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Réduire le temps d’écran est la solution la plus facile

mercredi 21 novembre 2018 à 06:00

Réduire le temps d’écran est la solution la plus facile, mais ce n’est pas nécessairement la meilleure.

Beaucoup de parents luttent avec leurs enfants autour de l’utilisation des média numérique. Les jeux vidéo, les réseaux sociaux et le streaming de vidéo et de musique occupent une grande partie du temps libre des adolescents. Les parents s’en inquiètent souvent, car ils pensent que ce temps pourrait être plus utile à leurs enfants s’il était alloué à des activités de plein air.

Les écrans empoisonnent alors l’ambiance familiale. Des disputes éclatent à propos de leurs utilisation. Les parents ont tendance a restreindre leur accès, ce qui amène les enfants à réagir par la frustration ou la colère ou un mélange des deux. “Est ce que je peux utiliser l’ordinateur” est la première phrase que le parent entend lorsqu’il rentre du travail. Lorsque l’enfant n’est pas devant son jeu vidéo préféré, il parle de son jeu vidéo préféré ou se plaint de ne pas être devant son jeu vidéo préféré.

Intervenir uniquement sur le temps d’écran est une cause perdue. D’abord parce que les écrans sont maintenant profondémeent intégrés aux divertissements, à la vie sociale à la vie scolaire des enfants. Du point de vue éducatif, c’est aussi un mauvais calcul.  En effet, l’enfant n’apprend rien d’autre qu’il est sans pouvoir sur cette question ce qui l’amène à réagir différemment selon son caractère. Certains se rebellent contre ce qu’ils jugent être une injustice. Mensonges, dissimulations et conflits sont alors sur la route. D’autre acceptent la limitation, soit parce qu’ils la jugent juste ou nécessaire, soit parce qu’ils intériorisent le sentiment d’impuissance. Enfin, il arrive que les enfants désinvestissement tout simplement la question en trouvant à s’occuper à autre chose.

Si la limitation du temps d’écran a un objectif pédagogique, on voit bien qu’il est manqué. En effet dans le meilleur des cas, l’enfant limite son temps d’écran, mais il le fait au mieux dans une fausse adaptation. Il n’apprend pas lui-même a réguler un comportement mais délègue cette régulation à une autorité extérieure.

Si le but des parents est d’aider leur enfant a réguler leurs comportements, alors une attitude plus souple est souhaitable. Les parents et l’enfant doivent travailler en équipes, car la tâche demandée a l’enfant est difficile. C’est en effet un des challenges du développement que d’arriver à s’autoréguler. Les parents et l’enfant ont déjà connu ces marches développementales lors de la régulation du sommeil, Lorsque l’enfant à maîtriser la marche, il a du apprendre à s’éloigner des parents mais sans rompre le contact avec eux. Puis, il a appris à réguler ses prises de parole. À l’école, il a appris l’alternance travail jeu. Avec les écrans, le même travail est demandé.

Les jeux vidéo sont des objets complexes. Les parents ne doivent pas s’arrêter aux problèmes qu’ils notent immédiatement. Le fait de voir son enfant être de très mauvaise humeur parce qu’on lui a demandé d’arrêter sa partie de jeu vidéo ne doit pas masquer le fait que ce temps de jeu lui est aussi utile sur d’autres plans de son développement. Les jeux vidéo aident l’enfant à réguler son humeur, à avoir des copains, à développer des compétences cognitives.

Une recherche conduite par Andrew Przybylski et trouve un lien faible entre le bien-être et le temps passé devant les écrans.  Cependant, en utilisant le même set de données Jean Twenge et Keith Campbell arrivent des conclusions opposées : le temps passé devant les écrans est corrélé négativement avec le bien-être. Concrètement, cela veut dire que plus les adolescents passent du temps devant les écrans, moins ils sont bien dans leur peau. Les utilisateurs fréquents ont aussi tendance à être moins curieux, a avoir moins de contrôle et moins de stabilité émotionnelle que les autres enfants.

La recherche apporte là, comme souvent à propos des écrans, des résultats contradictoires; La bonne nouvelle, c’est que cela remet les questions d’éducation dans les mains des personnes consacrées. Après tout, ce sont les parents qui éduquent les enfants, pas l’académie des sciences. Aujourd’hui comme hier, avec ou sans écrans, les enfants s’élèvent de la même façon : par l’exemple, avec de la bienveillance et du bon sens.

Les enfants grandissent en intériorisant les comportements qu’ils observent chez leurs parents. Ces comportements intériorisés leur servent de modèles pour leurs propres actions. Parfois, le modèle parental intériorisé est critiqué – l’enfant essaie alors de ne pas faire comme son parent – mais la plupart du temps, l’influence des parents se traduit par le fait que les enfants tentent de les imiter. Il est difficile de demander a un enfant de faire ce que l’on ne fait pas soi-même. Pourquoi un enfant apprendrait à se réguler s’il a sous les yeux l’exemple d’un parent qui ne sait pas ne pas répondre immédiatement à un message ?

La bienveillance est nécessaire, car l’enfant échouera nécessairement. Pour les parents, c’est parfois une source de frustration, car il doit accepter le fait que son enfant n’est pas l’enfant merveilleux et parfait qu’il a en tête. Il échoue à des taches qui semblent simples, désobéit ou se montre ouvertement opposant. Ces échecs sont normaux. Ils font partie du processus du développement. Ils doivent être tolérés et corrigés avec bienveillance.

Le bon sens permet de garder en tête que l’objectif n’est pas l’obéissance de l’enfant, mais le fait qu’il puisse passer un cap développemental en réussissant à s’auto-réguler. Il vaut mieux un enfant qui tâtonne en jouant parfois trop qu’un enfant qui accepte sans réflexion les limitations qui lui sont imposées. Enfin, le bon sens permet de hiérarchiser les choses. Limiter le temps d’écran pour limiter est contre-productif. Il est certes pénible pour un parent d’avoir sous les yeux quelqu’un qui passe du bon temps pendant qu’il a 1001 choses à faire après une journée de travail (pour lesquelles il ne sera sans doute pas remercié) mais ce n’est pas une raison pour gâcher le plaisir des autres. Pourquoi limiter le temps d’écran d’un enfant qui travaille bien, qui dort bien, qui joue bien et qui a des amis ? Si ces activités ne soulèvent pas d’inquiétude, alors le temps pris à jouer, à surfer ou a streamer ne devrait pas non plus poser problème

SOURCES

Twenge, J. M., & Campbell, W. K. (2018). Associations between screen time and lower psychological well-being among children and adolescents: Evidence from a population-based study. Preventive medicine reports.

Przybylski, A. K., & Weinstein, N. (2017). A large-scale test of the goldilocks hypothesis: quantifying the relations between digital-screen use and the mental well-being of adolescents. Psychological science, 28(2), 204-215.