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LECTURE KUSS GRIFFITHS PONTES 2016 Chaos and confusion in DSM-5 diagnosis of Internet Gaming Disorder

dimanche 19 février 2017 à 14:22

Trois psychologues de l’Université de Nottingham Trent rendent un avis sans concession sur le  Trouble du Jeu Vidéo en Ligne (Internet Gaming Disorder). KUSS, GRIFFITHS et PONTES sont des des auteurs important dans ce domaine. Daria KUSS a publié de nombreux articles sur l’addiction aux jeux vidéo ou aux réseaux sociaux. Mark GRIFFITHS fait partie des inventeurs de l’addiction aux jeux vidéo. Spécialiste du jeu d’argent excessif, il est entré dans le domaine de l’addiction aux jeux vidéo en proposant tout d’abord une addiction au flipper en utilisant les critères du jeu d’argent pathologique du DSM III-R . Il en est venu à l’idée d’une addiction aux jeux vidéo en remarquant les caractéristiques communes des machines à sous et des bornes d’arcade. Enfin, PONTES a défendu une thèse remarquable sur l’addiction à l’Internet et aux Jeux vidéo et a publié en peu de temps de nombreux articles sur ce sujet

La méthode utilisée est la revue de la littérature. Les auteurs s’appuient sur une soixantaine d’articles pour appuyer leur thèse : la définition de  l’addiction aux jeux vidéo en ligne est problématique pour des raisons cliniques et méthodologiques.    Les auteurs font assurément du bon travail en amenant des éléments convainquant de preuve  qui montrent une nouvelle fois les questions laissées dans le flou par cette notion.  La revue aurait été plus complète si les auteurs avaient donné leurs critères d’inclusion et d’exclusion car la bibliographie est en grande partie constituée par leurs articles précédents. Cela laisse l’impression que les auteurs cherchent plus à imposer leur agenda qu’a apporter des preuves factuelles de ce qu’ils avancent.

L’idée d’une addiction aux jeux vidéo est presque aussi ancienne que les jeux vidéo eux-même. Plus exactement, c’est par l’addiction que les psychologues ont construit leur objet d’étude lorsqu’ils se sont rapproché des jeux vidéo. Cependant, après quelques 30 ans de recherche, la communauté scientifique n’est arrivée a aucun résultat substantiel puisqu’il n’u a pas à ce jour de définition consensuelle de l’addiction aux jeux vidéo ni d’accord sur les symptômes relevés et leur signification. En 2013, la cinquième édition du DSM-5 a relancé la question en proposant en annexe un Trouble de l’Addiction au Jeu Vidéo en Ligne caractérisé par des comportements répétitifs et extrêmes en dépit des conséquences négatives, un contrôle diminué sur les comportement, un besoin du comportement et un plaisir lorsque le comportement est produit. Les éditeurs produisent 9 critères (préoccupation, manque, tolérance, diminution des autres intérêts, poursuite du jeu vidéo malgré les problèmes, tromperie, évasion, perte d’opportunité)  qui sont examinés par les auteurs de la présente étude.

Sur les 9 critères de l’Addiction au Jeu Vidéo sur Internet, 7 sont largement critiqués. Par exemple, le premier critère est la préoccupation excessive. Elle est évaluée avec des questions comme “Passez-vous beaucoup de temps à penser aux jeux vidéo ? Pensez-vous aux jeux vidéo même lorsque vous ne jouez pas ? Pensez-vous à vos parties futures ?” Les réponses permettent au psychologue d’évaluer jusqu’à quel point les jeux vidéo occupent les pensées de la personne. Mais ce critère de préoccupation a l’immense défaut de pathologiser l’expérience des joueurs de jeux vidéo. On peut en effet s’attendre à ce qu’une personne pense à une activité lorsqu’elle est investie. En d’autres termes, le critère de préoccupation ne permet pas de différencier l’engagement d’une personne dans un jeu vidéo d’une éventuelle addiction.

Pour les auteurs, seuls deux critères de l’Addiction au Jeu Vidéo sur Internet sont valides. Le fait de jouer aux jeux vidéo malgré les conséquences négatives de l’activité et l’utilisation du jeu vidéo a des fin d’évasion sont des critères solides de l’Addiction au Jeu Vidéo sur Internet. Tous les autres critères sont contestés pour leur manque de spécificité. Le syndrome de manque ne sont pas systématiquement documentés. Les émotions négatives peuvent être simplement une manifestation du désagrément à l’arrêt du jeu. Le critère de tolérance ne prend pas en compte que certains joueurs ne souhaitent pas arrêter de jouer quelques que soient les conséquences négatives. Le désinvestissement d’autres activités est un processus développemental normal. A différentes périodes de la vie, les personnes investissent et s’investissent différentes activités.  les jeux vidéo sont par exemple beaucoup joués dans la première partie de l’adolescence puis abandonnées au profit d’autres activités comme les sorties en groupe ou en couple. Mentir a propos des jeux vidéo en dit plus sur les représentations négatives associées aux jeux vidéo que sur une éventuelle addiction. Enfin, la mise en danger des relations intimes, d’opportunités liées au travail ou aux études n’est pas suffisament documenté. Il existe au contraire des preuves que les jeux vidéo sont une activité qui nourrissent les relations sociales et aident à construire des compétences utiles au travail et pendant les études.

En conclusion, pour les auteurs, le terme d’addiction à l’Internet est inapproprié d’abord parce que les personnes sont rarement dépendantes au médium Internet et ensuite parce que ‘l’addiction à l’Internet” ne fait pas la différence entre les différents comportements possible en ligne. Pour les auteurs, l’idée d’une addiction aux jeux vidéo n’est pas en cause. KUSS, GRIFFITHS et PONTES contestent la composante “Internet” du Trouble de l’Addiction aux Jeux Vidéo en Ligne. Ils souhaitent supprimer le mot “internet” pour prendre en compte le fait qu’il existe des addictions aux jeux vidéo hors-ligne. L’idée générale est donc de critiquer le trouble de l’Addiction du Jeu Vidéo  en Ligne pour imposer un trouble de l’Addiction aux Jeux Vidéo.

Le chaos et la confusion que les auteurs relèvent dans le Trouble de l’Addiction au Jeu Vidéo en Ligne est si grand qu’il va au-delà du souhait initial des auteurs. Comment, en effet, conserver un Trouble de l’Addiction au Jeu Vidéo lorsque 7 critères sur 9 sont problématiques, qu’il existe pas de critère de sévérité, que la durée et le moment du trouble ne sont pas pris en compte et que la comorbidité fait que l’utilisation problématique des jeux vidéo et de l’Internet est probablement le signe  d’un trouble anxieu, d’une dépression ou d’une hyperactivité ? Comment expliquer qu’alors qu’ils critiquent la notion d’une addiction aux jeux vidéo en ligne, les auteurs évoquent uniquement les MMORPG et les MOBA, c’est à dire des jeux vidéo en ligne ?

L’article donne une impression d’inachevé puisque après avoir totalement déconstruit la notion, les auteurs proposent tout de même de différencier une Addiction à l’Internet et une Addiction aux Jeux Vidéo. On se demande comment cette différence va tenir puisque l’Internet est maintenant partout. Une personne qui passe tout son temps sur Candy Crush Saga, qui n’a que ce sujet de conversation, qui pense à ses parties au travail ou lors de réunions amicales, qui retarde le moment de se coucher ou d’aller au travail pour une partie de plus, qui joue pour ne pas penser à la situation compliquée qu’il vit au travail ou dans son couple, qui recevra-t-elle un diagnostic d’un Trouble de l’Addiction à l’Internet ou d’un Trouble de l’Addiction aux Jeux Vidéo ? Candy Crush Saga a en effet, comme la plupart des casual games, une composante sociale puisque le jeu peut être connecté au compte Facebook de la personne.

Les auteurs sont plus inspirés dans leurs recommandations suivantes. Des études plus précises sont en effet souhaitables en se centrant sur les situations cliniquement problématiques, en différenciant les joueurs qui ont des problèmes de ceux qui n’en ont pas, en constituant un groupe international de recherche et un groupe de travail pluridisciplinaire sur l’Addiction du Jeu en Ligne et cherchant à aboutir à un consensus sur ce trouble.

Sur ce dernier point, il est évident que le diagnostic est une étape importante d’un traitement psychothérapeutique. Cela permet de former des plans de traitement pour les personnes qui cherchent de l’aide, tout en facilitant les échanges entre les professionnels. Parce que les jeux vidéo font partie de la vie des patients, ils sont objet de conflits internes et externes. Le fait que le jeu vidéo soit une pratique problématique pour certains, parce ils sont l’occasion de disputes avec les proches ou parce qu’ils sont un terrain pour la procrastination ne doit pas être ignoré des psychothérapeutes. Cependant,  il est maintenant largement temps d’arrêter chercher à tout prix à créer de toute pièce une addiction aux jeux vidéo, qu’ils soient en ligne ou hors ligne, car ces problèmes ne sont pas des addictions

Le temps d’écran n’est pas la bonne clé éducative

dimanche 12 février 2017 à 17:33

Le temps que les enfants passent devant les écrans est une préoccupations pour les parents et une source fréquente de conflits. Cependant, selon la dernière recherche du psychologue Christopher FERGUSON publiée dans le Psychiatric Quarterly, ces inquiétudes et ces conflits sont le plus souvent vains. En effet l’association entre le temps d’écran et des problèmes psychologiques comme la dépression ou des troubles de comportement est négligeable. De ce point de vue les pratiques éducatives fondées sur la limitation du temps d’écran pour les enfants sont infondées et peuvent donner des résultats contre productifs.

Ces résultats vont dans le sens du changement d’attitude des professionnels de l’enfance vis à vis des écrans. L’année dernière, les pédiatres américains ont abandonné la recommandation de deux heures d’écran par jour pour les enfants au regard des nouvelles données issues de la recherche.

Les recommandations sur le temps d’écrans reposaient jusqu’à présent sur des intuitions et des observations anecdotiques. L’article de Ferguson répond à une question de recherche qui était jusque là encore inexplorée : plus de temps d’écran est il lié à plus de problèmes psychologiques ?

Pour répondre à cette question, FERGUSON et son équipe se sont servis de données qui questionnaire de 2013 d’enfants de l’etat de Floride. Le questionnaire permettait d’obtenir des réponses sur les temps de sommeil, l’activité physique, les repas familiaux, des symptômes de dépression, des conduites à risque, des troubles du comportement alimentaire, l’activité sexuelle, le temps passé à jouer aux jeux vidéo et à regarder la télévision.
Les résultats de l’étude de FERGUSON montré que les enfants sont résilients jusqu’à 6 heures d’écran par jour. Lorsque des éléments négatifs sont noté, il sont faibles et concernent davantage les garçons que les filles. Le calcul statistique permet d’estimer que le temps passé devant un écran compte pour 0.49% de la variance de la délinquance, 1.7% des symptômes de dépression et 1.2% des notes. Il est sans lien avec les pratiques sexuelles risquées, l’utilisation de drogues ou encore la conduite automobile risquée. Ce résultat va a l’encontre de publications précédentes. BEULLENS avait montré un lien entre les jeux de voiture et les conduites à risque sur la route. Mais la taille de l’effet trouvée était faible ce qui veut dire faisaient partie de facteurs parmi d’autres
Les parents limitent souvent le temps d’écran parce qu’ils pensent que les écrans sont liés à des comportements problématiques. L’étude de FERGUSON montre que le temps d’écran n’est pas la bonne clé pour agir. La restriction du temps d’écran est souvent mise en place par les parents parce qu’elle est facile à mettre en place et à évaluer. Les systèmes de contrôle parental permettent de bloquer l’utilisation d’une tablette ou d’un ordinateur à des pages précises. Mais cela n’est pas une bonne manière de limiter les comportements problématiques des adolescents. Cela crée par ailleurs dans la famille des problèmes et des tensions supplémentaires. Les parents doivent alors passer beaucoup de temps à gérer ces problèmes ce qui les rend moins disponible pour traiter les difficultés qu’ils visaient initialement. Une méthode plus efficace consiste à accompagner l’adolescent dans la manière dont il utilise les écrans et à l’aider à construire les littératies qui lui permettront d’évaluer les média qui passent dans ses flux d’information, à gérer les problèmes comme le vol d’identité et les agressions en ligne.
SOURCES
Christopher J. Ferguson, Everything in Moderation: Moderate Use of Screens Unassociated with Child Behavior Problems, Psychiatric Quarterly (2017). DOI: 10.1007/s11126-016-9486-3

Beullens, K., Roe, K., & Van den Bulck, J. (2011). Excellent gamer, excellent driver? The impact of adolescents’ video game playing on driving behavior: A two-wave panel study. Accident Analysis & Prevention, 43(1), 58-65.

Beullens, K., Roe, K., & Van den Bulck, J. (2008). Video games and adolescents’ intentions to take risks in traffic. Journal of Adolescent Health, 43(1), 87-90.

[LECTURE] VIROLE (2013) La technique des jeux vidéo en psychothérapie

mardi 23 août 2016 à 15:07

Benoit VIROLE expose comment les jeux vidéo peuvent être utilisés en psychothérapie à partir d’une vingtaine d’année d’expérience. Pour lui,  “comme pour la technique classique du jeu et du dessin, l’utilisation des jeux vidéo en psychothérapie permet l’expression des fantasmes et la perlaboration des traumatismes”. Le texte traite de l’immersion dans les jeux vidéo, de la place de l’avatar et de la manière dont la situation vidéo ludique peut-être organisée par le psychothérapeute pour travailler.

La technique des jeux vidéo en psychothérapie s’ouvre par une définition du jeu vidéo : “un jeu vidéo est constitué d’images graphiques représentant des univers imaginaires donnant l’illusion d’une réalité effective” . Le cadre utilisé par Benoit VIROLE est celui de la psychothérapie psychanalytique d’enfant dont il garde les principes fondamentaux. Il diffère du cadre classique par le fait le le patient et le psychothérapeute s’immergent  conjointement dans le monde du jeu vidéo. Le patient dispose d’un ensemble de jeux vidéo qu’il choisit librement. Le thérapeute assiste au jeu de son patient en commentant ses choix, les péripéties du jeu, et ses  réactions émotionnelles.

L’immersion est définie comme “le processus mental, spécifique, par lequel un sujet attribue un gradient de réalité suffisant à un univers virtuel pour lui donner l’illusion d’être présent à ce monde.” La qualité de l’immersion dépend moins de la projection que des caractéristiques du monde présenté par le jeu vidéo. Un monde qui a sa propre vie, qui a des objets qui ont des comportements aléatoires, a tendance a susciter une forte sensation d’immersion.Dans le contexte de la psychothérapie, l’immersion nécessite de la part du psychothérapeute une attention conjointe avec son patient. Le monde extérieur est pour un temps mis en arrière plan tandis que le jeu vidéo occupe pour le patient et le thérapeute le devant de la scène. VIROLE voit dans cette situation la construction d’une “néo-réalité transitionnelle”. C’est ensuite vers la psychanalyse que VIROLE se tourne pour explorer l’économie de l’immersion. L’économie de mouvement entre le geste physique réel et l’effet virtuel observé permet un gain de plaisir qui est expliqué par la théorie de HOCHMANN sur la naissance de la pensée. La résistance que le monde réel oppose au préconceptions des actions motrices génère un sentiment d’existence par la différenciation entre le soi et le non-soi qui est vécue avec déplaisir. Le jeune enfant a alors tendance à réduire ce déplaisir par une hallucination  puis par une activité de pensée grâce au travail de métaphorisation de la mère. Cette dynamique se retrouve dans l’utilisation des jeux vidéo en psychothérapie puisque les premières satisfactions sont vite attaquées par les limites et les difficultés du jeu ou du patient. Le travail du psychothérapeute est alors de transformer avec empathie l’éprouvé du patient.

L’avatar est le second élément traité par VIROLE. Il est défini comme représentant “les capacités d’action du patient pour la réalisation d’un soi grandiose”.  Il correspond à la projection d’un soi grandiose donné à admirer à une mère. De son côté le psychothérapeute peut être en position d’alter ego, d’initiateur, de rival ou de guide. Il peut aider le patient à s’orienter dans le monde virtuel pour l’aider à dépasser ses inhibitions. A ce transfert maternel s’ajoute un transfert paternel du fait que les mondes virtuels contiennent des limites qui forcent la reconnaissance du principe de réalité. Le thérapeute est alors appelé comme guide, aide ou transmetteur d’expérience..  Dans tous les jeux vidéo, le joueur est représenté par un objet qui est souvent appelé “avatar” dans les publications. Alors que l’identification, la projection et l’image inconsciente du corps sont le plus souvent mis en avant pour expliquer la relation du joueur à son avatar, VIROLE utilise le terme d’appropriation.  Pour VIROLE, l’investissement de l’avatar dépend d’abord de ses possibilités d’action. Même si l’avatar a des fonctions psychologiques (TISSERON, 2012), il est avant tout la matérialisation des intentions d’action du joueur.

L’intentionalité est pour VIROLE une propriété importante des mondes numériques puisqu’il considère que les objets numériques activent des représentations de mouvement. Les objets numériques activent des affordances c’est à dire des actions motrices intériorisées qui sont ensuite agencées en scripts qui suscitent une tension chez le joueur tant qu’ils ne sont pas réalisés

La médiation par le jeu vidéo nécessite un partage émotionnel de l’expérience vécue dans le monde virtuel. Le thérapeute doit authentiquement jouer tout en restant curieux quant aux événements qui se déroulent sous ses yeux. VIROLE insiste sur la neutralité, la bienveillance, la présence empathique du thérapeute qui permettent au patient d’entrer réelle dans le jeu et d’effectuer des demandes inconscientes qui se traduisent par des échecs, des attaques sadiques ou des conduites obsessionnelles répétés symbolisant sa détresse infantile. Enfin, à partir de quelques exemples, VIROLE montre que l’effet thérapeutique tient au fait que l’enfant perçoit que sa demande inconsciente est perçue avec empathie par tle thérapeute qui verbalise avec tact ce qu’il a compris. L’objectif thérapeutique est le renforcement ou l’initiation d’une mentalisation des conflits et des traumatismes.

L’utilisation des jeux vidéo offrent une dimension nouvelle aux thérapies des enfants et des adolescent. L’effet thérapeutique découle de la mentalisation, de la contenance pulsionnelle, de la restauration narcissique et de l’identification projective au thérapeute. Elle met en jeu une polarité régressive centrée sur les relations d’objet et une polarité prospective centrée sur la construction narcissique de soi.

“La technique des jeux vidéo en psychothérapie” de Benoit VIROLE n’apporte pas à la discussion les éléments bibliographique qui permettent de situer l’utilisation des jeux vidéo dans le cadre de psychothérapies et plus particulièrement dans le cadre des psychothérapies psychodynamiques. Cela peut laisser le lecteur novice avec l’illusion que l’utilisation des jeux vidéo dans les psychothérapies est une nouveauté. Il n’en est rien. D’ailleurs,  la figure du psychothérapeute hante les mondes numérique puisque la première Intelligence Artificielle, Eliza, a été conçue sur le modèle d’un psychothérapeute rogérien. Les psychothérapeutes se sont  rapidement saisis de l’ordinateur et des jeux vidéo comme des médias facilitant ou rendant possible leur travail. Dans la communauté francophone, les livres de Evelyne Esther GABRIEL, de  Hélène GARREL et Daniel CALIN donnent des points de repère importants sur la manière dont les jeux vidéo ont pu être utilisés à des fins thérapeutiques

L’article de VIROLE reste cependant bienvenu. D’une part, les jeux vidéo de  2013 ne sont pratiquement plus les même que ceux de des années 2000. D’autre part, les psychothérapeutes ont maintenant un recul d’une dizaine d’années qui leur a permis d’affiner leur cadre de travail. Une mise à jour des connaissances est donc bienvenue. elle de Benoit VIROLE est d’autant plus appréciée qu’il amène à la discussion des notions qui sont peu utilisée dans les psychothérapies psychanalytiques. La notion d’affordance des objets numériques est intéressante. Il est facile de d’observer que les premiers mouvements d’un joueur dans un jeu vidéo ont pour but de s’assurer ce qu’il est possible de faire dans le monde. Le joueur vérifie ainsi ce qu’il est possible de détruire, de déplacer ou de manipuler. Le texte de VIROLE laisse penser qu’il existe une grammaire générale des jeux vidéo. Les genres de jeux vidéo regrouperaient ainsi les jeux qui ont une grammaire commune. Par exemple, dans les FPS, le joueur dispose généralement de plusieurs allures (marcher, courir, ramper, s’accroupir) et peut peut choisir entre plusieurs armes.

“La technique des jeux vidéo en psychothérapie” est un texte important pour toute personne qui s’intéresse à l’utilisation des jeux vidéo dans les psychothérapies psychodynamiques.

SOURCES

Gabriel, Evelyne Esther. Que faire avec les jeux video?. Hachette éducation, 1994.

Garrel, Hélène,  etDaniel Calin. “L’enfant à l’ordinateur.” Paris, L’Harmattan (2000).

[LECTURE] LANGE (2013) “You’re just gonna be nice”: how players engage with moral choice systems

dimanche 21 août 2016 à 09:27

Lange, Amanda.
Lange, Amanda. “‘You’re just gonna be nice’: how players engage with moral choice systems.” Journal of Games Criticism 1.1 (2014): 1-16.

Amanda LANGE est une game designer qui a contribué à la création de plusieusr jeux vidéo. Avec “You’re just gonna be nice’: how players engage with moral choice systems.” Elle montre que les joueurs privilégient les héros positifs et font dans les jeux vidéo des choix qui ne compromettent pas leur moralité. En s’appuyant sur les résultats d’un questionnaire,  (N=1067), elle dégage les motivations des joueurs à jouer du “bon” ou du “mauvais” côté. Même si les résultats doivent être interprétés avec précaution, cette recherche apporte des éléments de réflexion important sur la moralité dans les jeux vidéo.

L’article montre tout d’abord, que les dilemmes moraux se multiplient dans les jeux vidéo. Des  titres aussi différents que Mass Effects, inFamous, BioSchock, Star Wars: Knights of the Old Republic, Fallout, Fallout, Spec Ops: the Line, Fable,Mass Effect 3,  ou The Walking Dead confrontent les joueurs à des choix déchirants.

Parce que les jeux vidéo sont des systèmes de choix, il laissent souvent aux joueurs la possibilité de faire le bien ou le mal. Des destructions inutiles, la traîtrise, le refus de venir en aide à un personnage  ou des actions uniquement motivées par le profit sont généralement considérées comme mauvaises. L’étude de LANGE montre que les joueur privilégient les bons choix. Ils sont 59% à déclarer faire les bons choix moraux et seulement 5% à jouer du “mauvais” côté. 55% des joueurs affirment tenter de se comporter dans les jeux vidéo de la même façon que dans la vie réelle.

LANGE dégage plusieurs profils de joueurs. D’une façon générale, les joueurs préfèrent jouer du coté du “bien” même s’ils peuvent effectuer dans le jeu des actions qu’ils ne feraient pas dans la réalité. Parmi ceux qui rejouent un titre, nombreux sont ceux qui jouent du côté du “mal”. Il n’y a pas de différence entre les joueurs et les joueuses en ce qui concernent les choix moraux

LANGE apporte des éléments importants sur ce qui est perçu comme moralement inacceptable par les joueurs. Le meurtre d’un enfant (BioShock) ou d’un personnage considéré comme “bon” (le dragon Paarthurnax dans Skyrim) , l’utilisation de l’arme atomique (Fallout), la torture (Grand Theft Auto V) ou le meurtre de civils (Call of Duty : Modern Warfare 2) sont des limites que beaucoup refusent de franchir.

La moralité est aussi un casse-tête dans les jeux vidéo.  En effet,  rares sont les joueurs qui abandonnent un jeu à cause d’un dilemme moral peut être parce que la conscience qu’il s’agit d’un jeu reste présent à l’esprit des joueur. Dans le même temps, 71% des joueurs se sentent coupable de quelque chose qu’ils ont commis dans un jeu vidéo. D’une façon générale, les joueurs suivent une morale simple : les bonnes actions doivent être récompensées, et les mauvaises doivent être punies. Ils ont le sentiment que cette morale est largement appliquée dans les jeux. Ils apprécient peu que le jeu leur force la main en leur faisant faire des choix moralement répréhensibles.

Les joueurs cherchent parfois des stratégies pour éviter d’avoir à se compromettre moralement. Certaines de ces stratégies sont réalisées à l’intérieur du jeu vidéo. Par exemple, dans Spec Ops : The Line, le joueur peut choisir de ne pas faire usage de son arme face à une foule qui tente de le lapider. D’autres fois, le joueur amoindrit la portée de son acte en se remettant à l’esprit qu’il ne s’agit que d’un jeu.

Le résultat le plus important de la recherche de LANGE est que les joueurs n’aiment pas effectuer des actions immorales dans les jeux vidéo. Au contraire, ils aiment incarner des héros positifs dont la violence est au service du “bien”.

[LECTURE] WAWRZYNIAK (2008) Nouvelles addictions et virtualité à l’adolescence

jeudi 11 août 2016 à 07:00
Wawrzyniak, Michel.
Wawrzyniak, Michel. “Nouvelles addictions et virtualité à l’adolescence.” Perspectives Psy 47.1 (2008): 16-21.

Existe-il de nouvelles addictions liées aux espaces des technologies numériques ? Dans “Nouvelles addictions et virtualité à l’adolescence”, le psychologue et psychanalyste Michel WAWRZYNIAK donne une réponse rassurante. L’addiction au virtuel tient plus à la méconnaissance des adultes qu’à une réalité clinique. Les espaces numériques sont des espaces d’exploration et d’expression de soi que l’adolescent doit transformer avec l’aide des adulte en espace de création de sens et de limites.

WAWRZYNIAK s’appuie essentiellement sur deux auteurs dans sa réflexion. Marc VALLEUR apporte un modèle de l’addiction conçue comme une “modalité existentielle complexe” intégrant les dimensions de dépendance physiologique et de recherche de sens et de limite . Pour VALLEUR, les addictions comportement toujours une dimension ordalique, c’est à dire la mise à l’épreuve de soi.

Pour l’auteur, l’adolescence a un lien particulier avec le registre de la virtualité. Ce lien s’explique par l’existence de deux destins des images qui correspondent à deux imaginaires : la rationalité et la sensorialité qui correspondent au récit fantastique et aux récits féériques (CAILLOIS, 1966). L’adolescent peut tirer parti de cette tension pour explorer et exprimer sa singularité

A l’adolescence, le jeu du virtuel peut être une manière de refuser la nécessité d’établir des limites. Cette position de refus n’est pas nécessairement pathologique car elle aide à élargir les limites de la réalité. Le registre du virtuel apporte un nouveau type de rapport au monde en offrant des possibilités d’exploration de soi comme peuvent le faire les poètes et les romanciers

Le goût de l’adolescent pour l’expérimentation se déploie dans une offre sociale ou les nouvelles technologies numériques aiguisent ses potentialités et ses compétences.

WAWRYNIAK se montre rassurant vis à vis du risque de déréalité provoqué par le virtuel. L’isolement de l’adolescent face aux objets numérique est plus une absence à sa famille qu’une absence au monde. Les demandes d’aide  par rapport à l’Internet et aux jeux vidéo témoignent du fait que ces pratiques ne sont pas encore intégrées par les parents. Avec VALLEUR et TISSERON, il réfute l’idée d’une nouvelle dépendance aux jeux vidéo et appelle les adultes a prendre la place de “témoins vigilants” auprès des adolescents afin de les aider à ce que l’expérimentation et l’expression vécues dans les espaces virtuels puissent devenir un espace de relation avec les adultes.

Deux points ferment le texte. Le premier est le rappel que l’utilisation du diagnostic doit toujours être faite avec prudence à l’adolescence afin d’éviter de transformer des explorations en un problème effectif. Le second est un appel à construire un métapsychologie qui prend en compte la présence virtuelle