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Les lacs et les rivières se chargent petit à petit en... médicaments

samedi 30 août 2014 à 12:34
Les lacs et les rivières se chargent petit à petit en... médicaments

Les poissons premières victimes, aucune étude sur l'Homme

Les lacs et les rivières se chargent petit à petit en... médicaments

 

 

Les médicaments que nous prenons où qui sont donnés aux animaux d'élevage ou de compagnie se retrouvent dans l'environnement. Pourquoi ? Combien ? Quelles conséquences ? Décryptage.

CAMPAGNE. Lentement mais sûrement, les eaux de nos lacs et de nos rivières, tout comme les nappes souterraines, se chargent petit à petit en... médicaments. C'est ce que nous rappelle la dernière campagne du groupe de Recherche Rhône-Alpes sur les infrastructures et l’eau (Graie).

Cette association de 300 acteurs impliqués dans la gestion ou l'utilisation de cette ressource, publie à intervalle régulier des articles et des vidéos sur un site web dédié à ce projet. Cette nouvelle campagne d'information consacrée à la présence de médicaments dans l'eau est accompagnée d'une mini Web-Série mettant en scène les acteurs Jacques Chambon et Frank Pitiot (Merlin et Perceval dans la série télévisée Kaamelott). 

"Des tout petits cachets". L'épisode de la Web-Série du Graie consacré aux médicaments dans l'eau.

Voici 7 points clés à retenir de ce dossier :

1) D'où viennent ces molécules ?

Voies d’arrivée des résidus de médicaments dans les milieux aquatiques. Crédit : Graie

Comme on peut le voir sur ce schéma, les médicaments qui se retrouvent dans les eaux proviennent de nombreuses sources. Mais la plus grande quantité provient des excrétas (urine, fèces).

Ceux qui proviennent des humains passent par des centrales d'épuration, ce qui n'est pas le cas des résidus issus de l’élevage qui peuvent rejoindre l’environnement soit directement par le biais des excréments animaliers dans le cas du pâturage, soit par épandage du fumier ou des lisiers.

2) Quelles sont les molécules concernées ?

Ces molécules que l'on retrouve dans l'environnement ont plusieurs origines. Certaines molécules sont données aux animaux d'élevage à des fins thérapeutiques, préventives ou pour favoriser la croissance.

Pendant longtemps les éleveurs ont fait un usage important d’antibiotiques sous forme d’additifs alimentaires. En 1999, on estimait ainsi qu’en Europe la consommation animale était du même ordre de grandeur que la consommation humaine. Depuis l'usage des antibiotiques a été réglementé. Malgré tout, l’élevage est probablement une source très importante de résidus pour cette classe de médicaments, comme pour d’autres.

Mais on retrouve également dans les rivières des molécules destinées aux humains. Soit parce que le dosage pris est trop fort (et que l'organisme n'a pas le temps de tout métaboliser durant le transit du médicament), soit parce qu'une partie seulement des molécules thérapeutiques est transformée par voie biochimique. Une partie provient également des médicaments périmés jetés dans les toilettes, les lavabos, ou les poubelles.

Tous ces médicaments ainsi que leurs produits de dégradation (métabolites) peuvent se retrouver dans l’eau. En pratique, seules quelques dizaines de molécules sont suivies de façon régulière. Et presque toutes les familles de médicaments ont été détectées lorsqu’elles ont été effectivement recherchées.

3) En quelles concentration les trouve-t-on ?

Les médicaments que l'on retrouve dans l'eau le sont à des concentrations très faibles. Ainsi, il faudrait par exemple boire environ 500 000 m3 d’eau potable pour ingérer l’équivalent d’un cachet d’aspirine de 500 mg. 

Néanmoins, même à des concentrations infimes, ces molécules ont des effets mesurables sur certaines espèces (poissons et batraciens notamment)

4) Quels sont les effets

Plusieurs études ont mis en évidence des altérations de populations aquatiques reliées de façon certaine à la présence des substances actives dans l’eau, parmi lesquelles :

- Des effets sur la reproduction des animaux (poissons, batraciens, mammifères marins), pouvant aller jusqu’au changement de sexe et associés à la présence d’œstrogènes

- Des modifications des populations bactériennes, avec en particulier un développement des bactéries résistantes aux antibiotiques, associées à une pression de sélection due à la présence permanente d’antibiotiques dans l’eau

- Des modifications du comportement de poissons, par exemple perches rendues plus agressives du fait de la présence d’un antidépresseur (oxazepam) dans l’eau ; etc.

5) Est-on certain que ce sont les molécules de médicament qui provoquent ces effets ?

Il est  extrêmement difficile d’apporter la preuve formelle de la relation de causalité entre l’exposition aux résidus de médicaments et la dégradation observée des populations d’organismes aquatiques.

Si l’étude de la toxicité aigüe d’un produit est bien maîtrisée, il n’en est pas du tout de même de celle de sa toxicité chronique. Par ailleurs, tout organisme vivant est exposé en permanence à un grand nombre de substances qui interagissent avec lui-même, mais aussi entre-elles.

L’origine de ces substances est très diverse, naturelle ou artificielle, et les résidus de médicaments ne constituent que l’une des pièces du puzzle. Il est donc difficile de séparer l’influence des résidus de médicaments de l’influence des autres polluants.

En revanche beaucoup d’effets sont suspectés dans la mesure où les tissus et organes cibles visés par les médicaments chez l’homme ont souvent des équivalents chez beaucoup d’espèces sauvages.

 6) Y a-t-il un risque sur la santé humaine ?

Pour le moment, aucun effet notable n’a pour l’instant (en 2013) été scientifiquement prouvé sur l'homme.

Et au vu des faibles concentration constatées (voir plus haut) il ne semble pas y avoir un risque immédiat d'exposition à ces résidus de médicament. 

Malgré tout, des effets toxiques restent possibles du fait du caractère chronique de l’exposition, des risques d’accumulation dans la chaine alimentaire et dans le corps humain et de potentiels effets cocktail.

Ce risque est d’autant plus important que l’exposition existe à chaque âge de la vie et que par exemple les bébés et les enfants peuvent être extrêmement sensibles à certaines molécules.

L'autre risque est que la présence chronique d'antibiotiques dans les rivières favorise l'apparition de bactéries résistantes à ces médicaments, et donc potentiellement plus dangereuses pour l'homme en cas de contamination.

La vigilance est donc nécessaire. 

7) Comment agir ?

Le Graie préconise trois mesures :

- Que des études soient faites sur les impacts des médicaments et de leurs métabolites sur les organismes aquatiques. C'est désormais le cas depuis peu, mais uniquement pour les médicaments nouveaux. Et ces analyses ne concernent que les principales molécules actives et non les produits issus de leur dégradation.

- Que soient renforcées les stratégies visant piéger ces molécules à la source (collecte séparée par exemple) et/ou développer des procédés épuratoires susceptibles d’arrêter les molécules potentiellement dangereuses dans les stations d’épuration et dans les usines de production d’eau potable.

- Que nous limitions notre consommation de médicaments au strict nécessaire en respectant les doses et les moments de prise. Et que nous ne nous débarrassions pas des médicaments inutilisés en les jetant dans sa poubelle, les toilettes ou le lavabo. Il suffit de les rapporter à votre pharmacien. 

Vous pourrez retrouver l'intégralité de ce dossier sur le site de Meli-Melo.

 

http://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/20140829.OBS7600/7-choses-a-savoir-sur-la-presence-de-medicaments-dans-l-eau.html