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Les vrais problèmes de la loi Création et Internet

mercredi 13 octobre 2010 à 17:27

La loi Création et Internet aka loi Hadopi est souvent décrite comme idiote, liberticide et inefficace.

On peut assez aisément comprendre la raison du qualificatif « idiote » : en fait il découle des deux autres. Cependant l’utilisation combinée des termes « liberticide » et « inefficace » semble contradictoire : à priori, une loi ne peut être liberticide que si elle est efficace.

Pour tenter de comprendre la raison de ces qualificatifs, concentrons-nous sur l’impact réel (factuel) d’Hadopi sur l’utilisateur final.

Une loi idiote

Hadopi est une loi idiote car inutile, or chère. Le prix excessif (important ou non, il reste excessif, la loi étant inutile) d’Hadopi est un argument que l’on peut opposer à cette loi, mais dans les faits, celui-ci n’est pas vraiment valable : supprimer Hadopi ne diminuerait pas les taxes et les impôts.

À cet argument on pourrait me répondre deux choses :

À la première objection je répondrais que c’est effectivement possible, mais qu’avec le talent dont font continuellement preuve nos politiciens à jeter l’argent par les fenêtres, j’en doute.

À la seconde je répondrais qu’il n’y a pas besoin d’argent pour trouver des solutions, mais de cerveaux. Si l’offre légale respectueuse du travail des artistes ne se développe pas, c’est avant tout parce qu’il n’y a pas de demande. Le jour où le problème de la rémunération des artistes sera significatif pour ces derniers, alors ils se mobiliseront.

Une loi liberticide

Il s’agit d’élucider la contradiction loi liberticide/inefficace.

En fait Hadopi est liberticide parce qu’elle est efficace pour des choses pour lesquelles elle n’a pas été votée. En effet :

(On passe sur les irrégularités de procédure comme la non-consultation de la CNIL, le non-remboursement de FAI, etc… qui ne concernent pas directement la liberté de l’individu.)

Hadopi attaque, semble-t’il, d’autres libertés :

Hadopi attaque-t’elle la liberté de partager sa connexion Internet dans la sphère publique ?
On pourrait penser que oui, car elle impose désormais l’obligation de sécuriser son point d’accès WiFi. Or, des solutions à cette atteinte existent. L’opérateur Free propose par exemple deux IP : une pour le réseau privé (le point d’accès privé de la box), et une pour le réseau public (le hotspot public de la freebox).
[Mais est-ce possible de se passer de la freebox pour exploiter cette possibilité ? Si ce n'est pas possible, notre liberté est effectivement attaquée suite à Hadopi, mais pas à cause d'Hadopi. Le problème est en effet technique : il n'existe pas de solution non-privatrice pour exercer la liberté de partager son accès au Net.]
Edit : La Fonera fonctionne avec du logiciel libre et propose cette fonctionnalité. De plus, il semble que d’autre opérateurs comme Neuf ou SFR proposent cette option IP privée/IP publique.
Hadopi attaque-t’elle la liberté de partager sa connexion dans la sphère privée ?
J’ai du mal à répondre à cette question : je ne laisse jamais mon ordinateur entre les mains d’une autre personne, et je ne sais pas s’il est bon de le faire ou pas.
Par contre, on peut se reporter à la question précédente : est-il possible d’avoir ce système de double IP (privée/publique) dans le cas d’une connexion filaire ?
Hadopi attaque-t’elle la liberté de partager son IP en tant que passerelle ?
C’est la grande question déterminant si cette loi est liberticide ou non. Puis-je héberger un serveur proxy/VPN/nœud final TOR derrière une IP française ?
Certains répondront que le problème est encore une fois technique : il suffit d’utiliser des darknets ou de se satisfaire d’un nœud TOR intermédiaire. Dans la théorie, cette réponse est correcte, mais en pratique on ne trouve pas sur les darknets toute l’information présente sur les réseaux « publics » (bittorrent, emule, world wide web,…). De plus la logique de TOR veut que les nœuds intermédiaires soient présents partout dans le monde[1], et que les nœuds finaux soient l’exclusivité des pays libres. Cependant la faible proportion de pays libres dans le monde remet en cause cette logique : que dirait-on d’un réseau TOR mondial dont tous les nœuds finaux se trouveraient en Islande ?
La loi Hadopi peut alors sembler inquiétante si on la voit comme la cause du fait que le petit groupe des pays libres[2] compte un membre de moins : la France.

[1] En fait je ne suis pas tout à fait sûr de ceci. Peut-on identifier publiquement par son IP un nœud TOR intermédiaire ? Si c’est le cas, il devrait être impossible dans certains pays d’héberger un serveur TOR.

[2] Libre au sens de : « qui offre la liberté de créer un serveur passerelle final pour aider ses pairs ».