Les gens qui ecoutent ou font de la musique sont des contrefacteurs
dimanche 4 août 2013 à 21:34Ecouter ou interpréter une œuvre sonore avec ou sans paroles de telle sorte que des tiers l'entendent sans l'accord des ayants-droits constitue une contrefaçon.
Faire entendre une œuvre sonore à un nombre indéterminée de personnes est juridiquement une « communication au public », donc une « représentation » :
Article L 122-2 du Code de la Propriété Intellectuelle (CPI) :
“La représentation consiste dans la communication de l’œuvre au public par un procédé quelconque, et notamment :
1° Par récitation publique, exécution lyrique, représentation dramatique, présentation publique, projection publique et transmission dans un lieu public de l’œuvre télédiffusée ; […]
La représentation d'une œuvre sonore (avec ou sans paroles) couverte par le droit d'auteur nécessite l'accord des différents titulaires de droits sur cette œuvre (compositeur, parolier, artiste-interprète, producteur du phonogramme). En l'absence d'autorisation préalable, cette diffusion est illicite nous dit l’article L 122-4 du CPI :
Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.
Il s'agit d'une contrefaçon définie par l’article L 335-3 du CPI :
Est […] un délit de contrefaçon tout reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur, tels qu’ils sont définis et réglementés par la loi.
En l'absence de l'accord des différents ayants droit, constitue donc une contrefaçon le fait de (liste non exhaustive) :
-
Chanter sous la douche (ou ailleurs chez vous…) une œuvre couvertes par le droit d'auteur si des tiers (autres que les « proches » ou « intimes » qui composent votre « cercle de famille » voire plus bas) sont susceptibles de l'entendre. Veillez à bien fermer vos fenêtres quand vous faites des vocalises
-
Diffuser de la musique chez vous à un volume si élevé que vos voisins pourraient l'entendre. (Même remarque pour les fenêtres que ci-dessus).
-
Ecouter de la musique couverte par le droit d'auteur en public via des hauts-parleurs (ou des enceintes, des bafles, etc.) dans la rue, dans un parc, sur la plage, en forêt dès lors que des tiers (passants, badauds, promeneurs,…) sont susceptibles de l'entendre.
-
Ecouter « à fond » de la musique couverte par le droit d'auteur via des écouteurs (casques, intra-auriculaires…) en public si le volume est si élevé que le son est audible par des tiers. Une telle pratique n'est pas uniquement dangereuse pour votre santé, il s'agit d'un délit puni par la loi.
-
Chanter, chantonner, fredonner de la musique couverte par le droit d'auteur dans un lieu public, même à voix basse dès lors que des tiers sont susceptibles de vous entendre.
-
Jouer à l'aide d'un instrument de musique une œuvre couverte par le droit d'auteur en public. Cette pratique est illicite, elle est toutefois tolérée durant la journée du 21 juin par la SACEM dont la philanthropie est légendaire.
NB. Cela signifie par exemple que tous les jeunes qui interprètent devant leur lycée ou leur université des titres tels que « Wonderwall » d'Oasis ou « Where is My Mind » de Pixies à la guitare sans autorisation préalable sont de fait des délinquants.
-
Diffuser de la musique couverte par le droit d'auteur dans (ou devant) votre tente dans un camping si d'autres clients sont susceptibles de l'entendre .
-
…
Toutes ces représentations d’œuvres couvertes par le droit d'auteur sont, si elles n'ont pas fait l'objet d'un accord écrit des ayants droit desdites œuvres, des contrefaçons.
Les personnes qui exécutent de telles représentations sont donc des contrefacteurs et risquent une peine de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende.
Un conseil : débarrassez-vous de votre chaîne Hi-Fi, de la guitare de votre enfant, de votre lecteur de musique nomade et même de vos cordes vocales avant de commettre par erreur une contrefaçon.
Inopposabilité des exceptions
Exception pour « représentation dans le cercle de famille »
Article L122-5 1° du CPI
« Lorsque l’ œuvre a été divulguée, l’auteur ne peut interdire :
1° Les représentations privées et gratuites effectuées exclusivement dans un cercle de famille […] »
La jurisprudence définit le « cercle de famille » comme étant « les personnes parents ou amis très proches, qui sont unies de façon habituelle par des liens familiaux ou d’intimité ».
Cela signifie que cette exception n'est opposable que si les seules personnes susceptibles d'entendre les œuvres sonores que vous diffusez / interprétez vous sont intimes.
Ce n'est pas le cas lorsque vous vous trouvez dans un lieu public ou lorsque le son traverse les murs, plafonds, fenêtres de votre logement pour atteindre les organes auditifs de personnes non membres de votre « cercle de famille » (voisins, passants,…).