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Interview du CC Meta @LibreFlag #V

samedi 1 novembre 2014 à 08:00
J’ai été intrigué par un étrange oiseau. J’ai donc décidé de faire une interview pour en savoir plus.
CC.Méta /Cryptos Crew se défini comme un collectif citoyen. Peux-tu faire une présentation de ton mouvement ? Quel est la différence entre les deux entités ? Quand il est né, combien de membres, où sur la planète… ?
Le « nous » sera employé pour ne pas troubler le lecteur. « Je » ne suis personne sinon un représentant temporaire accompagné d’acolytes anonymes.
Le Cryptos Crew est une petite équipe internationale d’artistes, chercheurs et hacktivistes essentiellement intéressée par les signes urbains, et les architectures (physiques ou virtuelles).
La cryptographie et le code en tant que langages d’initiés sont au centre des préoccupations de certains membres bien que le graffiti et l’urban hacking occupent pour le moment une grande place dans la vie du club.
Le crew n’est pas organisé de manière formelle et nous pourrions dire qu’ils s’agit d’un fork[1] de plusieurs équipes issues de divers milieux undergrounds tel qu’Anonymous ou Telecomix.
Sa particularité est d’agir avec peu de moyens, de manière radicale dans la ville, ce n’est pas un mouvement, il peut se passer des mois sans aucun signe de vie, ni activité, comme il peut s’y trouver quelques coups d’éclats pas toujours signés d’ailleurs.
« Cryptos » compte une vingtaine de membres actifs.
Crédit : Cryptos Crew
Crédit : Cryptos Crew

Le Collectif Citoyen Métèques et Aliens (CC.META) est une sorte d’usine à fabriquer des utopies et des TAZ[2] . Concrètement, il servira aussi de portail de diffusion pour divers projets de défense des droits et libertés, la surveillance des surveillants et la réduction sans concessions de la fracture numérique dans les quartiers de seconde classe ou les campements de troisième classe.
La zone d’action est restreinte en Val-de-Loire mais un projet de ferme familiale est en cours au Tchad, des membres réfléchissent à la création d’un collectif national relatif aux bibliothèques de France, des connections se font avec les activistes U.S de l’EFF, la FSF et plusieurs mouvements sociaux états-uniens. Il s’agit encore d’un projet en gestation, nous ne pouvons divulguer le nombre de membres car ce n’est pas une association, mais un collectif de contributeurs anonymes bien souvent.

Tu arbore un logotype représentant un oiseau. Que représente-il pour toi ? Forme d’expression ? Réaction
face à la société ? Et quel utilisation dans le street-art ?

« Le monde est submergé de symboles désuets. L’humanité rêve de liberté sur terre et dans les internets. Voici son drapeau. Un oiseau,  un livre ouvert avec amour. Victoire. Ce signe n’est à personne,  il est à tous les enfants. Libre est son nom. Propagez. » Logotype du (des) mouvement(s) Cryptos Crew
« Le monde est submergé de symboles désuets. L’humanité rêve de liberté sur terre et dans les internets. Voici son drapeau. Un oiseau, un livre ouvert avec amour. Victoire. Ce signe n’est à personne, il est à tous les enfants. Libre est son nom. Propagez. » Logotype du (des) mouvement(s) Cryptos Crew

En ce qui concerne ta question sur le « Libre Flag », il s’agit d’un projet concret d’appropriation d’un symbole par et pour les masses.
C’est un projet porté (et dessiné) par des membres du Cryptos Crew rendu public sous licence libre (Creative Commons).
C’est un oiseau et un livre ouvert au partage et à la culture.
« Que tous les enfants du monde, les utopistes et les militants s’emparent de leurs pinceaux !
Une surface à libérer vous attendra toujours jusqu’à la fin des temps ! »
Nous voulions un signe fort, simple, facilement identifiable et reproductible par tous.
Des milliers de stickers seront en circulation, des affiches seront collées, des tags commenceront à apparaître ici et là, dans le monde entier.
Il s’agira pour nous, peuple éveillé, de diffuser ce futur symbole de manière poétique donc créative dans toutes les villes et les campagnes à libérer.
Le street-art ne sera qu’un outil pour diffuser les utopies et percer les murs privateurs.
Nous utiliserons indifféremment les technologies high-tech ou low-tech pour parvenir à nos fins.
De nombreuses fresques témoigneront via l’appropriation de l’espace urbain, de la lutte menée par les hacktivistes. Peintures, pancartes, graffitis, affiches, cerfs volants…l’inscription graphique du drapeau Libre ne connaîtra aucune limite.
La dissémination stratégique de ce signe vers d’autres territoires, d’autres combats partageant une volonté commune de scier les barreaux des cages du pouvoir participera à la décolonisation symbolique.
Personne ne pourra s’approprier pour lui seul, son groupe, son collectif, son association, son entreprise, son parti, sa nation, son ONG, sa coalition, ce dessin universel.
Il fait partie des biens communs.

Comme tous artiste, tu a des sources d’inspiration pour exercer ton œuvre. Que sont-ils ?
Nos sources d’inspiration sont larges… Nous ne voudrions léser personne et éviter le Name Dropping.

Le street-art est-il à la porté de tous ? Des conseils pour réaliser une œuvre dans ce domaine ?
Le Street-Art est effectivement à la portée de tous.
Commencer par dessiner des petits oiseaux sera un très bon début !
  1. « Un fork, ou embranchement, est un nouveau logiciel créé à partir du code source d’un logiciel existant. » (Wikipédia) ^
  2. Zone autonome temporaire ^

La polémique autour de wikipedia, une querelle byzantine ?

samedi 25 octobre 2014 à 12:00
Récemment, Crouzet a lancé une polémique autour d’une suppression d’un article sur la Théorie Relative de la Monnaie (TRM). Ainsi se pose tout une problématique tout autour de Wikipédia, ce qui doit être mit ou non, et les sources d’informations qui doit être utilisé. Cet article ne parlera pas de la validité de cette théorie (ni de cyclisme !), mais vraiment des enjeux qui ressort de Wikipedia.

Wikipédia, une sorte d’information voulant être exhaustive ?


Wikipédia est une source d’informations extraordinaires. On peut retrouver le nom de petits villages ruraux du fin fond de la Pologne à un article sur Victor Hugo, en passant par les jeux olympiques de 2004. Néanmoins, comme toute encyclopédie, elle est sujette à des choix éditoriaux. Ainsi, est décidé collégialement ce qui doit être mit ou non. Ainsi, le groupe de rock alternative en mandarin médiévale de Perpette-les-bananes-sur-Garonne n’aura pas sa page Wikipédia. C’est un choix éditorial. Si vous voulez un article sur vous, pourquoi pas créer un wiki spécifique ? Dans l’inconscient collectif, tout ce qui existe doit être répertorié sur cette encyclopédie. Ainsi, tout ce qui est sur Wikipédia gagne une légitimité. Au contraire, je pense qu’il faut que quelque chose soit sur légitime pour qu’il soit sur Wikipédia. Je ne pense pas que le rôle de wikipédia serait d’embraser l’entièreté de la connaissance humaine, mais au contraire de sélectionner, de synthétiser un ensemble d’informations préalablement choisi selon certains critères (ainsi, une encyclopédie sur la géographie parlera de la géographie au sens large, une encyclopédie sur la musique de musique…). Wikipédia étant généraliste, elle doit proposer un survol d’une partie des connaissances humaines.
De plus, une encyclopédie doit être synthétique et neutre. Ainsi, l’article sur Napoléon 1 er ne doit pas être une bibliographie complète, mais seulement un point d’entrée, qui sera complété par la bibliographie. Cela est autant valable pour Wikipédia que l’Universalis ou les autres encyclopédies. Une encyclopédie n’est pas un travail universitaire, ce n’est pas un outil de propagande, ce n’est pas un outil publicitaire, c’est, et je me répète, seulement un point d’entrée pour aborder un sujet !

La bibliographie, la question du en ligne et des pairs


Un grand débat fut donné sur l’incitation (c’est un euphémisme) de mettre des sources (et donc une bibliographie) papier. Bien que je ne suis pas détracteur du net (au contraire, je suis le premier à le défendre) je me pose la question de la pérennité. En effet, qui dit qu’un site va être encore là dans 10, 20, 30 ans ? Alors qu’un livre sera encore là pour des siècles, pour les sites, c’est plus dur, même si Web Archive et autres outils d’archivages en ligne tente de régler ce problème. Une encyclopédie étant être intemporel (dans la limite de l’évolution des connaissances), il est difficile de mettre des sources « périssables » sans que cela nuise au projet.
Wikipédia est un travail qui, dans la méthode et dans le but, est universitaire et scientifique. Ainsi, comme toute publication scientifique, il faut des sources. Il faut aussi une reconnaissance des pairs. Cette relecture permet d’éviter d’écrire n’importe quoi, des choses infondés d’un point de vue scientifique. Ainsi, j’éviterai de citer des travaux créationnistes ou pastaféristes pour parler de l’évolution de l’espèce humaine, je me baserai plus sur les travaux de Darwin. Une théorie, autant populaire soit-elle, peut ne avoir aucune crédibilité scientifique. Ainsi, les théories sur les races, tant développé au XIXe et XX siècle n’a plus aucune crédibilité scientifique, malgré ce que veut faire croire l’extrême droite. Ses partisans pourront dire : « c’est une conspiration, ils veulent pas reconnaître notre théorie, donc elle est révolutionnaire et que ca va contre l’ordre établi » est un argument de la victime, et n’est pas scientifique. Une expérience scientifique ne peut être validé que si elle peut être reproduite ET qu’elle donne des résultats identiques. Sinon, il n’y a pas de crédibilité. C’est sur ce postulat que marche la science, et c’est très bien, ça évite les dérives.
Certes, Internet à démocratisé la parole. Le nombre de personnes sensés disant des choses sensés augmentent. Mais le nombre de personnes idiotes disant des choses idiotes augmente aussi. Il faut donc trier le bon grain de l’ivraie, chose difficile quand on a pas les compétences dans un domaine. Les pairs servent donc à cela. Et à ma connaissance, à part revue.org, je ne connais pas beaucoup de magazines scientifiques en ligne. Peut-être que cela se démocratisera et Wikipédia pourra les citer, un jour peut-être (espérons !).
En conclusion, Wikipédia n’est pas neutre. Elle décide des informations qu’elle veut publier, et elle a le droit, comme toutes les encyclopédies. C’est même un devoir. De plus, les sources doivent être impérissables et avoir des sources reconnus par des pairs. Si vous n’êtes pas content, monter votre propre encyclopédie !

Déontologie du bloggeur, proposition

samedi 18 octobre 2014 à 10:26
De nos jours, l’art de tenir un blogue est quelque chose de courant. Il y a de moins en moins de honte à dire que « je tiens un blog ». Autrefois, parent pauvre du journaliste, c’était une forme de honte. Aujourd’hui, certains bloggeurs font un travail parfois meilleur que celui de journalistes. Certains utilisent des blogues pour transmettent leurs pensées (philosophie), diffuser une cause (logiciels libres, végétarisme, féministe…). Cependant, certains utilisent ce magnifique outil pour faire ce que j’appelle de la presse poubelle : ragots, potins, diffusion de photos de stars très dénudés… ou alors une utilisation outrancière des skyblogs.
J’ai voulu faire une sorte de charte de Munich (référence dans le journalisme), appliqué sur les blogs. Dans l’idée, c’est de promouvoir des blogs de qualité, qu’on a envie de lire. Libre aux personnes de l’appliquer ou non. Dans mon idée, c’est faire comme les labels pour la nourriture, du style Appellation d’origine contrôlé ou Label rouge. Un agriculteur peut ne pas faire du bio. Mais s’il fait du bio, il doit respecter un cahier des charges. Ainsi, j’ai voulu faire les « droits et devoirs du bloggeur », garantissant une certaine qualité de blogging. Je vois pas comme une obligation de respecter scrupuleusement mais plus comme un idéal. Comme je suis adepte de l’ouverture, j’ai mit sur Github, pour qu’on puisse modifier, car en effet, je n’ai fait qu’un brouillon qui mérite d’être amélioré. En voici mon brouillon :

Code déontologique


  1. L’auteur doit s’assurer à répondre à sa mission : informer et respecter le lecteur, doit servir l’intérêt public et le droit au savoir. Tous les articles publiés traitent de faits vérifiés par la rédaction sur le fond ; ils sont corrigés et enrichis, si nécessaire, sur la forme. Il en résultera un contenu de qualité, incitant au débat (constructif) et à la réflexion. L’auteur doit faire preuve d’une grande intégrité et honnêteté intellectuelle, afin de ne pas tomber dans le piège du sensationnel.
  2. Les contenus doivent être compréhensible par la majorité des lecteurs. Le jargon technique et les concepts difficiles à appréhender doivent être expliqué pour être compris par le plus grand nombre.
  3. L’auteur à une responsabilité vis-à-vis de la liberté d’expression. Cette liberté peut-être utilisée dans les limites de la loi. Il a la liberté de s’exprimer, mais aussi la responsabilité d’assumer les conséquences de ses propos face à la loi et les critiques qui pourraient être faites.
  4. Toute information possède un contexte. Il est du devoir de l’auteur d’en prendre compte et d’en informer ses lecteurs. L’auteur, comme le lecteur, doit pouvoir exercer son droit à l’esprit critique en connaissant dans sa globalité le contexte, afin de ne pas tomber dans le piège de la désinformation.
  5. L’auteur doit s’assurer à respecter les droits internationaux et nationaux en vigueurs, notamment concernant le respect de la vie privée. Est interdit, notamment, la violence ou l’incitation à la violence, raciste ou xénophobe, la pornographie, la pédophilie, le révisionnisme et le négationnisme. Est prohibé la publication de contenus contrevenant aux droits d’autrui ou à caractère diffamatoire, les propos injurieux, obscènes ou offensants. Est aussi interdit propagande (directe ou indirecte), prosélytisme ou dogmatisme, notamment à but idéologique, politique, professionnelle, commerciale religieuse ou sectaire. Est également interdit la contrefaçon de marques déposés et le plagiat.
  6. L’auteur ne doit pas chercher à porter atteinte à l’image d’une personne en raillant ses caractéristiques physiques ou en lui associant toute représentation dégradante.
  7. L’auteur peut émettre un jugement, même partiel et partial, en respect avec la déontologie.
  8. L’auteur doit s’assurer une indépendance des pouvoirs politiques, économiques ou tout autre forme de pouvoir en contradiction avec la volonté d’accomplir sa mission.
  9. L’auteur doit citer ces sources et des « matériaux » nécessaire à l’élaboration de l’article, hormis dans le cadre exceptionnel de la protection des sources d’information du journalisme. Ainsi, toutes sources d’information doit être vérifiable par le lecteur et permettre de vérifier son authenticité.

Publication


  1. La publication doit utiliser au maximum des logiciels libres dans des formats ouverts et standardisés.
  2. La publication doit être, si possible, sous contenu libre, par respect de la culture libre et du logiciel libre, afin de faciliter la lecture, l’étude, la modification et la diffusion.
  3. La publication doit offrir un moyen au lecteur, soit par exemple via le biais de commentaires ou de courriel, un moyen de contacter l’auteur, pour apporter des précisions, un avis…
  4. La publication doit permettre notamment un espace de « droit de réponse » selon les obligations fournit par la loi.

Qualité du contenu


  1. L’auteur doit respecter les règles issues des rectifications orthographiques françaises de la réforme de 1990.
  2. L’auteur doit respecter les règles typographiques en vigueur en France.
  3. Il sera honni toute utilisation abusive des majuscules, du langage SMS, d’une utilisation non modérée des smileys.
  4. L’auteur doit respecter, dans la limite du possible, les règles sémantiques relatif à l’utilisation du HTML5 et d’accessibilité dans le cas de publication sur le web.


Quelques citations célèbres (10)

samedi 11 octobre 2014 à 08:00
Cela faisait longtemps que je n’avais pas fait une compilation de citations. Aujourd’hui, c’est spécial géographie !

La France est diversité


« La France oppose aux diversités qui l’assiègent et la pénètrent sa force d’assimilation. Elle transforme ce qu’elle reçoit. Les contrastes s’y atténuent ; les invasions s’y éteignent. Il semble qu’il y a quelque chose en elle qui amortit les angles et adoucit les contours.[…] Le mot qui caractérise le mieux la France est variété. » (Paul Vidal de la Blache)

Définitions de Géographie


« Déceler et évaluer la nature et l’intensité des rapports et relations qui caractérisent et le conditionnent la vie des groupes humains ». (P. George)
« étude de l’organisation et du fonctionnement des territoires » (Scheibling)
« Savoir difficile parce qu’intégrateur du vertical et de l’horizontal, du naturel et du social, de l’aléatoire et du volontaire, de l’actuelle et de l’historique, et sur la seule interface dont dispose l’humanité » (Pinchemel)
« Production et organisation de l’espace » (R. Brunet)
« Science qui a pour objet l’espace des sociétés, la dimension sociale du spatial : objet e cette science, espace des sociétés (espace géographique) » (J. Levy)

Autour de la géographie


« La géographie, ça sert, d’abord, à faire la guerre. » « La Géographie, cela ne sert pas seulement à faire la guerre. »(Y. Lacoste)
« Il est bien difficile, en géographie comme en morale, de connaître le monde sans sortir de chez soi. » (Voltaire)
« Ce n’est pas le géographe qui va faire le compte des villes, des fleuves, des montagnes, des mers, des océans et des déserts. Le géographe est trop important pour flâner. Il ne quitte pas son bureau. Mais il y reçoit les explorateurs. Il les interroge, et il prend en note leurs souvenirs. Et si les souvenirs de l’un d’entre eux lui paraissent intéressants, le géographe fait faire une enquête sur la moralité de l’explorateur. […]Les géographies, dit le géographe, sont les livres les plus précieux de tous les livres. Elles ne se démodent jamais. Il est très rare qu’une montagne change de place. Il est très rare qu’un océan se vide de son eau. Nous écrivons des choses éternelles. » (St-Exupery)
« Le géographe n’est pas l’inspecteur des décors » (Brunet)
« Tout ce qui est cartographiable relève de la géographie » (Andrée Siegfried)
« Il y a les très beaux et les très laids. Quant à la peau et ses histoires de couleurs, ce sont des caprices de la géographie, rien de plus. » (Pennac)
« La géographie. Où la Seine se jetterait-elle si elle prenait sa source dans les Pyrénées ? » (Jean Tardieu)
« Frontières. En géographie politique, ligne imaginaire entre deux nations, séparant les droits imaginaires de l’une des droits imaginaires de l’autre.  » (Ambrose Bierce)
« La géographie ne sert pas seulement à faire de la géopolitique. Cela sert aussi, pour tout un chacun, à admirer davantage de beaux paysage, en comprenant mieux comment ils sont construits. » (Yves Lacoste)
« L’analyse géopolitique est aussi un moyen de conjurer des guerres ou de trouver une solution à certains conflits. » (Yves Lacoste)
«  Le tiers monde ça existe, mais ce n’est pas simple.  » (Yves Lacoste)
«  La géographie s’est développée considérablement, son accroissement relatif a été supérieur à celui de l’histoire. Nous arrivons au moment où il faut lui reconnaître les mêmes droits. Il ne faut pas oublier que si elle a des liens avec l’histoire elle en a avec d’autres sciences, avec les sciences naturelles, la géologie. » (André Allix)

Gérard Courtois, Le Monde, 13/09/2014 – avec l’aimable autorisation du Monde

mardi 7 octobre 2014 à 11:06

Gérard Courtois, Le Monde, 13/09/2014 – avec l’aimable autorisation du Monde

Crise de régime

A ces jugements solennels, autant que tactiques, il faut ajouter les plaidoyers des avocats d’une VIe République, convaincus que la Ve est obsolète, mais aussi le sentiment insistant qu’un président aussi affaibli, un gouvernement aussi chahuté et une majorité aussi perturbée ne pourront continuer leur chemin jusqu’en 2017 sans accident majeur, et vous obtenez un de ces cocktails dont raffole le pays, entre dépression et défiance, entre fronde et désenchantement.

Cette dramatisation est-elle fondée ? A première vue, nullement. En dépit des fortes turbulences actuelles, le président préside, arbitre, engage la France. Le gouvernement met la dernière main au projet de budget. Le Parlement est réuni en session extraordinaire et travaille. Bref, la France de 2014 n’est pas celle de 1940, lorsque la IIIe République s’effondra sous le choc de la défaite. Pas davantage celle de 1958, lorsque la IVe République, paralysée par le conflit algérien, céda en quelques semaines le pouvoir au général de Gaulle.

C’est précisément pour faire face à de telles crises, existentielles pour le coup, que le fondateur de la Ve République a rebâti de fond en comble les institutions, imposé la prééminence du chef de l’Etat (plus encore après la réforme de 1962 instaurant son élection au suffrage universel), placé le gouvernement sous son autorité et étroitement encadré les pouvoirs du Parlement. A ses yeux, il fallait donner au pouvoir exécutif la durée et la stabilité pour gouverner le pays, à l’abri des soubresauts parlementaires. Et, par-dessus tout, protéger le président, élu de la nation : il est irresponsable devant l’Assemblée nationale et rien ne peut le contraindre à quitter ses fonctions, sauf son choix souverain comme de Gaulle en fit la démonstration en 1969, au lendemain d’un référendum perdu.

De fait, ce bouclier institutionnel a résisté à toutes les crises, et elles n’ont pas manqué : l’épreuve algérienne jusqu’en 1962 ; la tornade de Mai 68 ; la mort du président en exercice, Georges Pompidou, en 1974 ; le divorce brutal du couple exécutif Giscard-Chirac en 1976 ; le défi de l’alternance en 1981 ; le pari des cohabitations en 1986, 1993 et 1997, sans parler des soudaines éruptions de la jeunesse ou des profondes crispations sociales de 1984 sur l’école ou de 1995 sur la protection sociale. Dans tous les cas, la Ve République s’est montrée assez résistante et assez souple pour encaisser les chocs et s’adapter aux circonstances. François Hollande peut donc remercier le général de Gaulle. Les institutions le protègent contre les secousses les plus violentes et les mises en cause les plus virulentes. Elles lui permettent, en principe, d’exercer le mandat que les Français lui ont confié pour cinq ans. A ceux qui en douteraient, il a d’ailleurs répliqué, le 5 septembre : « J’agis et j’agirai jusqu’au bout. »

Pour l’heure, rien ne l’en empêche formellement. La crise gouvernementale provoquée par les critiques intempestives de l’ex-ministre de l’économie, Arnaud Montebourg, contre la politique du gouvernement ? Elle a été réglée en deux jours par le départ et le remplacement de l’intéressé et de deux collègues solidaires. D’autres gouvernements, de gauche comme de droite, ont connu semblable péripétie sans plus de dommage. De même, le départ du gouvernement, en avril, des ministres écologistes a réduit l’assise de la majorité, mais elle n’a pas ébranlé son socle puisque les socialistes et leurs alliés radicaux de gauche disposent encore d’une majorité de 307 députés sur 577.

Reste la fronde engagée depuis plusieurs mois par trente à quarante députés socialistes contre les choix économiques du gouvernement. Sans doute celui-ci a-t-il dû batailler, négocier, voire forcer la main des récalcitrants, mais, au total, tous les textes soumis au Parlement ont été adoptés sans difficulté majeure.

D’ailleurs, comme le rappelle Jean-Claude Casanova, président de la Fondation des sciences politiques, « Raymond Barre a bien gouverné pendant cinq ans, entre 1976 et 1981, sans véritable majorité parlementaire, en butte à une guérilla incessante des gaullistes. Et Michel Rocard a fait de même entre 1988 et 1991, sans majorité absolue à l’Assemblée. » L’on sait que le pouvoir exécutif dispose de sérieux moyens pour faire rentrer dans le rang une majorité rétive : vote bloqué, ordonnances, article 49-3 de la Constitution même si, contrairement à MM. Barre ou Rocard, Manuel Valls ne peut plus faire un usage incessant de cette arme de dissuasion massive depuis la réforme constitutionnelle de 2008, qui en a limité le recours au vote du budget, de la loi de financement de la Sécurité sociale et d’un texte par session.

Jusqu’à présent, quelles que soient les supputations avant le vote de confiance demandé par le premier ministre le 16 septembre à l’Assemblée nationale, rien ne permet donc de penser que les « frondeurs » socialistes sont prêts à pousser l’indiscipline jusqu’à la rupture de la discipline majoritaire : cela supposerait soit qu’ils soient beaucoup plus nombreux à s’abstenir (de l’ordre de 80 au moins), soit, pire encore, qu’ils joignent leurs voix à celles de l’opposition.

Ce scénario catastrophe ne s’est produit qu’une seule fois, contre le premier gouvernement Pompidou en octobre 1962. Nul doute qu’il ouvrirait, aujourd’hui comme hier, une crise politique majeure : le gouvernement serait obligé de démissionner et, même s’il n’y est pas contraint, le président de la République n’aurait guère d’autre solution que de dissoudre l’Assemblée et convoquer des législatives. L’on imagine aisément que la majorité socialiste sortirait laminée d’une telle confrontation électorale. François Hollande n’aurait plus, alors, que deux solutions. Il pourrait, comme Jacques Chirac en 1997 après sa dissolution ratée, tenter de cohabiter avec un premier ministre du camp adverse (d’ailleurs bien incertain, compte tenu de l’état de désorganisation actuelle de l’UMP…). Mais, après le désaveu de sa majorité et l’échec de son camp, le chef de l’Etat serait en position d’extrême faiblesse et il pourrait être conduit à démissionner.

Bref, comme le résume Pascal Perrineau, professeur à Sciences Po Paris, « pour qu’il y ait crise de régime, il faudrait une rupture entre la majorité parlementaire et le président ». Nous n’en sommes pas là mais attention, prévient-il : « L’affaiblissement du pouvoir exécutif est impressionnant. On assiste, en direct, à un phénomène de déconstruction dont il est difficile d’imaginer ce qui peut en sortir. »« Sauf explosion populaire, estime pour sa part l’historien Jean-Noël Jeanneney, on ne voit pas la solidité des institutions menacée. » Mais il ajoute prudemment : « Pour l’instant, ça tient encore. » La formule résume bien les interrogations du moment : jusqu’à quel point le crédit et l’autorité des principaux acteurs publics peuvent-ils s’affaisser sans ébranler le système politique lui-même ? Jusqu’où la défiance ou l’exaspération du pays peuvent-elles enfler sans provoquer une crispation majeure, imprévisible ?

Professeur à Paris-I Panthéon-Sorbonne, Dominique Rousseau est beaucoup plus tranché. « On invoque toujours le bouclier institutionnel. Mais il risque de ne plus fonctionner, menacé par plusieurs crises – économique, sociale, morale et politique – qui se cumulent et ont creusé une fracture profonde entre gouvernants et gouvernés. La panne de l’ordre institutionnel, la décomposition du système politique sont les symptômes de cette crise générale de l’ordre social. » De fait, la vertu première de la Constitution de 1958 était de donner au pouvoir exécutif les moyens de gouverner efficacement le pays et d’affronter courageusement les défis de l’époque. Or chacun constate l’impuissance du pouvoir face à la crise économique, la plus grave depuis un siècle, qui mine la France.

La croissance a à peine retrouvé son niveau de 2008, avant la crise financière mondiale ; le cancer du chômage de masse ne cesse de progresser ; la dette nationale se creuse dangereusement ; et ni la droite jusqu’en 2012 ni la gauche depuis n’ont été capables de proposer aux Français des remèdes pertinents et convaincants. « Cette impuissance radicale du politique est aussi corrosive que celle de l’Etat face à la guerre, mondiale en 1940, coloniale en 1958 », juge Pascal Perrineau. Et Laurent Bouvet, professeur de sciences politiques, poursuit la comparaison : « L’événement traumatique pour la Ve République, ce n’est plus la guerre, mais la crise économique et l’ »étrange défaite » qu’elle inflige au pouvoir. »

S’y ajoute une crise morale qui menace, tout autant, le contrat de confiance entre gouvernés et gouvernants. Ainsi, selon des enquêtes constantes, les deux tiers des Français considèrent que « la plupart » des responsables politiques sont « corrompus ». Comment pourrait-il en être autrement, si l’on se rappelle l’incessante litanie des scandales politico-financiers qui, depuis plus de vingt ans, n’ont cessé d’éclabousser droite et gauche ? En dépit de plusieurs lois dites de moralisation de la vie publique, rien n’y fait. En 2013, c’était la terrible affaire Cahuzac, ce ministre du budget qui fraudait le fisc. Aujourd’hui, c’est la lamentable affaire de l’éphémère secrétaire d’Etat Thevenoud, qui évitait de payer impôts et loyers. L’UMP n’est pas en reste, avec le scandale Bygmalion et le financement aussi extravagant qu’illégal de la campagne présidentielle de M. Sarkozy en 2012. De telles malhonnêtetés, une telle irresponsabilité, individuelle ou collective, ne peuvent que saper les valeurs républicaines élémentaires, discréditer l’ensemble de la classe politique – élus et partis politiques – et nourrir la vieille antienne de l’extrême droite « Tous pourris ! ».

Depuis deux ans dans les sondages, depuis six mois dans les urnes, François Hollande paye ces échecs et ces turpitudes au prix fort : impopularité présidentielle sans précédent et déroute des socialistes aux municipales de mars et aux européennes de mai. Sauf de Gaulle en Mai 68, jamais un président de la Ve République ne s’était retrouvé dans une telle position de faiblesse. Parce que le chef de l’Etat est doté de pouvoirs considérables, il est tenu pour responsable de tout, sans être constitutionnellement responsable devant l’Assemblée (c’est le premier ministre qui l’est), ni même devant le peuple durant son mandat, sauf à recourir au référendum comme l’a fait régulièrement le général de Gaulle.

Destiné à le protéger, ce dispositif devient un piège périlleux lorsque le président est affaibli comme aujourd’hui. Pour peu qu’il donne en plus le sentiment aux Français, comme c’est le cas depuis deux ans, de ne pas habiter pleinement la fonction et de ne pas en incarner clairement la gravité, il devient la cible d’un rejet redoutable. Et quand, de surcroît, il voit comme aujourd’hui sa vie privée étalée de façon indécente sur la place publique par son ancienne compagne, ce n’est plus seulement son autorité mais la dignité même de la fonction qui est atteinte : le roi est nu. Comme le note cruellement Laurent Bouvet, « les institutions peuvent protéger la fonction présidentielle, mais pas un homme qui l’exerce sans en avoir les qualités ».

On le voit, les institutions elles-mêmes ont leur part dans l’impasse actuelle. Pour Marie-Anne Cohendet, professeur de droit constitutionnel à Paris-I Panthéon-Sorbonne et partisane d’une VIe République, « ce qui est en crise, aujourd’hui, c’est la pratique présidentialiste à l’oeuvre depuis 1958, fondée sur la soumission du Parlement et qui rompt l’équilibre nécessaire entre pouvoir, légitimité et responsabilité ». A ses yeux, rien n’interdit de sortir de cette « crise d’adolescence » de la Ve République, en revenant à la lettre même de la Constitution : un président élu au suffrage universel, mais un gouvernement qui, effectivement, « détermine et conduit la politique de la nation ». Et elle note que cela n’a pas mal fonctionné durant les périodes de cohabitation et que c’est la norme dans la moitié des vingt-huit pays de l’Union européenne.

Dominique Rousseau confirme : « Il n’y a pas d’incompatibilité entre un président élu et un système parlementaire, dès lors que le président ne gouverne pas. En revanche, il y a incompatibilité si le président gouverne ; c’est cette contradiction qu’il faut aujourd’hui dépasser. » Et il ajoute : « La Ve République était la solution en 1958. Elle est aujourd’hui devenue un problème. » Avant de jouer à se faire peur ou à faire peur en invoquant une crise de régime, les principaux responsables politiques seraient donc bien inspirés de réfléchir et débattre, sans tabou, des défauts de fabrication d’un régime en crise. Avant que la situation actuelle n’empire et ne bascule, pour le coup, dans une crise de régime.

 

« Droit constitutionnel » de Marie-Anne Cohendet(LGDJ, 2013).

« Les Grandes Crises politiques françaises 1958-2014 » « Le Monde », sous la direction de Gérard Courtois (Perrin, 1 064 p., 14,90 €).

« Le Choix de Marianne » de Pascal Perrineau (Fayard, 2012). professeur à Sciences Po Paris