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Un peu de lucidité sur notre monde

jeudi 17 juillet 2014 à 18:44

EDIT 18/07 : Une traduction collaborative a été lancée en parallèle, elle est très réussie.

Ce texte est une traduction que j’ai effectué, en prenant quelques libertés, d’un commentaire laissé par un anonyme américain sur Reddit en réponse à l’article US government says online storage isn’t protected by the Fourth Amendment et à ce commentaire. J’ai voulu le traduire, car ce texte m’a touché par sa justesse, son analyse, et peut être un peu son pessimisme.


 

Ce ne sont pas seulement les américains, mais toute l’humanité qui est dotée de droits inaliénables

Je dirais que les américains ont accepté l’idée que ces droits sont seulement dus au privilège de vivre aux États-Unis, que ce sont simplement des droits légaux qui deviennent immédiatement invalides en passant la frontière.

Cela autorise le gouvernement à priver des gens de leur droits civils les plus basiques, sous à peu près n’importe quel prétexte, tant que c’est à l’étranger.

Le fait que ces droits sont, ou devraient être sans doute, liés aux humains par le seul fait d’être humain est un fait discutable. Un cortège de gens viendront critiquer ça ; pas seulement les élites, mais aussi des gens ici, sur Reddit. Je vis en Arizona, où tout un tas de personnes sont pour la suppression des droits de ces « illégaux ». Alors même qu’aliéner les droits de ces gens pour le seul fait de ne pas être né au bon endroit (j’utilise cette terminologie volontairement) supprime le concept de droit en général. Les gens adorent l’idée de pouvoir immédiatement révoquer les droits de ceux qui sont impopulaires, dangereux ou inconvénients ; que ce soit pour la propriété d’armes à feu, pour la liberté d’expression, ou ce que vous voulez.

L’Amérique c’est la liberté pour moi et pour tout ce que je veux faire, mais toi, je t’emmerde : l’objectif de la politique est de pouvoir voter pour des gens qui vont priver les gens que je n’aime pas de leurs droits. A droite ou à gauche. C’est ça, les citoyens américains – je vais être plus clair – ce sont ces gens qui se plaignent sans cesse à propos de leurs droits, mais qui déploient des efforts considérables pour expliquer pourquoi les autres devraient en être privés. C’est une plaie, et collectivement, nous récoltons le fruit de cette attitude.

Surveiller la population signifie que la population est la plus grande menace

Mais votre voisin pourrait être un écoterroriste ! Ou un type de milicien ! Ou un musulman radical ! Bien sûr qu’ils devraient être surveillés. C’est juste que moi, personnellement, je ne devrais pas être surveillé.

C’est la guerre. Le monde est fondamentalement différent aujourd’hui et nous ne pouvons juste pas nous autoriser ce genre de notions comme la vie privée ou la liberté, dont les civils fanatiques libertaires nous rabâchent les oreilles. Bon, on peut se le permettre lorsque ça me concerne, je suis quelqu’un de sacrément moral et éthique, un citoyen honnête. Mais pas les autres.

Si tous les américains veulent la liberté […]

(ndt : désolé, je ne suis pas sûr d’avoir compris la phrase précédente, et j’ai peur de faire un contresens).

Je ne crois pas que la liberté soit fondamentalement ce que la plupart des américains veulent, et c’est confirmé par un rapide recensement des bouffons qu’ils élisent au pouvoir.

L’espionnage invasif implique que l’espionnage est nécessaire par ceux qui sont au pouvoir.

Encore une fois, pas seulement ceux qui sont au pouvoir : les gens dangereux qui ne sont pas d’accord avec moi devraient être espionnés aussi. Juste, pas moi. La réalité n’est pas ce qu’elle devrait être, et si plus de gens pouvait militer pour ce quoi je milite, croire en ce que je crois et adopter mes valeur, les États-Unis serait comme, eh bien, Narnia.

On pourrait facilement être tenté de croire qu’il y a une idéologie fasciste derrière ceux qui nous gouvernent.

Je pense que la question concerne davantage l’idéologie fasciste de mes voisins d’à côté. Le pouvoir des élites n’existe pas en vase clos. Ces gens au pouvoir sont mis au pouvoir par leur concitoyens. La raison pour laquelle, par exemple, quelqu’un pourrait voter pour quelqu’un comme Dianne Feinstein [ndr : sénatrice de Californie, ancienne maire de San Francisco, 81 ans] – une supposée « démocrate », pourtant l’avocate la plus bruyante et virulente de « l’état d’espionnage » (ndt: « intelligence state ») que je connaisse – m’échappe toujours.

Ils cherchent à subvertir votre esprit, supprimer la liberté, et saboter la compétition comme nous pouvons en témoigner aujourd’hui. Le socialisme échoue jusque dans son idéologie à montrer à quoi nous avons droit.

C’est bien plus large que le socialisme. Oui, les socialistes croient réellement que l’on peut avoir un gouvernement couteux qui fourni des services pour la classe des travailleurs, et avec ça de l’efficience, pas de corruption, pas de brutalité. C’est un sujet rodé, mais nous avons aussi des conservateurs qui sont des fans de la militarisation d’à peu près tout : les frontières, les forces de police locales, les dépenses militaires sans fins, et surtout toute la surveillance qui accompagne tout ça.

De plus, je ne suis pas sûr qu’il existe la possibilité d’un front uni contre l’autoritarisme car les socialistes et conservateurs, bien que mécontents, n’arrivent pas trouver un terrain d’entente (et je ne crois pas qu’il en existe un). Chaque côté croit dans ses propres formes d’autoritarisme, en apparence au nom d’un quelque plus grand bien : vous pouvez distraire les socialistes avec n’importe quelle notion de liberté si vous agitez l’égalité devant eux (au nom de l’égalité, si vous parlez bien, beaucoup (ou la plupart) vendront les droits individuels en un clin d’œil), ou bien les conservateur en agitant bibles et drapeaux. Il y a toujours des conservateurs qui écrivent des op-eds contre la légalisation du cannabis ou l’homosexualité, ou raillant quiconque s’oppose à la guerre ou l’armée.

Pour les libertaires, il sont encore plus à couteaux tirés. Essayez de faire discuter des anarchistes et des « libertaires en faveur du libre marché » (ndt : free market libertarians) entre eux d’une façon qui soit un tant soit peu civilisée. A cause de leurs différences de point de vue sur la propriété privée, toute discussion tentant de terminer une guerre interminable (et touchant aux intérêts de chacun inévitablement), ou simplement travailler ensemble de quelque façon que ce soit, est impossible. Alors même que ni les anarchistes ni les libertaires capitalistes n’ont le moindre pouvoir, ils se disputent comme s’ils étaient les pires ennemis. Une blague.

A bas le mysticisme fasciste et socialiste. A bas l’oligarchie. A bas ceux qui veulent subvertir le libre arbitre.

L’heure est proche.

Je suis d’accord mais l’heure n’est pas proche. Éa va devenir bien pire avant de s’améliorer. Et ça ne va pas s’améliorer avant que les ventres ne soient littéralement vides. D’ici là, ça ne sera que des manifestation, des parcs occupés et des tracts.

C’est à peine si j’ai pu voir le moindre changement important depuis que je suis sur cette planète.

Les gens ont oublié comment ne pas être d’accord et se respecter. La plupart des gens à qui vous parlerez vous diront qu’ils en sont capables, et pourtant leurs actions ne semblent pas le montrer.

Je ne vois aucun front uni, aucune résistance effective, et en fait, aucun espoir à court ou moyen terme. L’impression de déjà-vu que je ressens en regardant les gens de gauche essayant de réfuter les critiques à propos de l’administration Obama comme une sorte de complot républicain (en général passant directement à « tu  n’aimes pas Obama parce que tu es raciste ») me rappelle qu’exactement la même chose s’est produite avec les républicains pendant l’administration Bush. Tout espoir que j’ai pu avoir que la gauche fasse changer les choses, étant donné les huit ans où ils ont été en possession du pouvoir exécutif, a disparu depuis longtemps. Ce sont des hypocrites qualifiés sachant bien s’excuser, tout comme leur homologues républicains.

Nous verrons probablement Hillary Clinton devenir notre prochain président, et vous pouvez parier qu’elle sera acclamée, en faisant le même genre de choses que Bush ou Cheney ont pu faire, par les mêmes personne qui sont descendues dans la rue pour protester contre les actions de Bush ou Cheney.

A bas le mysticisme fasciste et socialiste.

Il y a encore beaucoup de mysticisme qui nous entoure, pas seulement dans le socialiste et le fascisme : il y en a également dans dépersonnalisation du libre marché, le culte du capitalisme ; comme si l’argent n’apportait pas de corruption. La viande de cheval dans les lasagnes, des produits industriels chimiques dans le lait chinois, la propagande pour les énergies fossiles malgré les contrindications de la science, etc. Il y a une infinité d’exemples.

Pour information, je suis partisan du libre marché en théorie – en pratique, je suis dans le ventre de la bête, où le profit et la réduction des coûts sont un culte presque religieux. Je me demande combien de personne aujourd’hui mangent des crevettes achetées dans un magasin américain, qui sont le produit de l’esclavage dans des endroits comme la Thaïlande. Cette crevette n’est pas chère, c’est sûr. Agréable, abordable et pas chère. Et produite par le travail d’esclaves : c’est à dire produite au travers de très nombreuses couches d’abstraction formées par des entreprises s’échangeant des contrats. Au bout de quoi, se trouvent des gens, une arme braquée sur la tempe par leur « employeur ». Ils se le permettent, non pas à cause de leur gouvernement, mais justement par le manque de visibilité et grâce aux couches d’abstraction qu’ils ont crée pour empêcher les consommateurs de voir ça. Je me demande combien de consommateur, même en sachant ça, serait prêt à changer ses habitudes. Vous ne pouvez même pas faire boycotter Walmart aux smicards.

Le problème, pour ce que je peux en dire :

Nous sommes corrompus, et nous nous fabriquons des excuses pour justifier notre corruption, et nous récupérons généralement ces excuses de notre idéologie politique. Un bon gouvernement pourrait sembler être la conséquence d’un bon peuple, et je me demande à quel point nous sommes de bonnes personnes. La laideur et la méchanceté que j’entends de la bouche de certains chaque jour, que je lis depuis les claviers des gens, laisse suggérer que nous avons exactement le gouvernement que l’on mérite.

Une chose que nous avons en commun, et je peux en être content, c’est que nous savons tous exactement ce dont le monde a besoin et qui sont les vrais ennemis : il a besoin de ce que nous voulons, et les ennemis sont les gens qui ne sont pas d’accord avec nous.

Nous récoltons ce que nous avons semés. Nous avons construit ça. Nous avons construit ça par une rhétorique poussant inutilement à la division. Nous avons construit ça par un égoïsme irrationnel. Nous avons construit ça en idolâtrant des choses qui auraient dues être secondaire à l’expérience humaine. Nous avons construit ça avec des conneries d’idéologies corrosives, qui existent sur tout le spectre politique. Enfin, nous avons construit ça en dévaluant la vie humaine, ou en la reléguant au second plan, devant des artifices et des principes idéologiques abstraits.


Article rédigé par Arthur pour aryo, le 17/07/2014. | Lien Permanent | 0 Commentaire
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