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Neutralité du Net : La France fait le jeu des opérateurs télécoms

lundi 1 décembre 2014 à 13:59

Paris, 1er décembre 2014 — Sept mois après le vote historique du Parlement européen au sujet de la neutralité du Net, le Conseil de l'Union européenne pourrait bientôt enterrer ce principe. Alors que son inscription dans la loi française pourrait être débattue au cours des prochaines semaines, il est grand temps que le gouvernement sorte de l'ambiguïté et soutienne une défense sans compromis de la neutralité du Net auprès de ses partenaires européens. Or, à Bruxelles, les autorités françaises semblent alignées sur la position des opérateurs télécoms.

Procédure législative européenne
La procédure législative européenne

Le 27 novembre, près de sept mois après le vote historique de leurs prédécesseurs pour une vraie protection de la neutralité du Net, les eurodéputés élus en mai dernier ont adopté une résolution réaffirmant cette position1.

Dans le même temps, le Conseil de l'Union européenne – qui en tant que co-législateur européen est désormais saisi de ce dossier législatif – a quant à lui repoussé sa prise de décision sur le sujet, faute d'accord sur le fond entre les États membres qui y siègent. Alors que la présidence italienne du Conseil semblait favorable à la neutralité du Net il y a quelques mois, sa proposition de texte récemment débattue cherche à détricoter les définitions protectrices de la Neutralité du Net adoptées par le Parlement. Elle supprime les garanties d'application effective des droits des citoyens, puisqu'elle permet une priorisation des « services spécialisés » conforme aux demandes des lobbies des télécoms, qui souhaitent pouvoir faire alliance avec les gros services en lignes (comme Google ou Netflix) en leur vendant un accès priorisé à leurs abonnés. Face aux divergences de positions au sein du Conseil, les États ont repoussé à plus tard tout accord sur le texte, laissant craindre un abandon pur et simple du futur règlement, et le maintien d'un dangereux statu quo.

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C'est dans ce contexte que Axelle Lemaire a annoncé2 que le projet de loi « numérique », prévu pour le premier trimestre 2015, contiendrait un volet sur la neutralité du Net, alors que cette option semblait avoir été écartée3. Mais la position défendue par la France lors du vote au Parlement européen d'avril dernier et les récents débats au Conseil européen soulève de graves inquiétudes. De plus, l'apparition dans le discours de la Secrétaire d'État chargée du Numérique d'éléments de langage habituellement portés par les opérateurs4, laisse craindre que ce projet de loi soit davantage orienté vers la protection des intérêts des opérateurs plutôt que de ceux des citoyens.

À cet égard, les positions sur la neutralité du Net exprimées par le récent rapport du Conseil d'État sont également source d'inquiétudes : elles semblent elles aussi conforter les affirmations infondées des opérateurs selon lesquelles il serait nécessaire de porter atteinte à la neutralité pour encourager l'investissement.

« Il est plus que temps pour les pouvoirs publics français de clarifier leur position au sujet de la neutralité du Net, tant au niveau européen qu'au niveau national à l'approche du projet de loi annoncé sur le "numérique". L'importante mobilisation citoyenne du printemps dernier et le vote historique des eurodéputés en faveur d'une vraie protection d'un Internet libre ne peuvent être balayées d'un revers de la main par le gouvernement français. En tant que ministres en charge du dossier, Axelle Lemaire et Emmanuel Macron doivent mettre fin aux atermoiements pour prendre clairement parti en faveur de la neutralité du Net, en se démarquant des dangereuses positions défendues par les grands opérateurs télécoms. » déclare Félix Tréguer, membre fondateur de La Quadrature du Net.