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La translittératie numérique, objet de la médiation numérique (seconde partie)

jeudi 6 avril 2023 à 16:55

Toujours dans le cadre de la série « Lots in médiation », on retrouve aujourd’hui Corine Escobar, Nadia Oulahbib et Amélie Turet pour la suite de l’article qu’elles ont publié la semaine dernière dans lequel elles ont commencé à partager avec nous leur analyse d’une expérimentation qu’elles ont menée lors d’une recherche-action. Pour une meilleure compréhension de ce qui va suivre, nous vous conseillons vivement de prendre connaissance de la première partie. Bonne lecture !

Corine Escobar est enseignante chercheure depuis plus de 40 ans, au service de l’égalité des chances. Institutrice en France, puis professeure de français en Espagne, suède et Allemagne, elle a expérimenté différentes pédagogies holistiques. Une thèse de doctorat en sciences de l’éducation lui a permis d’observer et d’évaluer la puissance associative au service des plus faibles. Déléguée du préfet depuis plus de 10 ans, elle accompagne les associations investies auprès des publics des quartiers prioritaires notamment sur la remobilisation éducative.
Nadia Oulahbib est chercheure et analyste clinique du travail en santé mentale, observatrice des scènes de travail dans le monde de la fonction publique, l’entreprise associative, coopérative, industrielle et également liés aux métiers du social. Elle apporte son soutien à la parole sur le travail pour entretenir le dialogue collectif. Elle est aussi maîtresse de conférences associée pour l’UPEC.
Amélie Turet est docteure qualifiée en sciences de l’information et de la communication, chercheure associée à la Chaire UNESCO « Savoir Devenir » et au MICA, enseignante à l’UPEC sur le numérique dans l’éducation populaire et l’ESS, spécialiste de l’appropriation socio-technique des dispositifs liés au numérique. Membre de l’ANR Translit, elle a présenté ses travaux sur la médiation numérique lors des rencontres EMI de l’UNESCO à RIGA en 2016. CIFRE, diplômée de l’université Paris-Jussieu en sociologie du changement, elle a conduit des projets de R&D dans le secteur privé puis au service de l’État sur la transformation numérique, la démocratie participative, l’inclusion numérique, la politique de la ville et l’innovation.

La translittératie numérique, objet de la médiation numérique.
Analyse d’une expérimentation : remobilisation scolaire et articulation de médiations.

Deuxième partie : Articulations et mises en synergies des médiations

2.1. La confusion entre actions de médiations et types de médiateurs

La médiation numérique a été mobilisée durant le premier confinement de la « crise COVID » pour accélérer, via un « numéro vert », l’acculturation au numérique pour tous. L’expérimentation confirme que la médiation numérique, la médiation sociale, la médiation culturelle et la médiation éducative ne portent pas sur les mêmes objets mais peuvent concerner les mêmes personnes et un même projet d’intervention : ici la remobilisation scolaire. Ces deux constats permettent d’interroger la prévalence supposée de la médiation sociale devant la médiation numérique ; cette question se pose de manière similaire s’agissant de la médiation culturelle (notamment scientifique et technique) et de la médiation éducative (voire scolaire).

schéma de l'articulation entre les différentes formes de médiation

Articulation, Juxtaposition,
Distinction et Confusion entre médiations

Ces hiérarchisations entre médiations renvoient à des représentations culturelles institutionnalisées et ancrées dans des considérations idéologiques qui pèsent sur les priorités de l’action publique. Selon les situations, sont privilégiées des options politiques plus ou moins favorables aux libertés publiques : socialisation, contrôle social et émancipation sociale. L’analyse des sources de confusion entre ces médiations au-delà des populations ciblées s’impose donc.

2.1.1. Limites de la médiation numérique dans l’intervention sociale et limites de la médiation sociale en ligne et hors ligne…

En 2011, un rapport interministériel œuvre pour la reconnaissance des métiers de la médiation sociale : l’objet annoncé de la médiation sociale est « un mode original et efficace de résolution des tensions et d’amélioration des relations entre les populations des quartiers en difficulté et les institutions » (CIV, 20111). Sept champs d’intervention de la médiation sociale sont inventoriés : habitat, transport, santé, éducation, intervention sociale, tranquillité publique, accès aux services publics.

Le champ du travail social s’envisage à l’origine, dans une perspective réparatrice au bénéfice des personnes et des familles à soigner, à éduquer, à adapter : il ne s’inscrit pas d’emblée dans une logique de médiation. La médiation sociale apparaît à titre bénévole (femmes relais, correspondants de nuit) dans les années 80 ; elle est utilisée pour négocier les interventions des institutions et des travailleurs sociaux auprès des populations bénéficiaires. Elle naît explicitement en 1997 avec la circulaire interministérielle sur les contrats locaux de sécurité pour la prévention de la délinquance (CIV, Annexe 5, 2011).

Des médiateurs sociaux sont placés en appui des travailleurs sociaux grâce aux emplois aidés : « les grands frères », les emplois jeunes, les adultes relais… N’y apparaissent pas les éducateurs spécialisés qui opèrent dans les quartiers prioritaires, travailleurs sociaux porteurs depuis leur création de médiation sociale auprès des jeunes qu’ils accompagnent et souvent vers le droit commun. Les dispositifs publics de médiateurs sociaux, nouveaux entrants dans le travail social au statut précarisé s’additionnent. Ils permettent d’ouvrir les moyens d’intervention tout en limitant les budgets et en fluidifiant les corporatismes des travailleurs sociaux : rémunérations, conventions collectives, secret professionnel, niveaux de qualification, périmètres d’intervention.

Les objectifs des pouvoirs publics sont de faciliter la prise en charge sociale face à des situations interculturelles complexes et face à la montée du chômage notamment des jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il s’agit d’en maîtriser les risques : égalité des chances, discriminations, insécurité, insalubrité, … Le rôle des médiateurs sociaux est d’intermédier, à la faveur de leur situation de proximité géographique et socio-professionnelle avec les groupes de populations visées (âge, habitat, précarité, origine sociale, sexe…). Leurs compétences attendues d’acculturation aux logiques interculturelles (bilinguisme, leadership, négociation…), sont censées faciliter les relations entre les bénéficiaires visés et les dispositifs publics du champ des politiques sociales. Ils permettent la mise en lien de personnes issues de cultures urbaines, rurales et également proches par la langue avec les structures associatives porteuses des dispositifs publics. Cette proximité enclave aussi une médiation sociale qui permettrait de sortir des recours habituels du quartier ou du territoire. L’expérimentation a montré que la médiation numérique et la médiation culturelle sont des leviers d’ouverture sur d’autres horizons.

Les premiers médiateurs numériques bénéficient des mêmes emplois aidés pour œuvrer sur les territoires : la création du premier Point Information Multiservices (PIMMS) à Lyon en 1995, les animateurs multimédias ainsi que les cyber-médiateurs qui existent réglementairement depuis 1999 pour porter ce qui deviendra la médiation numérique.

Rappelons quelques éléments repères sur l’histoire de la constitution de la médiation numérique en termes de valeurs, de principes et d’objectifs. En 2015, l’ensemble des réseaux de la médiation numérique se réunissent sous la bannière d’un logo commun. Ce rassemblement s’est opéré à la faveur des résultats de la consultation nationale de la médiation numérique, organisée par la Délégation aux Usages de l’Internet de juin à octobre 2014. Ce logo national de la médiation numérique a été proposé par le ministère du numérique, en concertation avec les acteurs de la médiation numérique, lors de l’inauguration du site gouvernemental mediationnumerique.fr en octobre 2015.

Logo gouvernemental de la médiation numérique

Logo gouvernemental de la médiation numérique

L’analyse des concepts constituant ce logo (innover, coopérer, réfléchir, accompagner, découvrir et échanger) montre que les champs d’action de la médiation numérique ont une dimension sociétale, avec une approche d’éducation populaire assumée : découvrir, réfléchir, coopérer…. De fait, la médiation numérique traverse les champs d’intervention de la médiation sociale (CIV, 2011), par effets de dématérialisation progressive des interactions bénéficiaires/institutions : accès aux services publics, santé, habitat…

Quand on parle de médiation numérique soluble dans la médiation sociale, dépasse-t-on les attendus des formulaires administratifs ? (Lequesne-Roth, 20212) S’agit-il d’intervenir sur les écueils de la conditionnalité et de la vulnérabilité numériques ? de trouver des solutions de formation aux logiques administratives pour éviter l’hybridation de l’accès aux services publics (accueil physique, accueil téléphonique et accueil numérique) ? En 2022, la Défenseure des droits préconise l’hybridation des modes d’accueils face à l’échec de la généralisation des « compétences numériques de base ». Après plus de 20 ans de dématérialisation, et 16,5 % de personnes touchées par l’illectronisme (INSEE, 2021), l’objectif réitéré de l’administration est la dématérialisation de 250 services publics.

L’éducation de proximité au numérique sur les territoires est très contrastée dans ses objectifs. La CAF (Caisse d’allocations familiales) est un financeur historique de la médiation numérique dans les centres sociaux, en politique de la ville. Elle finance également des interventions des « Promeneurs du Net » (CNAF, 20183). Depuis les années 2010, « Les promeneurs du Net » pratiquent du dialogue en ligne en direct avec les jeunes. Encore plus ancien, « SOS fil info santé jeunes » anime des tchats entre jeunes et médecins avec des réseaux sociaux de soutien psychologique. Comme pour « SOS fil info santé jeunes », les « promeneurs du net » ont accès aux jeunes qui sont déjà dans une pratique particulière du numérique. Ainsi les jeunes les plus éloignés d’un usage « éducatif » du numérique sont ici comme ailleurs « intouchables » (Têtard, 20104). C’est le cas par exemple, des enfants et des adolescents observés et accompagnés dans le cadre de l’expérimentation : ils ont un usage récréatif du numérique via les réseaux sociaux tels que tiktok et snapchat.

Ainsi, malgré un environnement du « tout numérique », la médiation sociale en ligne peine à « toucher » les bénéficiaires les plus éloignés des pratiques sociétales actuelles et des plus innovantes.

2.1.2. « Fractures / Inclusions » : slogans communs et prévalence associative

La première source de confusion entre médiation sociale et médiation numérique, semble liée à l’analogie politique historique (car intrinsèque au programme des élections présidentielles de Jacques Chirac) entre « réduction de la fracture sociale » et « réduction de la fracture numérique » (Vandeninden, 20075). La dénonciation de la fracture sociale a été antérieure à la dénonciation de la fracture numérique. Cette confusion apparaît précisément au moment où le numérique est l’apanage des pionniers de l’Internet, une élite aisée et instruite. Le sujet ciblé concerne l’accès financier aux outils. Dans un deuxième temps, cette confusion a été confortée par l’utilisation généralisée des terminologies européennes : le terme choisi d’inclusion pour remplacer celui de fracture est plus propice à une vision constructive des politiques d’intervention publiques (Toledano Laredo, 20226). L’inclusion sociale a en quelque sorte embarqué l’inclusion numérique (Hue, 20197). Ces locutions ont remplacé les expressions de fractures mais aussi d’exclusions sociales et numériques. Pourtant et pendant tout ce temps, les difficultés de littératie numérique étaient tout autant socio-économiques, générationnelles, que culturelles et/ou physiologiques et cognitives (handicap).

La deuxième source de confusion peut provenir de la proximité des institutions et des acteurs eux-mêmes car les acteurs de la médiation numérique et de la médiation sociale s’inscrivent tous dans le secteur de l’économie sociale et solidaires (ESS) et dans les administrations de la fonction publique territoriale. Comme pour le champ du travail social, le champ de la médiation numérique, de la formation et de l’éducation au numérique, est l’apanage du secteur associatif, des collectivités territoriales et des services publics. A ce titre, la médiation numérique a donc été l’objet dès son lancement dans les années 2000, d’une politique publique socio-économique de réduction de la fracture numérique soutenue par des emplois aidés « les Emplois Jeunes ». Ces animateurs multimédia, médiateurs cyber-jeunes, (etc.) sont venus se juxtaposer à grand renfort de précautions juridiques sur les périmètres d’intervention à l’offre privée préexistante : les Cybercafés. Ils ont renouvelé laborieusement cette première offre pédagogique et andragogique de lutte contre l’illectronisme, centrée sur l’accès aux outils numériques, le dépannage ponctuel, le soutien individuel et les cours collectifs.

Cette réduction publique ou privée de la fracture numérique se limite donc à l’origine à mettre à disposition du matériel informatique connecté en état de marche, et à donner quelques conseils individuels d’utilisation et de manipulation. Le modèle du service à la carte du réseau du label Cyber-base (Turet, 20188) a établi une évaluation positive du service offert, en cas d’absence de nouvelle sollicitation des publics sur un même sujet. Ce modèle relevait de cette même démarche de soutien ponctuel sans qu’une recherche d’autonomie numérique globale de la personne soit engagée.

L’actuelle offre publique « France Services » encourage pour une grande part ce service ponctuel à la demande, centré sur l’accueil individuel. Les formations et les certifications des Conseillers Numériques France Service (CNFS) prennent toutefois en compte des besoins plus larges et des compétences d’accompagnement collectifs. Ces formations ne se référent pas totalement à la charte nationale9 de la médiation numérique (2015), issue de la consultation nationale sur la médiation numérique10. Elles n’englobent pas non plus la charte des Espaces Publics Numériques en vigueur de 2011 à 2016 (Turet, 201811).

2.2. La clarification des champs d’intervention des médiations

Pour clarifier les périmètres d’intervention des médiations, il faut donc déterminer précisément leurs champs d’action à partir de leur objet d’existence. Les recherches interdisciplinaires de l’ANR Translit ont permis d’identifier l’objet de la médiation numérique qui jusque-là semblait s’emparer de multiples sujets. Cette multiplication des sujets numériques ont créé des frictions et des interrogations sur la nécessité de former les travailleurs sociaux au numérique mais aussi les enseignants au C2i2e. L’Éducation nationale choisit d’abandonner la logique du C2i2e au profit de l’autoformation par PIX et le travail social accentue la formation de ses cadres et de ses intervenants aux compétences numériques. L’expérimentation apporte de nouveaux angles de réflexion sur la pertinence du croisement des médiations.

2.2.1. Translittératie numérique et identité professionnelle des médiateurs numériques

Les professionnels de la médiation numérique ont pris la mesure de leur impact malgré les vagues successives de nouveaux entrants chez les commanditaires (élus, administrateurs) et chez les acteurs de terrain (services civiques, emplois d’avenir, …) au petit bonheur de la variété des politiques publiques et des acceptions locales des missions attendues. Les jurys successifs du « Label Ville, Villages et Territoires Internet » œuvrent à comparer les efforts des collectivités locales dans leur offre de médiation numérique. La transmission d’une culture numérique (Voirol, 201112) devient progressivement incontournable au-delà de la maîtrise du « socle des compétences numériques de base » définies par la Direction Générale de l’Emploi et de la Formation Professionnelle (DGEFP).

Des tensions existent entre les injonctions de mise en conformité aux commandes publiques, financièrement incitatives issues des politiques nationales, et les contrats européens de financement : certains appels à projets favorisent une inclusion numérique qui relève davantage des valeurs de la formation aux utilisations civiques. D’autres, plus rares soutiennent des valeurs plus émancipatrices et critiques proches de l’éducation populaire. Les institutions phares de l’éducation populaire tardent à se positionner face aux orientations de développement du numérique. Elles n’ont pas d’offre politique concernant les besoins corrélés de la population : une vision globale des enjeux, une capacité d’orientation et de choix d’émancipation et de développement personnel pour être un citoyen libre et égal en droits face au numérique. Il s’agit de surcroît, d’usages personnels mais aussi des usages des personnes dont on a la charge : enfants, ascendants, personnes en situation de handicap.

Les médiateurs numériques doivent être capables d’initier la population pour faire reculer l’illectronisme quels que soient les critères socio-économiques et culturels en jeux : ils sont donc généralement dotés non seulement des connaissances techniques (outils) liées à des technologies en perpétuelle évolution mais aussi informationnelles et médiatiques (réseaux sociaux, fake news…). Ils doivent aussi faire relais, coopération ou partenariat avec les spécialistes de champs particuliers : l’administration, le social, l’emploi, l’entreprise, le commerce, etc. Ils sont au cœur de la translittératie numérique qui elle, se déploie dans tous les champs de la société.

Dans le cadre de l’expérimentation auprès des enfants, la convocation d’un médiateur numérique s’est avérée incontournable face au manque de culture numérique transversale des autres médiateurs scolaires, sociaux, culturels, économiques. Le médiateur numérique est porteur d’une mise en intelligibilité socio-technique : il a besoin de s’acculturer pour éviter le biais de « la suprématie » et confisquer le pouvoir d’agir. Il s’est retrouvé chargé de mettre en place des ateliers non seulement pour les enfants mais aussi pour quelques adultes référents de l’expérimentation.

2.2.1.1. L’écrivain public numérique : figure croisée de médiations

L’écrivain public numérique est une figure de l’autonomie, de l’émancipation et de la citoyenneté retrouvées à l’heure de l’indispensable maîtrise des écritures numériques. Il s’agit aussi de la compréhension de la logique des algorithmes (AFFELNET13, Parcours Sup). Le médiateur du cybercafé aide à l’accès, aide parfois « à faire » quand l’écrivain public numérique fait à la place, tel le secrétaire de mairie ou le scribe des temps reculés. Il s’agit là de la méthode et de la limite de la médiation : jusqu’à quels niveaux d’émancipation et de socialisation, les clés de connaissances et de compétences sont-elles transférées ?

La vision aujourd’hui répandue d’un « médiateur numérique-administratif » est centrée sur la levée des blocages de l’utilisateur à l’utilisation des applications et des formulaires de l’eAdministration. Elle renvoie à l’image initiale du médiateur numérique centré sur l’accès aux matériels informatiques. Elle relève pourtant majoritairement d’un besoin de médiation administrative liée à la non maîtrise de la culture administrative : permettre de comprendre les attendus du formulaire opposable à l’administré. C’est le cas de la réplique célèbre du film Le père Noël est une ordure (Jean-Marie Poiré, 1982) concernant le remplissage d’un formulaire CERFA de la sécurité sociale14 : quand Josette, la protagoniste ne peut pas dire si elle travaille ou non, alors qu’il faut remplir le formulaire par oui ou par non. Elle n’est pas d’accord puisqu’elle veut écrire sa réalité mouvante par « ça dépend » mais elle constate que « ça dépend, ça dépasse » des cases à cocher. Pour remplir correctement un formulaire, il faut connaître l’approche administrative et développer une stratégie administrative. Cette logique de l’administré est niée par l’administrateur qui veut pouvoir préjuger d’une réalité fiable à partir de ses propres indicateurs non explicités à l’administré. L’administrateur, gestionnaire de l’optimisation des critères, ne saurait prendre en compte une réalité aménagée par l’administré en fonction de ses propres attendus. Le dialogue, voire la négociation, encore rendus possibles par une communication orale ou manuscrite au guichet physique, permettait cette médiation administrative. Dans un cadre informatisé non médié, cette médiation est de facto supprimée.

L’écrivain public, le « donneur de mots » pour ceux qui n’en ont pas…15 est une figure tutélaire du médiateur administratif : auparavant complémentaire, il est aujourd’hui supplétif du fonctionnaire d’accueil au guichet des administrations. De profession libérale parfois, (227 recensés en 2011 pour toute la France), il est le plus souvent bénévole (Ollivier, 200916). La profession n’étant pas réglementée, toute personne peut se déclarer écrivain public bénévole. Il est lié à la médiation sociale : il exerce souvent dans les centres sociaux. Il maîtrise à la fois les fondamentaux du savoir administratif et du savoir juridique. Il a l’expérience de situations socio-économiques et culturelles toujours singulières et donc majoritairement atypiques qu’il faut rapporter à l’étalon attendu par l’administration. L’écrivain public a dû progressivement se doter d’une culture et de compétences numériques associées aux compétences qu’il maîtrise déjà pour son métier.

Quasiment chaque administration a recruté à un moment donné, des services civiques « digital natives »17 ou Génération Z, en soutien au remplissage de tel ou tel formulaire en ligne. Ces derniers sont souvent moins performants que les anciens écrivains publics des centres sociaux qui par leur maîtrise de la culture administrative pouvaient intervenir sur tous types d’illettrismes. L’écrivain public est une sorte d’interprète entre le langage commun et le langage juridico-administratif. Il est identifié comme un levier pour créer des ponts interculturels.

Lors de l’expérimentation, deux services civiques issus du même quartier que les enfants ont permis de nouer un lien de confiance avec les intervenants et notamment avec la médiatrice culturelle qui les accompagne à écrire la musique et les paroles des chansons. L’apport médiatique d’enregistrement des répétitions, des concerts, des chorales, relayé par le numérique crée une occasion de partages de savoirs, de compétences, de remémoration qui ouvrent sur des besoins puis sur des demandes des enfants pour être en autonomie de manipulation des outils d’abord, puis à termes de création de contenus. Cette combinatoire a invité progressivement les enfants à s’initier directement à l’écriture et à la lecture.

La translittératie numérique est donc prépondérante dans cette logique de mise en autonomie : dans le cas suivant, concernant l’acculturation au numérique des chefs d’entreprise, la question de médiation sociale est remplacée par la question de la médiation de l’économie numérique.

2.2.1.2. Translitteratie et chefs d’entreprise : une médiation numérique à dominante économique ?

La translitteratie numérique concerne les entreprises, qu’elles soient engagées dans des stratégies de transformation numérique ou formation continue. Le champ de la médiation numérique pour ces entreprises n’est pas soluble dans la médiation sociale même si les responsables de TPE PME bénéficient des « dispositifs publics pour tous » : Tiers lieux, Fablabs, EPN…

Dans ce champ du développement économique, les médiateurs numériques sont plutôt désignés conseillers numériques. Leur activité est bien plus lucrative et attractive en termes de reconnaissance professionnelle. A la demande d’un réseau d’acteurs économiques de haut niveau, un diplôme de niveau master (niveau 2) de conseiller numérique pour les entreprises est reconnu au RNCP. Doit-on en déduire que la solvabilité économique des bénéficiaires induit une médiation numérique et un travail translittératique hors de toute question sociale ? Dans ce cadre précis, il n’y a pas de médiation sociale sauf à y inclure les travaux de l’ANACT, sur le sujet de la transformation numérique aux prises avec la Qualité de vie au travail. A contrario, s’agit-il d’une autre médiation numérique selon qu’elle s’exerce à la chambre de commerce et d’industrie ou au centre social ? La question de la médiation numérique dans la médiation sociale n’a ici pas d’objet.

Pour ce qui concerne la participation des entreprises à l’expérimentation de remobilisation scolaire des enfants, il s’est avéré que la médiation des entreprises n’a pas opéré en tant qu’offre de services et de produits, ni en tant que passeurs de valeurs et de processus. Lors de la première phase de l’expérimentation, le groupement économique innovant devant assurer l’intégration des entrepreneurs s’est trouvé dépassé par les représentations sociales attachées aux enjeux et aux besoins identifiés de la remobilisation scolaire des enfants : le jeu de plateau a été réalisé sans les enfants et les adultes référents, le budget a été dilapidé dans des activités de secrétariats et de quelques réunions préparatoires assimilées à des séances de consulting.

Ces questionnements nous conduisent à interroger les qualifications des médiateurs numériques aux prises avec ces sphères d’intervention et l’objet de la médiation numérique : la translittératie numérique.

2.2.2. Faciliter la mobilité entre les sphères d’intervention du secteur de la médiation numérique

Quel enjeu de la gestion prévisionnelle des emplois et des qualifications « GPEQ » pour le secteur de la médiation numérique : faciliter la mobilité entre ses sphères d’intervention ? La « filière métiers de la médiation numérique » a été initiée par la Délégation aux Usages de l’Internet. Deux centres de ressource régionaux, désignés à partir des dynamiques régionales déjà existantes en 2014 ont participé à cette définition sur la question des compétences métiers et des niveaux d’intervention. Il apparaît alors la nécessité d’aligner le niveau d’intervention avec celui des enseignants du second degré et de l’enseignement supérieur : le C2I2E. Il s’agit a minima de monter le niveau d’intervention à Bac +2 pour prendre en compte les compétences nécessaires aux trois phases de diagnostic, d’ingénierie et d’intervention selon les cas pédagogiques ou andragogiques. Ce projet de filière de compétences perd sa légitimité avec l’abandon du C2I2E obligatoire pour les enseignants.

A partir de 2017, la généralisation du PIX comme outil d’auto formation et de certification accompagnée à l’éducation nationale et dans les espaces publics numériques contribue à une forme de plateformisation de la médiation numérique. Cette nouvelle médiation scolaire du numérique pour les mineurs, concomitante du renforcement de la médiation sociale du numérique pour les plus éloignés du numérique, met en tension l’éducation critique et citoyenne au numérique. Cette éducation critique nécessite l’échange, le questionnement, la confrontation à l’autre et le débat au-delà de l’apprentissage de compétences et de bonnes pratiques : « Les dispositifs artificiels reflètent une extériorisation des compétences formatives. Les dispositifs intériorisés humains sont un construit fait d’habitus et de qualifications nourries de théories et d’expériences pratiques qui se cristallise dans l’opportunité d’une rencontre favorisant la transmission et l’alerte incarnée par une histoire et un parcours de vie unique et singulière » (Turet, 2018). La filière métiers de la médiation numérique et ses portefeuilles de compétences peuvent-ils aujourd’hui se fonder sur les questions de translittératie numérique au-delà des seules transmissions de compétences et de culture numérique ?

Conclusion

L’expérimentation sur la remobilisation scolaire par la translittératie numérique accompagnée par de multi-médiations invite à repenser les stratégies de reproduction (Bourdieu, 197018) et de distinction (Bourdieu, 197919) à l’œuvre : avec ces multi-médiations, les enfants peuvent transférer leurs compétences familiales, numériques et scolaires d’un univers à l’autre de manière fluide et émancipatrice. L’expérimentation rappelle l’importance de la présence humaine, de « l’adulte référent », du pair qui partage dans l’ici et maintenant, le faire ensemble et l’émotion éphémère du moment partagé. « Les scénarios d’un futur sans éducation critique et politique au numérique ouvrent sur un monde programmé par une minorité dictant au reste du monde des usages, des processus et des horizons non discutés » (Turet, 2018). L’intervention sociale et l’éducation populaire sont deux démarches qui selon les politiques publiques à l’œuvre sont souvent irréductibles l’une à l’autre mais toujours complémentaires. Les résultats de l’ANR Translit (Frau-Meigs, 2017[noteFrau-Meigs, Divina. ANR Translit 2017, Rapport final[/note]) permettent de déduire que la médiation numérique a pour objet premier la translittératie numérique. Par son approche éducative associée à sa mission socialisatrice et émancipatrice dans une société numérique, elle doit en dispenser les savoirs, les savoir être, les savoirs faire et les savoir devenir nécessaires.

La médiation numérique a des fondements politiques dans l’éducation populaire : la fabrique numérique, ses pratiques et ses usages sont politiques en ce qu’ils organisent le vivre ensemble. La médiation numérique a donc pour finalité d’éveiller l’esprit critique des « homonuméricus » : « En se concentrant sur les phénomènes de médiation technologique et sur la matérialité du travail d’intermédiation, nous interrogeons la capacité des plateformes à influencer et à configurer des pratiques, et des formes d’autorité, à organiser l’action en imposant des contraintes, mais aussi l’existence de modes d’appropriation et de critiques de la part d’usagers, souvent « dominés » par ces plateformes » (Bigot, 202120). Davantage de travaux restent nécessaires pour relier les médiations numériques au bénéfice d’une émancipation critique des usages des technologies numériques.

Constituer des savoirs collaboratifs et universitaires entre pratiquants et professionnels de différents métiers, institutions, centres de formation pourrait faire émerger les « bidouillages » (Leroi-Gourhan, 196421) de chacun afin de fabriquer un bien commun d’utilités et « la circulation de la pensée scientifique entre les littératies : la programmation informatique, la programmation médiatique et les sciences de l’information et de la communication. La question de la diffusion d’une culture numérique éclairée par la recherche et les savoirs universitaires sur le modèle de la « translittératie numérique » s’avère vitale d’un strict point de vue démocratique.  » (Turet, 2018). Ainsi le cas de la translittératie numérique étudiée pendant l’expérimentation avec un groupe d’enfants dépasse la question de la remobilisation scolaire via des médiations croisées. Il s’agit par l’analyse et la réflexion collective sur leurs pratiques numériques de les conduire vers une émancipation citoyenne et l’acquisition de compétences en Savoir devenir qui donnera du sens à leurs parcours et à leurs sociabilités scolaires.

La médiation numérique par ses dimensions émancipatrices et citoyennes et ses champs d’intervention culturels, techniques et éducatifs est génératrice d’innovations socio-techniques à l’écoute d’un monde en mouvement. La médiation numérique ne vise pas intrinsèquement la remédiation des absences de compétences ; elle ne cible pas non plus uniquement les dérives d’usage en rapport à une norme minimale d’inclusion. La médiation numérique n’est donc ni soluble, ni réductible à la médiation sociale et inversement, car tout en initiant et en mettant à jour les connaissances, elle participe à la réflexion individuelle et collective pour un positionnement éclairé sur les orientations éthiques et démocratique de développement de notre humanité numérique (Guichard, 201622).

La combinatoire de ces deux types de médiation ne signifie pas la dissolution de l’une au profit de l’autre car les objets sont différents. Quand un seul médiateur porte deux types de médiation, le risque de confusion est important avec ses conséquences d’instrumentalisation. L’expérimentation a permis une observation de ces médiateurs généralistes mis en « panne » lors des collectifs de travail associant des médiateurs plus spécialisés et centrés sur leurs objets de médiation. Il en est ressorti l’importance de l’attention à porter sur l’articulation des médiations dans l’intérêt librement partagé des populations bénéficiaires.

Un grand merci à Corine Escobar, Nadia Oulahbib et Amélie Turet d’avoir partagé avec nous leurs réflexions. Si celles-ci vous font réagir, n’hésitez pas à partager les vôtres en commentaires. On en remet une couche (de réflexion) dès la semaine prochaine…

Feedback on the ECHO Network opening seminar, January 2023, Paris

mercredi 5 avril 2023 à 12:14

From January 14 to 16, 2023, the Ceméa France and Framasoft held the opening seminar of the ECHO Network project. Here is a report of this weekend of international exchanges and discoveries.

A two-year European project

Presented on the Framablog last October, ECHO Network is one of the four flagship projects of our roadmap Collectivisons Internet, Convivialisons Internet.

Ethical, Commons, Humans, Open-Source Network is a project, but also an associative network on a European scale. Led by the new education association Ceméa France, this network is composed of 7 structures from 5 European countries :

These structures share an intent to accompany citizens (via popular education, news, activism, etc.), and to exchange on the digital uses specific to their country, their culture, their language.

Study trips are therefore planned in 2023 in each of the countries to facilitate these exchanges and the understanding of the context of each one, so that in 2024 we can produce commons that can be used by other associations in Europe.

 

Drawing of five islands in a circle, each with constructions of a different culture. They communicate with each other by sending waves, echoes.

ECHO Network – Illustration by David Revoy – Licence : CC-By 4.0

The opening seminar in Paris

The first meeting with all the actors took place from Saturday 13 to Monday 16 January in Saint Ouen, north of Paris, France.

This opening seminar was co-organized by Ceméa France and Framasoft. While we didn’t hesitate to get involved and contribute as much as we could, we have to admit that members of the Ceméa have a precious experience in setting up these events, and that they did a great job overall on organizing this seminar.

In addition to the thirty or so participants representing the partners of the ECHO Network project, we were able to invite more than twenty people from networks interested in new education, digital mediation, the commons and free software to contribute to these first discussions on ethical digital support for citizens.

Thus, this opening seminar was designed to find out how to talk about the same thing when we don’t speak the same languages, even though our contexts are different and our digital cultures varied.

Imagine a large room, about twenty people are sitting on chairs in tight rows. In front of them, a person seems to give them instructions. That’s what it looked like.

Understanding each other through « new education »

These three days were conceived beforehand using the methods of « new education » dear to the Ceméa.

The 55 people were divided into 3 reference groups, in order to share knowledge together. The concept was simple : rather than having poor interactions with 55 people, spend more quality time with a smaller group of 15 of them.

These groups were led by a team of three people (2 members of Ceméa, 1 member of Framasoft). Some periods were also reserved to be spent in micro groups (of 2-4 people) and to realize « mini projects ». Of course, all the participants gathered for the meals and conviviality times in the canteen.

Let’s take a moment to greet and thank the team managing the place, Mains d’œuvres, in Saint-Ouen, for their wonderful welcome and their delicious food. This space dedicated to culture and integrated into the life of the neighborhood was ideal to discover the flavor of Paris that’s lived by the locals. https://www.mainsdoeuvres.org/

The three days were divided into six half-days : the first one to meet each other, then 4 half-days dedicated to exchange on the notion of Ethics, Commons, Humanization and Openness in the digital world (yes, these are the words of the ECHO acronym ;)).

The last half-day of Monday afternoon allowed each group to present to the others a report of the exchanges, to put all this together and to say goodbye.

 

Grand papier sur lequel est écrit la question "comment déinirais tu l'éthique ?" et ou plein de cartes affichant des concepts autour du numérique éthiques sont collées

Conviviality as a political tool

The objective was to meet and to understand what brings us together in our political actions (which aim at organizing the society in a different way), and for that, the Ceméa and Framasoft relied on conviviality and exchange.

The participants had different sensitivities about digital uses. Most of them knew Mastodon but not all of them. Most of them had an idea of what free software is but not all of them. The activities allowed them to share their knowledge of the different themes.

The workshops took several very imaginative formats, such as :

A5 cards from the 'life phone workshop' are spread out on a table. They represent concepts of a life phone: "a very small battery", "do not disturb", "a phone for two", etc.

The « Life Phone » workshop.

During the time devoted to these mini-projects, we were able to observe some beautiful initiatives :

In short, collective intelligence has shown again, during these three days, its wonderful power.

Poster paper explaining "recipe cards", a card game idea to explain digital in the form of cooked dishes and recipes for children from 8 years.

Recipe cards, a tool idea that makes you drool !

Study visits to follow

If we already know that these will not necessarily resemble this seminar (where we have chosen new education methods as a tool for meeting and exchange), the next study visits have already been scheduled. In fact, as we finish writing these lines, all the partners are in Berlin for another meeting.

The main themes for those visits are, in our opinion, quite attractive :

Of course, we will continue to report here about our experiences within these meetings and this project. All the articles can be found in the ECHO Network category on the Framablog… To be continued, then !

The picture is blurry, but you can see the main thing : the « Star Trek » room we used during the plenary sessions.

 

Retour sur le séminaire d’ouverture d’ECHO Network, janvier 2023, Paris

mercredi 5 avril 2023 à 12:14

Du 14 au 16 janvier 2023, les Ceméa France et Framasoft ont tenu le séminaire d’ouverture du projet ECHO Network. Voici un compte rendu de ce week-end d’échanges et de découvertes internationales.

Un projet européen sur deux ans

Présenté sur le Framablog en octobre dernier ; ECHO Network est un des quatre projets phare de notre feuille de route Collectivisons Internet, Convivialisons Internet.

Ethical, Commons, Humans, Open-Source Network (Réseau autour de l’Éthique, les Communs, les Humaines et l’Open-source) est un projet, mais aussi un réseau associatif à échelle européenne. Mené par l’association d’éducation nouvelle des Ceméa France, ce réseau se compose de 7 structures provenant de 5 pays européens :

Ces structures ont en commun d’accompagner des citoyen·nes (éducation populaire, nouvelle, militantisme, etc.), et pour objectif d’échanger sur les usages numériques spécifiques à leurs pays, leur culture, leur langue.

Des visites d’études sont donc prévues en 2023 dans chacun des pays pour faciliter ces échanges et la compréhension du contexte de chacun·e, afin qu’en 2024 l’on puisse produire des communs pouvant servir à d’autres associations en dans l’Europe.

Dessin de cinq iles en cercle, chacune avec des constructions d'une culture différente. Elles communiquent ensemble en s'envoyant des ondes, des échos.

ECHO Network – Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Un séminaire d’ouverture à Paris

La première rencontre des acteurs et actrices a donc eu lieu du samedi 13 au lundi 16 janvier dernier, à Saint-Ouen, au nord de Paris.

Ce séminaire d’ouverture était co-organisé par les Ceméa France et Framasoft. Si nous n’avons pas hésité à nous impliquer et contribuer de notre mieux, il faut reconnaître que les Ceméa ont une expérience précieuse sur l’organisation de ces événements, et qu’iels ont fourni un formidable travail sur ce séminaire (on a aidé comme on a pu ^^).

Car en plus de la trentaine de participant·es représentant des partenaires du projet ECHO Network, nous avons pu inviter plus de vingt personnes des réseaux de l’éducation nouvelle, de la médiation numérique, des communs et du libre pour alimenter ces premiers échanges autour du numérique éthique dans l’accompagnement citoyen.

Ainsi, ce séminaire d’ouverture a été pensé pour trouver comment parler de la même chose quand on ne parle pas les mêmes langues, alors que nos contextes sont différents, et nos cultures numériques variées.

dans une grande salle, une vingtaine de personnes sont assises sur des chaises en rangs serrés. Devant elles une personne semble leur donner des consignes.

Le jeu du « pac man IRL », pour se ré-énergiser après le déjeuner et avant de s’y remettre, était assez épique.

Se comprendre grâce à l’éducation nouvelle

Ces trois jours ont été conçus en amont en reprenant les méthodes de l’éducation nouvelle chères aux Ceméa.

Les 55 personnes ont été réparties en 3 groupes de référence, pour pouvoir partager les savoirs ensemble. Le concept était simple : plutôt que de mal rencontrer 55 personnes, prendre le temps d’échanger avec une petite quinzaine.

Ces groupes étaient animés par une équipe de trois personnes (2 membres des Ceméa, 1 membre de Framasoft). Des temps étaient aussi réservés pour se trouver en micro groupes (de 2-4 personnes) et réaliser des « mini projets ». Bien entendu, l’ensemble des participant·es se rassemblait pour les repas et temps de convivialités ; dans la cantine.

Prenons d’ailleurs un temps pour saluer et remercier l’équipe du lieu Mains d’œuvres, à Saint-Ouen, pour son accueil formidable et ses plats délicieux. Cet espace consacré à la culture et intégré à la vie de quartier était idéal pour faire découvrir à nos partenaires de l’Europe Paris telle qu’elle est vécue par les personnes qui y habitent.

Les trois jours ont été découpés en six demi-journées : la première pour se rencontrer, puis 4 demi-journées consacrées à échanger sur les notions d’Éthique, de Communs, d’Humanisation et d’Ouverture dans le numérique (oui, ce sont les mots de l’acronyme ECHO ;)).

La dernière demi-journée du lundi après-midi a permis à chaque groupe de présenter aux autres un compte rendu des échanges, de mettre en commun tout cela et de se dire au revoir.

Grand papier sur lequel est écrit la question "comment définirais-tu l'éthique ?" et ou plein de cartes affichant des concepts autour du numérique éthiques sont collées

La convivialité comme outil politique

L’objectif était donc de se rencontrer et de comprendre ce qui nous rassemble dans nos actions politiques (qui visent à organiser la société autrement), et pour cela les Ceméa et Framasoft ont misé sur la convivialité et l’échange.

Les participant·es avaient des sensibilités différentes sur les usages du numérique. La plupart connaissaient Mastodon mais pas toustes. La plupart avaient un aperçu de ce qu’est le logiciel libre mais pas toustes. Les activités leur ont permis de se partager, entre elles et eux, leurs connaissances des différentes thématiques abordées.

Les ateliers ont pris plusieurs formes très imaginatives, par exemple :

Des cartes A5 de 'atelier life phone sont étalées sur une table. Elles représentent des concepts d'un téléphone à vie : "une toute petite batterie" , "ne pas déranger", "un téléphone pour deux", etc.

L’atelier Life Phone, imaginons à quoi ressemblerait un téléphone low-tech, qui nous tiendrait toute notre vie.

Durant les temps consacrés à ces mini-projets, nous avons pu observer de belles initiatives :

En bref, l’intelligence collective a encore montré, durant ces trois jours, ses merveilleuses capacités.

Papier affiche expliquant les "cartes recettes", une idée de jeu de cartes pour expliquer le numérique sous forme de plats cuisinés et de recettes pour les enfants dès 8 ans.

Les cartes-recettes, une idée d’outil qui fait saliver !

Des visites d’études à suivre

Si l’on sait déjà qu’elles ne ressembleront pas forcément à ce séminaire (où nous avons fait le choix de l’éducation nouvelle comme outil de rencontre et d’échanges), les visites d’études sont déjà programmées. D’ailleurs, au moment où nous finissons de rédiger ces lignes, c’est à Berlin que l’ensemble des partenaires est en train d’échanger.

Le programme des thématiques est alléchant :

Bien entendu, nous continuerons de rendre compte, ici-même, de notre expérience au sein de ces rencontres et de ce projet, l’ensemble des articles pourra être suivi grâce à la catégorie ECHO Network sur le Framablog… à suivre, donc !

La photo est floue, mais on y voit le principal : la salle « Star Trek » qui nous a servi lors des séances de plénière.

Khrys’presso du lundi 3 avril 2023

lundi 3 avril 2023 à 07:42

Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.


Tous les liens listés ci-dessous sont a priori accessibles librement. Si ce n’est pas le cas, pensez à activer votre bloqueur de javascript favori ou à passer en “mode lecture” (Firefox) ;-)

Brave New World

Spécial France

Spécial femmes en France

Spécial médias et pouvoir

Spécial emmerdeurs irresponsables gérant comme des pieds (et à la néolibérale)

Spécial recul des droits et libertés, violences policières, montée de l’extrême-droite… »

Spécial résistances

Spécial GAFAM et cie

Les autres lectures de la semaine

Les BDs/graphiques/photos de la semaine

Les vidéos/podcasts de la semaine

Les trucs chouettes de la semaine


Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.

Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).

Le Contrat d’Engagement Framasoftien, pour un usage digne et responsable de nos services

samedi 1 avril 2023 à 08:13

Dans la grande tradition du libre qui consiste à copier les bonnes idées et les adapter à son besoin, nous nous inspirons du contrat d’engagement républicain mis en place par l’État français, et annonçons aujourd’hui en grande pompe le Contrat d’Engagement Framasoftien.

Comme le Contrat d’Engagement Républicain, mais en mieux

En effet, désormais, les associations ne peuvent pas avoir d’interactions significatives avec les institutions de la République Française (subventions, agréments, etc.) sans avoir signé ce « contrat d’engagement républicain » qui garantit loyauté et fidélité à la République, et permet à l’État de s’assurer que les associations se tiennent sages. C’est une excellente idée qui est d’ailleurs expliquée en détail par le Collectif des Associations Citoyennes (qui fait partie, tout comme Framasoft, des membres fondatrices du collectif « Coalition pour les libertés associatives » ), ou encore dans « Associations, Mode d’Emploi » (article soumis à abonnement).

Toute règle ayant sa réciproque, Framasoft conditionne donc désormais l’usage de ses services et outils par les entreprises, établissements, agences et surtout les institutions et organisations publiques à la signature d’un Contrat d’Engagement Framasoftien. Il vise à rassurer nos donatrices et donateurs qui financent nos services sur le niveau d’engagement de ces organisations utilisatrices vis-à-vis du respect des libertés numériques et des principes de solidarité.

Ce Contrat implique de leur part une utilisation responsable, citoyenne et démocratique de nos ressources financées par le public selon des valeurs que nous pourrions résumer en trois mots :

Liberté, Égalité, Adelphité.

parodie du logo de la république Française reprenant le logo et les couleurs de Framasoft

La Liberté ou la porte

Examinons ensemble les articles de ce contrat et ce qu’ils impliquent, en prenant pour exemple une direction de l’administration publique qui utiliserait nos outils.

1. être toujours gentil·le avec Framasoft et les membres de son gouvernement, quitte à ne plus penser ce que je pense.

La liberté, c’est bien. Sauf si vous l’utilisez contre nous ou nos intérêts, alors dans ces cas-là il faut le dire franchement : c’est pas bien.

Imaginez qu’une institution publique utilise Framaforms, alors qu’en même temps la présidence distribue des légions d’honneur au milliardaire Jeff Bezos, et se fasse féliciter par le milliardaire Elon Musk ? Où serait la cohérence, le sérieux, l’intégrité ?

2. respecter la liberté de conscience d’autrui, même les personnes qui disent sérieusement « digital » et « c’pas Linux, c’est GNU/Linux ! ».

Il existe une liberté de parole, de croyance, de religion : il nous appartient de ne pas juger autrui dans ses rituels. Il convient d’éviter une guerre sainte entre ceux qui disent crypter et celles qui préfèrent parler de chiffrement. Les naïfs qui s’adonnaient à l’adoration des start-ups, et faisaient leurs offrandes aux NFT, tournent désormais leur ferveur de zélotes vers des IA privatives, qu’ils ne maîtriseront toujours pas.

Cette liberté de conscience n’offre cependant pas la liberté de finance : rappelons que si votre institution utilise les services Framasoft, la frama-laïcité veut qu’elle cesse de financer une startup nation dont le code ne serait pas ouvert libre : si l’argent est public, le code se doit d’être public.

3. rappeler que chacun·e est libre de ne pas utiliser l’écriture inclusive, mais ailleurs. Loin.

C’est un des points les plus virtuoses du Contrat d’Engagement Républicain que l’État offre en signature aux associations forcément consentantes : la liberté y est définie comme la liberté de se barrer. Si cela ne vous plaît pas, allez voir ailleurs. C’est brillant.

Alors bien sûr, on attend mieux, on attend plus que ce trait de génie. Qu’il s’agisse de partager le code (qui est libre), notre expérience, nos moyens, d’impulser la reproduction de ce que l’on fait… Framasoft renforce la liberté de se barrer ailleurs en donnant à celleux qui le souhaitent les clés pour faire pareil, à leur manière, et donc mieux.

Si des institutions se mettent à utiliser nos services, nous leur enjoignons de faire comme nous, et de donner à leurs bénéficiaires les moyens d’être autonomes. On pourrait même aller loin dans l’utopie et imaginer appeler cela des « services publics ». Oui : c’est osé.

 

capture d'écran de la modale disant : 
« Contrat d’Engagement Framasoftien

décret n°2021-1947 du 31 décembre 2021, article 5, pris pour l’application de l’article 10-1 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000

En contrepartie des services offerts par Framasoft, je¹ m’engage solennellement à…
être toujours gentil·le avec Framasoft et les membres de son gouvernement, quitte à ne plus penser ce que je pense.
respecter la liberté de conscience d’autrui, même les personnes qui disent sérieusement « digital » et « c’pas Linux, c’est GNU/Linux ! ».
rappeler que chacun·e est libre de ne pas utiliser l’écriture inclusive, mais ailleurs. Loin.
accepter que devant le code (qui fait la loi), l'égalité des uns est supérieure à celle des autres.
me tenir sage face à mon écran, ne jamais exprimer ma colère, même en cas d’erreur 49.3 - democracy not found.
respecter la dignité humaine avec autant d’intelligence et de fougue qu’un algorithme de notation de la CAF.
laver chaque matin mon T-shirt de libriste-woke, et savoir réciter en verlan le manifeste de Framasoft.

¹ J’accepte qu’à travers moi, j’engage sans réserve mon association, entreprise ou institution ainsi que ma famille sur six générations. »

 

Une Égalité qui se mérite

Dans le monde numérique, le code définit que ce que l’on peut faire et ne pas faire. Celles et ceux qui financent les développements, pensent la forme que prendra le code… ces personnes ont donc le pouvoir de décider quels seront nos comportements dans le monde numérique.

4. accepter que devant le code (qui fait la loi), l’égalité des uns est supérieure à celle des autres.

C’est une simple question de mérite, il n’y a donc rien de mal à ce que certains soient plus égaux que d’autres. Nous voyons bien qu’aux plus hauts sommets de notre république l’on respecte (avec discernement) l’égalité de toustes devant la Loi, même celle de Gérald Darmanin, d’Olivier Dussopt, d’Alexis Kholer ou de Damien Abad.

dessin de gee caricaturant eric ciotti titré "traitement de faveur pour la mère d'Eric Ciotti, hébergée aux frais de la sécu pour ne pas rejoindre une chambre de CHu "minable, aux murs humides" (dixit le père d'Eric Ciotti"

 

N’oublions pas la Fraternité Sororité Adelphité

Le principe de solidarité permet de créer une communauté. N’oublions pas pour autant que cette solidarité doit s’appliquer dans une considération juste de l’autre, pour que chacune et chacun reste bien à sa place.

5. me tenir sage face à mon écran, ne jamais exprimer ma colère, même en cas d’erreur 49.3 - democracy not found.

Chez Framasoft, nous ne parlons pas d’erreur. Nous disons juste que ça n’a pas marché. Ce n’est pas pour autant que, quand ça plante il faille être frustré, ou en colère. Car la colère, ce n’est pas gentil. C’est mal. C’est extrême. C’est indigne.

Si des représentant·es de l’État utilisent nos services, nous attendons en retour un comportement exemplaire de pays qui se tient sage : ça veut dire fini les caprices tous les 49.3 heures, on arrête de jeter des LBD sur les copaines, et sur les plateaux on arrête les gros mensonges pour laisser la parole aux autres, hein. Sinon on peut se frama-fâcher tout rouge, à la fin.

 

6. respecter la dignité humaine avec autant d’intelligence et de fougue qu’un algorithme de notation de la CAF

Alors on ne peut pas vous dire exactement combien d’intelligence et de fougue ça fait, vu qu’aux dernières nouvelles les choix que la CAF a commandités pour qu’ils soient codés dans cet algorithme sont toujours opaques. Mais l’idée est là : forcer chacun·e à rester digne, et à ne pas parasiter ce qui est mis à disposition du public.

Ainsi, il tombe sous le sens que les entreprises ou institutions qui utilisent les services mis à disposition du public par Framasoft s’engagent à se battre contre ce parasitisme de l’extrême que sont les optimisations et fraudes fiscales, dont les géants du web sont les plus indignes représentants.

 

7. laver chaque matin mon T-shirt de libriste-woke, et savoir réciter en verlan le manifeste de Framasoft.

Oui. Chaque matin. Même (et surtout) les week-end de conventions.

Les symboles de la Frama-république wokistanaise sont importants, plus importants que nos individualités ou notre libre-arbitre. On n’a pas encore d’hymne Framational, mais dès qu’il y en aura un, ce sera par cœur tous les soirs avant de dormir, non mais !

Fan arts de Framasoft réalisés par l’exemplaire JC Frog

 

Un Compte d’Ouverture Utopiste d’Accomplissements Civiques pour les bons élèves

Dans le cas où il sera signalé par un ou plusieurs usagers l’infraction de tout ou partie de ces principes par le passé, il faudra mériter de pouvoir signer notre Contrat d’Engagement Framasoftien, et en faire la demande. Cette demande nécessitera la validation d’une commission pluridisciplinaire ad hoc qui statuera sur le bien-fondé et l’engagement de l’entreprise ou organisation publique envers les valeurs portées par l’association via un Compte d’Ouverture Utopiste d’Accomplissements Civiques.

Cette commission convoquera le représentant par lettre recommandée au plus tard 48 heures avant de statuer et la présence de celui-ci sera impérative, garante de l’importance accordée à la demande.

La liste des pièces à fournir, en 5 exemplaires papier plus en format électronique (uniquement des formats standards tels que définis par le Comité de l’Union Européenne sur l’Interopérabilité, sur une clef USB formatée en BTRFS) sera indiquée sur la convocation. Les commissions pluridisciplinaires se réunissent selon les moments de l’année à Dinan, Riom-es-Montagnes, Nancy, Gif-sur-Yvette, Nantes, Strasbourg ou Toulouse.

Dessin d'un Canard qui sourie en très gros plan, de manière comique, tandis que derrière lui des canards font la fête dans une kermesse champêtre

La commission du COUAC en plein travail, allégorie – Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

 

La Commission établira un Compte d’Ouverture Utopiste d’Accomplissements Civiques pour rendre son avis. La Commission pourra ainsi considérer favorablement les actions préalables suivantes de la part de l’institution et/ou de son représentant ou mandataire :

ilustration de David Revoy où un chaton fait les gros à un deuxième qui s'est plié-déguisé en théière

Erreur 418 : je suis une théière – Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Et si je ne veux pas signer ce contrat… ?

Rien ne vous y oblige.

Nous vous blocklisterons, vous et vos adresses IP sur deux générations (IPv4 et IPv6, bien entendu), mais rien ne vous y oblige.

Nous vous retirerons tout moyen d’accéder à nos logiciels, services, outils, sites web et interventions. Mais vraiment : rien ne vous y oblige.

Nous bloquerons toute possibilité pour vous de réaliser un partenariat, d’être agréé, d’être reconnu, mais encore une fois : rien ne vous y oblige.

Nous vous montrerons du doigt en vous dépeignant comme une personne irrespectueuse de notre jôli contrat social à taille unique, vous forçant ainsi à vous justifier aux yeux du grand public, mais nous insistons : rien ne vous y oblige.

 

Bref, ce contrat ne sera signé qu’avec votre consentement : vous êtes libres.

 

Ceci n’est pas (que) un 1er avril !

On rigole, on rigole. Mais si cet article vous paraît absurde, imaginez ce qu’il en est des 1,5 millions d’associations en France (dont Framasoft) à qui il est demandé de signer le Contrat d’Engagement Républicain.

Nous nous retrouvons engagé⋅es dans une période sombre où les libertés associatives sont menacées, où le ministre de l’Intérieur menace de dissolution des collectifs informels, et met la pression sur les associations et collectifs qui refusent de se tenir sages face aux crises démocratiques, sociales ou écologiques.

Sans avoir préalablement signé ce contrat, il n’est plus possible pour une association d’obtenir une subvention publique, de demander un agrément d’État ou d’accueillir des volontaires en service civique. Autant dire que les entraves sont tellement fortes que nombre d’associations ne pourraient plus fonctionner, plus exister, sans s’être courbées devant ce document.

Annoncé comme un outil de lutte contre le séparatisme, ce contrat, faussement simple, demande aux associations de s’engager sur sept points, dont cet article parodique se fait le miroir jusqu’à l’absurde. Par exemple l’engagement n°7 portant sur « le respect du drapeau tricolore, de l’hymne national, et de la devise de la République », dont il est aisé de deviner les  lectures qu’il est possible d’en faire.

Car, pour l’instant, le Contrat d’Engagement Républicain est surtout utilisé pour limiter la liberté d’expression et d’interpellation des associations et leur capacité à faire vivre le débat public. Soumis à interprétations subjectives, politiques ou arbitraires de la part de l’autorité publique, ce texte crée une insécurité juridique et financière forte pour les associations.

Grâce à vos dons, Framasoft a pu éviter de signer ce C.E.R. Cependant, depuis sa mise en place en janvier 2022, des dizaines de milliers d’autres associations l’ont signé sous la contrainte ou dans l’ignorance des risques impliqués par ce texte.

Pour vous renseigner, et pour agir, vous pouvez vous rapprocher (et adhérer) au Collectif Associations Citoyennes, qui tient à disposition une page « Mobilisation » sur le C.E.R.