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source: S.I.Lex

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Quel cadre juridique pour la Science Ouverte ? Un aperçu des évolutions récentes.

vendredi 23 novembre 2018 à 09:02

Le mois dernier, j’ai été invité à l’université d’Angers dans le cadre de l’Open Access Week pour une intervention à propos du cadre juridique de la Science Ouverte. Le terme est revenu en force depuis la publication en juillet dernier du Plan National pour la Science Ouverte, contenant des mesures importantes qui prolongent et renforcent les premiers jalons posés en 2016 par la loi République numérique.

Voici-ci dessous la captation de l’intervention (les diapositives sont récupérables ici).

Cliquez sur l’image pour voir la vidéo

 

En 2016, après l’entrée en vigueur de la loi République, j’avais déjà produit plusieurs synthèses à propos des répercussions du texte 1) sur l’Open Access, 2) sur le Text and Data Mining et 3) sur le statut des données de recherche.

Par rapport à cette date, on note plusieurs évolutions intéressantes.

Tout d’abord, nous avons obtenu plusieurs clarifications par rapport aux points qui restaient encore flous dans la loi et rendaient son interprétation incertaine :

Un Guide d’application de la loi a été publié en mai par BSN et endossé par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Il donne des directives claires sur des points encore discutés à propos de l’article 30, instaurant un droit d’exploitation secondaire ouvert aux auteurs d’écrits scientifiques pour en faciliter le dépôt en Open Access. Ces clarifications portent notamment sur la rétroactivité du texte et l’opposabilité aux éditeurs étrangers.

Un autre guide a été publié en avril par la BSN avec le soutien du Ministère à propos de la réutilisation des données de recherche et de l’articulation avec le principe d’ouverture par défaut mis en place par la Loi République Numérique. Ce texte confirme bien que les données de recherche sont incluses en principe dans l’obligation d’Open Data pesant désormais sur toutes les administrations. Ce n’est qu’à titre exceptionnel, lorsque des exceptions sont applicables (protection de données personnelles, droits de propriété intellectuelle appartenant à des tiers, secret commercial ou administratif) qu’on peut garder des données de recherche confidentielles et s’opposer à leur libre réutilisation.

Par ailleurs, le Plan National pour la Science Ouverte a impulsé un nouvelle dynamique, qui ne modifie pas ce cadre juridique issu de la Loi République numérique, mais va tout de même sensiblement changer la manière dont il est appliqué :

On notera que ces orientations politiques ont été immédiatement suivies d’effets concrets :

Au final, l’année 2018 aura été celle d’un véritable saut qualitatif, car le sens de la loi République Numérique est devenu plus clair et son effectivité est désormais mieux assurée, grâce à des obligations sanctionnées financièrement. Comme je l’ai dit lors de mon intervention à Angers, la Science Ouverte sort de l’ère des « bonnes volontés » pour entrer dans celle d’une politique publique d’intérêt général assumée.

Je termine en signalant une autre ressource utile pour appréhender le cadre juridique de la réutilisation des données de recherche. Un Guide de bonnes pratiques juridiques et éthiques relatif à la diffusion des données de recherche en SHS a été publié par les Presses Universitaires de Provence. Il s’agit d’un projet de longue haleine initiée depuis 2011, mais qui a pu être mené à bien grâce à la dévotion et à la persévérance de ses coordinatrices (Véronique Ginouvès et Isabelle Gras, merci à elles !).

J’ai eu la chance de faire partie du Comité scientifique de l’ouvrage qui présente la particularité de ne pas comporter uniquement des analyses juridiques, mais d’illustrer par des retours d’expérience concrets la question de la diffusion des données de recherche. Ces apports montrent que la dimension éthique joue aussi en la matière un rôle important à prendre en compte, notamment dans le champ des SHS, où c’est avant tout sur l’humain que les chercheurs travaillent.

J’ai produit une contribution dans ce livre intitulée « La réutilisation des données de la recherche après la loi pour une République numérique« , qui m’a permis de faire un tour aussi complet que possible sur la question. Le texte est disponible en Libre Accès sur HAL.

Car ce projet a aussi eu l’élégance de mettre la forme en cohérence avec le fond et les auteurs ont été autorisés à diffuser immédiatement leurs textes en Libre Accès et sous licence CC-BY. L’ouvrage complet sera par ailleurs disponible en Open Access sur la plateforme OpenEdition Books au début de l’année 2019.

En plus du livre, le projet a donné lieu à la publication d’un blog sur lequel la juriste Anne-Laure Stérin a produit plusieurs dizaines de billets traitant sous un angle pratique un point précis relatif à la recherche en SHS. C’est une véritable mine d’or que je vous recommande vivement de consulter !