PROJET AUTOBLOG


Shaarli - Les discussions de Shaarli

Archivé

Site original : Shaarli - Les discussions de Shaarli

⇐ retour index

Ce que nous coûtera vraiment la loi “Renseignement” - Objectif Eco, anticiper pour s'enrichir

mardi 21 avril 2015 à 21:06
CAFAI Liens en Vrac 21/04/2015
La loi renseignement n’est pas seulement une catastrophe démocratique. C’est une balle, ou plutôt un obus de 155 tiré dans le pied de l’économie française. Ce qui, à terme, provoquera de nouvelles atteintes contre nos libertés. [...]

Nous ignorons totalement quelle est la limite légale des “intérêts économiques, industriels et scientifiques majeurs”, mais nous vivons dans un pays où le gouvernement croit utile d’empêcher le rachat de Dailymotion par Yahoo ou un concurrent chinois: sa vision de “l’intérêt national” est donc particulièrement extensive. Autant dire que tout entrepreneur sait que son entreprise peut à tout moment être considérée comme un actif “d’intérêt majeur” justifiant une écoute du gouvernement Français.


On peut donc  supposer que la réaction de tout investisseur sensé sera d’éviter la France à tout prix. Nous avions déjà de nombreux boulets aux pieds, fiscaux et réglementaires, nous allons ajouter celui de l’impossibilité de préserver le secret des affaires. Cela n’est pas neutre: aux USA, de nombreux analystes ont montré que l’affaire Prism couterait des sommes énormes à l’industrie naissante du Cloud Computing.


Mais ces coûts iront bien au delà du “Cloud Computing” ou des entreprises de nouvelle technologie: même les industriels classiques ou les services, financiers, juridiques ou autres, voudront mettre leurs données, les travaux de leurs bureaux d’étude, leurs stratégies marketing, ou leurs projets d’OPA, à l’abri de l’indiscrétion des employés de l’administration française. On peut donc imaginer que le modèle de développement international de toute entreprise à vocation mondiale cherchera à limiter l’investissement en France au strict minimum (force de vente pour le marché intérieur, logistique), mais surtout à éviter le territoire français pour toute opération à caractère sensible, toute opération financière significative (adieu, recettes fiscales…), tout centre de décision majeur, tout développement de bureau d’études à haute valeur ajoutée.



Bien sûr, tout ne disparaîtra pas du jour au lendemain. Prenons un exemple : Renault ne déménagera pas son centre d’études de Guyancourt d’un coup de baguette magique. Mais le jour où cette entreprise devra arbitrer entre le développement de sa R&D sur le sol français et celle de ses filiales mondiales, la loi renseignement entrera sûrement en ligne de compte dans son choix final. Combien d’emplois directs et indirects perdus ? Nul ne peut le dire à ce jour, mais il risque d’être important. [...]

J’ignore si certains conseillers dans le sillage des promoteurs politiques de la loi Renseignement ont ce type d’idée en tête, et s’ils tentent déjà de bâtir une muraille législative contre la tentation croissante de fuite de l’orbite de l’état. Laissons donc de côté ce genre de spéculation sur leurs capacités visionnaires, et contentons nous d’observer ce projet de loi renseignement pour ce qu’il est: une tentative de l’état de garder son pouvoir sur ses citoyens, en utilisant une peur collective comme prétexte, et faisant fi de toute considération envers l’appauvrissement induit pour les gens ordinaires.


Ce schéma de pensée des états n’est évidemment pas nouveau: les peurs, peur de l’étranger, peur du climat qui change, peur de la concurrence des chinois, de l’ultra libéralisme anglo-saxon et du chômage,  et maintenant, peur des terroristes, ont été depuis longtemps instrumentalisées par ceux qui nous gouvernent, pour  justifier des politiques visant à accroître leur pouvoir sur les citoyens.


Mais la loi Renseignement 2015 du gouvernement Français va bien plus loin que tout ce qui a précédé en la matière. Et je n’ose imaginer vers quelles servitudes cette loi, et celles que les gouvernements à venir ne manqueront pas d’ajouter, nous entraîneront.
(Permalink)