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On vous a bien entubé (conclusion + PDF)

dimanche 23 décembre 2012 à 12:12

Inondations et disques durs : on vous a bien entubé – partie 8

Notre périple touche à sa fin. N’y allons pas par quatre chemins et disons les choses clairement : l’industrie a totalement profité des inondations en Thaïlande. Tandis que le pays était sous les eaux, que des centaines de personnes ont perdu la vie, les constructeurs eux, criaient au loup. Qu’on fait les moutons ? Ils se sont réfugiés en plein dans leurs gueules. Western Digital et Seagate n’ont aucun mérite dans cette histoire. Près de neuf disques sur dix provient de leurs usines, ils fixent les tarifs comme bon leur semble et détournent les chiffres à leur avantage. Les étalages sont encore scindés selon le nom des anciens constructeurs, les prix et les caractéristiques techniques ne différent aucunement d’un modèle à l’autre. La concurrence est quasiment inexistante. Pire encore, en seulement quelques semaines, on a réussi à nous faire gober que la production mondiale de disques durs était compromise. Pendant ce temps-là, on enregistrait 1100% de bénéfices et on vendait plus de disques que jamais.

Aujourd’hui, nombreux consommateurs, habitués à ces nouveaux tarifs, n’y voient que du feu et ne peuvent retracer les événements ni apporter un quelconque jugement. Puis de toute manière, qu’attendez-vous ? Vous voulez stocker vos données ? Achetez, c’est tel prix.

 

(n’hésitez pas à zoomer, l’effet foutage de gueule est garanti)

bourse

Sur votre gauche, un aperçu du cours de la bourse chez Seagate de ces deux dernières années. On discerne nettement une soudaine progression, au hasard au mois d’octobre 2011 (ligne rouge), alors que les inondations frappaient les usines du constructeur. A droite, le cours de la bourse de Western Digital avec cette fois-ci, un zoom sur l’explosion des actions durant les trois mois qui ont suivi le début de la catastrophe.

merci-inondations-signature

 


 


 

C’est l’heure des bisous

Et voilà chers lecteurs, il aura fallu 8 articles pour mettre en lumière cet entubage massif… En passant du fonctionnement basique d’un HDD, à sa conception, puis à l’historique des constructeurs, la localisation des usines des deux géants et l’excitante partie chiffre, nous en sommes ici.

Quand j’ai débuté la collecte d’informations sur mon fichier odt, j’ai rassemblé une tonne de liens, des tas de données et des illustrations à ne plus savoir quoi en faire. Je me suis pris pour un détective privé le temps de quelques semaines et je n’ai pas compté mes heures. D’ailleurs cela pose un problème car il est n’est pas envisageable de consacrer autant de temps, même de manière ponctuelle. Ne comptez pas sur les sites spécialisés pour publier ce genre d’articles, ce n’est ni intéressant (vaut mieux discuter du dernier i7) et trop risqué vis à vis de leurs partenaires. Je ne parle même pas du coté objectif. Soit on dit les choses clairement et le public adhère ou non, sinon on assiste à un ramassis de dépêches AFP, à base de copié/collé.

Retour sur l’écriture du dossier qui n’était pas toujours très encourageante. Entre les moments où on a carrément l’impression de stagner puis les interminables relectures, il faut parfois trouver la motivation. Mais je vous rassure, j’ai pris un malin plaisir à élaborer cette suite d’articles. C’est vrai, on apprend tellement de choses, autant sur les disques eux-même, qu’en géographie, en histoire des constructeurs, etc… Mais c’est également une aventure très palpitante. Lorsqu’on vous annonce que les têtes de lecture ne peuvent plus être produites dans telle usine de Thaïlande, mais que vous découvrez qu’une autre usine en Malaisie assure la majorité de la fabrication et pour terminer en beauté, que le constructeur enregistre un CA record… C’est juste magique à quel point on nous prend pour des pigeons et j’ai adoré cet enchainement de faits-résultats-preuves… J’ai l’impression d’avoir un accompli quelque chose de utile et suffisamment construit pour oser le publier.

Place au PDF, soigneusement mis en page et qui sera plus agréable à lire que le format web. Téléchargez, faites tourner, complétez, envoyez le par mail à Seagate et WD, bref…

(clic, clic sur l’image !)

couverture-dossier

Je vous dis à très bientôt. D’ici là, joyeux Noël et profitez bien de vos joujoux certifiés marketing bullshit :P .


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Les rois de l’octet-dollar

vendredi 21 décembre 2012 à 09:39

Inondations et disques durs : on vous a bien entubé – partie 7

Les inondations en Thaïlande ont indéniablement causé des dégâts et gelé une partie de la production mondiale. Cependant, les assembleurs en fin de chaîne que représentent Seagate et WD, n’ont pas été réellement touché. D’abord, contenu de leur immense capacité de production et les stocks faramineux dont ils disposaient, ils ont pu compenser les ventes et se sont largement rattrapés par la suite. La situation est hypocrite. Western Digital crie au loup et pendant ce temps là, ils empochent quelques milliards…. Les deux géants disposent d’un tel monopole que quoi qu’il arrive, ils peuvent librement fluctuer les prix. Les inondations ont peut-être apeurées les fournisseurs, d’où leurs réactions, mais la suite des événements prouve la démesure de leurs actes.

HDD-dollar

D’ailleurs n’oublions pas de mentionner le rachat de Samsung par Seagate en décembre dernier pour 1,4 milliards, preuve que tout allait pour le mieux en « pleine crise ». Puis courant 2012, Seagate enchaîne avec le rachat de Lacie pour 186 millions de dollars, une somme tout à fait modique.
Résultat des courses, l’année 2012 aura marquée un record de ventes jamais atteint et la fusion de plusieurs multinationales pour former les deux géants que nous connaissons aujourd’hui (qui ne sont pas prêt de couler).

« le disque dur reste un composant primordial sur le marché de l’informatique, ce que certains avaient un peu oublié vu le niveau qu’avaient atteint les prix. Ces événements ont changé cette perception et replacé le HDD comme un matériel de très haute technologie, fabriqué en salles blanches, qui demande savoir-faire et minutie ». Fred Milon. (via PCWorld)

Décidément monsieur Milon regorge d’arguments plus solides les uns que les autres.

Le disque dur, un composant vital

Tels les aliments de première nécessité, impossible de survivre sans disque dur. Certains diront que la comparaison est valable pour n’importe quel composant, au hasard le processeur, mais détrompez vous. Contrairement à un disque dur, un processeur ne s’use pas mais surtout, ne se remplit pas. Le disque dur est un consommable.

clochard-hdd

Le marché se départage entre deux constructeurs. Fiabilité, prix ou technologies, tout est semblable. Impossible de départager les deux compagnies. Dans ces circonstances, difficile d’affirmer que la concurrence règne de manière équitable. Le consommateur, dans l’obligation d’équiper ses ordinateurs en support de stockage, n’a d’autre choix que le modèle bleu ou rouge dont seul le logo diffère. Nous l’avons vu précédemment, même en période de crise, un disque dur de 1To à 150€, qui valait trois fois moins quelques semaines auparavant, se vend aussi bien. Demain, si la valeur du pétrole venait à doubler, qu’adviendrait-il ? Shell, BP et les autres acolytes gagneraient autant, voire plus de pétrodollars… tout comme Seagate et WD. L’industrie ne peut s’en passer. L’exemple peut paraître abusif mais rendez-vous compte de notre dépendance envers ces petits octets. Les disques durs se comptent par centaines de millions. Chacune de vos visites sur Internet sollicite plus de disques durs que vous n’en aurez dans votre vie. L’avènement du cloud et l’expansion globale des services en ligne requièrent de plus en plus d’espace disque. L’équation est simple, informatique = disque dur, du moins pour les quelques décennies à venir. Autant dire que Seagate et WD ne sont pas prêts de manquer de clientèle.


Nombre de ventes prévus en millions par année

estimations-demande-HDD

Les SSD dans tout ça ?

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Le SSD représente sans aucun doute la technologie de demain mais il est encore loin de pouvoir défier le bon vieux disque dur. Prix, capacité, pérennité ou durabilité ne sont pas comparable. Le grand public peut désormais s’offrir un petit SSD de 128Go sans se couper un bras, mais cette solution n’est pas adaptée aux besoins des data-center et autres gros consommateurs d’octets. Certes les performances des supports électroniques sont alléchantes mais elles servent surtout d’arguments marketing. Le prix des SSD baisse tranquillement et leur longévité s’accrut d’année en année, tout est une question de temps. Pour le moment, les disques durs sont intouchables.

 


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« Une catastrophe sans précédent » – suite

mercredi 19 décembre 2012 à 10:18

Inondations et disques durs : on vous a bien entubé – partie 6

 


 

« … 68, 69, 70 et 71millions de disques, ça se tient ! »

nb-disques-vendus

Pour conclure sur la partie chiffre, nous devons nous attarder sur un dernier graphique : les ventes de disques durs. Ainsi nous pourrons confronter tous les chiffres et leur donner davantage de sens. Je suppose que vous avez encore les courbes précédentes en tête et vous observerez que celle des ventes suit la même allure au détail près que… Entre Q3 et Q4 2011, Western Digital passe de 51 millions d’unités vendues à 29 millions soit environ 40% de vente en moins, mais conserve des bénéfices similaires et son CA ne chute que d’un petit 15%. L’explication est simple, le constructeur a compensé les pertes en augmentant considérablement le prix de ses disques.

entrepot

Ce n’est guère mieux pour Segate et les trimestres suivants. Prenons, le Q1 2012 qui précède les inondations et qui correspond en autre, à la montée en puissance des deux géants. Chez Seagate les ventes ont grimpé de 20% tandis que le CA augmente de 60% et que les bénéfices explosent de 1100% par rapport aux bilans pré-crise ! Il y a comme un léger WTF dans l’air. Certes, inondations il y a eu, dégâts matériels sont à déplorer et des correspondants tels que Nidec Corp souffrent, mais quand même… Peu importe les arguments mis en avant par Seagate ou Western Digital, ils ont clairement profité de la soit disant crise et ont empoché un max d’octet-dollars.

Encore perplexe ? Pourtant… même en supposant que les intermédiaires aient impacté (et ce fut le cas, il ne faut pas le nier), ils n’ont pas pu déséquilibré autant le marché au point que certains HDD dans les boutiques affichaient trois fois leurs prix orignal. Toute la chaîne s’est gavée : constructeurs comme grossistes et revendeurs.

« les demandes explosent avec le marché du Cloud. Résultat, la demande en disques de fortes capacités est dure à suivre. » Fred Milon directeur des ventes chez WD

Western Digital se plaindrait-il d’avoir du travail ?

 

Toujours pas convaincu ? Très bien. Nidec Corp comme mentionné quelques lignes plus haut, fut particulièrement pointé du doigt lors de la catastrophe. Avec 75% de la production mondiale de moteurs, il est certain qu’il a joué un rôle majeur. Mais… au 4e trimestre 2011 celui-ci a pu fournir 100 millions de moteurs au lieu de 140 millions prévus, malgré les inondations. Sur ses trois usines, deux d’entre elles sont reparties à partir du 1er décembre. Si importante soit la baisse de production, elle ne justifie en rien les chiffres évoqués précédemment. Nous ne sommes même pas dans les mêmes ordres de grandeurs.

helico WD

Insistons sur WD qui fut durement touché comme le prouve les bilans du Q4 mais pour autant, on s’aperçoit que le constructeur s’en sort très convenablement. Les trimestres suivants marquent pour lui et son concurrent un âge d’or où ils ont battu tous les records. Terminons avec deux citations. Voici ce qu’affirme le directeur des ventes de WD : « Très honnêtement, vu la situation du marché, je ne pense pas que les prix retrouveront leur niveau d’avant la crise. Aujourd’hui, les prix sont revenus à des niveaux beaucoup plus acceptables » nous signale-t-on chez WD. (via PCWorld)

Des prix « beaucoup acceptables »… et quoi d’autres comme argument fumeux ? Leurs marges augmentent de 40%, les chiffres d’affaires dépassent l’entendement, le nombre de disques vendus s’envole et les bénéfices sont au moins cinq fois plus importants sur l’ensemble de l’année. Sérieusement, c’est prendre les gens pour des cons.

Chez Seagate on nous rétorque : « Il y a environ 300 fournisseurs de pièces détachées indispensables pour la construction des disques installés dans la région, et au niveau de l’approvisionnement en composants, nous avons été touchés au même titre que WD. Sur ce plan, nous étions à égalité » (via PCWorld)

Ah, c’est pour ça les 1100% de bénéfices ! Je comprends…

 

evolution-prix-hdd

Concluons sur l’évolution du prix des disques entre le début de l’année 2011 et la fin d’année 2012. Le graphique en question se base sur le tarif d’un HDD Caviar Black de marque Western Digital de 1To. Un modèle très classique, très répandue et en vogue.

On distingue nettement une baisse progressive des prix entre janvier 2011 et la fin de l’été. La ligne en pointillée verte indique que le Caviar Black a atteint le prix de 69,99$ puis s’en suit une montée des prix totalement irrationnelle. En quelques semaines, la valeur du disque va quasiment tripler.

Plus proche de nous, au mois de novembre, soit un an après la catastrophe, on s’aperçoit que le prix est encore loin de ses origines avec une marge de 35%. Mais 35% c’est encore énorme ! Certains font la grève pour gagner 0,02% sur leur salaire… A ce rythme là, nous devrions retrouver les prix avant-inondations dans une petite dizaine d’années… le temps que tout le monde achète un SSD. Nous reviendrons sur ce dernier.

Si elle ne se relève pas dans 5, 4, 3, 0 : renvoyée

Si elle ne se relève pas dans 5, 4, 3, 0 : renvoyée

« Avant les inondations, le prix était devenu une obsession pour le marché, avec un coût du stockage qui n’avait historiquement jamais été aussi bas. Aujourd’hui nos objectifs sont différents et notre volonté d’innover est renforcée » Western Digital

Des objectifs différents, on l’a vu mais surtout ressenti. Quant à l’innovation, on préférerait qu’elle agisse sur les tarifs…

Impossible d’évoquer la vente de disques sans mentionner les contrats annuels entre les deux constructeurs et leurs partenaires privilégiés. Seagate et WD n’en disent pas plus à ce sujet mais nous pouvons imaginer qu’ils collaborent étroitement avec de grosses sociétés telles que Google ou tout individu qui consomment d’importantes quantités de données. Pourquoi pas l’armée. Bref, ces derniers peu importe leur nature, bénéficient de contrats d’approvisionnement aux montants sûrement bien négociés et qu’il faut garantir en premier lieux. Ces contrats assurent donc une rentrée d’argent certaine, sur lesquelles les constructeurs peuvent compter.

Plus d’informations : hardware.fr

 


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« Une catastrophe sans précédent »

lundi 17 décembre 2012 à 08:50

Inondations et disques durs : on vous a bien entubé – partie 5

A écouter certains, les inondations thaïlandaises ont radicalement changé le cours de l’histoire. Tous les superlatifs sont employés, « crise dévastatrice », « inondations meurtrières » ou encore « catastrophe d’ordre planétaire »… Voyons si les résultats financiers des deux groupes sont à l’image de leurs paroles.

Les chiffres, drogue douce du XXIe siècle

"C'est cool, avec les inondations on peut prendre son bain dans le salon."

« C’est cool, avec les inondations on peut prendre son bain dans le salon. »

Les trois schémas qui vont suivre, comportent sur l’axe des abscisses, les cinq derniers trimestres recouvrant ainsi la période de juin 2011 à septembre 2012. Le Q4 ne va pas tarder à s’achever ou peut-être l’est-il au moment où vous lisez ces lignes, ce qui sera sûrement l’occasion de relancer le débat ou de mettre à jour le dossier suite à la parution des bilans financiers. Quoi qu’il en soit, vu les prévisions, il n’y a guère à s’inquiéter pour les poches de Seagate et Western Digital. Nous y reviendrons après.

Avant de se lancer tête baissée dans les chiffres, notez que les premières valeurs de chaque tableau, soit le 3e trimestre 2011, correspondent à la situation avant-crise. Sachez que durant cette période, apogée du disque dur, avec des prix au Go jamais atteint, l’industrie battait son plein. Les chiffres du Q3 2011, pré-inondations, reflètent donc bien la situation « normale » des constructeurs.

CA : faites péter le champagne !

CA

La démarcation avant-après inondations est notable pour WD. Son chiffre d’affaire est en baisse mais il faut relativiser. Nous sommes loin d’un plongeon avec seulement 0,3 milliards de moins que le trimestre précédent. Rappelons que le Q4 2011 correspond au summum de la crise, soit à « une catastrophe d’ampleur mondiale dont l’industrie ne se relèvera pas avant deux ans ». Pour un événement de cette envergure, autant dire que les pertes matérielles sont tout à fait acceptables… Puis ce n’est sans parler des trimestres suivants.

Dès Q1 2012, Western Digital ressort la tête l’eau avec des chiffres insolents. A croire que les inondations ne sont déjà plus qu’un lointain souvenir… Chez Segate, c’est la fête, le constructeur est numéro 1 mondial depuis deux trimestres consécutifs (mais le plaisir ne durera pas).

seagate-finale

 


 


 


 


 


 


 


 


 

Second trimestre 2012, l’improbable se réalise, les deux concurrents enregistrent un chiffre d’affaire record en doublant les recettes pré-crise (si la définition du mot crise existe encore). WD repasse devant son concurrent avec 4,8 milliards de dollars, de quoi acheter quelques autres Samsung et Hitachi…

Le Q3 2012 marque une importante baisse mais les résultats restent largement au-dessus des bilans habituels.

Bénéfices ou les retours après blanchiment

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Les chiffres d’affaires c’est beau mais les bénéfices nets, ce que les directeurs pourront directement convertir en jets et voitures de luxes, c’est plus drôle. On remarque ainsi qu’avant la catastrophe, WD distançait Seagate de 50 millions, un gros écart qui représentait environ 60% de bénéfices supplémentaires pour situer la chose.

Q4 2011, les inondations frappent la Thaïlande, même discours « on va tous mourir, l’industrie entière est compromise… ». Malgré ça, WD, majoritairement touché conserve des bénéfices similaires et son acolyte le distance d’un modeste 400 millions, soit 6 fois plus de liquide que le trimestre précédent.

Q1 2012, Western Digital toujours « sous le choc » et qui « ne s’en remettra pas avant des mois, voire des années », voit ses bénéfices quadrupler par rapport à la situation pré-crise. Seagate continu sur sa lancée, pourquoi s’arrêter en si bon chemin…

Q2 2012 : WD est inarrêtable, Segate a encore la tête dans les nuages. Enfin, terminons avec le Q3 2012 qui décidément ne permettra pas aux CEO de se payer leurs yachts de rêve. Bon, on reste quand même entre 5 et 7 fois plus de bénéfices qu’un an auparavant donc il y a de quoi se consoler.

« Nous avons fait des efforts pour baisser nos prix, nos fournisseurs ont baissé les leurs, les grossistes et les revendeurs font de même. Il n’y a vraiment pas eu volonté de se remplir les poches » Fred Milon – Western Digital, via PCWorld

Qui oserait remettre en doute la parole de ce monsieur ?

Western Digital et Seagate, tour de table

samedi 15 décembre 2012 à 08:05

Inondations et disques durs : on vous a bien entubé – partie 4


Western Digital ou le tigre du Bengal

Au fil des années, la compagnie Western Digital s’est forgée une renommée de plus en plus solide pour parvenir aujourd’hui, au plus haut de l’échelle. Représentant un peu moins de la moitié des ventes mondiales, Western Digital semble quasi intouchable. Tel un guerrier en furie qui n’épargne aucun adversaire, la firme américaine a conquis nombreuses usines asiatiques grâce au rachat de Hitachi et peut désormais compter sur une production colossale.

Le rapport entre WD et Hitachi est primordial. Ayant débuté le rachat de la société japonaise en mars 2011, la transition s’est terminée un an plus tard, en mars 2012. Depuis cette date, toutes les anciennes usines nippones sont au service du titanesque américain. Ne vous y perdez pas, comme signalé précédemment, Western Digital a souhaité conserver le nom Hitachi, d’où la présence de disques apposés du label japonais dans le commerce à l’heure actuelle. (n’hésitez pas à zoomer sur les schémas)

carte-WD

La légende du schéma désigne clairement les deux constructeurs. Dans un graphique c’est acceptable mais si WD mentionne parfois cette bipolarité, dans d’autres cas, il n’hésite pas à faire une distinction. A part semer le désordre, ça n’aide personne. Concrètement, lorsque les inondations ont frappé, Western Digital pointait du doigt ses usines thaïlandaises sans forcement insister sur le reste de sa production, située dans d’autres pays. Maintenant, quand il est question de parler chiffre d’affaire et pourcentages, l’américain regroupe tout pour gonfler les résultats. La vraie question serait de savoir si Western Digital mélange ou non ses différentes chaînes de production. Si la réponse était négative, en plus d’être étonnant, les contraintes seraient très gênantes. Imaginez, WD produit des têtes de lecture dans telle ville de Malaisie puis une usine Hitachi située à 10km plus loin, permet de les assembler, mais c’est interdit ! Insensé… Non, le but du rachat de Hitachi consiste à profiter pleinement de toutes les usines et ainsi obtenir une plus grande souplesse.
En définitive on observe que Western Digital est loin d’être centralisé uniquement en Thaïlande. Cependant, malgré une bonne répartition sur le continent Asiatique, il faut savoir qu’au moment des inondations, l’usine d’assemblage de Bangkok constituait 60% de la production du groupe. Une dépendance très forte dont l’américain a souffert les premiers mois suivants la catastrophe. Voilà ce qui arrive quand on met tous ses œufs dans le même panier… Notons que dans ce même laps de temps, WD instaurait une nouvelle usine en Malaisie qui lui a permis de compenser la charge peu de temps après.

Seagate et le scandale du Watergate

Premier_Logo_Seagate

Le cas Seagate est particulièrement intéressant. Éternel numéro deux, il a su profiter de la crise thaïlandaise à son avantage et ainsi dépasser l’immense WD. Hélas, le succès ne fut qu’éphémère. Seulement quelques mois après la fin des inondations, le géant venu des fins fonds de l’ouest contrôlait de nouveau les plaines arides que représente le marché mondial.

Au fil des années, Seagate a su réaliser des choix stratégiques comme le rachat de Maxtor puis en décembre dernier, celui de la filiale HDD de Samsung. Notez que ce rachat est intervenu en pleine pénurie et que le montant de la transaction s’est élevé à 1,4 milliards de dollars, soit un tiers du CA de la compagnie. A priori, nous n’avons pas tous la même notion de crise…

Petit tour d’horizon sur les usines de la firme.

carte-seagate

Le nombre d’usines parait tout de suite moins impressionnant que Western Digital mais comme vous le savez, l’habit ne fait pas le moine. Au lieu de scinder son industrie en une multitude de petites cases, la carte laisse sous-entendre que Seagate compte sur quelques et importantes usines. Exemple avec celle de Springtown en Irlande où 75% des têtes de lecture du constructeur sont produites. Usinenouvelle.com et le diaporama n°4 du reportage de Presence-PC, confirment que les têtes de lecture, une fois produites en Irlande et dans le Minnesota, sont acheminées en Thaïlande tout comme les têtes d’écriture en provenance de Malaisie. Les sites de Korat et Teparuk assemblent les têtes sur des bras (HSA) puis l’assemblage final a lieu en Chine.

La dépendance vis à vis de la Thaïlande est minime comparée à WD et les revues de presse ne l’ont pas nié. Les inondations ont eu très peu d’impact pour Seagate de manière directe, cependant d’autres acteurs de la régions ou des fournisseurs en matériel, ont rencontré des problèmes. La compagnie américaine a pointé du doigt ces derniers, notamment Nidec Corp basé en Thaïlande qui fournit 75% des moteurs de disques durs dans le monde. Seagate a d’ailleurs peut-être trop exagéré la situation de Nidec Corp car les bilans financiers que nous verrons par la suite, démontrent que le californien s’en est largement sorti.

Remarque : si vous comparez la carte des deux constructeurs, vous remarquerez que la catégorie de production « bras pour têtes de lecture/écriture », est uniquement présente chez Seagate. En effet, en couplant plusieurs données j’ai obtenu certaines informations pour Seagate et d’autres pour WD. Pour ce dernier par exemple, je me suis basé sur un diagramme fourni par le service presse de la compagnie qui manifestement, ne détaille pas tout. J’ai tout de même préféré suivre ces informations officielles pour éviter les erreurs. De plus, pour Seagate, l’histoire ne dit pas ce que sont devenus les anciennes usines de Samsung. Je me suis basé sur une carte mise à disposition sur leur site puis j’ai déterminé à l’aide de plusieurs sources, le type de production. Après plusieurs heures de recherches, il faut savoir dire stop et conserver telles données. Le but de ces cartes étant avant tout de fournir un ordre d’idée sur la capacité et la localisation des usines des deux géants.

Une petite pensée pour Toshiba

toshiba-logo

Sa faible implication dans les inondations et sa mince production nous amènes à négliger sa présence. Encore très jeune, le japonais a beau détenir « seulement » 13% des ventes mondiales, sa situation pourrait largement évoluer dans le futur. Les deux géants sont également passés par le stade d’acteur de second plan avant de devenir des stars. Sans trop s’attarder sur Toshiba, sachez qu’une partie de sa production de plateaux est assurée par Showa Denko, puis les têtes de lectures par TDK. Cette collaboration japonaise permet au pays du soleil levant de subsister dans l’industrie du disque dur et pourquoi pas, de rebondir au moment opportun…

La Thaïlande, berceau de l’industrialisation

Il était primordial que nous nous attardions sur la fabrication d’un disque dur afin d’obtenir une vision d’ensemble : les principes de fonctionnement, la provenance des composants, les lieux d’assemblage, les pays concernés et l’ensemble de cette mécanique.

WD-inondations

Comme nous avons pu le voir précédemment, la répartition des usines est assez chaotique. L’une d’entre elle équivaut à la moitié de la production, tandis que d’autres sont regroupées dans un seul pays ou au contraire, nous découvrons de petits blocs réparties à plusieurs milliers kilomètres les uns des autres. Si cette fois les inondations ont touché la Thaïlande et l’industrie locale, d’autres événements pourraient mettre en péril d’autres maillons de la chaîne.

La concentration des usines d’assemblage en Asie peut poser problème comme nous avons pu le constater. Lorsque de tels mastodontes viennent à s’effondrer, les conséquences sont lourdes. C’est ce qui s’est produit en Thaïlande, immense usine qui représentait à elle seule 40% de la production mondiale de disques durs il y a un an. S’en est suivi une série d’événements pour les moins intriguant : soudaine hausse des prix, rachats d’entreprises concurrentes, bilans provisionnels médiocres puis records de ventes…

Il est temps de passer aux chiffres. Ça va chauffer.

Illustration de l’article par ianduffy


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