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Quand Rocard préparait le tournant de la rigueur | Contretemps

lundi 4 juillet 2016 à 12:25

La mort est une grande productrice d’amnésie collective ; à coup d’hommages nationaux, elle va jusqu’à transformer ceux qui furent les serviteurs zélés des puissants en amis des opprimé·e·s. Michel Rocard est de ceux là, dont la mort permet d’oublier ce que fut son action réelle, par la célébration ad nauseam de « l’homme de gauche » qu’il fut, dit-on, indéfectiblement.

Car Rocard n’est pas seulement celui qui a affirmé « nous ne pouvons plus héberger toute la misère du monde », légitimant les renoncements de la gauche sur la question de l’immigration et offrant un boulevard, dans le champ politique, à une xénophobie de plus en plus sûre d’elle-même. Il n’est pas seulement le 1er ministre qui a le plus usé du « 49-3 » pour imposer sa politique (Manuel Valls a été à bonne école…), ou a permis l’amnistie des militaires qui assassinèrent des militants kanaks à coup de bottes au terme de l’assaut de la grotte d’Ouvéa, comme il le reconnut plus tard. Il est également celui qui, dès les années 1970, a préparé le tournant de la rigueur et favorisé l’introduction, au sein du PS, du néolibéralisme.

Rien d’étonnant dès lors à ce que Michel Rocard ait pu fêter ses 80 ans en compagnie d’ancien·ne·s dirigeant·e·s du MEDEF, tels Ernest-Antoine Seillière ou Laurence Parisot, d’Alain Bauer (grand promoteur de politiques sécuritaires sous couvert de « criminologie »), outre évidemment les pontes du PS, Nicole Notat (ancienne secrétaire générale de la CFDT, reconvertie en PDG d'une entreprise d'audit-conseil) ou l'intellectuel social-libéral Pierre Rosanvallon (qui cherche activement, depuis quelques années, à faire oublier qu'il fut, sur un plan intellectuel, le principal promoteur de l'extrême centre, c'est-à-dire d'un néolibéralisme "ni droite ni gauche"). Nulle raison non plus de se montrer surpris que Rocard ait pu, à la toute fin de sa vie, considérer que la loi travail était « une chance pour la France ».

Bref, un vieux con en moins.
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