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Les écrans ne sont pas la cause de l’autisme (virtuel)

mercredi 14 novembre 2018 à 08:47

Récemment, en France, des deux médecins de PMI, les docteurs Isabelle Terrasse et Anne-Lise Ducanda, ont alerté les parents, les professionnels sur les dangers graves que représenteraient les écrans pour les enfants de zéro à quatre ans.

 

Ces médecins constatent que les enfants en grande difficulté passent plusieurs heures par jour devant ces écrans ce qui nuit à leur développement parce que les enfants ne peuvent pas faire les connexions cérébrales que les jeux avec des objets tangibles  leur permettraient de faire. Les écrans fascinent les enfants, les isolent des communications avec leur entourage et contribuent à former des troubles qui “évoquent” l’autisme. Ce n’est pas la première fois que cette alarme est lancée. En Roumanie, un médecin a évoqué un “autisme virtuel” pour décrire des troubles du développement présent chez des jeunes enfants qui étaient laissés seuls devant des écrans plusieurs heures par jours. Comme dans la description donnée par les docteurs Isabelle Terrasse et Anne-Lise Ducanda, ces troubles sont réversibles car ils disparaissent dès que les écrans sont supprimés.

 

Parce que les cliniciens n’arrivaient pas à distinguer suffisamment des troubles comme l’autisme, le syndrome de Rett,ou le syndrome d’Asperger, le DSM 5 a créé une catégorie de troubles appelée Trouble du Spectre Autistique (TSA) caractérisée par A) un déficit persistant de la communication et des interactions sociales et B) des comportements et des intérêts réduits ou répétitifs Le TSA est classé dans les troubles neurodéveloppementaux c’est-à-dire des troubles qui se manifestent pendant la petite enfance et qui sont caractérisés par des atteintes cognitives, sensori motrices et comportementales.

 

Les écrans ne causent pas de trouble de développement. Il est souvent cité le fait que les enfants qui ont un retard de langage en maternel  sont aussi ceux qui sont souvent devant la télévision mais les études pointent le fait que le statut socio-économique a un poids plus important que la télévision. Les écrans ne causent pas non plus l’autisme. Le consensus actuel est que la cause de l’autisme est principalement génétique. Cela signifie que l’autisme est provoqué par une défectuosité génétique qui se manifeste par des troubles de la communication et des interactions sociales et des stéréotypies qui vont être plus ou moins bien compensés par l’environnement.

Enfin, les écrans ne causent pas un autisme “autisme virtuel”. D’abord parce que cet “autisme virtuel” est a ce jour une pure invention de quelques professionnels de l’enfance. Par ailleurs, la relation entre l’utilisation d’écrans et un quelconque trouble du développement n’a jamais été prouvée.

En ce qui concerne les  observations des docteurs Isabelle Terrasse et Anne-Lise Ducanda, il faut rappeler que l’Essonne n’est pas le monde. Autrement dit, il est possible que leurs observation fassent l’objet d’un biais de sélection. Das ce cas, les quelques cas décrits ne sont pas représentatifs de la population générale ce qui rend impossible tout généralisation

Ensuite, l’observation de deux événements successifs dans le temps ne signifie pas que l’un est la cause de l’’autre. Beaucoup d’éléments expliquant les retards de développement : des défectuosité génétiques ou biologiques, la maltraitance dont l’enfant est l’objet, la maltraitance dont la famille de l’enfant est l’objet , trop ou trop peu d’interactions peuvent conduire a un développement s’éloignant de la normale.

Enfin, il faut prendre en compte que les troubles décrits dans la vidéo YouTube ne sont pas spécifiques à l’autisme. On peut par exemple reconnaître dans les descriptions qui sont données le trouble oppositionnel. Pourtant, il n’est pas question d’un “trouble oppositionnel virtuel” Pour toutes ces raisons, faire un lien direct entre un trouble du développement comme l’autisme et les écrans est au mieux faire preuve de faibles compétences diagnostiques.

Il est intéressant de constater que l’American Pediatrics Association qui donne le “la” aux recommandations qui sont faites à propos des écrans pour les enfants a assoupli sa position en 2015. L’APA fait preuve de sagesse et de réalisme abaissant d’un an l’embargo sur les écrans à partir des résultats de la recherche qui montrent que dans certaines conditions les écrans sont une médiation intéressante et positive. Par exemple, une revue de la littérature sur les jeux sérieux développés pour les enfants autistes montre un effet facilitateur sur l’expression des émotions et la communication mais aussi des enfermements dans des routines répétitives. Cette étude, prise parmi d’autres, montre que toute approche centrée sur le média donne un point de vue partiel qui peut conduire a de graves erreurs d’appréciation.

 

Les écrans ne sont pas en soi néfastes mais leur utilisation peut avoir des conséquences positives ou négatives. La communauté des aidants utilise depuis plusieurs années les écrans pour favoriser la prise de conscience autour de l’autisme ou la communication des personnes autistes. Par exemple, le personnage Julia dans Sesame Street est particulière intéressante pour les enfants autistes.  Selon une étude menée à la Georgetown University, Julia est perçue positivement par les parents parce qu’il aide à mieux comprendre et à accepter les enfants autistes. En France, la Fondation Orange très impliqué dans l’autisme a aidé au financement  de l’application TSARA destinée à sensibiliser l’accompagnement des personnes avec autisme. Certaines applications ne sont pas développées pour promouvoir des connaissances sur l’autisme mais pour aider au développement de compétences spécifiques chez les enfants autistes ou pour faciliter la communication avec leur entourage. C’est le cas par exemple de Hopster qui est initialement une application pour les enfants de 2 à 7 ans destinée a soutenir leurs apprentissages à partir de leurs émissions préférées. Hopster a intégré dans son application des zones qui répondent aux besoins spécifique des enfants autisme en leur apportant des challenges qui soutiennent leur développement moteur et cognitif ou des espaces pour se relaxer.

 

Même si ces applications sont intéressantes, leur développement et l’évaluation du service rendu de ces applications est compliqué du fait de la diversité du monde de ’l’autisme.  Mais cela reste un domaine de recherche passionnant et prometteur parce qu’il aide à mieux comprendre les besoins spécifiques des personnes autistes

 

Les écrans ne sont en aucun cas une cause du développement de l’autisme ou d’un trouble quelconque du développement de l’enfant. L’autisme virtuel est une infox médicale basée sur une analogie fragile, une définition vague, la confusion corrélation causalité et l’exploitation des peurs du public par quelques experts. On a ainsi la formule d’une panique entretenue par quelques entrepreneur moraux basée la vision fausse des écrans comme des objets techniques dotés d’une puissance néfaste sur le développement de tous les enfants.