates ont un peu bougé, parce qu’on a été pas mal occupé ces dernières semaines et qu’on refuse de se cramer pour respecter des calendriers ou des injonctions de consommateurs. Par contre, côté modèle économique, ça va être YOLO-style ! On va bien avoir une page de soutien à PeerTube v3, mais on fera les choses, qu’on ait l’argent ou pas. Idem pour Mobilizon.

C’est assez contre-intuitif, en tout cas pour moi qui ait quand même une responsabilité vis-à-vis de l’emploi de mes collègues, ainsi que plus globalement vis-à-vis du bon fonctionnement de l’association. Mais assurer le bon fonctionnement de l’association, ce n’est pas forcément assurer sa pérennité. C’est s’assurer que nous faisons au mieux. Que nous plaçons nos valeurs et notre engagement au dessus de contraintes, qu’elles soient financières ou sanitaires.

Deuxième exemple : se soutenir les un⋅es les autres

Cette forme d’action directe, on la retrouve aussi dans le fonctionnement interne de l’asso. Comme affiché sur notre page d’accueil, Framasoft est avant tout une bande d’ami⋅es. Or les situations financières de cette bande d’ami⋅es sont très variables. Cela va, pour la faire courte, du RSA au rentier. Et nous sommes parfaitement conscient⋅es qu’une partie de ces ami⋅es pourrait souffrir de la situation économique des mois à venir. Cela ne nous paraît pas acceptable. Et l’indignation nous paraît certes importante, mais insuffisante.

Comme Angie l’a évoqué dans un précédent billet, nous mettons actuellement en place notre propre « filet de sécurité/solidarité » entre membres, et donc ami⋅es, où les plus à l’aise financièrement pourront soutenir celles et ceux qui rencontrent des difficultés. Les détails importent ici assez peu, car ils ne concernent pas les lecteur⋅ices de ce blog, et même pas Framasoft en tant qu’organisation (il s’agit d’une solidarité directement entre personnes). Le principe est cependant loin d’être nouveau : « De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ». cet exemple d’auto-organisation privée, directe, communautaire, solidaire, s’est multiplié à l’infini ou presque non seulement en France, mais sur les territoires confinés, au niveau mondial.

Troisième exemple : s’auto-organiser

Ainsi, sur ma commune (rurale) de confinement, le premier hypermarché est à 35mn de voiture (et le premier « drive » encore plus loin). Certains habitants de la commune n’ayant ni la possibilité, ni les moyens de faire ce trajet, un petit marché de producteurs locaux s’est mis en place dès la seconde semaine de confinement (avec l’accord de la mairie et des règles sanitaires strictes et contrôlées). Rien d’extraordinaire à cela, car ce type d’initiative utile si ce n’est indispensable s’est multiplié sur l’ensemble du territoire.
J’ai cependant été plus marqué par le fait que le producteur de fromages, habitant lui aussi la commune, ait utilisé Framaforms pour ses commandes (sans me connaître ni connaître Framasoft auparavant). Ma fierté était cependant un peu gênée par le fait qu’en tant qu’auteur du logiciel, je sais qu’il n’est pas vraiment adapté à ce type d’usage. Mais bon, ça l’a dépanné un temps, alors tant mieux. Puis, les 4 ou 5 producteurs de ce marché on ne peut plus local ont basculé vers un autre logiciel, libre lui aussi ! https://www.cagette.net/ est en effet une solution parfaitement adaptée à ce genre de problématique. Les producteurs saisissent leurs produits, les clients passent commande (soit en ligne, sans commission, mais avec frais bancaires ; soit en réglant directement en liquide lorsque vous venez retirer votre commande).

Cagette.net : un site web, et un logiciel libre !, pour organiser ses commandes

Ici, pas de startup, pas d’État, pas de banque, pas intermédiaire si ce n’est un logiciel libre développé avec passion par les salarié⋅es d’une SCOP bordelaise qui n’ont aucunement besoin d’exploiter vos données personnelles ou de vous imposer un quelconque modèle.

L’à venir

Ce type de fonctionnement autonome, autogéré, auto-organisé, résilient – un mot que je ne souhaite pas voir être approprié par la Startup Nation – préexistait avant le confinement. Mais la défaillance voire l’absence d’État en a rendu l’expérience concrète nécessaire.

Il doit selon moi nous donner confiance en nous, nous apporter l’assurance que nous devons agir avec dignité, fierté, et ne pas attendre pour passer à l’action. Nous sommes capables et légitimes. Ici et maintenant. Que ce soit pour organiser un marché local, pour mettre en place des solidarités communautaires, ou pour développer des logiciels que nous pensons essentiels.

Comme le disait le philosophe Henri Bergson : « L’avenir n’est pas ce qui va arriver, mais ce que nous allons faire. »

 

Ce que Framasoft va faire en 2020, post confinement

mercredi 6 mai 2020 à 09:10

Voici une réécriture du calendrier de nos projets pour 2020, après que Framasoft a assuré de son mieux le maintien de ses services en ligne dans une France confinée.

Un résumé, pour les deux du fond

Nous vivons actuellement une pandémie mondiale. Qui a fait que #LesGens ont été confinés chez eux. Sauf que comme le monde n’était pas prêt (et l’Éducation Nationale encore moins), les services en ligne de visioconférence, de tchat de groupe, et d’écriture collaborative se sont trouvés submergés.

Framasoft héberge de tels services, avec zéro traçage, beaucoup de respect des internautes et un support qui accompagne avec sourire et humanité, tant qu’à faire. Ainsi, nous avons vu l’utilisation de certains services se multiplier par 8 (lorsque l’Italie s’est confinée) puis par beaucoup-tellement-qu’on-compte-plus (quand la France a finalement suivi).

Nous, quand un ministère n’écoute pas les savoirs-faire et talents dont il dispose en interne et donc ne s’est pas donné les moyens de fournir des services numériques pour les millions de personnes qui dépendent de ses choix politiques et de sa capacité à prévoir son indépendance numérique (allégorie).

Notre équipe salariée, épaulée par les bénévoles qui font vivre l’asso sur leur temps libre, a abandonné tous les projets en cours pour accueillir cette montée en charge, accompagner les usages et éviter que Skype, Zoom ou Google Meet ne profitent d’une pandémie pour se goinfrer des données des utilisateurs. Nous n’avons accueilli qu’une infime partie des besoins numériques de ces personnes, hein. Mais à notre niveau, c’était un raz-de-marée.

Nous le racontons en détail dans nos journaux de confinement : nous avons mis en œuvre de très nombreuses solutions. Techniquement, nous nous sommes donné les moyens : davantage de puissance et de machines, des améliorations de code et l’optimisation des installations… Humainement aussi : plus de collectif, plus d’animation pour parvenir à plus de décentralisation (ventilation de Framapad, Framatalk et Framadrop vers de multiples hébergeurs éthiques) et plus d’écoute des besoins pressants (par exemple en proposant l’outil de prise de rendez-vous médical RDV-Médecins).

Nous aussi, nous avons travaillé à « aplatir la courbe ».

Tout cela s’est fait avec plus de réflexion stratégique, plus de communication, plus de support communautaire, donc plus d’animation de communauté… Mais aussi plus d’expressions (et de plumes invitées sur ce blog), plus d’informations sur nos actions, plus d’éducation populaire (dont un gros dossier sur StopCovid)…

Pour ne rien vous cacher, même si on prend soin de nous, nous sommes rincé·es (et confiné·es : ces chamboulements dans la vie professionnelle et bénévole de l’association se sont accompagnés de chamboulements de nos vies personnelles, comme pour tout le monde…).

Revoir les plans du monde d’avant

Dans le monde d’avant, il n’y a pas si longtemps (même si on dirait), nous avons annoncé la fermeture programmée d’une partie des services de la campagne Dégooglisons Internet. Nous avions même préparé une page résumant toutes les informations et les sources plus détaillées, ainsi qu’un calendrier (annonçant les premières fermetures pour juillet prochain).

Nous allons poursuivre sur cette lancée, car nous avons plus que jamais besoin de tourner la page de certains services trop gourmands, trop anciens, etc. pour concentrer nos énergies sur l’essentiel. D’ailleurs, nous avons eu le nez creux, car les services les plus utilisés durant le confinement font partie de la liste des services que nous maintenons, et dont nous avons grandement renforcé les installations (Framapad et Framatalk en tête).

Entraide.chatons.org, une page pour trouver de nombreux services pratiques, éthiques et décentralisés.

Entraide.chatons.org, une page pour trouver de nombreux services pratiques, éthiques et décentralisés.

Par ailleurs, le collectif des hébergeurs alternatifs CHATONS a vraiment montré sa capacité à décentraliser les usages numériques. Ainsi, la création de la page entraide.chatons.org montre qu’il est possible de proposer un portail d’accueil de services sans inscriptions, qui vous renvoie de façon aléatoire vers un des membres du collectif. Que ce soit pour de l’écriture collaborative, de l’hébergement de photos ou de fichiers lourds, ou encore pour raccourcir une adresse web : si vous voulez un service en ligne libre, décentralisé, éthique et sans inscription, n’hésitez pas à privilégier les services proposés par entraide.chatons.org

Peertube : un financement pas à pas vers la v3

Nous détaillerons bientôt tout cela sur le framablog, mais en gros, nous ne nous sentons pas de lancer un crowdfunding en mai pour financer la v3 de notre solution d’émancipation de nos vidéos YouTube alors que l’avenir est incertain pour bon nombre de personnes.

Nous avons décidé plutôt d’annoncer une feuille de route, où nous afficherons les prochaines étapes de développements du logiciel. Cette feuille s’étendra jusqu’à la v3, que nous voudrions sortir en novembre prochain. Chaque étape, qui est en fait un cycle de développement, sera d’une durée d’un à deux mois, présentera son propre lot de fonctionnalités. Sans vendre la peau de l’ours, après des tests, nous pensons qu’il est possible d’inclure dans cette v3 la diffusion de vidéos en live ET en pair-à-pair.

Bientôt, Sépia (lae poulpe-mascotte de PeerTube) pourra regarder des live !
Illustration CC-By David Revoy.

Cette feuille de route sera accompagnée d’une collecte perlée sur toute la période de développement, de mai à novembre. Face à chacune des étapes, nous afficherons un coût, et ferons un appel aux dons, sans insister, et (comme toujours) sans culpabiliser. En effet, que les dons couvrent le coût de l’étape ou non, nous poursuivrons ce développement… quitte à ce que ce soit sur nos fonds propres (comme nous l’avons fait pour développer la v2).

Nous ferons le point, en novembre, sur le soutien qu’aura récolté cette collecte perlée. Cela vous permettra de suivre le développement de PeerTube au rythme où nous le vivons. Mais, une fois encore, nous avons confiance en votre capacité à soutenir ce projet actuellement utilisé par de nombreuses académies pour assurer la continuité pédagogique. Nous compterons sur vous pour promouvoir PeerTube hors de notre bulle, afin qu’il ne soit pas uniquement financé par la générosité des francophones.

Mobilizon espéré, Mobilizon retardé, mais Mobilizon bichonné

Mobilizon, c’est notre réponse à la question « comment faire pour que les marches pour le climat ne s’organisent plus sur Facebook ? » Un logiciel fédéré (où plusieurs hébergements peuvent synchroniser les infos entre eux) pour publier des événements, présenter et créer son groupe et s’y organiser ensemble.

Suite au succès du financement participatif du printemps 2019 nous avons travaillé et présenté une première bêta avec « juste les événements » en octobre et une autre incluant les outils de fédération en décembre 2019. Nous prévoyions d’ajouter les outils de groupe et de pages au printemps pour publier Mobilizon en juin, mais nous avons -forcément- pris du retard.

Nous croyons que Mobilizon va être plus important que jamais dans ce « monde d’après ». Il nous semble essentiel que les citoyen·nes reprennent leur indépendance sur les outils qui leur permettent de se mobiliser, s’organiser et se rassembler autour d’actions communes et concrètes.

Mobilizon fédéré, illustré par David Revoy (CC-By)

Nous prévoyons donc de publier, en juin, une nouvelle version bêta intégrant toutes les fonctionnalités prévues par le financement participatif de l’an dernier (des événements, des pages, et des groupes). Nous travaillerons ensuite, durant tout l’été, à améliorer le code selon les retours des personnes qui testeront la fédération (en hébergeant leur propre instance Mobilizon).

En effet, alors que Mobilizon explore des pans entiers du protocole ActivityPub (le langage commun pour que les hébergements synchronisent et échangent les informations), il nous semble urgent de prendre le temps de proposer, tester, remettre en question, discuter, modifier, et améliorer jusqu’à un consensus stable.

Nous voulons prendre trois à quatre mois pour tester Mobilizon avec des hébergeurs volontaires, améliorer sa compatibilité et sa façon de fédérer les informations pour sortir une première version stable à l’automne.

Un projet Framacloud dans la brume

Nous l’annoncions dans notre article « ce que Framasoft va faire en 2020 » de novembre 2019, nous avions un projet de « cloud Framasoft », un service unique et complet basé sur le logiciel Nextcloud pour synchroniser ses fichiers, ses agendas et ses notes, mais aussi collaborer sur des documents, tableurs et présentations, bref… Un service tout-en-un !

Nous avons retourné l’idée dans tous les sens, nous avons joué à la startup nation en essayant de le « pivoter » , mais soyons réalistes : on ne le sent pas. Avec toute la fatigue que nous avons accumulée (vous pouvez suivre ici notre journal de confinement), avec tout ce que nous avons en cours et tout ce qui nous attend… On préfère ne s’engager à rien sur ce projet… pour 2020.

On garde ce projet dans notre horizon, on ne sait juste pas pour quand.
Illustration CC-By David Revoy

Nous avons toujours la volonté de promouvoir un tel outil. Nous savons qu’il y en a besoin comme nous imaginons que les besoins vont changer en même temps que le monde change. Ce que nous ignorons, c’est de quelles énergies nous disposerons d’ici décembre. Pour l’instant, nous voyons simplement que nous ne sommes pas prêt·es, alors nous choisissons de faire moins, pour nous assurer de faire bien.

Nous gardons ce projet de cloud Framasoft dans notre horizon, mais pas sur 2020 (ou alors ce sera vraiment une bonne surprise de fin d’année ^^).

Le monde a changé©

C’est l’expression cliché qui nous accompagne depuis l’article relatant le deuxième jour de notre #Framaconfinement. « Le monde a changé », oui… et nous avec.

Nous essayons avec cet article de prendre de la hauteur pour vous communiquer ce que nous pensons accomplir, et pour quand. Mais embrassons l’impermanence de toute chose, cette impermanence qu’un petit virus nous a rappelée : tout peut encore bouger, surtout si le monde re-change, et nous re-avec.

Aujourd’hui, au sein de Framasoft, nous voulons nous concentrer sur des outils dont nous croyons qu’il pourront servir à ce qu’une société de contribution prenne toute sa place dans le « monde d’après ». En faisant cela, nous essayons aussi de fermer des onglets mentaux et rassembler nos énergies pour gagner en disponibilité.

Car le présent est en train de se dessiner, et Framasoft, par ses actions directes, souhaite être en capacité d’y jouer un rôle, afin de montrer que ce « monde d’après » peut ressembler, si chacun·e y apporte sa pierre, à cette Contributopia dont nous rêvons depuis quelques années.

Contributopia – Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Khrys’coronalungo du lundi 4 mai 2020

lundi 4 mai 2020 à 07:42

Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.

Brave New World

Spécial France

Spécial médias et pouvoir

Spécial sortie de confinement

Spécial Coronavirus – app de traçage

Spécial Coronavirus – données (plus ou moins) scientifiques

Spécial mauvaise gestion et casse du système de santé

Spécial travailleur·euses par temps de coronavirus

Spécial répression, violences et abus de pouvoir

Spécial la démocratie et nos droits en prennent un coup

Spécial résistance

Soutenir

VPN et services sécurisés pour nous organiser en ligne : soutenons Riseup ! (paris-luttes.info)

Spécial GAFAM et cie

Les autres lectures de la semaine

Les BDs/graphiques/photos de la semaine

Les vidéos/podcasts de la semaine

Les autres trucs chouettes de la semaine

Deux personnages prennent le café. Le personnage de gauche dit : Eh ben, toujours aussi long ! - la personne de droite répond : Yep, et ça risque de durer encore un petit bout de temps, vu comment nos dirigeants
Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.

Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).

Framaconfinement semaine 5 – Colère et apaisement

mercredi 29 avril 2020 à 16:45

C’est à nouveau moi Angie qui reprends le clavier pour vous raconter notre cinquième semaine de confinement, et ce malgré ma leucosélophobie ! Avec un titre pareil, vous allez croire que je me prends pour Dostoïevski ! Mais je vous rassure de suite, cet article ne sera ni très long, ni très littéraire. Ce titre m’est venu comme ça, un matin sous la douche, et je l’ai adopté parce qu’il semble assez pertinent pour vous raconter nos aventures framasoftiennes pour la semaine du 13 au 19 avril !

L’accès à l’ensemble de nos articles « framaconfinement » : https://framablog.org/category/framasoft/framaconfinement/

Les raisons de la colère…

Après Dostoïevski, voilà qu’elle nous détourne Steinbeck !

Cette cinquième semaine de confinement a commencé par un jour férié, le lundi de Pâques. Mais pas n’importe quel lundi de Pâques ! Car en plus de l’avoir vécu toutes et tous en mode confiné, c’est ce lundi 13 avril qu’a eu lieu la quatrième allocution du Président Macron durant laquelle il nous a annoncé la prolongation du confinement jusqu’au 11 mai prochain. Un long discours aux accents moins guerriers que les précédents, afin de faire passer la pilule auprès du plus grand nombre.

Au sein de l’association, personne n’a été surpris. Cependant, même s’il nous semblait évident qu’on n’allait pas être déconfiné⋅es immédiatement, les annonces de ce discours (pas uniquement la prolongation, mais aussi la levée progressive des restrictions et la réouverture des écoles à cette date) a mis une partie d’entre nous en colère.

Nous en avons parlé en introduction de la réunion de l’équipe salariée dès le mardi après-midi, mais aussi, lors de la Framapapote proposée par Maiwann et qui s’est tenue mercredi soir. Car comme elle nous le disait dans le message nous proposant ce temps de convivialité :

Je ne sais pas si je suis perdue ou en colère, si j’ai besoins de câlins ou de solutions magiques mais en tout cas, j’aimerais beaucoup discuter avec vous. Pour prendre de vos nouvelles, d’abord, mais aussi pour savoir comment vous vivez la situation / ce que vous en pensez, que vous soyez serein ou en colère, car j’en ai un peu marre de n’entendre que mes pensées et j’aimerais bien entendre les vôtres.

Nous sommes en colère quand on voit la façon dont ce gouvernement gère cette crise sanitaire. Sans revenir sur le manque d’anticipation, les lenteurs dans la prise de décisions, les erreurs d’appréciation ou les discours contradictoires qui ont été largement commentés, nous sommes indigné⋅es par l’hypocrisie du gouvernement qui, en ces temps d’austérité, trouve systématiquement de l’argent pour aider les grandes entreprises en difficulté.

Nous sommes en colère quand Geoffroy Roux de Bezieux, le patron du Medef, nous dit qu’il nous faudra travailler plus à la fin du confinement, augmenter notre temps de travail et envisager le report de nos congés et RTT, tout cela au nom de la croissance économique.

Nous sommes en colère quand certains patrons un peu trop zélés mettent en place des systèmes pour tracker l’activité de leurs salarié⋅es en télétravail ; certaines entreprises allant jusqu’à leur imposer de rester connecté⋅es en visioconférence toute la journée, afin de s’assurer qu’ils sont bien présent⋅es à leur poste de travail.

Nous sommes en colère parce que nous savons bien que cette crise va avoir (et a déjà) un impact sur nos libertés. Qu’après avoir vécu dans un État de surveillance, nous allons vivre nos prochaines années dans un État solutionniste. Nous n’avons pas besoin d’une application de traçage pour lutter contre le coronavirus, qu’elle émane d’un gouvernement ou d’une multinationale. Nous n’avons pas besoin de drones qui survolent nos villes et nos campagnes ou de reconnaissance faciale dans nos rues.

Nous sommes en colère face à la banalisation des dérives sécuritaires. Quelque 100 000 policiers et gendarmes ont été déployés en France pour sanctionner les déplacements injustifiés. Mais ce déploiement interroge, en particulier au sujet de la répartition des contrôles, notamment dans les territoires les plus pauvres et hébergeant des populations spécifiques. Ainsi, la Seine-Saint-Denis concentrait à elle seule 10 % des verbalisations au deuxième jour du confinement. Les forces de l’ordre ont « une marge de manœuvre extrêmement forte » pour faire respecter le confinement et n’hésitent pas parfois à verbaliser de manière totalement abusive.

Nous sommes en colère lorsqu’une partie de nos concitoyens se mettent à appeler les services de police ou de gendarmerie pour dénoncer leurs voisins. Il nous est difficile de supporter l’idée que certains confinés se sentent investis d’une mission judiciaire, même si nous sommes conscients que la peur de la maladie peut faire ressurgir ce type de comportements.

Nous sommes en colère quand nous voyons sur les chaînes de France Télévisions, qu’on indique toujours dans les bandeaux la mention « par Skype » pour parler de visioconférence. Oui, ça nous énerve beaucoup que les chaînes du service public fassent de la publicité à peine déguisée pour ce logiciel proposé par une multinationale du numérique.

Bref, nous sommes à l’image d’une grande partie de la population : nous ne vivons pas très bien cette restriction imposée de nos libertés. Alors, nous en parlons car il n’est rien de pire que de ressentir ces émotions négatives et de ne pouvoir les exprimer, les regarder et les analyser.

Bonsoir Tristesse…

Oh non, Angie, tu abuses ! Dostoïevski, Steinbeck et maintenant Sagan ? ? ?

Comme une grande partie de la population, chez Framasoft, nous n’échappons pas aux effets du confinement sur nous et nos proches. Ainsi, nous avons toutes et tous dans notre entourage des personnes en souffrance qu’il nous faut accompagner au mieux, que ce soit des membres de nos familles ou nos ami⋅es.

Nous ressentons de la tristesse à ne pouvoir davantage accompagner nos proches touchés par la maladie et/ou le deuil, les couples autour de nous qui se déchirent, toutes les personnes victimes de maltraitance et de violences conjugales ou nos proches touchés par la dépression. Cette tristesse se mêle à un sentiment profond d’impuissance qu’il est parfois difficile de supporter. Car le seul moyen que nous ayons pour agir c’est d’entretenir un maximum de contacts avec notre famille, nos amis ou nos collègues de travail. Nous parlons donc entre nous de nos appréhensions et de nos craintes, nous nous soutenons mutuellement.

Mais surtout nous partageons nos « recettes » respectives pour vivre au mieux la situation. Certain⋅es d’entre nous s’évadent en jouant aux jeux vidéo, d’autres découvrent les bienfaits de la méditation, ou se découvrent une passion pour la cuisine. Il y en a même parmi nous qui prennent plus de temps pour développer leur créativité. Bref, il n’y a pas de solution unique (magique ?), mais parler de ce qui nous fait du bien est déjà un bon moyen d’aller bien !

Enfin, il nous semble nécessaire d’élargir nos horizons, de ne plus se projeter uniquement dans comment gérer les deux semaines à venir, mais de penser bien au-delà. Réfléchir aux impacts que ce confinement va avoir sur nos vies dans un futur plus ou moins lointain semble faire beaucoup de bien à plusieurs d’entre nous. Même si nous ne sommes pas tou⋅tes d’accord sur comment sera le monde d’après (retour massif de la pensée capitaliste ou prise de conscience des populations qu’un autre monde est possible ?)…

Et pourtant nous continuons à avancer…

Malgré tout cela, nous continuons chaque jour, du mieux que nous pouvons à remplir nos missions. Ce n’est pas toujours simple. Peut-être même que parfois, on n’y arrive pas vraiment. Mais on fait au mieux.

Côté technique, cette semaine Luc était en congés et ce sont donc tcit, chocobozzz et Théo qui ont assuré le maintien de nos services. On a eu quelques soucis avec Framacalc : chocobozzz a dû relancer le service de nombreuses fois, mais il semble que ce soit rentré dans l’ordre. On n’a pas réussi à savoir exactement d’où cela venait (comme souvent avec Ethercalc) mais chocobozzz suppute qu’un calc flingué provoquait un souci mémoire, faisant crasher le processus parent. Vous n’avez rien compris à cette dernière phrase ? Je vous rassure, moi non plus.

Plusieurs utilisateur⋅ices de nos services nous ont aussi fait savoir cette semaine qu’iels rencontraient des soucis sur notre nouvelle instance MyPads, ce service qui permet de conserver ses pads et de les organiser dans des dossiers. Nous n’avons pas réussi à trouver d’où cela peut venir et on attend donc avec impatience le retour de Luc la semaine prochaine pour régler le problème.
EDIT : à l’heure où nous publions ce billet, le problème est réglé.

Nous avons dû modérer les inscriptions sur Framapiaf, notre instance du logiciel Mastodon, car une vague de bots est venue s’y créer des comptes en pagaille. Toute personne créant un compte sur ce service doit dorénavant laisser une note pour expliquer pourquoi elle souhaite s’inscrire et notre équipe de modération doit approuver chaque nouveau compte. Cette technique nous permet de nous assurer que ce sont bien des humains qui s’inscrivent. Mais c’est une charge supplémentaire pour nos modérateur⋅ices dont nous nous serions bien passé.
EDIT : à l’heure où nous publions ce billet, ce système de modération a été arrêté.

Les serveurs et les clients de Framatalk ont été mis à jour samedi matin pour intégrer plusieurs corrections qui devraient régler certains soucis rencontrés lorsqu’on utilise le logiciel Jitsi Meet avec le navigateur Mozilla Firefox. On a tout de même décidé de conserver le message sur la page d’accueil du service tant qu’on n’aura pas constaté une amélioration du fonctionnement de l’outil avec le navigateur Firefox.

Vendredi, tcit s’est occupé de gérer l’espace disque du serveur qui héberge le service Framateam, lequel suite à la création d’une nouvelle team s’est retrouvé en surcharge. L’administrateur⋅ice de cette nouvelle team a essayé d’importer un export Slack de taille relativement conséquente (~1.4 Gio) de multiples fois et contenant des pièces jointes relativement lourdes comme des vidéos. Nous accueillons déjà plus de 80 000 utilisateur⋅ices sur notre service Framateam. Nous avons donc contacté cette personne pour lui rappeler que nos services sont des ressources partagées que les utilisateur⋅ices sont libres d’utiliser en ayant conscience de l’aspect « commun numérique » de ces espaces. tcit a également publié le code de l’application Nextcloud qu’il avait développé pour afficher les message sur l’instance rdv-médecins.

Théo continue à travailler sur Framaforms et constate que les modifications qu’il y apporte sont parfois mal perçues par les utilisateur⋅ices ! Alors on prend du temps pour leur expliquer que cette nouvelle version vise à régler plusieurs problèmes, dont l’affichage des titres des pages qui causait problème, l’affichage sur mobile et l’adaptation à la taille des pages. Parce que vous imaginez bien que quand on fait des modifications, c’est bien dans le but d’une amélioration ! Théo découvre donc qu’il y aura toujours des personnes à qui le changement ne plaît pas !

En plus de toutes ces activités liées au maintien de nos services, tcit et chocobozzz ont trouvé le temps de se remettre sur le développement des logiciels dont ils ont la charge. Tcit développe actuellement les fonctionnalités des groupes dans Mobilizon. Il a eu cette semaine une réunion avec Marie-Cécile Godwin Paccard, designeuse en charge du suivre du projet, pour parler du report de la sortie de la V1, des différentes fonctionnalités que devaient proposer les groupes et de la manière dont on pouvait articuler l’organisateur⋅ice d’un événement VS le contact lors de l’événement. Cette discussion a aussi permis de clarifier le vocabulaire qui sera utilisé au sein de l’application, en particulier autour des concepts de public / privé. Marie-Cécile va donc réaliser une enquête dans les semaines (EDIT : elle est prête, et c’est ici) à venir pour identifier quels seraient les vocabulaires les plus adaptés pour distinguer les différentes formes d’évènements.

Parce que le monde a changé, nous avons décidé que la collecte pour la V3 de PeerTube que nous prévoyions de lancer en mai ne pourrait se faire sous sa forme initiale. Tout d’abord parce que chocobozzz, le développeur principal de PeerTube, a passé ces dernières semaines à maintenir et renforcer nos services. Mais aussi parce qu’il nous semble déplacé de lancer une collecte sans prendre en compte le contexte actuel. Nous avons donc pris le temps de réfléchir à cette question de comment nous allons arriver à financer les différents développements prévus dans la feuille de route de PeerTube. Chocobozzz a repensé sa feuille de route et nous avons cherché comment nous allions quand même vous demander de nous aider à financer ces nouveaux développements. Nous laissons actuellement mûrir ces réflexions avant de vous les présenter d’ici quelques jours.

En parallèle, les échanges entre les membres autour de la future application #StopCovid n’ont pas cessé. On a appris au début de la semaine que c’est beta.gouv.fr qui est en charge de son développement. Globalement, nous sommes assez énervés de constater que le gouvernement préfère croire que cette application résoudra le problème alors qu’aucun expert en épidémiologie et en sécurité informatique n’a prouvé que cette solution était efficace (et c’est même plutôt le contraire). On se dit qu’il nous faut donc continuer à publier de nouveaux contenus dans notre dossier StopCovid et pour cela, nous sommes nombreu⋅ses à prendre plusieurs heures par jour pour nous informer sur ces questions.

Nous partageons nos découvertes dans le canal Veille de notre Framateam associatif. Cela génère des réflexions collectives qui nous permettent d’affiner nos raisonnements et nos arguments. Et c’est aussi un très bon moyen d’élaborer une pensée commune. Et quand Théo nous requestionne sur la question du solutionnisme technologique, la #TeamChauves s’en donne à cœur joie de l’expliciter à nouveau en citant les penseurs de la question, Evgeny Morozov, Gilbert Simondon et Bernard Stiegler. Stph nous fait découvrir le texte de Pierre Steiner « Philosophie, technologie et cognition : état des lieux et perspectives » paru dans la revue Intellectica en 2010 qui présente la thèse TAC qui structure une partie des recherches du laboratoire Costech de l’UTC. C’est sûr que lire tout cela de bon matin, surtout pour celles et ceux d’entre nous qui ont du mal à ouvrir les yeux, c’était un peu violent !

Sur le framablog, cette semaine, nous avons laissé la parole aux membres bénévoles. Stph y a publié une synthèse sur les licences libres qu’il a réalisée dans le cadre du librecours Libre Culture. La #TeamMeme a fait son coming-out dans un article qui nous a redonné le sourire. Et Stph, décidément très productif, a repris son clavier pour nous raconter comment l’association Scenari dont il est membre, a reçu une demande de retrait de contenu non-autorisé et les réflexions qu’il en a tirées. Stph (toujours lui !) a publié sur Framabook la nouvelle A&A la genèse, dans laquelle il raconte les origines de A&A, la multinationale du numérique présente dans son roman Traces publié en juin 2018.

Jeudi soir, j’ai participé avec Lise à la réunion virtuelle mensuelle du CHATONS. Chez les chatons aussi, on ressent le fait qu’après avoir réagi très vite à la situation en mettant en place entraide.chatons.org et en alimentant la litière (c’est le nom donné au wiki des CHATONS) avec des fiches de présentation des outils du télétravail, il nous faut reprendre une activité plus habituelle. Lors de cette réunion, nous avons continué à nous questionner sur le processus de validation des candidatures des structures souhaitant rejoindre le collectif. Plusieurs réflexions avaient été lancées sur notre forum ces dernières semaines. Il s’agit tout d’abord de faciliter la candidature au collectif de nouvelles structures en leur fournissant un formulaire de candidature pour qu’elles puissent voir en amont si elles remplissent bien les conditions. Dans ce document, elles préciseront un ensemble d’informations sur le fonctionnement de leurs services au regard des différents critères indiqués dans la Charte du collectif. Ce formulaire sera aussi un outil qui facilitera l’analyse des candidatures par les structures membres du collectif puisqu’y seront répertoriées les principales informations. Le collectif prévoit d’ailleurs de travailler prochainement à la mise en place d’un système d’audit pour l’analyse des candidatures.

Côté support, on est content de recevoir des petits mots de remerciements mais parfois on s’agace un peu beaucoup de recevoir des injonctions de nos utilisateur⋅ices ! Par exemple, quand on nous envoie un message nous indiquant que nos serveurs Framaforms semblent avoir un problème et que ce serait bien qu’on les redémarre au plus vite car ils sont utilisés pour piloter une antenne régionale de l’ARS, on grince des dents. Parce que nous demander de les redémarrer en urgence, c’est pas comme si on n’y avait pas déjà pensé ! Alors on rappelle gentiment que nous sommes une petite association, nos CGU précisant bien que nos services sont mis à disposition gracieusement et que nous faisons au mieux pour les faire fonctionner, mais que nous ne nous assignons aucune obligation de résultat.

spf, notre collègue en charge du support a parfois des difficultés à contenir sa colère

Quand cela s’ajoute à tous les messages que nous recevons dans lesquels on nous suggère des améliorations de nos services, l’ajout de fonctionnalités ou qu’on nous intime de mettre en place de nouveaux services (alors qu’on a annoncé qu’on allait en fermer), et bien parfois, spf en a un peu ras la casquette ! Le plus lassant, c’est le fait que les gens ne savent pas toujours que leur super idée nous a déjà été demandée 42 000 fois… mais ça on ne peut pas vraiment leur en vouloir !

Tendre à l’apaisement même dans ce contexte

Exprimer entre nous et face aux autres notre colère, notre tristesse, notre sentiment d’impuissance, c’est un premier pas pour tendre vers l’équilibre sans pour autant nier les difficultés que nous rencontrons. Verbaliser le fait de vivre ces émotions nous permet d’en prendre conscience et surtout de constater que nous sommes pas seul⋅es à les vivre. Dire qui l’on est, ce que l’on ressent, c’est aussi permettre aux autres de se dire. Partager ses ressentis, c’est accepter le soutien que les autres peuvent nous apporter. En dédramatisant nos situations, et en se concentrant sur les points satisfaisants des celles-ci, nous apaisons nos réactions instinctives d’attaque/défense et cultivons notre résilience. Et c’est pour moi une grande chance que de pouvoir mettre ceci en application dans le cadre de mon environnement professionnel. J’en profite donc pour remercier toutes les personnes qui au jour le jour sont à mon écoute et m’apportent leur soutien dans cette période complexe. Je suis cependant consciente que nous n’avons pas toutes et tous cette facilité à nous dévoiler. Alors pour celleux là, il y a toujours la possibilité d’être présent. Et ça fait déjà beaucoup !